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10 déc. 2013

PENSER À PROPOS DE NOUS-MÊMES

L’individu humain : le futur anticipé (1)
Depuis longtemps, bon nombre d’entre nous se croient le but de la création : ce monde que nous habitons aurait été fait pour nous, et nous en serions non seulement les habitants, mais la finalité et la justification. L’emploi du mot « environnement » est un témoin de la domination de cette croyance : quand nous commençons à nous préoccuper de l’avenir de notre planète, le mot que nous employons ne nous définit par comme un de ses composants parmi d’autres, mais comme le cœur. A l’instar des Chinois qui habitent le « pays du milieu », nous nous pensons au centre du monde. 
Pourquoi donc refuser la logique de l’évolution ? Est-ce si difficile de ne pas nous penser comme la justification de ce qui nous a précédé, et de nous voir comme une étape dans ce processus, un animal de plus, un « animal plus »… en attente d’une suite qui a déjà probablement commencé
Mais si nous sommes nés des temps du minéral, du végétal et de l’animal, si en nous se développent l’incertitude, les emboîtements et les émergences, cet « animal plus » que nous sommes n’est pas un animal parmi d’autres : notre puissance est sans commune mesure, et c’est grâce à elle que nous avons assis notre suprématie sur notre planète… au moins jusqu’à présent.
D’où vient donc cette puissance ? Quelles sont les subtiles différences qui, tout en nous inscrivant dans la continuité de ce qui nous a précédé, lui ont permis d’émerger et de se propager ?
Maurice Merleau-Ponty voit en l’homme une conscience qui se construit : « L'homme n'est pas d'emblée une conscience qui possède dans la clarté ses propres pensées, mais une vie donnée à elle-même qui cherche à se comprendre elle-même. »  (1)
Vladimir Nabokov répond ainsi : « Être conscient d’être conscient d’être… Si je sais non seulement que je suis, mais également que je sais que je le sais, alors j’appartiens à l’espèce humaine. Tout le reste en découle. ». (2)
Et Siri Hustvedt complète : « A mon avis, il est absurde de prétendre que le rat n’est conscient ni du son ni du choc. (…) Ce qu’il ne possède pas, c’est le niveau le plus élevé de conscience de soi des humains. (…) Il ne dispose pas d’un narrateur interne qui lui raconte l’histoire de ses aventures dans le labo avec ses savants gargantuesques producteurs des sons et de désagréables chocs électriques. »  (3)
Serions-nous juste des animaux capables de penser à propos d’eux-mêmes ?
(1) Maurice Merleau-Ponty, Sens et non-sens, p.82
(2) Vladimir Nabokov, Strong Opinions, 1973, traduction issue du cours 2011 de Stanislas Dehaene au Collège de France
(3)  Siri Hustvedt, La femme qui tremble, p.132
(extrait des Radeaux de feu)


17 juin 2011

COMMENT MATÉRIALISER LES DÉCALAGES A L’INTÉRIEUR DE L'ENTREPRISE

Le Miroir Management, un outil pour évaluer les décalages internes
(reprise des 3 articles parus cette semaine et présentant le Miroir Management)

Le Miroir Client, présenté la semaine dernière, cherchait à matérialiser les écarts entre ce que pensent les clients, et ce que l'entreprise croit qu'ils pensent.
Et pour le management, ne serait-il pas aussi intéressant de matérialiser les écarts éventuels à l'intérieur de l'entreprise quand on passe d'un service à l'autre, ou quand on se déplace au sein de la chaîne hiérarchique ? Comment évoluent la compréhension des objectifs, le niveau d'engagement… ?
Il y a quelques années, pour mettre en lumière ces décalages éventuels, j'avais mis au point pour une grande banque un Miroir Management. 

