29 juin 2016

SUR L’EMPLOI : VERS LA DISPARITION DU SALARIAT ?

 « Inégalités » de Anthony B. Atkinson (5)
« Avant la révolution industrielle, chacun faisait souvent coexister emplois à temps partiel et emplois indépendants, structure qui, jusqu’à une date récente, est restée caractéristique de nombreuses sociétés rurales. (…) Lorsque l’économie s’est industrialisée et la population urbanisée, l’emploi est devenu du tout ou rien. (…) Quand le travailleur indépendant médiéval devenait vieux, il travaillait moins et produisait moins, mais il continuait à travailler tant qu’il pouvait produire quelque chose. »
« Au Royaume-Uni, la proportion de ceux qui occupent un emploi atypique – selon une définition qui englobe le temps partiel, l’emploi indépendant et les contrats à durée déterminée – est d’environ un quart, et elle serait encore supérieure si l’on ajoutait les contrats zéro heure et les stages non rémunérés. (…) En Allemagne, l’emploi « normal » a reculé dans les vingt ans écoulés de 1985 à 2005 : il est passé de 42 % à 37 % de la population en âge de travailler, tandis que le taux de participation à la population active, en hausse, passait de 68 % à 76 %. (…) Il est donc de plus en plus fallacieux de parler en termes de gens qui soit ont un emploi, soit n’en ont pas. Le travail n’est pas une activité simple de type binaire. »
« Il ne suffit pas d’adopter une mesure simple comme le décompte par tête : le nombre de personnes ayant un emploi. Ils proposent de la remplacer par une mesure de l’intensité d’emploi, définie sur la base des mois travaillés et des heures travaillées par mois. »
« Comme l’écrit l’Organisation internationale du travail, « lorsque l’on traite du travail à temps partiel, il est une distinction fondamentale : celui-ci est-il volontaire ou involontaire, le travailleur a-t-il délibérément choisi de travailler à temps partiel, ou bien n’a-t-il accepté un horaire réduit que faute de trouver un emploi à temps plein ? Dans ce dernier cas, le travail à temps partiel devient une forme de sous-emploi. »
« L’objectif doit donc être de réduire le chômage involontaire à son minimum. C’est pourquoi j’estime qu’il faut exprimer notre objectif pour le marché du travail en termes, non de maximisation de l’emploi, mais de minimisation du chômage involontaire, en mesurant ce chômage d’une manière adaptée aux nouvelles caractéristiques du marché du travail du XXIe siècle. »
« Or il existe des « travailleurs pauvres », et ce problème est très sérieux : selon Ive Marx et Gerlinde Verbist, « un quart à un tiers des Européens en âge de travailler qui vivent dans la pauvreté ont en fait déjà un emploi ». »
(à suivre)

27 juin 2016

SUR LES TRÈS HAUTS REVENUS

 « Inégalités » de Anthony B. Atkinson (4)
« Le principal ressort de l’inégalité américaine n’est pas l’écart entre les salariés très instruits et les autres, ni d’ailleurs les écarts en termes d’éducation en général. C’est l’échappée extraordinairement rapide de la pointe du sommet. On y est souvent très instruit, mais juste au-dessous on l’est tout autant, et ceux-là ont été distancés. On pourrait dire que, durant les vingt-cinq dernières années, la répartition des gains en matière d’éducation (un cursus universitaire suivi avec succès pendant quatre ans, voire plus) a été beaucoup plus large que celle des gains économiques. Seule une infime lamelle de la nouvelle élite instruite est entrée dans la nouvelle élite économique. »
« Le changement de la répartition des revenus du travail a propulsé ceux qui gagnent les plus fortes rémunérations dans le 1 % supérieur tous revenus confondus. Les mieux rémunérés ont rattrapé, ou dépassé, ceux qui vivent du revenu de leur capital. Les rentiers qui détachent les coupons de leurs dividendes ont cédé la place aux gestionnaires de fonds spéculatifs, aux présidents-directeurs généraux, aux footballeurs. »
« Jon Bakija, Adam Cole et Bradley Heim ont classé les contribuables du 0,1 % supérieur aux États-Unis en 2004 par activité professionnelle : 41 % étaient des dirigeants, gestionnaires ou hauts responsables du secteur non financier et 18 % exerçaient une profession dans la finance. »
« Alfred Marshall, professeur d’économie politique à Cambridge, a montré que les meilleurs professionnels pouvaient exiger des rémunérations d’autant plus élevées que le marché desservi était plus grand. Or la taille du marché dépend de la technologie en vigueur. Il a donc compris l’importance du « développement de nouvelles facilités de communication, facilités qui font que des hommes, dès qu’ils ont atteint une haute situation, ont le pouvoir d’appliquer leur esprit inventif ou spéculatif à des entreprises plus vastes, s’étendant sur une aire plus vaste qu’il n’ait jamais été possible auparavant ». »
« La chute abrupte des taux d’imposition réels sur les très hauts revenus a pu stimuler la hausse des rémunérations des cadres supérieurs, puisque ceux-ci gardent une part bien plus importante de leurs augmentations de salaire. » 
« En 1980, le degré d’association (entre revenus du travail et du capital) n’était pas si élevé : parmi les membres du 1 % supérieur des revenus du capital, seuls 17 % se trouvaient dans le 1 % supérieur des revenus du travail. Mais, en 2000, la proportion était passée de 17 % à 27 %, et plus de la moitié des membres du 1 % supérieur des revenus du capital se trouvaient dans les 10 % supérieurs des revenus du travail. Si l’on regarde la situation dans la situation dans l’autre sens, le chevauchement est encore plus grand en 2000. Parmi les membres du 1 % supérieur des revenus du travail, près des deux tiers – 63 % – figuraient dans les 10 % supérieurs des revenus du capital. Il y a davantage de points communs entre les deux répartitions. »
(à suivre)

