Comprendre comment on comprend, ou du moins essayer… (Neurosciences 1)
Le domaine des
neurosciences est fascinant pour de nombreuses raisons.
D’abord bien sûr
parce qu’il part à la découverte de notre cerveau, et peut donc venir éclairer
comment se constituent chacun d’entre nous, et nos systèmes collectifs. Il se
penche à la fois sur des questions « simples » comme la commande de
nos muscles ou la régulation de notre corps, des questions beaucoup plus
complexes comme l’apparition de l’écriture ou celle de savoir compter, et enfin
d’autres qui sont des puits sans fonds, comme les relations entre système
conscient et non-conscient, la mémoire, les émotions ou le sentiment d’être
soi.
Ensuite parce que
c’est un domaine qui n’en est qu’à ses premiers balbutiements, et qui, du coup,
bouge très rapidement. Les neurosciences n’ont vraiment décollé qu’avec le
développement de l’imagerie cérébrale, c’est-à-dire depuis les années 90. Je ne
dis pas bien sûr que tout ce qui a été fait avant, est quantité négligeable,
mais il y a réellement eu un point d’inflexion à ce moment-là et un décollage
depuis lors. On n’est donc qu’aux débuts, ou, si vous préférez, à une vraie
renaissance de nos connaissances sur le cerveau.
Enfin, et surtout pour
ce qui me concerne, parce que cette science n’en est pas une, du moins pas au
sens classique du terme comme on peut parler des mathématiques, de la physique
ou de la chimie. En effet elle est profondément intriquée avec la pensée
philosophique dont elle est inséparable. Comment en effet travailler sur des
questions comme l’apparition du sens, de la pensée ou de l’identité, sans
s’appuyer sur tout ce que la philosophie nous a appris ou nous apprend encore.
De ce point de vue, la neuroscience, du moins la vraie, est une science de la
modestie et de la réflexion sur ses propres limites.
Mon intérêt pour
elle est finalement très récent, puisqu’il ne date que de 2006. Mon premier
livre, Neuromanagement, est né de cette rencontre. En effet les découvertes de cette
science, et singulièrement l’importance, voire souvent la prépondérance, des
processus non conscients, m’ont apporté une clé pour revisiter ce que je
pensais du management : j’ai mis l’accent sur la présence aussi dans les
entreprises de processus non conscients, au sens de processus non voulus, et
non pilotés par la direction générale.
Dans mon deuxième
livre, les Mers de l’incertitude, je me suis aussi appuyé sur les neurosciences
pour expliquer pourquoi l’incertitude était irréductible et croissait avec le
développement de la vie. Comment en effet prévoir une évolution si les actions
humaines relevaient massivement de processus non conscients ?
Depuis lors, les
neurosciences ont poursuivi leur chemin, et des découvertes toujours plus
étonnantes, et riches de conséquences ont été faites.
Un des moyens pour
s’en rendre compte est de suivre le cours de psychologie cognitive
expérimentale de Stanislas Dehaene, au Collège de France. Ancien élève de
l’École normale supérieure, mathématicien d’origine, Stanislas Dehaene est
notamment le directeur de l’unité de Neuroimagerie Cognitive, unité mixte
INSERM-CEA, à Neurospin dans l’Essonne. Il est ainsi un des plus grands
spécialistes mondiaux dans son domaine.
Son cours est une
merveille de clarté, de richesse et de profondeur dans le questionnement. Il
est accessible en ligne sur le site du Collège de France ou via iTunes U.
Sans avoir
évidemment l’intention, ni la prétention de résumer un tel travail, je vais
consacrer les articles des jours qui viennent, à ce que j’en ai retenu, à ce
qui m’a le plus interpellé, éléments qui seront le moment venu intégrés dans un
futur livre…
(à suivre)
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