4 déc. 2013

COMPRENDRE QUE L’ON EST DÉPASSÉ PAR L’ENTREPRISE QUE L’ON DIRIGE

Diriger en acceptant de ne pas tout décider (1)
REPÈRES
L'impact direct d'un dirigeant est réel. Mais, au fur et à mesure du développement de l’entreprise, cet impact est de plus en plus limité : dès une certaine taille, la plupart des décisions sont prises sans lui et loin de lui, au sein de l’organisation, parmi ses clients ou partenaires. Si tout remontait à lui, non seulement l’entreprise mourrait d’asphyxie, mais, comme il ne peut pas être omniscient, souvent la pire des décisions serait prise.
Ne pas tout décider
Comment dans notre monde tissé d’incertitudes croissantes, un dirigeant seul pourrait-il sauver une collectivité ? Diriger efficacement, c’est admettre que l’essentiel n’est plus de bien décider soi-même, mais de mettre en place et animer des processus qui font qu’à partir de mouvements massivement chaotiques et lâchement coordonnés, une performance globale émerge. Diriger efficacement, c’est aussi comprendre que l’on est dépassé par l’entreprise que l’on dirige. Diriger efficacement, ce n’est réduire ni l’incertitude, ni la complexité : c’est vivre avec et en tirer parti. Bref, c’est diriger par émergence.
Créer une stabilité stratégique
L’agilité est le mot à la mode du management contemporain. Mais, dans notre monde incertain et tourbillonnant, est-ce, à la moindre brise, changer de cap plus vite que les autres ? Qui peut croire que la création de valeur naîtra de tels mouvements erratiques ?
Au contraire, la performance est dans la stabilité, et la capacité à maintenir son cap : arriver à construire dans la durée, sans être désarçonné par tout ce que l’on n’a pas pu prévoir. Tel un fleuve, modifier son cours en fonction des mouvements de terrain, du volume des pluies, des barrages imprévus, mais sans changer de destination.
Si toutes les entreprises sont nées par hasard, intuition ou volonté, celles qui sont devenues des leaders mondiaux durables ont pris, à un moment, le temps de trouver leur mer : elles sont les fleuves qui attirent et structurent le cours des autres.
Viser la beauté
L’Oréal ne cesse jamais de viser la beauté, reste centrée sur les cheveux, la peau et le parfum, développe des marques mondiales dédiées toujours aux mêmes circuits de distribution, tout en en allongeant sans cesse la liste, ne renonce pas à ses principes d’action, … avec au cœur, une réactivité extraordinaire, celle de l’énergie de la vie : les actes élaborent des produits, produits qui construisent des marques, marques qui rapprochent l’entreprise chaque jour un peu plus de sa mer.
L’entreprise est structurellement stable et changeante au quotidien : le chaos des initiatives apporte la résilience globale. Telle est la puissance des « matriochkas stratégiques » (ou poupées russes stratégiques), dont les emboîtements successifs, permettent de passer progressivement de la vision stratégique ou mer, jusqu’aux actions quotidiennes et locales.

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