22 juin 2016

SUR LES LIMITES SUR DU CALCUL ÉCONOMIQUE : TOUT EST AFFAIRE DE TRAJECTOIRE…

 « Inégalités » de Anthony B. Atkinson (3)
« La mondialisation est le résultat de décisions prises par des organisations internationales, des gouvernements nationaux, de grandes entreprises. »
« Ils ont élaboré des théories de l’« innovation induite », dans lesquelles les entreprises choisissent le degré d’inflexion du changement technologique. Elles sélectionnent dans une gamme de possibilités les options qui leur permettent de réduire leurs coûts le plus vite. »
« En somme, dès l’instant où nous comprenons que les forces du marché posent seulement des limites aux résultats possibles sur le marché du travail, nous voyons qu’une marge existe afin de prendre en compte les considérations d’équité et qu’en le faisant nous pouvons modifier la répartition des salaires. »
« En fait, l’élément « service humain » accroît la productivité relative des personnes vis-à-vis du capital. Mais cela suppose que le service humain continue à être rendu. Ici, le « deux en un » est un problème, car il n’existe aucun théorème en économie qui assure que le marché déterminera la juste dose de produit et de service humain lorsque les deux éléments ne peuvent être dissociés. »
« Expérimenter les robots nous aiguille sur une voie qui, finalement, les verra remplacer de plus en plus les êtres humains, car la substitution deviendra de plus en plus intéressante. Mais nous aurions pu suivre une autre voie, qui aurait mis l’accent sur l’élément « service humain » et développé de plus en plus les compétences des personnes. »
(à suivre)

20 juin 2016

SUR LE DANGER DES MOYENNES

« Inégalités » de Anthony B. Atkinson (2)
« Comme nous l’a appris la crise récente, regarder uniquement les agrégats macroéconomiques ne suffit pas. Les différences économiques entre personnes sont de toute première importance. Le prix Nobel Robert Solow, du Massachusetts Institute of Technology (MIT), le dit clairement dans sa critique des modèles qui ont dominé la macroéconomie contemporaine : « L’hétérogénéité est l’essence d’une économie moderne. Dans la vie réelle, nous nous préoccupons des rapports entre dirigeants d’entreprise et actionnaires, entre banques et emprunteurs, entre travailleurs et employeurs, entre investisseurs en capital-risque et entrepreneurs […]. Pour nous, il va de soi que ces agents hétérogènes ont des objectifs différents et parfois contradictoires, des informations différentes, des capacités différentes de les traiter, des attentes différentes, des convictions différentes sur le mode de fonctionnement de l’économie. [Les] modèles excluent l’ensemble de ce paysage. » »
« La politique de la concurrence doit se préoccuper explicitement de la répartition. Elle doit comprendre que le bien-être du consommateur est un cumul d’intérêts individuels qui sont différents et qui ne peuvent être associés qu’en pondérant d’une façon ou d’une autre la situation des diverses catégories. »
« L’inégalité des résultats au sein de la génération actuelle est la source de l’avantage injuste reçu par la suivante. Si l’égalité des chances de demain est notre souci, l’inégalité des résultats d’aujourd’hui doit l’être aussi. »
(à suivre)