Comment avait-été structurée la démarche ?
Au travers d'un questionnaire, on s'était intéressé à trois paramètres :
  • La compréhension des objectifs de l'entreprise et la perception des enjeux,
  • Le niveau de support et d'équipement,
  • L'engagement et la volonté d'agir
Quel est le sens de chacun de ces trois points et pourquoi avoir choisis ceux-là plutôt que d'autres ?
  1. Comme j'ai eu souvent l'occasion de l'expliquer sur ce blog ou dans mes livres, la compréhension partagée des enjeux et des objectifs est essentielle pour assurer la cohésion de l'entreprise et la synchronisation des initiatives individuelles. Ces enjeux et objectifs sont le plus souvent exprimés par la direction de l'entreprise, parfois comme résultat d'un processus impliquant largement l'entreprise, mais malheureusement rarement.
    Que se passe-t-il quand on circule dans l'entreprise ? Constate-t-on une rupture ou au contraire ils sont largement partagés par tous ?
  2. Pourquoi parler ensuite de niveau de support et d'équipement ? Puis-je vous poser une question simple : même si vous avez compris que l'on attend de vous que vous sautiez d'un avion, allez-vous le faire si vous n'avez pas de parachute, ni appris à vous en servir ? Non, n'est-ce pas…
    Eh bien, il en est de même au sein d'une entreprise : il est utile de mesurer comment les membres de l'entreprise se sentent « outillés » pour atteindre les objectifs fixés. Il s'agit de mesurer là non le niveau d'équipement réel, mais la perception qu'ils en ont, car c'est elle qui va soutenir ou entraver leur action personnelle.
  3. Engagement et volonté d'agir sont clairement essentiels. Mais pourquoi les évaluer en tant que tels ? Ne sont-ils pas naturellement la résultante des deux précédents ? Non l'expérience montre que l'on peut tout à fait avoir compris ce que l'on attend de vous, se sentir équipé et ne pas vouloir agir, par exemple parce que l'on n'adhère pas réellement aux objectifs, ou parce que l'on a d'autres priorités personnelles.
    Analyser comment évolue cette volonté de passer à l'acte tout au sein de l'entreprise va matérialiser la capacité réelle de l'entreprise à agir localement.
Dans son mode de déroulement, la démarche Miroir Management relève de la même logique que celle du Miroir Client :
  • Un questionnaire structuré autour des trois thèmes (compréhension, équipement, engagement) : le questionnaire est construit à partir des objectifs poursuivis de l'entreprise et déclinés en items simples sur lesquels on demande de se positionner. Toutes les questions sont mélangées, c'est-à-dire que l'on ne pose pas de façon séquentielle pour un même item, les questions portant sur la compréhension, puis l'équipement, enfin l'engagement.
  • Une mise en forme simple (voire photo ci-jointe) où l'on regroupe tous les questions appartenant au même item et en faisant apparaître le niveau pour les trois paramètres. Sur un même tableau, sont agrégées toutes les réponses d'une population donnée (un service, une fonction, un niveau hiérarchique, …).
  • Lors de la restitution, on laisse l'équipe analyser les résultats et bâtir son propre plan d'actions.
Afin de faciliter l'animation et la compréhension de l'outil, on s'était « amusé » à caricaturer quelques situations (voir les graphes correspondants dans l'illustration) :
  • Le Kamikaze : il a tellement adhéré aux objectifs que, même sans aucun équipement, il s'engage. Il n'a peur de rien, même pas du saut sans parachute.
  • Le Parasite : il consomme des ressources, mais ne comprend pas ce qu'on attend de lui, et ne s'engage pas. Il consomme pour rien, ou plutôt pour son seul plaisir.
  • Le Touriste : il ne comprend pas ce que l'on attend de lui, ne consomme pas de ressources et ne s'engage pas. Il est de passage. A noter que, si l'on arrive à transformer un Parasite en Touriste, on n'améliore pas le niveau d'engagement, mais on diminue la consommation des ressources…
  • L'Utilitaire : il ne comprend pas bien ce que l'on attend de lui, mais se sentant équipé, il s'engage. S'il a un tournevis, il dévisse ; s'il a un marteau, il enfonce des clous…
  • L'Opposant : il comprend ce que l'on attend de lui et se sent équipé, mais il ne s'engage pas. Plus il a de ressources, plus il est content de les détourner…
  • Le Démuni : il comprend ce que l'on attend de lui, mais ne se sent pas équipé et ne s'engage pas. Il aimerait bien, mais il ne peut pas…
Notons bien que ces situations type ne sont que des caricatures, et que la relation entre compréhension, équipement et engagement est beaucoup plus complexe.

Et concrètement, en quoi ceci a-t-il été utile pour cette banque ? …

La démarche Miroir Management a été déployée dans toutes les activités françaises de banque de détail de ce grand établissement bancaire. Ceci a été fait au moment de la mise en œuvre d'une organisation spécialisée par marché (séparant les marchés entreprises, professionnels et particuliers). La Direction Générale voulait :
  • Vérifier la bonne compréhension des objectifs poursuivis par ce changement d'organisation, 
  • Définir les modes de fonctionnement à mettre en place 
  • Préciser le rôle de chacun.
Elle a permis de mettre en évidence une bonne compréhension globale des objectifs, mais l'existence d'une rupture se situant au niveau de l'encadrement intermédiaire : en deçà de ce niveau, l'intensité de l'engagement chutait. Ceci était directement corrélé avec un déficit perçu en « niveau d'équipement » : le personnel en agence avait en effet bien compris ce que l'on attendait de lui et était bien prêt à s'engager, mais il se sentait démuni face aux clients et en attente de soutien pour l'aider à atteindre ses objectifs commerciaux.

