Télescopages thaïlandais (1)
Retour en Thaïlande pour quelques télescopages aléatoires, des rapprochements insolites, des moments reconstruits par ma digestion mentale.
Une petite route serpente dans le Nord de la Thaïlande, entre Mae Salong et Mae Chan, au Nord de Chiang Rai. Une route un peu perdue, une bande de macadam qui est venue s’inviter au sein de la végétation luxuriante.
Pourquoi est-elle là ? De quel droit trouble-t-elle le vert qui l’entoure ? Comment les mains des hommes ont-elles pu se croire autorisées à procéder à une telle saignée ?
Aussi légitimement, chaque bribe de végétation, chaque plante, chaque racine la mange, la dévore et l’assimile. Déjà le gris est encerclé, et se dissout. La tache commence à s’effacer, et l’asphalte n’est plus qu’un goulot où une voiture se glisse à peine.
Encore quelques semaines, et tout sera redevenu en ordre. Dans un rot final, la nature finira l’absorption de ce qui n’aurait jamais dû être.
De Mae Hong Son, un bateau m’emmène vers un village lové au fond d’une vallée. Terre des Karen, ces réfugiés qui ont quitté il y a des années les terres inhospitalières de la Birmanie voisine.
Là, se trouve un collège chrétien, et, à ma grande surprise, me voilà spectateur d’une fête des enfants. Habillés d’un short bleu et d’une chemise blanche, ils exécutent, sagement et veillant à respecter une chorégraphie probablement longuement apprise, des mouvements de danse sans liens clairs avec leurs origines.
Les parents sont tout autour et les observent. Rite habituel et sans frontières du plaisir de voir sa progéniture devenir, le temps d’un spectacle, les héros de la fête. Les enfants ne sont pas en reste, et loin de tout folklore et de toute nostalgie, s’amusent et se contorsionnent. (voir la vidéo ci-dessous)
Parmi la foule des parents, certaines femmes arborent fièrement des colliers qui étirent et soulignent leurs cous. C’est la tradition de cette tribu, les Karen aux longs cous. Certaines adolescentes ont commencé à superposer ces cercles.
Un peu plus loin, dans les ruelles du village qui domine l’école, mon regard s’arrête sur l’une d’elles. Il émane une force et une joie étranges de sa silhouette insolite.
Je ne sais pas d’où vient cette tradition, et ne veut pas l’apprendre. Je préfère rester dans le vide de l’observation et dans le rêve de mon imagination. Je vois des nuits où la tête se rétrécit pour pouvoir se glisser dans ces anneaux… à moins que ce ne soit eux qui se dilatent.
J’aime la beauté des cous allongés et sertis. Comme nos colliers me semblent vains et ridicules, face à la magie de cet échafaudage doré !
2 commentaires:
Et voilà!Recommencement accompli des "téléscopages" .Sortir des chemins tracés et tomber,comme tu le fais,sur la route aux enfants !N'est-ce pas un bon commencement?Amitiés françaises et tous mes encouragements au voyage ainsi qu'au récit dont il fait l'objet,sous ta plume(informatique)
Merci... Cette été, mon errance va me ramener dans les terres d'Asie. Cette fois la mégapole de Singapour, puis les Philippines. Occasion de nouvelles rencontres, de nouveaux télescopages, autant de nourriture pour des écritures futures...
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