17 juin 2016

FUSION

Plus rien
S’asseoir et ne plus penser, 
S’abandonner,
Se dissoudre dans l’eau et le ciel.
Être là, juste là, lâcher prise.
Ce banc n’est jamais né, 
Moi non plus,
Nous nous attendions de tout temps,
Pour nous fondre à jamais.
(Photos prises au Québec au Domaine de Pine Grove en août 2014

15 juin 2016

VOYAGE AU PAYS DES INÉGALITÉS

« Inégalités » de Anthony B. Atkinson (1)
Un nouveau patchwork, cette fois sur le livre « Inégalités » de Anthony B. Atkinson, économiste anglais dont les travaux ont influencé Thomas Piketty (seuls les sous-titres sont de moi)
Sur les minimums
« Rawls structure les principes de justice en termes d’accès aux « biens premiers » – « tout ce qu’on suppose qu’un être rationnel désirera, quels que soient ses autres désirs »., il énumère de vastes catégories : « les droits, les libertés et les possibilités offertes, les revenus et la richesse. ». »
« Amartya Sen a fait valoir que cette perspective, si elle nous mène bien au-delà de l’utilitarisme, ne va pas assez loin : elle ne voit pas qu’il existe entre les personnes de « grosses variations d’aptitude à convertir les biens premiers en vie satisfaisante ». Sen propose donc de passer des biens premiers aux « capabilités » – de définir la justice sociale en termes de possibilités offertes aux gens compte tenu de leur « fonctionnement » concret. L’approche des capabilités diffère de celle de Rawls à deux égards. Elle se concentre sur ce que les biens peuvent apporter à chacun dans sa situation particulière, en notant, par exemple, qu’un handicapé doit dépenser davantage pour se rendre à son travail qu’une personne valide. »
« Mais, avec le temps, l’attention s’est déplacée vers une définition plus large de la pauvreté, fondée sur la capacité de participer à la vie de la société, et cette évolution s’est accompagnée d’un intérêt pour le concept de droits minimaux à des ressources, dont l’utilisation relève de la décision individuelle. »
(à suivre)

13 juin 2016

CHÔMAGE, ÉDUCATION, SEXE ET FAMILLE, DES RELATIONS COMPLEXES

Anatomie Sociale de la France (5)
C’est sur le chômage que l’analyse de Hervé Le Bras est la plus riche. 
Difficile de la résumer ici si ce n’est que de dire que sa photographie est très fine puisqu’après avoir analysé le lien avec l’âge et le niveau d’éducation, avoir intégré le sexe, il s’interroge sur le lien avec la situation familiale. Il termine avec une dernière analyse qui, au lieu de s’intéresser à la situation d’un individu, se pose la question suivante : dans combien de ménages, y a-t-il au moins un chômeur présent ? Vraie mesure de la précarité…
Voici ci-dessous sans commentaires les quelques graphes qui m’ont paru les plus pertinents. Je vous laisse les regarder, en tirer vous-mêmes les enseignements… et comprendre pourquoi il va vous falloir lire le livre !

Pourcentage de chômeurs de longue durée (plus d’un an) par âge seul et par niveau d’éducation seul (en haut) et selon les deux critères simultanément (en bas).

Taux de chômage des hommes et des femmes selon la catégorie sociale de l’homme et de la femme de chaque couple en 2011.

Pourcentage de ménages avec au moins un chômeur selon le type de ménage et la catégorie sociale de la personne de référence en 2011

10 juin 2016

PATÈRE MÉMORIELLE

Souvenirs
La chaleur omniprésente sature l’air.
Allongé nu sur le lit étroit, plus une couchette qu’un lit, je récupère de la longue marche faite au travers des temples, des rocs et des paysages.
Tout est encore intensément présent en moi. Les images, les bruits, les sensations, les odeurs. La vieille femme entraperçue tout à l’heure se penche toujours vers moi. Les rires des enfants résonnent en mes oreilles. La violence écrasante du soleil aveugle mes yeux.
Mais je sais que bientôt, tout ne sera plus qu’un compost mémoriel. Un magma informe d’où ne surgiront plus que quelques morceaux déformés.
Ce ne seront que des souvenirs accrochés à la patère de ma vie, à l’instar des pièces de vêtement que je regarde maintenant.
(Photo prise en Inde à Hampi en août 2012)

