18 févr. 2010

ON NE PEUT PAS GAGNER UN MARATHON EN PARTANT SUR LE RYTHME D’UN CENT MÈTRES

Il faut choisir la voie la plus facile

Le discours actuel dominant – fortement relié à la pensée judéo-chrétienne – met en avant la noblesse et l'importance de l'effort et de la souffrance : une victoire facile n'est pas une vraie victoire ; les vraies victoires doivent être obtenues au prix d'un combat long et difficile. Métaphoriquement, nous ne croyons pas que le paradis puisse être atteint si l'on n'a pas souffert préalablement sur terre.

Ceci colore aussi le management et la façon d'aborder la réflexion stratégique : on n'a pas peur de la difficulté, du combat ; on craint la facilité et le confort.

Or, comme nous vivons dans le monde de l'incertitude, comme le pire peut survenir à tout moment, comment y faire face si l'on est déjà parti à bloc dès le départ ? Si nous choisissons la voie la plus difficile, la plus risquée, celle qui donc nous paraîtra la plus noble, comment réussir alors que, très probablement, rien ne va se passer comme prévu ?

A l'opposé, les stratèges chinois ont développé une apologie de la facilité. 

Ne nous trompons pas : cela ne veut pas dire qu'aucun effort, aucun travail ne seront nécessaires. Non, cela signifie que toute action pour être efficace doit prendre appui sur le potentiel de situation et la configuration du terrain, qu'elle doit être amplifiée et relayée par les forces naturelles. A l'inverse, il est inutile et illusoire de penser que l'on peut lutter contre le cours des choses. 

Comme un fleuve, la mise en œuvre doit « couler de source », c'est-à-dire prendre appui sur la géographie de l'entreprise : les tendances de fonds de la situation actuelle ; les savoir-faire de l'entreprise, sa position, son histoire, ses hommes ; ceux de la concurrence actuelle et potentielle… 

C'est ce qui va permettre de résister au mieux aux aléas du trajet et aux « cygnes noirs » qui peuvent survenir. 

On ne peut pas gagner un marathon en partant sur le rythme d'un cent mètres.

17 févr. 2010

TOYOTA OU QUAND LA MAIGREUR REND L’ENTREPRISE CASSANTE

Le lean management décuple l'impact des cygnes noirs

Toute entreprise sait que, quelles que soient les mesures prises, la qualité garantie à 100% n'existe pas : réussir une prestation ou délivrer le bon produit sont des opérations tellement complexes que, inévitablement, à un moment ou à un autre, une erreur va se glisser. Meilleure sera la gestion de la qualité et moins ceci se produira souvent, et surtout n'arrivera que très rarement jusqu'au client final. Dernier objectif d'une politique qualité : faire tout cela à moindre coût, avec l'adage du geste juste, plutôt que du contrôle a posteriori.
Dans le même temps, toutes les entreprises font la course pour la productivité : comment jour après jour, mois après mois, année après année, produira mieux et moins cher. Produire moins cher pour rester compétitif, pour répondre à l'attente des consommateurs, pour améliorer sa rentabilité. Les approches se sont sophistiquées au fil des années, le lean management – ou production au plus juste – en étant la version la plus évoluée.
Ces deux objectifs – amélioration de la qualité et meilleure productivité – apparaissent antagonistes, mais ils sont indissociables et doivent être menés de front. D'où dans toutes les industries, la diminution du nombre de sous-traitants et la normalisation des pièces détachées : moins il y a de composants différents, plus il est facile de certifier leur qualité et plus on peut négocier les prix à la baisse. 

Un des cas les plus frappants est l'industrie automobile : derrière la multiplicité des modèles, tous les constructeurs cherchent à avoir une « bibliothèque de pièces » la plus restreinte possible. Le champion de tout ceci est incontestablement Toyota : roi de la qualité, de l'amélioration continue et du lean management.
Certes… mais toutes ces démarches associant lean management, suppression progressive de tout ce qui est jugé inutile, et diminution du nombre de pièces et de fournisseurs rendent aussi l'entreprise plus « cassante » : tout retard d'une pièce peut arrêter une usine, toute erreur dans les prévisions peut déclencher des problèmes en cascade… et tout problème de qualité sur une seule pièce peut contaminer toute une production. Toyota vient d'en faire la démonstration : un problème sur une pédale d'accélérateur a mis en cause tous les modèles ou presque.
Comme l'indique Philippe Escande dans son denier article dans les Échos (« Pourquoi Toyota perd les pédales », Les Échos du 10/2/2010), toute entreprise – Toyota y compris – est soumise à la loi des cygnes noirs, ces évènements hautement improbables(1)

Or, plus l'entreprise est efficace au sens classique du terme, plus elle est passée au crible du lean management, et plus elle est devenue « cassante » : tendue vers son objectif, ayant éliminé tout ce qui n'y contribue pas, elle est d'autant plus vulnérable quand survient l'imprévu. Sans parler de celles qui, à force d'avoir suivi des cures d'amaigrissement sont devenues anorexiques.

(1) Concept développé par Nassim Nicholas Taleb dans le Cygne Noir

16 févr. 2010

« IL N'Y AURA PAS DE KRACH EN 2008 »

Quand on affirme tout et son contraire… (suite)
(suite de mon article d'hier)


13 août 2007 : « Les banques risquent un mauvais troisième trimestre » (Les Échos)
« La crise des crédits immobiliers à risque est une vraie crise. Mais ce n'est pas une crise du crédit. (…) Par un effet de contagion lié au saupoudrage des crédits « subprime » dans les produits structurés (titrisation ou dérivés), les investisseurs ont arrêté, depuis deux semaines environ, d'acheter ces produits, adossés ou non à du « subprime ». (…) Nous sommes persuadés que la valeur fondamentale des actifs est supérieure à leur valeur de marché actuelle. » (Christian de Boissieu, Président du conseil d'analyse économique, et Patrick Artus, Directeur de la recherche et des études de NATIXIS)

17 août 2007 : Crise des "subprimes" : le point de vue de deux économistes
Augustin Landier : « Dans les semaines à venir, on va enfin savoir quelles sont les banques et les institutions financières qui sont touchées et à quel point elles le sont. (…) C'est un moment "darwinien" : les banques qui ont eu des politiques de gestion du risque trop laxistes vont le payer très cher, des institutions prestigieuses vont perdre leur crédibilité (comme par exemple la société de courtage Bear Stearns), et seront peut-être absorbées par d'autres. C'est de la "création destructrice". »

29 août 2007 : Dans le sillage de Wall Street, les Bourses mondiales plongent à nouveau
« L'ampleur exacte de la crise des crédits immobiliers à risques, dits "subprime", reste encore à évaluer et toute nouvelle négative a un impact fort sur les places boursières. »
10 septembre 2007 : Crise financière : la BRI souligne le risque de contagion à l'économie réelle aux États-Unis
« Il y a un risque de contagion à l'économie réelle aux États-Unis de la crise du "subprime", a estimé, lundi 10 septembre en début d'après-midi, Jean-Claude Trichet, le porte-parole du groupe du G10 et gouverneur de la Banque centrale européenne (BCE), à l'issue de la réunion bimestrielle de la Banque des règlements internationaux (BRI). »