En conséquence, la mission principale du management intermédiaire, celui situé entre le directeur d'agence et le directeur régional, a été recentrée sur le soutien et le support aux agences :
  • Évaluation des savoir-faire, 
  • Définition du plan de formation et suivi,
  • Déclinaison des outils et méthodes de l'entreprise auprès des agences.
De plus, comme la démarche se déroulait Direction régionale par Direction Régionale, elle était décentralisée et pilotée par le Directeur Régional. Ceci a permis une adaptation fine aux situations locales et une implication de toute la hiérarchie locale.
Les plans d'actions n'ont pas été imposés, ni définis uniformément : lors de la restitution, chaque unité était mis face à la photographie prise et aux écarts éventuels, chacun les analysant, les explicitant et bâtissant un plan d'action. L'équipe en charge du projet n'avait qu'un rôle de support et d'animation pour aider à cette réflexion, mais ne menait pas l'analyse à la place des acteurs de l'entreprise : chaque unité prenait ainsi conscience par elle-même de la situation.

16 juin 2011

LE MANAGEMENT INTERMÉDIAIRE MOBILISÉ POUR NE PLUS LAISSER LES AGENTS DÉMUNIS FACE AUX CLIENTS

Le Miroir Management, un outil pour évaluer les décalages internes (3)

La démarche Miroir Management a été déployée dans toutes les activités françaises de banque de détail de ce grand établissement bancaire. Ceci a été fait au moment de la mise en œuvre d'une organisation spécialisée par marché (séparant les marchés entreprises, professionnels et particuliers). La Direction Générale voulait :
  • Vérifier la bonne compréhension des objectifs poursuivis par ce changement d'organisation,
  • Définir les modes de fonctionnement à mettre en place
  • Préciser le rôle de chacun.
Elle a permis de mettre en évidence une bonne compréhension globale des objectifs, mais l'existence d'une rupture se situant au niveau de l'encadrement intermédiaire : en deçà de ce niveau, l'intensité de l'engagement chutait. Ceci était directement corrélé avec un déficit perçu en « niveau d'équipement » : le personnel en agence avait en effet bien compris ce que l'on attendait de lui et était bien prêt à s'engager, mais il se sentait démuni face aux clients et en attente de soutien pour l'aider à atteindre ses objectifs commerciaux.

En conséquence, la mission principale du management intermédiaire, celui situé entre le directeur d'agence et le directeur régional, a été recentrée sur le soutien et le support aux agences :
  • Évaluation des savoir-faire,
  • Définition du plan de formation et suivi,
  • Déclinaison des outils et méthodes de l'entreprise auprès des agences.
De plus, comme la démarche se déroulait Direction régionale par Direction Régionale, elle était décentralisée et pilotée par le Directeur Régional. Ceci a permis une adaptation fine aux situations locales et une implication de toute la hiérarchie locale.
Les plans d'actions n'ont pas été imposés, ni définis uniformément : lors de la restitution, chaque unité était mis face à la photographie prise et aux écarts éventuels, chacun les analysant, les explicitant et bâtissant un plan d'action. L'équipe en charge du projet n'avait qu'un rôle de support et d'animation pour aider à cette réflexion, mais ne menait pas l'analyse à la place des acteurs de l'entreprise : chaque unité prenait ainsi conscience par elle-même de la situation.

15 juin 2011

IL PEUT ÊTRE UTILE DE TRANSFORMER LES PARASITES EN TOURISTES

Le Miroir Management, un outil pour évaluer les décalages internes (2)