8 juin 2016

FÉCONDITÉ ET GRAND REMPLACEMENT

Anatomie Sociale de la France (4)
L’arrêt de l’immigration ne signifie pas l’arrêt de la mixité :
« En conservant le même apport migratoire à chaque génération, sur les 72 % d’enfants qui n’ont aucun parent immigré, seuls 41 % n’ont aucun grand-parent immigré, soit 58 %. (…) En remontant encore d’une génération, la réduction sera encore plus drastique puisque 14 % seulement des enfants dont les deux parents ne sont pas immigrés n’auront aucun arrière-grand-parent immigré. En grimpant d’un cran dans l’ascendance, ce sont donc 0,14 × 14 % =  2 % des enfants qui n’auront aucun arrière-arrière-grand-parent immigré. »
« Les calculs précédents ont été menés dans l’hypothèse d’une continuation de l’immigration à son rythme actuel. Pour enrayer la disparition du peuple d’origine française, les théoriciens du grand remplacement demandent un arrêt immédiat de l’immigration. (…) L’arrêt de l’immigration n’affecte donc guère le mélange de la population. La notion de « deux peuples », l’un immigré, l’autre non immigré n’a rigoureusement aucune signification dès que les unions mixtes sont fréquentes. Peut-on tracer une frontière telle qu’à partir d’un certain nombre d’ancêtres non immigrés, on soit considéré comme non immigré ? (…) La distribution du nombre d’ancêtres immigrés est sans rupture et largement étalée dès que l’on remonte à quatre ou cinq générations. Aucun critère ne permet de définir un seuil à partir duquel on cesserait d’être considéré comme un immigré. Il n’y a pas deux peuples mais un seul, mélange d’une quasi-infinité d’ascendances diverses. »
De plus la fécondité des immigrés converge vers la fécondité du pays :
« Arrivées de pays où le niveau de fécondité est élevé, les immigrées visent une descendance plus faible à mesure que leur niveau d’éducation s’élève. Le lien entre éducation et baisse de la fécondité a été constaté dans le monde entier et il a été mis en avant par les organisations mondiales s’occupant de population. Ce faisant la composition de la famille des immigrées rejoint celle des originaires du pays où elles se sont installées, ce qui est une indication (parmi d’autres) de leur intégration. 
On peut aussi faire référence à la théorie de Gary Becker selon lequel, avec l’investissement dans l’éducation, la qualité des enfants remplace leur quantité. Une fois la jonction opérée, au contraire, la fécondité s’élève avec le niveau d’éducation et le niveau d’activité féminine, autre régularité observée dans les pays de l’Union européenne où les plus fortes fécondités coïncident avec les plus fortes participations des femmes à l’emploi (pays nordiques, Royaume-Uni, France) et les plus faibles avec leurs plus faibles participations (Italie, Espagne, Grèce). Cette dernière relation semble en contradiction avec la théorie de Becker. Elle s’explique cependant assez facilement. Les femmes veulent à la fois construire une famille et accéder à l’emploi à égalité avec les hommes. »
Le lien durable est entre fécondité et géographie
« En France, pays longtemps inquiet du risque de dépopulation, une forte fécondité est connotée positivement, mais ce n’est pas le cas dans les pays voisins dont l’attitude est plus malthusienne au sens exact du terme et beckerienne (la qualité plutôt que la quantité). C’est aussi une explication possible de la fécondité française actuelle qui est la plus forte de l’Union européenne (avec l’Irlande). Inquiets devant la mondialisation, méfiants envers le monde extérieur qu’il s’agisse de l’Europe, de l’immigration ou des réfugiés, les Français ont tendance à se réfugier dans la vie familiale. 
Les deux niveaux géographiques utilisés ici conduisent à deux types d’explications différents. Au niveau des départements, et plus généralement des grandes régions qui constituent l’espace français, les variations de fécondité reflètent des comportements très anciens qui tiennent à des conceptions différentes de la vie familiale, de la succession et des rapports entre générations. Les niveaux de fécondité diffèrent aussi beaucoup dans chaque région selon que l’on habite en agglomération ou dans les zones rurales. Il s’agit là de comportements actuels. Les contraintes et les choix de logements y jouent le rôle principal. Une sélection s’opère. Ceux qui souhaitent une famille assez nombreuse, ce qui signifie dans le monde moderne deux ou trois enfants, rarement plus, ont tendance à s’établir assez loin du centre où ils trouvent des logements plus spacieux et moins chers. Considérer la fécondité globalement empêche de saisir les différences de comportement puisque ville et campagne, Ouest fécond et Sud-Ouest peu fécond se retrouvent mêlés. »
(à suivre)