11 septembre 2007 : La crise financière ne devrait pas avoir de conséquences importantes en Europe
Jean-Paul Fitoussi : « Je ne crois pas que l'Europe soit touchée en tant que telle. (…) Donc en dehors de quelques évolutions trimestrielles heurtées, la crise ne devrait pas avoir de conséquences importantes en Europe. (…) Il n'y a pas de raison que la crise ait un impact sur le consommateur médian. »
2 novembre 2007 : Les bons chiffres de l'emploi aux États-Unis apaisent les craintes de récession
« La récession tant annoncée aux États-Unis ne semble pas pour tout de suite, même si la crise immobilière reste une inconnue déterminante pour l'avenir de la première économie mondiale. »

6 novembre 2007 : Christian de Boissieu :"Malgré la crise financière, la croissance mondiale peut tenir le coup"
« Mais il me semble que la croissance mondiale peut tenir le coup. (…) Je pense que la croissance mondiale peut résister entre 4 % et 5 % pour l'an prochain, grâce à la croissance des pays émergents et au rôle des banques centrales. L'autre scénario, qui n'est pas le mien, est celui d'une récession américaine. (…) L'effet de cette crise me paraît modéré en Europe. (…) La crise aura une conséquence sur l'Europe à travers son impact sur le change. »

7 décembre 2007 : « Le ralentissement n'est pas tragique », selon l'OCDE
« La croissance des pays de l'Organisation ne devrait pas être trop touchée par la hausse des matières premières et la crise des « subprimes ». Le ralentissement de l'économie mondiale sera à son maximum au premier trimestre 2008. Selon les perspectives semestrielles publiées jeudi 6 décembre par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la croissance du produit intérieur brut (PIB) de ses pays membres passera de 2 % au dernier trimestre 2007 à 1,9 % au premier trimestre 2008, avant d'amorcer une remontée pour atteindre 2,5 % au premier trimestre 2009. »

2 janvier 2008 : David Naud, économiste à la Deutsche Bank « Il n'y aura pas de krach en 2008 »
« Avec les interventions des banques centrales, mi-2008, la crise et les désordres du marché monétaires devraient finalement s'estomper. (…) Aux États-Unis, l'embellie arrivera certainement mi-2008. En Europe la reprise prendra sans doute quelques mois de plus. En tout cas, il n'aura pas de krach cette année ! »

9 avril 2008 : L'économie américaine va connaître une "légère récession" en 2008, selon le FMI
« "L'économie américaine connaîtra une légère récession en 2008, en raison des effets de synergie entre les cycles de l'immobilier et des marchés financiers, avant de ne se redresser que progressivement en 2009", affirme le Fonds dans ses perspectives économiques mondiales. Le produit intérieur brut (PIB) américain devrait ainsi croître de seulement 0,5 % en 2008 et de 0,6 % en 2009, ce qui représente une révision à la baisse de 1 point et 1,2 point respectivement par rapport aux prévisions de janvier. »

25 juin 2008 : Crise bancaire : pour Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France, "il n'y a pas de deuxième vague"
« Il n'y a pas de deuxième vague : les pertes supplémentaires qu'annoncent les banques sont la conséquence mécanique de l'évolution des marchés. On est dans un cycle normal de provisionnement des risques, sans danger cette fois de contagion à d'autres secteurs du crédit bancaire. (…) L'exercice de transparence sera achevé d'ici au 30 juin, en France et dans tous les pays du G7. »


7 septembre 2008 : Freddie Mac et Fannie Mae mis sous tutelle gouvernementale
Le président de la Réserve fédérale américaine, Ben Bernanke, a affiché un soutien sans détour au plan de reprise. "Ces étapes nécessaires vont aider à renforcer le marché américain de l'immobilier et à promouvoir de la stabilité sur nos marchés financiers". 

16 septembre 2008 : La faillite de Lehman Brothers ébranle le système financier mondial
« Il s'agit d'un événement qui se produit une fois tous les cinquante ans, probablement une fois par siècle. Il n'y a aucun doute, je n'ai jamais rien vu de pareil (...) », a commenté Alan Greenspan, l'ancien président de la Réserve fédérale américaine (Fed), face à l'aggravation de la crise financière née aux États-Unis à l'été 2007. 


15 févr. 2010

« TOUT EST DONC EN PLACE POUR QU'IL AIT UNE CROISSANCE PLUS SOUTENUE »

Quand on affirme tout et son contraire…

Il est bon de parcourir les archives des journaux. C'est ce que je viens de faire en regardant ce qui a été écrit dans le Monde depuis début 2004 sur la croissance mondiale et la crise des subprimes. Je vous livre ce feuilleton brut en 2 épisodes : aujourd’hui de début 2004 à l’été 2007, demain de l’été 2007 à septembre 2008. Chacun pourra en faire son commentaire personnel…



1er janvier 2004 : Les 3 scénarios d'une croissance retrouvée« L'optimisme est de retour. Après la stagnation (en France) et même la récession (en Allemagne), du moins dans la première moitié de 2003, la nouvelle année s'ouvre sous le signe de la reprise. Les indices sont flatteurs : le rebond est réel et même fort. L'économie mondiale, tirée par les États-Unis et l'Asie, repart rapidement. Toutefois il subsiste partout un malaise et de nombreuses interrogations persistent sur le moyen terme »

5 octobre 2004 : La spéculation a gagné l'ensemble des États-Unis
« Pour autant, les risques de voir soudain la bulle éclater sont très faibles. Le logement, contrairement aux actions, est un bien indispensable. »

11 janvier 2005 : Les trois points noirs de l'économie mondiale
« Avec un taux de près de 3 % attendu pour la zone de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), de près de 4 %pour l'ensemble de la planète, les perspectives de croissance pour l'année 2005 n'ont, a priori, pas de quoi inquiéter. (…) Une envolée des taux risquerait notamment de provoquer un effondrement du marché de l'immobilier, dont beaucoup d'experts affirment qu'il est, dans de nombreux pays occidentaux, en proie à un phénomène de bulle spéculative.

5 mai 2005 : Consacrée à la consommation et à l'immobilier, la dette des ménages américains atteint 1,2 fois leur revenu annuel
« M. d'Arvisenet se montre plutôt rassurant : « L'essentiel de l'endettement est de nature hypothécaire et principalement consenti sur la base de taux fixes, ce qui protège les ménages dès à présent endettés. Le comportement récent des défauts n'est dès lors pas pour étonner.»