Dans son mode de déroulement, la démarche Miroir Management relève de la même logique que celle du Miroir Client :
  • Un questionnaire structuré autour des trois thèmes (compréhension, équipement, engagement) : le questionnaire est construit à partir des objectifs poursuivis de l'entreprise et déclinés en items simples sur lesquels on demande de se positionner. Toutes les questions sont mélangées, c'est-à-dire que l'on ne pose pas de façon séquentielle pour un même item, les questions portant sur la compréhension, puis l'équipement, enfin l'engagement.
  • Une mise en forme simple (voire photo ci-jointe) où l'on regroupe tous les questions appartenant au même item et en faisant apparaître le niveau pour les trois paramètres. Sur un même tableau, sont agrégées toutes les réponses d'une population donnée (un service, une fonction, un niveau hiérarchique, …).
  • Lors de la restitution, on laisse l'équipe analyser les résultats et bâtir son propre plan d'actions.
Afin de faciliter l'animation et la compréhension de l'outil, on s'était « amusé » à caricaturer quelques situations (voir les graphes correspondants dans l'illustration) :
  • Le Kamikaze : il a tellement adhéré aux objectifs que, même sans aucun équipement, il s'engage. Il n'a peur de rien, même pas du saut sans parachute.
  • Le Parasite : il consomme des ressources, mais ne comprend pas ce qu'on attend de lui, et ne s'engage pas. Il consomme pour rien, ou plutôt pour son seul plaisir.
  • Le Touriste : il ne comprend pas ce que l'on attend de lui, ne consomme pas de ressources et ne s'engage pas. Il est de passage. A noter que, si l'on arrive à transformer un Parasite en Touriste, on n'améliore pas le niveau d'engagement, mais on diminue la consommation des ressources…
  • L'Utilitaire : il ne comprend pas bien ce que l'on attend de lui, mais se sentant équipé, il s'engage. S'il a un tournevis, il dévisse ; s'il a un marteau, il enfonce des clous…
  • L'Opposant : il comprend ce que l'on attend de lui et se sent équipé, mais il ne s'engage pas. Plus il a de ressources, plus il est content de les détourner…
  • Le Démuni : il comprend ce que l'on attend de lui, mais ne se sent pas équipé et ne s'engage pas. Il aimerait bien, mais il ne peut pas…
Notons bien que ces situations type ne sont que des caricatures, et que la relation entre compréhension, équipement et engagement est beaucoup plus complexe.
Et concrètement, en quoi ceci a-t-il été utile pour cette banque ? …

(à suivre)

14 juin 2011

ON SAUTE RAREMENT D’UN AVION SANS PARACHUTE…

Le Miroir Management, un outil pour évaluer les décalages internes (1)

Le Miroir Client, présenté la semaine dernière, cherchait à matérialiser les écarts entre ce que pensent les clients, et ce que l'entreprise croit qu'ils pensent.
Et pour le management, ne serait-il pas aussi intéressant de matérialiser les écarts éventuels à l'intérieur de l'entreprise quand on passe d'un service à l'autre, ou quand on se déplace au sein de la chaîne hiérarchique ? Comment évoluent la compréhension des objectifs, le niveau d'engagement… ?
Il y a quelques années, pour mettre en lumière ces décalages éventuels, j'avais mis au point pour une grande banque un Miroir Management.

Comment avait-été structurée la démarche ?
Au travers d'un questionnaire, on s'était intéressé à trois paramètres :
  • la compréhension des objectifs de l'entreprise et la perception des enjeux,
  • le niveau de support et d'équipement
  • l'engagement et la volonté d'agir
Quel est le sens de chacun de ces trois points et pourquoi avoir choisis ceux-là plutôt que d'autres ?
  1. Comme j'ai eu souvent l'occasion de l'expliquer sur ce blog ou dans mes livres, la compréhension partagée des enjeux et des objectifs est essentielle pour assurer la cohésion de l'entreprise et la synchronisation des initiatives individuelles. Ces enjeux et objectifs sont le plus souvent exprimés par la direction de l'entreprise, parfois comme résultat d'un processus impliquant largement l'entreprise, mais malheureusement rarement.
    Que se passe-t-il quand on circule dans l'entreprise ? Constate-t-on une rupture ou au contraire ils sont largement partagés par tous ?
  2. Pourquoi parler ensuite de niveau de support et d'équipement ? Puis-je vous poser une question simple : même si vous avez compris que l'on attend de vous que vous sautiez d'un avion, allez-vous le faire si vous n'avez pas de parachute, ni appris à vous en servir ? Non, n'est-ce pas…
    Eh bien, il en est de même au sein d'une entreprise : il est utile de mesurer comment les membres de l'entreprise se sentent « outillés » pour atteindre les objectifs fixés. Il s'agit de mesurer là non le niveau d'équipement réel, mais la perception qu'ils en ont, car c'est elle qui va soutenir ou entraver leur action personnelle.
  3. Engagement et volonté d'agir sont clairement essentiels. Mais pourquoi les évaluer en tant que tels ? Ne sont-ils pas naturellement la résultante des deux précédents ? Non l'expérience montre que l'on peut tout à fait avoir compris ce que l'on attend de vous, se sentir équipé et ne pas vouloir agir, par exemple parce que l'on n'adhère pas réellement aux objectifs, ou parce que l'on a d'autres priorités personnelles.
    Analyser comment évolue cette volonté de passer à l'acte tout au sein de l'entreprise va matérialiser la capacité réelle de l'entreprise à agir localement.
Comment avaient été mise en forme les résultats et comment la démarche Miroir Management s'était-elle déroulée, c'est ce que nous verrons demain…

(à suivre)

10 juin 2011

COMMENT MATÉRIALISER L’ÉCART ENTRE CE QUE PENSENT LES CLIENTS ET CE QUE L'ENTREPRISE CROIT QU'ILS PENSENT ?