6 juin 2016

IMMIGRATION ET COUPLES MIXTES

Anatomie Sociale de la France (3)
Pour analyser l’intégration des immigrés, Hervé Le Bras prend l’angle des couples mixtes.
Voici d’abord ci-dessous le lien entre proportion des couples mixtes et niveau d’éducation : le constat est sans appel et le lien est direct et spectaculaire. Seuls les immigrés sans diplôme – et ce quelque soit leur âge – se marient entre eux très majoritairement.
Un peu plus loin, Hervé Le Bras analyse la relation entre la mixité des couples et la densité de la population immigrée. Il montre que, contrairement à une idée reçue, plus les immigrés sont nombreux dans un territoire donné, plus la mixité s’y développe :
« La préférence pour les unions mixtes est plus importante dans la plupart des zones où les immigrés sont les plus nombreux. Loin de mener à une séparation des populations, l’immigration en se développant favoriserait donc la mixité. Là où les immigrés sont nombreux, ils se mêlent à la population native dans la vie quotidienne et nouent des relations avec elle. C’est le contraire de l’appellation de ghetto ou de celle d’apartheid brandie par les partis de droite comme de gauche. Là où ils représentent une faible minorité, les immigrés tendraient à vivre, au contraire, en circuit fermé pour protéger leurs habitudes culturelles qu’ils sentent menacées par l’environnement différent dans lequel ils sont en général arrivés plus récemment que dans les zones traditionnelles d’immigration. »
« Si l’on se fie à la simple proportion d’unions endogames, on affirmera que l’intégration est plus facile quand les immigrés forment une faible proportion de la population. Si l’on se fie au calcul des préférences qui a été argumenté plus haut, c’est au contraire quand les immigrés sont en proportion non négligeable que les unions mixtes sont plus recherchées et que l’intégration réussit. »
(à suivre)

3 juin 2016

FIN DE VIE

Mort touristique

A quoi pensent-ils ?
Probablement à leur village qui, à quelques centaines de mètres de là, est en train d’être détruit : pour satisfaire la manne touristique et faire resurgir un passé révolu, toutes les maisons et toutes les échoppes sont en train de disparaître.
Bientôt du présent et du passé récent, il ne restera rien. Hampi ne sera plus qu’un musée où les fantômes auront remplacé les vivants.
Alors il ne leur restera plus qu’à s’allonger à même le sol, et comme le chien, à dormir pour rêver de leurs vies arrachées…
(Photos prises en Inde à Hampi en août 2012)

1 juin 2016

UN INDIVIDU NE PEUT PAS ÊTRE COMPRIS INDÉPENDAMMENT DE SON ENVIRONNEMENT

Anatomie Sociale de la France (2)
Voici pour commencer comme Hervé le Bras introduit son propos :
« Une personne n’est pas successivement un ouvrier, un homme, un jeune, un titulaire du bac, un habitant d’une commune rurale. Elle est tout cela à la fois, et plus encore. Elle n’est pas non plus isolée et réduite à ses attributs individuels. Elle vit en général au sein d’une famille, elle habite un endroit précis où se nouent une grande part de ses contacts amicaux et sociaux. Son comportement dépend des attributs de son entourage proche autant sinon plus que des siens propres. 
Pour le saisir, il faut donc disposer d’une masse énorme d’informations où l’on pourra croiser les nombreuses caractéristiques individuelles et celles des proches, une sorte de big data social. Le recensement qui correspond assez bien à cette exigence sert de base aux développements de cet ouvrage. Grâce aux données individuelles et surtout grâce aux caractéristiques des ménages et à leur localisation, qu’il collecte, il permet de sonder en détail les conduites des Français. 
Pour cela trois sujets sont privilégiés : la composition des couples, l’immigration et le chômage. Ils sont croisés entre eux et avec d’autres critères, en particulier l’éducation, la catégorie sociale, la taille de la famille, et le lieu de résidence. L’image des Français qui en résulte est plus sophistiquée que celle véhiculée par les sondages et amplifiée par les médias. Elle prouve que les difficultés économiques et politiques de la France ne se déclinent pas selon celles, générales, que rencontrent les ouvriers, ou bien les jeunes, ou bien les femmes, ou bien les immigrés, mais au cas par cas. 
Pour prendre un exemple, selon celle plus particulière de la femme âgée de 25 à 30  ans, employée de profession, titulaire du brevet seulement, habitant sans conjoint dans le Languedoc rural. »
(à suivre)