30 août 2005 : Les banques centrales jugent que la flambée du crédit et des prix de l'immobilier n'est pas soutenable
« La flambée actuelle des prix de l'immobilier n'est-elle pas plus inquiétante et dangereuse, sur le plan économique, que l'envolée des cours pétroliers ? C'est ce que pense le président de la Réserve fédérale américaine (Fed), Alan Greenspan. (…)Cette baisse de la valeur patrimoniale des ménages pourrait « faire fléchir la consommation », a averti M. Greenspan, qui a constaté que les estimations sur l'ampleur de ce phénomène sont très variables. Les excès du marché de l'immobilier seront-ils corrigés en douceur ou au contraire de façon brutale, avec le risque, dans ce cas, d'ajustements douloureux sur les revenus, la production et l'emploi ? »

31 janvier 2006 : Une économie américaine puissante mais fragilisée
« L'autre menace est la bulle immobilière. L'économie américaine a surmonté les chocs successifs depuis 2000 car les Américains ont continué de dépenser. (…) Alan Greenspan lui-même estime que les consommateurs sont devenus trop dépendants des crédits qu'ils obtiennent en mettant leurs logements en garantie. Entre un quart et un tiers des prêts accordés engageant les logements financent les dépenses personnelles. »

13 avril 2006 : Le FMI redoute l'impact économique de la hausse des taux
« Une hausse des taux pèserait aussi sur le service de la dette des personnes ayant emprunté pour acquérir leur maison. (…) Une faible culture financière, alliée à une forte prise de risques, est politiquement un cocktail explosif. »

14 mai 2007 : La croissance est de retour
« Il y a ceux qui ont la "baraka" et les autres. Jacques Chirac avait inauguré son quinquennat, en 2002, avec un retournement conjoncturel à l'origine d'une forte poussée du chômage et d'une très nette détérioration des finances publiques. Nicolas Sarkozy bénéficie d'une conjoncture autrement plus favorable. (…) "Les contraintes pesant sur l'économie française vont se lever, analyse Eric Heyer, l'un des directeurs adjoints de l'Observatoire des conjonctures économiques (OFCE). (…) Tout est donc en place pour qu'il y ait une croissance plus soutenue". (…) Même un ralentissement plus marqué de la croissance américaine, que pourrait provoquer un éclatement de la bulle immobilière aux États-Unis, ne devrait pas changer la donne en France, estime l'OFCE, compte tenu du découplage des cycles économiques européen et américain. »

19 juillet 2007 : A New York, l'indice Dow Jones a brièvement franchi les 14 000 points
« Pour certains analystes, les boursiers ne se sont pas focalisés sur la crise des crédits immobiliers, car elle ne présente a priori pas de risque systémique. « Une grande partie des prêts ont été reconditionnés par les banques sous forme d'instruments financiers qui, eux-mêmes, ont été mis dans d'autres actifs financiers. Le risque a, de ce fait, été atomisé et disséminé et nous ne pensons pas qu'il puisse présenter un caractère systémique.», explique Benoît Hubaud, responsable de la recherche sur les marchés de taux et de change à la Société générale. »

12 févr. 2010

VOYAGER VITE ET BEAUCOUP, C’EST SE DISPERSER

______ Éditorial du vendredi ________________________________________________________________
Rappel du patchwork de la semaine :
- Lundi : Quand on découvre que Mc Donald est peut-être en train d'abandonner ses racines américaines au profit d'une version plus mystique et empreinte d'histoire.
- Mardi : Il y a 20 ans, Michel Serres mettait en exergue notre attitude de parasite et le danger du mot « environnement » qui nous laisse à croire que nous sommes au centre du monde 
- Mercredi : Où l'on voit que, à l'occasion de son dernier film, le « What else » de Georges Clooney est devenu « What's next »
- Jeudi : Une question au sujet de l'écomobilité : est-ce implicitement la promotion de l'homme-escargot, celui qui n'a plus d'histoire, voyage avec sa maison dans son dos et regarde le monde au travers d'une glace ?

Ces articles (je mets à part celui de lundi qui n'était qu'un regard amusé sans autre intérêt que cet amusement) ont pour fil conducteur notre attitude par rapport au monde.
Sommes-nous toujours en train de voyager dans ce monde en le considérant comme « notre » monde, celui qui nous appartient, qui nous environne et que nous pouvons salir à notre gré ? Voulons-nous poursuivre notre course sans fin, en limitant au maximum nos bagages pour voyager plus vite et plus efficace, en consommant le moins possible des ressources rares ?
Ou allons-nous arriver à comprendre que nous appartenons à ce monde ? Serons-nous capable de repenser aussi nos relations interpersonnelles et de remettre en cause notre agitation croissante ? Pouvons-nous arriver à comprendre que voyager vite et beaucoup, c'est se disperser ?

11 févr. 2010

QUAND LA SNCF FAIT LA PROMOTION DES ESCARGOTS !

L'écomobilité ou les voyageurs sans bagages

La SNCF a lancé récemment le concept de l'écomobilité. Volonté de surfer sur la vague écologique et d'en profiter pour mettre en avant la performance énergétique du train.
Je ne doute pas du bien-fondé de cette affirmation et de la nécessité de développer des transports collectifs (sans oublier le vélo !).
Je suis simplement amusé par cette expression « écomobilité ». Je n'ai lu aucune étude, mais je serais curieux de savoir ce que quelqu'un pris au hasard comprend à partir de cette expression et de l'affiche ci-jointe.
Je suis allé chercher sur internet une définition du mot. Voilà ce que j'ai trouvé :

"Qu'est ce que l'écomobilité ? C'est bouger écologique et équitable. C'est la suite du Grenelle et le commencement d'autre chose, c'est la nouvelle bataille de SNCF. (…) Un petit mot pour dire une grande cause : faire préférer le train à tout le monde. C'est la nouvelle bataille de SNCF. Et le triomphe de l'écomobilité profitera à tout le monde" (http://www.carte-regliss.fr/fr/votre-planete/sncf-et-leco-mobilite/ )
Beau concept donc…

Simplement, je ne peux pas m'empêcher de trouver un autre sens à ce mot : comme « éco » vient du mot maison en grec, je vois là la promotion de l'escargot, celui qui est voyage avec sa maison.
Clin d'œil involontaire vers le personnage de Georges Clooney dans « In the air » (voir mon article d'hier) qui, lui aussi, voyage avec sa maison réduite à un sac à dos.
Sur l'affiche de la SNCF, on voit en petit la mention « generation-ecomobile ». C'est peut-être bien de cela dont il s'agit : sommes-nous en train de devenir des voyageurs sans bagages, des itinérants sans histoire ? Avons-nous vraiment envie de redevenir des enfants regardant le monde réel défiler devant une glace ?

10 févr. 2010

QUAND GEORGES CLOONEY EST PRIS DE FOLIE VIBRIONNAIRE

De "What else" à "What's next" !

Autant dans la publicité pour Nespresso, Georges Clooney exprime le calme et la tranquillité, autant dans son dernier film « In the Air », il est la caricature du cadre courant sans arrêt d'un bout des États-Unis à l'autre.
Quand, pour Nespresso, il dit « What else », ce n'est pas pour changer. Bien au contraire, c'est pour exprimer qu'il a enfin trouvé ce qu'il cherchait. Plus de raison de changer, tout est parfait. Implicitement, il exprime aussi lui-même le choix parfait : Georges Clooney incarne un idéal masculin.