Le Miroir Client un outil simple pour matérialiser les écarts entre entreprise et client

- Je publie à nouveau, cette fois en une seule fois pour faciliter la lecture, les 4 articles parus cette semaine et relatif au Miroir Client -

Lors de mes derniers articles, j’ai insisté sur la difficulté de l’observation, et notamment du risque de voir l’entreprise développer un point de vue différent de celui du client (1), risque qui, paradoxalement, peut croître avec l’expertise interne de l’entreprise.
Comment peut-on agir ? Y a-t-il un outil simple dont toute entreprise pourrait se doter ?
La réponse que j’ai développée et  qui a été déjà mise en œuvre de multiples fois, et dans de grandes organisations, est le Miroir Client.
Avant de vous présenter de quoi il s’agit, je précise que cet outil n’a pas la prétention de résoudre à lui seul la totalité du problème posé, mais il a montré qu’il était un excellent déclencheur et permettait des progrès significatifs.
L’idée Miroir Client est née de la remarque suivante : ce qui détermine les actions de chacun, ce ne sont pas les priorités clients réelles, mais les priorités clients telles que vues et interprétées par l’organisation et son personnel ; s’il y a un décalage entre ce qu’attend le client et ce que croit l’entreprise qu’il attend, le centrage des actions sera inefficace. Il y a donc un intérêt à mettre en regard, comme par un effet miroir, ce que l’entreprise croit que le client pense et ce qu’il pense vraiment.
Quel est le principe du Miroir Client ? Il est de mettre en relief les décalages éventuels entre ce que pensent les clients et ce que l’entreprise croit que les clients pensent. 
Comment ?
  • Par l’élaboration d’un questionnaire partant du parcours client et, pour chaque item, demandant quel est son importance et quel est le degré de satisfaction,
  • Par l’administration de ce questionnaire d’abord à l’ensemble du personnel de l’entreprise (ou à un échantillon si l’entreprise est de grande taille), puis à un échantillon des clients. Au personnel, on demande d’indiquer non pas son opinion personnelle face à une question donnée, mais ce qu’il pense que sera la réponse du client.
  • Par, ensuite, la mise en forme des résultats sous forme très visuelle matérialisant les écarts ou les similitudes (voir la photo ci-jointe)
  • Par l’animation de la restitution, amenant des représentants de l’entreprise à auto-analyser les tableaux, et en veillant qu’ils n’esquivent pas les problèmes.
Est-ce que cela marche vraiment ? La réponse est oui ….

Il peut être rapidement mis en œuvre par l’entreprise elle-même, et être déployé partout
Une fois passée la phase initiale de mise au point du questionnaire et de la mise en forme des résultats, et de la formation d’une équipe interne, la démarche Miroir Client peut être réalisée sans l’appui de ressources externes, dans toutes les composantes de l’entreprise.
… et c’est donc un outil d’autodiagnostic décentralisé
Le questionnaire étant administré localement, chaque équipe – il ne faut en aucun cas en faire un outil d’évaluation individuelle – est mise face à la situation telle qu’elle est pour elle, et non pas de la moyenne de l’entreprise. L’expérience montre qu’il est alors – sauf de rares exceptions –, inutile d’argumenter longuement sur les actions à entreprendre. La seule matérialisation des écarts entre ce que l’équipe pensait et ce que le client pensait vraiment va déclencher un changement des comportements.
C’est une démarche consolidante…
Pour la plupart des items, l’écart entre les points de vue est faible. En effet, si ce n’était pas le cas, l’entreprise serait complètement décalée par rapport aux attentes du client, et serait donc déjà sortie de son marché(2). Ce fait, à chaque démontré, qu’à environ 80/90%, il y a adéquation favorise l’adhésion à la démarche et consolide les équipes.
… qui permet d’optimiser les efforts et les allocations de ressources
Le Miroir Client met en relief à la fois les cas où l’entreprise sous-investit sur un sujet (soit en sous-estimant l’importance de l’item, soit en surestimant la satisfaction du client, soit cas le pire, les deux à la fois) ou surinvestit (pour des raisons symétriques). Comme le Miroir Client est déployé localement, cette optimisation est fine et précise, et n’est pas imposée par le centre, ni par des visions moyennes.
Les illustrations de cet article sont tirées de cas réels (3).
Cette démarche peut être réalisée pour toute entreprise, quel que soit son domaine d’activités, grand public ou industriel. Le questionnaire est simplement évidemment très différent, et son mode d’administration aussi. Notamment en milieu industriel, comme le client est lui-même une entreprise, et donc une organisation complexe, il faut chercher à administrer le questionnaire à l’intérieur de l’organisation du client.

