3 mars 2018

COMING OUT OU COMING IN ?

Extrait de mon livre « Coming in » : in et pas out
"Souvent à la radio, à la télévision ou dans la presse, on entend parler de « coming out ». Untel ou unetelle ont fait son coming out. Ou encore ont été « outés ». Rien de plus stupide que cette expression. 
Comme si l’homosexualité est une variété de furoncle qu’il faut percer pour que son pus jaillisse en plein jour : « Purgez donc cette vilaine boursouflure, et tout ira bien ensuite, vous verrez ! » 
Comme si une part essentielle de notre personnalité peut sortir sans dommage collatéral. (…)
Je n’avais honte ni de qui j’étais, ni de ce que j’avais fait. Ce n’était pas la question. Si certains étaient gênés de me savoir homosexuel, autant cesser tout de suite de les voir ! L’homosexualité n’est pas une maladie, a fortiori contagieuse. Non, je n’avais pas peur de cela. 
Dans l’expression « coming out », il y a surtout implicitement l’idée d’une destruction, d’une implosion sentimentale. C’était précisément ce que je vivais actuellement : à force de trop de coming out, je me désintégrais. Je brûlais. Chaque morceau de mon identité s’écartait des autres, chaque parcelle de mon « Je » suivait sa propre trajectoire. Divergente. Toutes divergentes. (…)
Non, le coming out n’est pas la solution, mais le problème. Il me fallait arrêter mon coming out, arrêter mon implosion. Tant qu’il en était encore temps. (…)
Continuer mon coming out, ce serait l’échec assuré. Mon autodestruction. Au mieux, le rejet par tous ceux qui m’avaient connu autre : pourquoi accepteraient-ils de me découvrir différent ? Au pire, la rupture par fragmentation. Désintégration. (…)
J’avais besoin de l’inverse. D’un coming in. 
Pour pouvoir décider ce que je voulais faire, et le décider pour moi ainsi que Marc me l’avait dit, il me fallait réparer ma fracture. De l’intérieur, et non pas de l’extérieur. In et non pas out. Prendre le temps de plonger en moi. 
Pour comprendre comment et pourquoi j’étais passé à côté de moi-même. Comment et pourquoi j’avais élaboré une identité fictionnelle et artificielle. Comment et pourquoi celle-ci n’était pas seulement « fictionnelle et artificielle », mais représentative de qui j’étais. Comment et pourquoi mes deux parties – mon identité apparente et celui que j’avais pris l’habitude d’appeler « mon Alien » – étaient indissociables et constituaient ensemble mon identité réelle. Comment et pourquoi l’Alien n’en était pas un. Comment et pourquoi cet Alien était moi. Moi aussi. Comment et pourquoi sans lui je ne serais pas moi.
Bref comprendre qui j’étais."

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