Dans « In the Air », à l'inverse, il est toujours entre deux avions, deux rendez-vous. Il n'envisage pas de s'arrêter même un instant, son appartement est vide et tout ce qu'il a tient dans sa valise. Son cadre de vie idéal, c'est la cabine d'un avion ou la chambre d'un hôtel.
Il a même théorisé son mode de vie et tient des conférences autour du sac à dos : êtes-vous capable de mettre tout ce à quoi vous tenez dans un sac à dos ? Si oui, vous êtes libre ; si non, vous avez des entraves. Lui, il n'a pas d'ami, pas d'amour, pas de possession. Rien. Donc il est libre.
Libre de bouger tout le temps, de courir toujours plus vite… mais pour rien. A chaque fois qu'il a obtenu quelque chose ou est arrivé quelque part, il dit « What else ? » et repart… In fine, il s'apercevra du vide de sa vie… mais trop tard.
Ce film est une métaphore de notre civilisation : je ne vois autour de moi que des gens qui courent sans cesse. Si, comme je l'ai déjà écrit souvent (voir la série d'articles autour du temps), c'était une preuve d'efficacité, nous vivrions dans un monde parfait !

Attention donc à ne pas nous tromper sur la réponse à apporter à « What else » : comprenons que c'est plus pour nous faire comprendre que le mouvement est souvent illusoire… Ne le remplaçons pas par "What's next" !

9 févr. 2010

« OUBLIEZ DONC LE MOT ENVIRONNEMENT »

Quand il y a 20 ans, Michel Serres proposait déjà le contrat naturel...

Dès 1990, Michel Serres écrivait "le Contrat naturel" dans lequel il attirait l'attention sur la nécessité de changer notre relation à la nature : le monde n'est pas notre environnement, mais nous en faisons partie ! Certains se sont ralliés récemment à l'écologie, il m'a semblé utile de réécouter ce que Michel Serres avait écrit, il y a vingt ans. Occasion d'un nouveau patchwork.

Nous salissons le monde pour montrer qu'il nous appartient 
« Ne vivant plus qu'à l'intérieur, … indifférents au climat, sauf pendant leurs vacances, où ils retrouvent, de façon arcadienne et pataude, le monde, ils polluent, naïfs, ce qu'ils ne connaissent pas, qui rarement les blesse et jamais ne les concerne. Espèces sales, singes et automobilistes, vite, laissent tomber leurs ordures, parce qu'ils n'habitent pas l'espace par où ils passent et se laissent donc aller à le souiller. (…) De quoi nous occupons-nous ? De données numériques, d'équations, de dossiers. »
« Or j'ai souvent noté qu'à l'imitation de certains animaux qui composent leur niche pour qu'elle demeure à eux, beaucoup d'hommes marquent et salissent, en les conchiant, les objets qui leur appartiennent pour qu'ils le deviennent. Cette origine stercoraire ou excrémentielle du droit de propriété me paraît une source culturelle de ce qu'on appelle, pollution, qui, loin de résulter, comme un accident, d'actes involontaires, révèle des intentions profondes et une motivation première. »
« Ainsi la souillure du monde y imprime la marque de l'humanité, ou de ses dominateurs, le sceau ordurier de leur prise ou de leur appropriation. »

Nous sommes des parasites du monde que nous habitons
« La Déclaration des droits de l'homme a eu le mérite de dire : « tout homme » et la faiblesse de penser : « seuls les hommes » ou les hommes seuls. Nous n'avons encore dressé aucune balance où le monde entre en compte, au bilan final. »
« L'essentiel se passe dedans et en paroles, jamais plus dehors avec les choses… Au moment même où physiquement nous agissons pour la première fois sur la Terre globale, et qu'elle réagit sans doute à l'humanité globale, tragiquement, nous la négligeons.
« Oubliez donc le mot environnement, usité en ces matières. Il suppose que nous autres hommes siégeons au centre d'un système de choses qui gravitent autour de nous, nombrils de l'univers, maîtres et possesseurs de la nature. »

Nous ne pouvons plus être en guerre contre notre monde
« Or, à force de la maîtriser, nous sommes devenus tant et si peu maîtres de la Terre, qu'elle menace de nous maîtriser de nouveau à son tour. »
« Nous ne nous battons plus entre nous, nations dites développées, nous nous retournons, tous ensemble, contre le monde. Guerre à la lettre mondiale, puisque tout le monde, au sens des hommes, impose des pertes au monde, au sens des choses. » 
« Aimer nos deux pères, naturel et humain, le sol et le prochain : aimer l'humanité, notre mère humaine, et notre naturelle mère, la Terre. »

Nous devons reconnaître par contrat la globalité du monde
« J'entends désormais par contrat naturel d'abord la reconnaissance, exactement métaphysique, par chaque collectivité, qu'elle vit et travaille dans le même monde global que toutes les autres. »
«  Virtuel et non signé au même titre que deux premiers, puisqu'il semble bien que les grands contrats fondamentaux demeurent tacites, le contrat naturel reconnaît un équilibre entre notre puissance et les forces du monde. De même que le contrat social reconnaissait quelque égalité entre les signataires humains de son accord… de même que le contrat savant s'oblige à rendre en raison ce qu'il reçoit en information, de même le contrat naturel reconnaît d'bord l'égalité nouvelle entre la force de nos interventions globales et la globalité du monde. »

8 févr. 2010

MC DO S’APPRÊTE À TOUT CHANGER !

Mc Donald's teste son nouveau concept dans le silence d'une rue parisienne

Jeudi dernier, je marchais rue Saint Lazare à proximité de la Gare du même nom quand mon regard fut arrêté par une image insolite : Une devanture nouvelle et révolutionnaire d'un Mc Donald's (voir la photo ci-jointe).

Manifestement Mc Do teste un nouveau concept révolutionnaire : il compte abandonner son rattachement au mythe nord-américain pour plonger ses racines dans les tréfonds de l'histoire européenne.

Qu'apprend-on en observant attentivement cette façade (comme toujours lors d'un test, une entreprise en dit plus qu'elle ne le voudrait sur ses intentions) :

- Ronald Mc Donald, personnage central de l'iconographie actuelle remplacé par un roi : Ce changement exprime, à lui seul, la portée de la transformation : dynamisme et exubérance de Ronald versus majesté et calme du roi, couleurs vives et maquillage outrancier versus tons pastels et réalisme affiché. Mc Do veut clairement s'inscrire dans notre nouvelle culture mondiale : réalisme, conformismes, sérieux. Tout un programme.

- L'omniprésence du bois : Là je m'interroge. Il ne peut s'agir d'un mépris affiché vis-à-vis de l'environnement et de la déforestation. Mc Do ne pourrait pas prendre un tel risque. J'y vois au contraire une prise de position en faveur de la maison ossature bois et des économies d'énergie. Ce bois vient surement d'une plantation écologique, et certainement pas d'une forêt africaine ou sud-américaine. Les cimentiers devraient faire attention à ce que Mc Do ne devienne pas le cheval de Troie venant menacer notre mode de construction.

- La présence de 4 drapeaux juxtaposés au logo M : C'est évidemment un clin d'œil à l'intention des européens et de la multiplicité de nos nations. C'est un peu un remake du « United colors of Benetton ». Je suppose que les 4 drapeaux seront choisis en fonction du continent. Malin.