Voici deux exemples réels, issus d’une compagnie aérienne, entreprise dans lequel le Miroir Client a été intégré pendant de nombreuses années, comme un outil permanent d’une démarche qualité.
Pour la séquence à l’intérieur de l’aéroport, une divergence insolite a été le suivante : le personnel de l’entreprise était persuadé que les clients n’étaient pas satisfaits des toilettes de l’aéroport, alors que les clients pas du tout. Lors de la restitution de ce point, il était apparu que c’était en fait un problème de conditions de travail pour le personnel au sol …
Moins anecdotique, cette fois, il y avait un décalage important et plus complexe concernant le moment où, les passagers étant montés, l’avion est immobilisé sur la piste en attente du décollage. Ce temps d’attente était une source de mécontentement important pour les clients, mais uniquement ceux en classe économique, ce sans que le personnel n’en soit conscient.
Ces décalages ont permis de mettre en évidence que :
  • Les clients affaire ou première étaient occupés dès leur montée dans l’avion (journaux, proposition d’une boisson), et, étant des voyageurs fréquents, ils avaient l’habitude de ces temps d’attente, et n’étaient donc pas stressés.
  • A l’inverse, les clients en classe économique n’avaient rien à faire (une fois assis à leur place, personne ne s’occupait d’eux). De plus, bon nombre n’ayant pas l’habitude de voyager et ne connaissant pas les problèmes de régulation au niveau d’un aéroport, craignaient que, si le temps d’attente se prolongeait,  cela voulait dire qu’un problème était apparu sur l’avion. D’où stress.
  • Le personnel était lui très occupé pendant cette phase-là : il devait vérifier le remplissage de l’avion, contrôler les fermetures des casiers à bagages, procéder à des séries d’actions liées à la sécurité. Pour lui, ce temps d’attente était d’abord un temps de travail. Par ailleurs, étant bien évidemment des voyageurs fréquents, ils avaient l’habitude de ces temps d’attente.
La mise en évidence de ces décalages a conduit la compagnie aérienne à faire évoluer la séquence des services pour la classe économique et à modifier l’attitude du personnel de bord pour les rendre plus attentifs aux préoccupations réelles des passagers.

Deux exemples enfin issus d'une entreprise industrielle.

Pour cette entreprise du secteur de la chimie, le Miroir Client avait montré un décalage sur le thème « meilleur fournisseur ». Or le personnel de l’entreprise avait une connaissance précise de sa concurrence et une vue exacte de la qualité relative de ces prestations.
Que s’était-il passé ?
Pour les clients, la performance de l’entreprise n’était pas comparée à ses concurrents - souvent elle était le fournisseur unique pour ces produits -, mais à tous les fournisseurs que voyait la structure d’achat. Ainsi la même performance objective de l’entreprise donnait lieu à des interprétations pouvant être complètement différentes, puisque les référentiels n’étaient pas du tout les mêmes : l’entreprise experte de son secteur se comparaît à ses concurrents, ses clients experts de leur métier comparaient l’entreprise en dehors de son secteur. Divergence des repères et des histoires qui conduit à une divergence des interprétations.
Autre exemple issu de la même entreprise et concernant un de ses produits de cette entreprise industrielle qui était extrêmement dangereux à manipuler. L’ensemble du personnel avait intégré cette dimension dans son travail quotidien : la gestion de la sécurité ne posait plus de problèmes et était devenue « évidente » par apprentissage. À l’inverse, les clients, n’ayant pas la même expertise, restaient très inquiets de ces risques.
Lors de la réalisation du Miroir Client, le personnel de l’entreprise avait complètement sous-estimé l’importance de la problématique sécurité pour les clients, alors qu’elle était ressorti comme prioritaire pour ces derniers.
La réalisation du diagnostic avait été pour l’entreprise l’occasion de cette découverte. L’action à déployer avait été très simple, car il suffisait d’utiliser toute l’expertise interne pour mettre au point des documents pour les clients. En parallèle, les commerciaux ont intégré la dimension sécurité dans toutes leurs discussions commerciales.



(2) Dans une telle situation, une démarche de type Miroir Client est inappropriée. L’entreprise a besoin de se reconstruire en profondeur.
(3) Si vous cliquez dessus vous aurez l’image agrandie et donc plus lisible


9 juin 2011

ON NE VOIT PLUS CE QUE L’ON FAIT TOUS LES JOURS… LES CLIENTS, OUI !

