31 janv. 2012

LABEL FRANCE : ET SI BAYROU AVAIT RAISON ?

Pourquoi ne pas parier sur le civisme des Français ?
Quand François Bayrou a proposé la création d’un label France pour relancer l’emploi industriel sur notre territoire, la plupart des commentateurs, qu’ils viennent du monde politique ou journalistique, en ont plaisanté, soit parce qu’il trouvait cette idée inapplicable, soit parce qu’il la pensait inefficace.
Reprenons chacun de ces deux points.
Inapplicable donc. Ses détracteurs ont indiqué, à juste titre, que les processus de production étant très imbriqués, et que souvent les usines situées en France n’étant que des usines d’assemblage, un tel label n’avait pas grand sens.
Certes, mais il y a une donnée qui serait finalement assez facilement mesurable : la part de valeur ajoutée réalisée en France. Pour cela, il suffirait que, lors de la vente d’un quelconque produit, l’entreprise soit tenue d’indiquer cette part.
Comment cela pourrait-il fonctionner ?
-        Si l’entreprise a fabriqué ce produit complètement, à 100 % dans ses usines, elle connaît la part réalisée en France, et pourrait donc facilement l’indiquer. Afin de ne pas créer une usine à gaz, on pourrait se contenter d’une exactitude à 5, voire 10 % près.
-        Si elle ne l’a pas complètement fabriqué, c’est donc qu’elle a intégré des composants achetés à d’autres entreprises. Comme lors des achats, la part réalisée en France figurera sur ces composants, il lui sera aussi facile de calculer la part finale.
-        Restera bien sûr l’amorçage du processus, notamment sur les stocks anciens, pour lesquels l’information n’existera pas au départ. Mais vu l’organisation industrielle qui est de plus en plus en flux tendu, cette limite sera de courte durée.
On peut donc avoir pour chaque produit vendu sur le marché final, une estimation de la part de valeur ajoutée faite en France. Le coût d’une telle évaluation serait minime, car elle deviendrait un calcul informatique automatique.
Comment ensuite communiquer ceci auprès des acheteurs ?
Pourquoi ne pas imaginer trois labels matérialisant la part de valeur ajoutée réalisée en France : par exemple plus de 25% (« assemblé en France »), plus de 50% (« fabriqué en France ») et plus de 75% (« Tout en France »). On aurait donc une modulation qui permettrait à des produits uniquement assemblés en France d’obtenir le label (je pense par exemple aux usines automobiles de marques étrangères), mais d’être différenciés de ceux plus complètement fabriqués sur le sol national.
Comment contrôler l’exactitude de ce taux ? S’agissant d’une nouvelle norme, un contrôle par l’AFNOR s’impose.
Reste maintenant l’autre reproche : ce serait inefficace, car les consommateurs veulent toujours acheter le moins cher possible.
Je ne suis pas sûr du tout de cette affirmation, et je pense au contraire l’inverse : si les consommateurs étaient informés de la part réalisée en France, avec les 3 niveaux, cela orienterait leurs achats vers les produits les plus fabriqués en France. Bien sûr cette préférence ne serait possible que si les performances et les prix étaient proches, et si l’impact sur le pouvoir d’achat restait limité.
Difficile de démontrer évidemment mon affirmation que cela marcherait, mais pourquoi toujours parier sur le manque de civisme et l’incohérence de nos concitoyens ? Pourquoi ne pas parier  sur l’intelligence individuelle et collective ?
Et même si ce déplacement était modeste, il induirait de fait un encouragement à la localisation d’activités en France. De plus c’est un procédé libéral, qui ne crée pas de biais sur le marché, et dont le coût pour l’État est voisin de zéro.
Alors pourquoi ne pas le mettre en œuvre ?
La logique aussi voudrait ensuite d’avoir un label du même type au plan européen, permettant de mettre aussi en relief les produits dont la part de valeur ajoutée est essentiellement européenne.
Et quelle pourrait bien être une meilleure idée, sachant que je ne crois pas au dirigisme, ni une politique industrielle impulsée par l’État : comment imaginer que la réponse efficace à la montée de l’incertitude serait dans une centralisation des décisions ?

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Ce que vous proposez est juste une amelioration du label "Made in..." deja existant. Donc cela tue l'argument de ceux qui disent que c'est inapplicable.
Et pour ceux qui disent que ce serait innefficace, c'est juste ignorer les basics du marketing. Pourquoi alors VW peut vendre ses voitures 10% plus cher que les marques francaises, pourquoi les marques low costs de distribution n'ont pas deja tue les Danone, Nestle et autres...
Je vous soutiens tout a fait ! (et pourtant Bayrou n'est pas ma tasse de the)

Eliane Jacquot a dit…

Il faudrait en effet le mettre en oeuvre en France,et au niveau européen,puisque c'est ,comme vous le soulignez,un "procédé libéral,qui ne crée pas de biais sur le marché."
Vous devriez aller vendre tous vos projets porteurs d'espoir au Conseil d'Analyse Stratégique...

Anonyme a dit…

Bonjour,
Bon article mais quand vous écrivez " les processus de production étant très imbriqués, et que souvent les usines situées en France n’étant que des usines d’assemblage" vous avez raison. Mais c'est surtout vrai pour ce qui est assemblé en France (automobile, immobilier et un peu l'Electronique par exemples)

Une part non négligeable des dépenses quotidienne des ménages c’est à dire l'alimentation est assez peu "assemblée" et relativement facile à "sourcer", quel est par exemple le sens de consommer des carburants fossiles pour faire venir des haricots du Kenya ou des pommes du Chili alors que la France en produit!