- La verticalité du concept : La plupart des Mc Do actuels sont des structures horizontales, alors que celle-ceci est d'abord verticale. Cet élancement vers le ciel est-il une affirmation de l'importance de Dieu et de la religion ? Mc Do veut-il faire de ses restaurants les cathédrales du 21ème siècle ? Des minarets de la consommation au sommet desquels des haut-parleurs viendraient hurler les promotions du jour ? La réponse dans les semaines et mois à venir…

C'est donc une révolution qui s'annonce. Et pourtant personne n'en parle. Y aurait-il une conspiration du silence ? Mais alors y a-t-il un chef d'orchestre, et si oui, pourquoi ?

5 févr. 2010

COLLECTIVEMENT, NOUS NE VISONS AUCUNE MER

______ Éditorial du vendredi ________________________________________________________________

Rappel du patchwork de la semaine :

- Lundi : Où grâce au Docteur House, on comprend mieux pourquoi pour réussir un diagnostic complexe, on a besoin de confrontations, d'observations larges, d'approximations successives, de perte de temps et d'intuition.
- Mardi : L'Oréal a choisi au début des années 70 la beauté comme stratégie, a alors aligné ses actes en vendant Monsavon et a depuis multiplié produits et voies d'accès vers cette même mer.
- Mercredi : Comme L'Oréal, Google vise une mer et c'est sa seule stratégie. Elle revendique de n'avoir aucun plan d'action…
- Jeudi : Choisir sa mer, c'est un peu comme un mariage pour lequel le divorce serait interdit. Plus l'entreprise avance, plus elle sera forte et soudée, ce à une condition : ne pas changer de mer.

Qu'en est-il de l'action politique ? J'ai un peu l'impression de voir le négatif de ce que revendique Google : je ne vois que des plans d'action à un, deux ou cinq ans, mais je ne vois ni vision, ni stratégie. Tous les raisonnements, tous les projets sont emportés par les vagues de l'incertitude : comme ils ne visent aucune mer, ils sont le jouet des aléas et ne construisent que bien peu.
Choisir une mer qui viendrait fixer l'objectif de l'action collective, supposerait de réussir un diagnostic complexe : comprendre quels sont les mondes vers lesquels nous pouvons aller et quel est celui que l'on vise. Au lieu de cela, nous regardons couler l'eau et nous nous posons la question d'où elle vient : comment savoir où va la Seine en la regardant couler ? Et nous oscillons d'un méandre à l'autre…

4 févr. 2010

ON CHOISIT SA MER POUR LA VIE

Une stratégie qui coule de source

Paradoxalement, dans le monde de l'incertitude, on choisit sa mer pour la vie… toute la vie. La mer n'est pas un objectif que l'on se fixe pour les cinq ou dix à venir, c'est un horizon, situé à l'infini, qui va guider et apporter du sens aux actions de l'entreprise aujourd'hui et demain : L'Oréal vise la beauté depuis le début 70, Air Liquide s'intéresse au gaz depuis plus de cent ans, et Google n'envisage pas de se centrer sur un autre thème que l'information.

Pourquoi une telle stabilité ?
D'abord parce qu'elle est possible. Une mer est un attracteur stable dans le chaos du monde, un besoin fondamental et stable qui, quels que soient les aléas, va structurer le fonctionnement de notre société à long terme, orienter les évolutions, et attirer vers lui les courants. C'est un des éléments constitutifs de notre écosystème social. Des exemples ? La beauté, la communication, les loisirs, le déplacement, l'alimentation, la sexualité, l'énergie, un composant de la matière… Plus le rattachement sera direct, plus l'attraction sera forte et stable, plus la mer profonde et vaste. Donc les mers sont et seront toujours là. Si elles venaient à disparaître, ce ne seraient plus des mers.
Ensuite parce que, comme un fleuve se renforce au fur et à mesure qu'il progresse, une entreprise ne peut pas changer de mer sans « repartir de zéro ». Au début, une entreprise n'a qu'une intuition de la mer qui lui convient et de comment elle peut contribuer à apporter des solutions nouvelles facilitant l'accès à cette mer. C'est petit à petit qu'elle va développer une compréhension fine, créer des offres de mieux en mieux adaptées, créer des réseaux multiples, développer des savoir-faire internes…

Enfin parce que c'est cette mer qui donne le sens à l'action collective et soude les équipes internes. Changer de mer, ce n'est pas seulement changer de stratégie, c'est changer d'identité. Changer de mer, c'est risquer de ne pas être compris et suivi, de voir éventuellement même éclater l'entreprise. En fait, changer de mer, c'est changer l'entreprise : quand BSN est passée du verre à l'alimentation et la santé, elle est devenue Danone, qui n'est pas la transformation de BSN, mais une nouvelle entreprise.

Aussi ne choisit-on pas sa mer sur un coup de tête : cela doit être le résultat d'un processus long et approfondi. Souvent ce choix a été fait dès la naissance de l'entreprise et s'est trouvé progressivement confirmée par le renforcement de l'entreprise. Dans ce cas, on a choisi sa mer comme l'eau d'un fleuve : la source a imposé la mer.

3 févr. 2010

GOOGLE N’A PAS DE PLANS À 5, 2 OU 1 ANS

Viser une mer et agir au présent

Dans une interview paru en juin 2009 dans Wired MagazineEric Schmidt, PDG de Google, disait : « Google est peut-être au cœur de ce futur, mais il n'y a pas de grand plan. (…) Nous n'avons pas de plan à cinq ans, nous n'avons pas de plan à deux ans, nous n'avons pas de plan à un an. Nous avons une mission et une stratégie, et la mission est…, vous savez, d'organiser l'information du monde. Et la stratégie est de le faire à travers l'innovation. Cela ne nous ennuie pas si quelque chose ne marche pas. Parce que nous comprenons que quelque chose d'autre marchera. »

Ainsi comme L'Oréal, sa stratégie se résume au choix d'une mer, la beauté pour L'Oréal (voir mon article d'hier), l'information du monde pour Google. Dans les deux cas, le même choix : privilégier l'innovation pour l'atteindre.

De même Nestlé avec la nutrition et la santé (mer aussi visée par Danone), Saint Gobain avec l'habitat, Total avec l'énergie ou Air Liquide avec le gaz …

2 févr. 2010

L’ORÉAL ET LA MER DE LA BEAUTÉ

Parce que cela le valait bien !

Si vous demandez à L'Oréal de définir sa stratégie, il va répondre la beauté de la femme, et plus récemment celle de l'homme. La beauté est bien une mer, car elle est un besoin fondamental et stable qui, quels que soient les aléas, va structurer le fonctionnement de notre société à long terme, orienter les évolutions, et attirer vers lui les courants. En quoi L'Oréal contribue-t-il à nous rapprocher de cette mer ? En proposant des innovations dans le domaine de la peau, du cheveu et du parfum, et mobilisant ainsi trois de nos cinq sens : la vue, le toucher et l'odorat.

Ce choix date du début des années 70. Il n'était alors ni simple, ni évident. L'Oréal aurait tout aussi bien pu, vu sa position dans les shampooings et les savons, choisir l'hygiène et la propreté. Une fois le choix fait, cela s'est traduit par un acte majeur : il a vendu Monsavon à Procter & Gamble. Or, Monsavon avait été racheté par L'Oréal en 1928, et avait servi de support à toute l'extension du groupe dans le secteur grand public. La raison sociale du groupe a même été L'Oréal-Monsavon. La cession de Monsavon constituait une rupture avec le passé et la concrétisation de la stratégie. En 1964, L'Oréal a racheté Lancôme qui était une PME (créée en 1935 par Armand Petitjean, un parfumeur parisien) et a assuré son expansion.

