Ah, si nous pouvions parcourir notre passé !
Dans le roman de Paul Auster, La nuit de l'oracle (*), l'écrivain Sydney Orr invente un monde qui maitrise le voyage dans le temps :
« Conscient des risques de rupture et de désastre qu'elle implique, l'État n'accorde à chacun qu'un seul voyage durant sa vie. (…) Vous commencez deux cents ans avant votre naissance, en remontant à peu près sept générations, et puis vous revenez progressivement au présent. Le but de ce voyage est de vous enseigner l'humilité et la compassion, la tolérance envers le prochain. Parmi la centaine d'aïeux que vous rencontrerez en chemin, la gamme entière des possibilités humaines vous sera révélée, chacun des numéros de la loterie génétique aura son tour. Le voyageur comprendra qu'il est issu d'un immense chaudron de contradictions et qu'au nombre de ses antécédents se comptent des mendiants et des sots, des saints et des héros, des infirmes et des beautés, de belles âmes et des criminels violents, des altruistes et des voleurs. A se trouver confronté à autant de vies au cours d'un laps de temps aussi bref, on gagne une nouvelle compréhension de soi-même et de sa place dans le monde. On se voit comme un élément d'un ensemble plus grand que soi, et on se voit comme un individu distinct, un être sans précédent, avec son avenir personnel irremplaçable. On comprend, finalement, qu'on est seul responsable de son devenir. »
J'aime vraiment cette idée, non pas seulement par sa dimension poétique, mais parce que cela permettrait effectivement à chacun de percevoir combien la vie procède par tâtonnements, hasards et bifurcations. Ceci nous montrerait aussi que nous sommes le fruit de métissages, de mélanges et de transformations.
Peut-être reviendrions-nous de tels voyages un peu plus ouvert à l'autre et comprenant mieux que le choc des cultures et des différences est ce qui crée le progrès ?
Et comme l'a écrit Paul Auster, on comprendrait « qu'on est seul responsable de notre devenir » et que nous sommes libres et riches du chaos de notre passé et de nos racines.
(*) Éditions Babel, Actes Sud 2004
2 commentaires:
Oui ,en effet à défaut d'avoir une généalogie "parfaite" tâchons d'inventer un devenir qu'il ne s'agira pas de renier mais d'assumer par-delà les aléas à venir...
Notre devenir est ce qui est entre nos mains - et encore sommmes-nous contraints par les systèmes et nos histoires -, alors ayons le culot de le saisir et de ne pas penser à partir du passé !
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