Le Miroir Client, un outil simple pour matérialiser les écarts entre entreprise et client (4)
Pour cette entreprise industrielle, du secteur de la chimie, le Miroir Client avait montré un décalage sur le thème « meilleur fournisseur ». Or le personnel de l’entreprise avait une connaissance précise de sa concurrence et une vue exacte de la qualité relative de ces prestations.
Que s’était-il passé ?
Pour les clients, la performance de l’entreprise n’était pas comparée à ses concurrents - souvent elle était le fournisseur unique pour ces produits -, mais à tous les fournisseurs que voyait la structure d’achat. Ainsi la même performance objective de l’entreprise donnait lieu à des interprétations pouvant être complètement différentes, puisque les référentiels n’étaient pas du tout les mêmes : l’entreprise experte de son secteur se comparaît à ses concurrents, ses clients experts de leur métier comparaient l’entreprise en dehors de son secteur. Divergence des repères et des histoires qui conduit à une divergence des interprétations.
Autre exemple issu de la même entreprise et concernant un de ses produits de cette entreprise industrielle qui était extrêmement dangereux à manipuler. L’ensemble du personnel avait intégré cette dimension dans son travail quotidien : la gestion de la sécurité ne posait plus de problèmes et était devenue « évidente » par apprentissage. À l’inverse, les clients, n’ayant pas la même expertise, restaient très inquiets de ces risques.
Lors de la réalisation du Miroir Client, le personnel de l’entreprise avait complètement sous-estimé l’importance de la problématique sécurité pour les clients, alors qu’elle était ressorti comme prioritaire pour ces derniers.
La réalisation du diagnostic avait été pour l’entreprise l’occasion de cette découverte. L’action à déployer avait été très simple, car il suffisait d’utiliser toute l’expertise interne pour mettre au point des documents pour les clients. En parallèle, les commerciaux ont intégré la dimension sécurité dans toutes leurs discussions commerciales.

8 juin 2011

ASSIS DANS LE MÊME AVION, PEUT-ON ATTENDRE PLUS LONGTEMPS QUE LES AUTRES ?

Le Miroir Client, un outil simple pour matérialiser les écarts entre entreprise et client (3)
Je poursuis la présentation du Miroir Client avec deux exemples réels, issus d’une compagnie aérienne, entreprise dans lequel le Miroir Client a été intégré pendant de nombreuses années, comme un outil permanent d’une démarche qualité.
Pour la séquence à l’intérieur de l’aéroport, une divergence insolite a été le suivante : le personnel de l’entreprise était persuadé que les clients n’étaient pas satisfaits des toilettes de l’aéroport, alors que les clients pas du tout. Lors de la restitution de ce point, il était apparu que c’était en fait un problème de conditions de travail pour le personnel au sol …
Moins anecdotique, cette fois, il y avait un décalage important et plus complexe concernant le moment où, les passagers étant montés, l’avion est immobilisé sur la piste en attente du décollage. Ce temps d’attente était une source de mécontentement important pour les clients, mais uniquement ceux en classe économique, ce sans que le personnel n’en soit conscient.
Ces décalages ont permis de mettre en évidence que :
  • Les clients affaire ou première étaient occupés dès leur montée dans l’avion (journaux, proposition d’une boisson), et, étant des voyageurs fréquents, ils avaient l’habitude de ces temps d’attente, et n’étaient donc pas stressés.
  • A l’inverse, les clients en classe économique n’avaient rien à faire (une fois assis à leur place, personne ne s’occupait d’eux). De plus, bon nombre n’ayant pas l’habitude de voyager et ne connaissant pas les problèmes de régulation au niveau d’un aéroport, craignaient que, si le temps d’attente se prolongeait,  cela voulait dire qu’un problème était apparu sur l’avion. D’où stress.
  • Le personnel était lui très occupé pendant cette phase-là : il devait vérifier le remplissage de l’avion, contrôler les fermetures des casiers à bagages, procéder à des séries d’actions liées à la sécurité. Pour lui, ce temps d’attente était d’abord un temps de travail. Par ailleurs, étant bien évidemment des voyageurs fréquents, ils avaient l’habitude de ces temps d’attente.
La mise en évidence de ces décalages a conduit la compagnie aérienne à faire évoluer la séquence des services pour la classe économique et à modifier l’attitude du personnel de bord pour les rendre plus attentifs aux préoccupations réelles des passagers.
Demain, je poursuivrai avec deux exemples issus d’une entreprise industrielle…
(à suivre)