Depuis, pour viser la beauté, L'Oréal a multiplié les produits, les marques, les circuits de distribution. Cette redondance peut sembler une sous-optimisation, un manque de productivité, elle est surtout une assurance contre les aléas : si le circuit des ventes via les pharmacies se développe plus vite que via les parfumeries, L'Oréal est là. Si c'est celui de la vente directe, L'Oréal est là encore. Si ce sont les produits naturels qui ont le vent en poupe et supplantent ceux qui revendiquent d'abord une performance technique, L'Oréal est toujours là. Plus il y aura de chemins possibles pour aller vers la mer, plus on aura de chances de l'atteindre effectivement, plus « l'histoire coulera de source ». C'est la redondance qui va apporter souplesse et résilience.

Ainsi année après année, sans remettre en cause la mer visée, jouant des opportunités qui se présentent, l'Oréal se renforce et est devenue le leader mondial dans le champ visé.

Pourquoi donc L'Oréal s'en est-il tenu à ce choix, a-t-il multiplié les voies d'accès, a-t-il aligné ses actes ? Parce que cela le valait bien !

1 févr. 2010

POURQUOI LE DOCTEUR HOUSE RÉUSSIT-IL SES DIAGNOSTICS ?

Les cinq clés de la réussite

La série TV « Docteur House » met en scène, à chaque épisode, un diagnostic médical quasiment impossible : chaque fois, un patient présente un ensemble de symptômes apparemment contradictoires, et tous les tests viennent successivement éliminer les hypothèses faites. In fine, comme un magicien, le docteur House va trouver la solution, celle qui réunit tous les faits et va résoudre le cas.

Comme émerge cette solution ? Si j'analyse le déroulé du diagnostic, je trouve toujours : 
- Une confrontation constante au sein de l'équipe : Chacun est tenu de formuler à haute voix ses hypothèses, d'expliquer ce qui les sous-tend et d'accepter l'exercice de démolition venant du reste de l'équipe, et souvent de House lui-même.
- Un recueil large des faits qui va bien au-delà du classique questionnaire médical : Tous les éléments de contexte, y compris via une fouille de l'appartement du malade, sont collectés.
- Des tests successifs : Toute hypothèse est immédiatement testée, même si elle n'est pas certaine. Il suffit qu'elle soit envisageable, c'est-à-dire possible pour être vérifiée.
- Du temps passé à « ne rien faire » : L'essentiel de l'activité de House n'est pas planifiée, ni affectée à une recherche opérationnelle. Il passe son temps à discuter, critiquer les personnes qui l'environnent, jouer avec un balle, regarder une émission de télévision.
- Une solution qui vient d'ailleurs : La solution émerge toujours à partir d'une analogie externe. Confronté à une situation de la vie courante, House va y trouver la clé qui lui permet de relier les faits et comprendre ce qui lui échappait. De plus, pendant tout l'épisode, House va veiller à s'impliquer au minimum dans la relation au patient. Il est intensément au courant des faits, mais il reste ailleurs, à distance.

Voilà cinq points à garder en mémoire pour tout diagnostic complexe… On n'est toutefois pas obligé d'avoir un comportement aussi pénible que celui de House !


29 janv. 2010

ARRÊTONS DE DÉBATTRE À PARTIR DE FAUX HORIZONS ET D’INDICATEURS QUI N’EN SONT PAS

______ Éditorial du vendredi ________________________________________________________________

Rappel du patchwork de la semaine :
- Lundi : Où l'on voit que Yoda, celui qui est grand sans être un guerrier, peut être la source d'une discussion étonnante avec un douanier français. 
- Mardi : Nous sommes trop nombreux et trop connectés pour nous penser indépendants les uns des autres. Résultat pris dans l'effet cumulé de nos actes individuels, et dans des boucles de rétroactions multiples, nous sommes condamnés au flou. Au mieux, nous pouvons dessiner des possibles.
- Mercredi : Patchwork issu du livre Crise & Mutation, où les questions sur les marques et la consommation viennent s'entrechoquer avec celles sur le sens et la relation au monde. Avec une conclusion : « L'instant présent est tout ce qui nous reste. »
- Jeudi : Qu'y a-t-il entre le flou du long terme et la netteté du présent immédiat ? Rien. Le moyen terme est un horizon inutile et dangereux. Il faut en même temps se penser au futur et agir intensément au présent, et c'est tout.
Ainsi mon billet de jeudi vient-il en contre-point de mon patchwork de la veille : à la différence de Jean-Pierre Crépin et de Charles Antoni (les auteurs de Crise et Mutation), je ne crois pas que l'instant présent soit tout ce qui nous reste. Nous avons aussi la possibilité de comprendre et sentir vers quoi vont les évolutions et quelles sont les mers qui nous attirent. Nous ne sommes pas condamnés à n'être que le jouet des courants.

Quand j'analyse la plupart des débats politiques actuels, je vois qu'ils tombent dans le danger de l'horizon à moyen terme, cet horizon inutile et dangereux. A quoi bon débattre des heures et des jours sur des prévisions à 2 ou 3 ans ?
Ne serait-il pas plus pertinent de se poser collectivement la question de la mer que nous voulons viser ? Dans quel type de société voulons-nous vivre ? Pouvons-nous sortir de notre jungle et cesser de nous organiser sur nos antagonismes ? Comme pour un fleuve, ce n'est pas en partant de la situation actuelle et des courants immédiats, que l'on pourra trouver notre mer et penser notre futur collectif…
En parallèle, pourquoi ne pas analyser intensément la situation actuelle et ce sans préjugés, ni a priori ? A quoi cela sert-il de débattre, pendant des jours et des heures, de chiffres qui n'ont pas d'autre sens que d'être le résultat d'un calcul ? Ainsi comment peut-on parler de « taux de croissance » ou de « taux d'inflation » sans comprendre qu'ils ne représentent pas une réalité, mais juste un calcul, et que, ce faisant, ils nous masquent le réel et nous en écartent…

28 janv. 2010

SE PENSER AU FUTUR, AGIR AU PRÉSENT ET C’EST TOUT !

Ne pas faire de plan à moyen terme

Au-delà de l'horizon du flou, impossible de prévoir ce qui va se passer : au mieux, je peux dessiner des possibles, les organiser dans des scénarios, mais je ne saurai jamais les probabiliser. Trop d'incertitudes, trop d'interférences, Trop de cygnes noirs. (voir « Nous n'aimons pas l'incertitude »« Vive les recettes de cuisine » et « Seuls les paranoïaques y arriveront… »). Je dois seulement chercher quelles sont les mers qui vont attirer le cours des fleuves.
En deçà de cet horizon, je peux prévoir et calculer : je construis des plans d'action, élabore des budgets, répartis les moyens. A quelle échéance commence l'horizon du flou ? De plus en plus tôt car le flou progresse et s'avance vers nous. Pour la plupart des secteurs, il se situe autour de l'année.

Et entre les deux, entre le choix des mers que je vais viser et mes plans d'action immédiats, y a-t-il un horizon intermédiaire ? Puis-je dessiner des plans à moyen terme ? Puis-je m'organiser à l'avance ? 
Non, ce serait non seulement inutile, mais dangereux.
Inutile, car je ne peux pas savoir ce qui va se passer, alors pourquoi passer du temps à faire des plans qu'il faudra refaire ?
Dangereux, car je serai moins disponible pour lire ce qui va advenir réellement, mes plans venant comme un prisme déformer ma lecture de la réalité.
Dans le monde de l'incertitude, il faut simultanément se penser au futur et agir intensément au présent. C'est tout… et c'est déjà beaucoup !

Mais comment peut-on alors articuler plan d'action immédiat et mer visée ? Bonne question. Je vous apporterai ma réponse prochainement…

27 janv. 2010

« CONSOMMATION ET RELIGION SE MARIERONT-ELLES POUR DONNER NAISSANCE AU BURKING (STRING SOUS LA BURKA) ? »

Quand l'économie rencontre la philosophie…

Vendredi soir, à l'occasion de la sortie de son livre, j'ai retrouvé Jean-Pierre Crépin, un ami perdu de vue depuis plus de dix ans. Ce livre court et tendu, préfacé par la philosophe Paule Orsoni, est écrit à deux voix : c'est un dialogue entre Jean-Pierre et Charles Antoni, le premier parlant depuis l'économie et la consommation, le deuxième depuis la philosophie et la réflexion sur le sens.
Une occasion de vous livrer un nouveau patchwork personnel issu de leurs réflexions…
Marques, consommation et croissance
« Les banlieues où la barbarie côtoie l'amour des Marques en sont l'illustration car, comme tu le sais, dans les démocraties de marché, le bonheur des citoyens dépend de la consommation qui dépend de la croissance économique qui dépend de la consommation qui dépend elle-même du bonheur des citoyens. La boucle est bouclée… »
« C'est toute la difficulté d'Olivier Besancenot (fonctionnaire révolutionnaire), hostile à la société de consommation, de porter un message dans des territoires de marques extrêmement forts comme le sont les banlieues. Sous cet angle, il est donc légitime que l'expression d'une révolte sociale se solde par un pillage de magasin de chaussures. En cela nous pouvons considérer que nous avons assisté à la Gare du nord à une émeute consumériste révolutionnaire menée par des gens qui n'avaient plus accès à la culture Nike et Adidas. »
« Que nous aura laissé cette époque mémorable où la consommation des démocraties de Marché se sera heurtée de plein fouet à la religion des républiques islamistes et au terrorisme ? D'immenses interrogations comme : le port du string fait-il partie des droits de l'homme ? J'exagère à peine… En quoi le port du string libère-t-il la femme par rapport au port de la Burka ? Sur la tête ou sur le sexe, ces morceaux de tissus ne sont-ils pas que l'expression d'une domination masculine visant à réduire la femme à un statut d'objet sexuel ? (…) Consommation et religion se marieront-elles pour donner naissance au Burking (string sous la Burka) ? »
« Si l'on avait réellement souhaité cesser d'importer de la pauvreté, peut-être aurait-il fallu exporter de la richesse… cela tombait sous le sens et c'était le prix de la mondialisation heureuse. Aucune démocratie de Marché ne l'a fait. Toutes connaîtront des émeutes consuméristes avec pillage de magasins. »
« Ce ne sont pas les entreprises qui produisent trop, ce sont les consommateurs qui n'achètent pas assez. Ainsi fonctionnent les sociétés avancées et c'est à cela que servait le bonheur payable à tempérament : à garantir la cohésion sociale en assurant la croissance. »
« Car au fond, cette frénésie de la consommation exacerbée et orchestrée à grande échelle est habitée par l'ennui… et il s'agit « de consommer jusqu'à se consumer ». Épuisement total : des richesses naturelles et de nous-mêmes. Sauf qu'une question d'importance se pose sur le sort de ce monde… Faut-il au juste le sauver ? » (Paule Orsoni dans la préface)

Travail et plaisir ?
« Les hommes travaillent généralement trop pour pouvoir rester eux-mêmes. Le travail : une malédiction que l'homme a transformée en volupté. (…) Il est significatif que le travail en soit venu à désigner une activité purement extérieure : aussi l'homme ne s'y réalise-t-il pas – il réalise… » (Sur les cimes du désespoir de Cioran) 
« Bref, ceux qui ne travaillent pas s'ennuient, ceux qui travaillent s'ennuient également. Tous parlent du travail comme une activité extérieure à eux-mêmes… »
Langage, pensée et sens
« Il en est d'ailleurs ainsi pour presque tous les mots qui finissent par ne plus rien signifier. La perte de la langue est le signe avant-coureur de la fin d'une civilisation. »
« Le langage, en conséquence, n'est plus utilisé pour la médiation mais pour la représentation. »
« Nous savons que la pensée est la plus grande force qui nous ait été donnée : employons-la. Penser sa vie au lieu de laisser les pensées nous diriger en toutes circonstances : c'est ce que l'on pense qui produit la réalité finale. »
« Alors, il se rend à la certitude et à l'évidence, que ce qui est connu par lui n'est ni le soleil ni la terre mais ce n'est jamais qu'un œil voyant le soleil, une main touchant une terre, que le monde environnant n'existe qu'à titre de représentation, c'est-à-dire seulement en rapport avec quelque chose d'autre : avec ce qui se représente, à savoir l'homme lui-même. » (Le Monde comme Volonté et comme représentation de Schopenhauer). 
« Le monde est tel que nous sommes et non tel qu'il nous semble être. C'est nous-mêmes qui créons le monde que nous percevons. Rien n'existe à l'extérieur de nous. C'est l'Univers qui est en nous, et non pas nous qui sommes dans l'Univers. » 
« L'instant présent est tout ce qui nous reste. »

26 janv. 2010

L’INCERTITUDE DE NOTRE NEUROMONDE : HYPER-CONNEXION, HYPER-DÉPENDANCE ET HYPER-FLOU

Tout est dans tous et réciproquement

Depuis qu'elle est apparue, la vie avance de possibles en possibles, et, plus l'univers s'est développé, plus il s'est complexifié et moins on peut facilement prévoir les évolutions futures : trop d'interactions entre trop de paramètres, trop de phénomènes régis par des lois du chaos et impossibilité de connaître parfaitement les conditions initiales, présence de la vie et de l'auto-organisation, capacité du monde animal à construire des stratégies adaptatives, apparition de l'homme et de son libre-arbitre, …
Dernièrement avec les technologies de l'information, cette hypercomplexité a franchi un nouveau stade : tous connectés, nous sommes tous codépendants. De plus, nous sommes six milliards d'êtes humains et bientôt neuf. 
Dans le même temps, « notre savoir-faire s'adonne, de plus, depuis un temps assez récent, au façonnage des objets-monde. Un satellite, pour la vitesse, une bombe atomique, pour l'énergie, l'Internet, pour l'espace, les résidus nucléaires pour le temps... voilà quatre exemples d'objets-monde. » (Michel Serres, Hominescence). Aussi l'impact de chacun de nous est-il : grâce aux « objets-monde », il suffit de quelques hommes pour agir sur le monde tout entier. 
Résultat, comme l'écrit toujours Michel Serres (cette fois dans le Temps des crises), « nous dépendons enfin des choses qui dépendent de nous. (…) Ladite mondialisation me paraît aujourd'hui au moins autant le résultat de l'activité du Monde que des nôtres. » Qu'est-ce à dire ? Que nous sommes pris dans les mailles de l'effet de nos propres actes, que la boucle d'interaction entre l'action et ce sur quoi on agit devient prépondérante. Témoin les débats actuels sur le climat et le réchauffement de la Terre, l'eau, la pollution, l'énergie…