7 juin 2011

POURQUOI LE MIROIR CLIENT EST UN OUTIL EFFICACE

Le Miroir Client, un outil simple pour matérialiser les écarts entre entreprise et client (2)
Il peut être rapidement mis en œuvre par l’entreprise elle-même, et être déployé partout
Une fois passée la phase initiale de mise au point du questionnaire et de la mise en forme des résultats, et de la formation d’une équipe interne, la démarche Miroir Client peut être réalisée sans l’appui de ressources externes, dans toutes les composantes de l’entreprise.
… et c’est donc un outil d’autodiagnostic décentralisé
Le questionnaire étant administré localement, chaque équipe – il ne faut en aucun cas en faire un outil d’évaluation individuelle – est mise face à la situation telle qu’elle est pour elle, et non pas de la moyenne de l’entreprise. L’expérience montre qu’il est alors – sauf de rares exceptions –, inutile d’argumenter longuement sur les actions à entreprendre. La seule matérialisation des écarts entre ce que l’équipe pensait et ce que le client pensait vraiment va déclencher un changement des comportements.
C’est une démarche consolidante…
Pour la plupart des items, l’écart entre les points de vue est faible. En effet, si ce n’était pas le cas, l’entreprise serait complètement décalée par rapport aux attentes du client, et serait donc déjà sortie de son marché(1). Ce fait, à chaque démontré, qu’à environ 80/90%, il y a adéquation favorise l’adhésion à la démarche et consolide les équipes.
… qui permet d’optimiser les efforts et les allocations de ressources
Le Miroir Client met en relief à la fois les cas où l’entreprise sous-investit sur un sujet (soit en sous-estimant l’importance de l’item, soit en surestimant la satisfaction du client, soit cas le pire, les deux à la fois) ou surinvestit (pour des raisons symétriques). Comme le Miroir Client est déployé localement, cette optimisation est fine et précise, et n’est pas imposée par le centre, ni par des visions moyennes.
Les illustrations de cet article sont tirées de cas réels (2).
Cette démarche peut être réalisée pour toute entreprise, quel que soit son domaine d’activités, grand public ou industriel. Le questionnaire est simplement évidemment très différent, et son mode d’administration aussi. Notamment en milieu industriel, comme le client est lui-même une entreprise, et donc une organisation complexe, il faut chercher à administrer le questionnaire à l’intérieur de l’organisation du client.
Demain, je donnerai des anecdotes issues de démarches réalisées…
(à suivre)
(1) Dans une telle situation, une démarche de type Miroir Client est inappropriée. L’entreprise a besoin de se reconstruire en profondeur.
(2) Si vous cliquez dessus vous aurez l’image agrandie et donc plus lisible

6 juin 2011

COMMENT METTRE L’ENTREPRISE FACE À CE QU’ELLE PENSE ET CROIT

Le Miroir Client un outil simple pour matérialiser les écarts entre entreprise et client (1)
Lors de mes derniers articles, j’ai insisté sur la difficulté de l’observation, et notamment du risque de voir l’entreprise développer un point de vue différent de celui du client (1), risque qui, paradoxalement, peut croître avec l’expertise interne de l’entreprise.
Comment peut-on agir ? Y a-t-il un outil simple dont toute entreprise pourrait se doter ?
La réponse que j’ai développée et  qui a été déjà mise en œuvre de multiples fois, et dans de grandes organisations, est le Miroir Client.
Avant de vous présenter de quoi il s’agit, je précise que cet outil n’a pas la prétention de résoudre à lui seul la totalité du problème posé, mais il a montré qu’il était un excellent déclencheur et permettait des progrès significatifs.
L’idée Miroir Client est née de la remarque suivante : ce qui détermine les actions de chacun, ce ne sont pas les priorités clients réelles, mais les priorités clients telles que vues et interprétées par l’organisation et son personnel ; s’il y a un décalage entre ce qu’attend le client et ce que croit l’entreprise qu’il attend, le centrage des actions sera inefficace. Il y a donc un intérêt à mettre en regard, comme par un effet miroir, ce que l’entreprise croit que le client pense et ce qu’il pense vraiment.
Quel est le principe du Miroir Client ? Il est de mettre en relief les décalages éventuels entre ce que pensent les clients et ce que l’entreprise croit que les clients pensent. 
Comment ?
  • Par l’élaboration d’un questionnaire partant du parcours client et, pour chaque item, demandant quel est son importance et quel est le degré de satisfaction,
  • Par l’administration de ce questionnaire d’abord à l’ensemble du personnel de l’entreprise (ou à un échantillon si l’entreprise est de grande taille), puis à un échantillon des clients. Au personnel, on demande d’indiquer non pas son opinion personnelle face à une question donnée, mais ce qu’il pense que sera la réponse du client.
  • Par, ensuite, la mise en forme des résultats sous forme très visuelle matérialisant les écarts ou les similitudes (voir la photo ci-jointe)
  • Par l’animation de la restitution, amenant des représentants de l’entreprise à auto-analyser les tableaux, et en veillant qu’ils n’esquivent pas les problèmes.
Est-ce que cela marche vraiment ? La réponse est oui ….
(à suivre)