Conséquence, l'horizon du flou se rapproche et il devient de plus en plus aléatoire de voir précisément au-delà d'un horizon proche. Très vite, nous ne pouvons prévoir que les grandes tendances, et plus les évolutions précises… et encore.
Plutôt que parler d'horizon de flou, je devrais parler de flou progressif : plus je m'écarte du présent, moins je vois clair. A un moment, le flou est tel que je ne perçois plus que les grandes lignes.
Plus rien n'est certain. Au mieux, nous pouvons probabiliser des scénarios d'évolution, mais, le plus souvent, nous ne pouvons que les dessiner. Et de plus en plus, nous sommes dans le flou total : impossible même de dessiner des scenarios d'évolution…

25 janv. 2010

DANS QUELLE CATÉGORIE, METTRE UN YODA ?

Est-ce une œuvre d'art, un jouet ou seulement un objet en latex ?

« Dans quelle catégorie, allons-nous bien pouvoir le mettre? Vous me dites que c'est un Yoda. Mais qu'est-ce que c'est au juste un Yoda ? »
Celui qui venait de me poser cette question étrange était un fonctionnaire chargé du dédouanement à l'aéroport d'Orly. Pourquoi venait-il de me la poser ?

Parce que je suis un fan de la Guerre des Etoiles, et surtout de Yoda (voir « Que la force soit avec toi » et  « Non, Ronald Mc Donald n'est pas un Jedi ! ».  J'apprécie singulièrement deux répliques de Yoda faites lors de sa première apparition (dans le deuxième film qui est en fait le cinquième – les initiés comprendront …) :
- Lors de sa rencontre avec Luke Skywalker, celui-ci lui dit être à la recherche d'un grand guerrier. Alors Yoda lui répond en riant : « Ahhh ! Un grand guerrier. Personne n'est devenu grand grâce aux guerres. »
- Un peu plus tard, à Luke qui n'arrive pas à soulever par la pensée son aéronef enlisé dans les marécages, et qui a fini par lui avouer qu'il ne croît pas que ce soit possible, il lui dit : « C'est pourquoi tu échoues ».

Je suis suffisamment fan pour que, il y a plus de dix ans, à l'occasion d'un voyage aux États-Unis, j'ai fait l'acquisition d'un Yoda en latex, grandeur nature (ce qui restait d'une taille raisonnable, Yoda étant grand par la pensée et la force, mais pas par sa taille comme tout un chacun le sait… ou devrait le savoir). Comme je faisais un voyage professionnel avec plusieurs haltes, j'ai alors dû me le faire expédier à Paris.
Ce que je n'avais pas prévu, c'est qu'une fois arrivé, j'allais avoir à le faire dédouaner. Et me voilà donc dans ce bureau situé dans la zone de fret de l'aéroport d'Orly, ayant cette conversation quelque peu surréaliste, conversation dont l'objet était de déterminer dans quelle catégorie, on pouvait mettre un Yoda.
Mais était-ce un objet en caoutchouc, une œuvre d'art, un jouet … ? Par respect pour ce qu'il représentait, il ne pouvait être question d'accepter qu'il fut considéré comme un jouet.
Le fonctionnaire, amusé, fut conciliant et accepta de choisir finalement la catégorie pour lesquels les droits de douane seraient les moins élevés. Conscient du crime de lèse-majesté, mais voulant en finir, j'acceptais. 

Depuis ce Yoda, trône au-dessus de ma télévision…

22 janv. 2010

SANS COMPRÉHENSION NI VISION COLLECTIVES, NOUS RÊVONS D’UN PASSÉ, D’UN PRÉSENT ET D’UN FUTUR, TOUS TROIS IMAGINAIRES

______ Éditorial du vendredi ____________________________________________________________________________________

Rappel du patchwork de la semaine :
- Lundi : Toute interprétation est contingente. Si nous n'y prenons pas garde, nous cherchons dans ce que nous observons ce que nous croyons savoir. Aussi les mêmes faits ne seront-ils pas compris de la même façon, et seule une « approche d'historien » peut-elle s'approcher du réel.
- Mardi : En prenant appui sur le système Facom qui reposait sur un catalogue et des camions apparemment inutiles, on peut prendre conscience que des approches simplistes de productivité peuvent conduire à la mort : l'anorexie n'est pas une preuve de bonne santé.
- Mercredi : Nous naissons en continu et non pas seulement le jour de l'accouchement ou de la fécondation. Entreprises comme individus se composent sans cesse au hasard des rencontres, des décisions et des apprentissages. Notre identité est ce sentiment de continuité qui nous fait relier nos états passés à notre présent et notre futur possible.
- Jeudi : La vision et la compréhension des risques futurs ne doivent pas nous amener à rester dans notre landau. Fort de leurs expériences et de leurs expertises, entreprises comme individus, doivent sentir où sont les mers et se lancer dans le mouvement des flots qui les y conduisent.

Bon nombre des réflexions et travaux portant sur l'évolution de la société française pêchent par une mauvaise prise en compte de ces différents éléments :
- L'évaluation de l'efficacité des structures publiques : Bien peu d'analyses sont menées en prenant le soin d'une approche de type « historien » qui va s'en tenir au maximum aux faits et qui va confronter les points de vue. Souvent les analyses expriment les a priori de ceux qui les mènent, sans parler des manipulations… Attention aux approches simplistes de productivité : comme pour les individus et les entreprises, un État anorexique n'est pas un État en bonne santé. Nous sommes ainsi en déficit d'une compréhension commune et partagée de notre présent.
- La réflexion et le débat sur l'identité française : Ils tombent à tout moment dans le risque de vouloir figer cette identité, au lieu de la penser en dynamique. En quoi la notion même de France est-elle porteuse de sens pour demain ? Comment relier cette idée d'un futur, cette mer que collectivement nous visons, à notre passé ? Comment notre identité collective peut-elle nous aider à vivre cette transformation ? 
- Le principe de précaution : Nous sommes tellement en déficit d'adhésion à un projet collectif, nous ne savons tellement plus quelle mer viser, nous avons tellement peur du futur, que nous refusons collectivement de bouger tant que nous ne sommes pas certains de ne courir aucun risque. Faisons attention, car si cela continue, nous n'apprendrons plus les nouvelles « marches » nécessaires à notre évolution et nous nous anesthésierons dans le rêve d'un landau fictif et perdu.