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19 mai 2009

ON EST VRAIMENT BIEN NOURRI DANS CETTE FERME !

Le futur est rarement le prolongement du passé

« Notre part de marché actuelle est de 16,2%. Au pire, l'année prochaine, elle sera au moins de 15%. »

« Notre chiffre d'affaires de l'année dernière a été de 521 M€. Pour cette année, il sera au minimum de 500 M€. Cette prévision est d'autant plus prudente, que nous avons toujours progressé les 5 dernières années. »…

Je pourrais multiplier les citations de ce type : difficile de comprendre que le futur ne sera pas « dans la tendance » du passé, que le pire est possible, que la rupture est toujours là, latente. Qu'une part de marché peut s'effondrer brutalement, qu'un chiffre d'affaires n'est jamais certain.

Et pourtant…

Il a fallu la crise récente pour rouvrir les yeux de certains stratèges.

C'est le syndrome de la dinde de Noël qui, en novembre, pense : « Cette ferme est vraiment géniale. La nourriture y est bonne et abondante, je peux dormir toute la journée si je veux. Le rêve, quoi. »

Attention aux lendemains qui déchantent.

Comme l'a écrit Nassim Nicholas Taieb dans le Cygne Noir : « Au cours des cinquante ans qui viennent de s'écouler, les dix jours les plus extrêmes sur les marchés financiers représentent la moitié des bénéfices. Dix jours sur cinquante ans. Et pendant ce temps, nous nous noyons dans les bavardages. »

La crise, au travers de laquelle nous passons, n'est pas un « accident ». Elle n'est qu'un « cygne noir » de plus…

7 mars 2009

COMMENT RÉUSSIR UN DIAGNOSTIC

Pourquoi prendre une photographie est dangereux, comment trop d'expertise peut conduire à se tromper, pourquoi les processus inconscients sont essentiels

La performance durable d'une entreprise repose sur sa capacité non pas à faire juste une fois, mais à s'adapter dynamiquement à l'évolution de la situation. Cette adaptation dynamique repose sur trois points majeurs :

- L'existence de confrontations internes pour ajuster les points de vue, fiabiliser les analyses et construire des projets communs,

- Un maximum de faits et d'informations sur le marché, les concurrents, les résultats des actions passées et en cours pour nourrir les analyses,

- La capacité à se remettre en cause et innover

Tout ceci va venir non seulement des processus apparents dans l'entreprise, mais beaucoup de processus « inconscients » et cachés issus de l'histoire de l'entreprise, de sa culture et de ses systèmes (organisation, système d'information, tableaux de bord et scores, ….). Finalement être rationnel, c'est accepter l'importance de cette dimension inconscient.

Ainsi pour évaluer la performance d'une entreprise, il y a trois pièges principaux à éviter :

- Prendre une photographie de la situation instantanée : comment savoir si la performance – positive ou négative – sera maintenue dans la durée ? L'exactitude est-elle le fruit de la chance ou de la performance du système ? Symétriquement, s'il s'agit d'une erreur, est-elle provisoire ou permanente .

- Avoir une attitude d'expert qui va porter un jugement et dire si ce qu'il voit est juste ou faux : comment percevoir la logique du système analysé et son histoire, si l'on part d'une expertise externe ? Comment être sûr a priori que cette expertise recouvrira bien toutes thématiques pertinentes ?

- Se contenter de ce qui est directement visible : comment évaluer la reproductibilité d'une performance sans comprendre comment elle est atteinte ? Comment analyser un résultat atteint sans comprendre le processus sous-jacent et intégrer les dimensions cachées de l'entreprise ?

Pour réussir un diagnostic, il faut :

- Mener des entretiens ouverts et « non préparés » pour comprendre les logiques des acteurs en place, percevoir les histoires sous-jacentes et évaluer sur quoi reposent les interprétations internes,

- S'arrêter dès que « l'on ne comprend pas » ou que l'on perçoit un résultat ou une attitude « illogique » ou « irrationnelle », car c'est le plus souvent le signal d'une logique cachée et inconsciente,

- Analyser les logiques de systèmes et documents internes (plans stratégique, marketing, industriel, et commercial; politique des ressources humaines ; système d'information ; système de reporting…) et évaluer les logiques induites et leurs cohérences relatives,

- Marier un champ large d'analyse pour ne pas préjuger a priori de la situation, à des zooms locaux ou des « carottages » pour comprendre les logiques et dépasser les apparences.

Tout repose finalement sur deux questions « simples » :

  • L'entreprise, est-elle « connectée au réel » ou encore quelle quantité de « faits » l'irrigue ?

  • Est-elle « cohérente » ou encore est-ce la même « musique » au marketing, au commercial ou à la fabrication ?

En effet si l'entreprise est cohérente, mais déconnectée du réel, elle va foncer, consciencieusement et efficacement, dans le prochain mur et ce « comme un seul homme ». Et si elle est « éclatée », elle sera décoordonnée et n'ira nulle part.

Si elle est connectée au réel et cohérente ("consistent"), elle va progressivement trouver la meilleure réponse et saura s'adapter à ce qu'elle n'a pas prévu...

5 mars 2009

FAIRE UN DIAGNOSTIC, CE N’EST PAS PRENDRE UNE PHOTO

Comment évaluer la performance d'une entreprise… vraiment ?

« Mon diagnostic a commencé, il y a maintenant trois jours. Les interviews se succèdent, celui-là est le vingtième. Le déroulement initial est immuable : je commence par me présenter en deux minutes, et puis, première question : « Et vous ? »

Comme d'habitude, mon interlocuteur, à son tour, me dit qui il est, d'où il vient. Essentiel pour comprendre de savoir « d'où » il va me parler. En fait je me suis présenté surtout pour cela : pour qu'il trouve naturel de me dire même rapidement son parcours personnel. Réciprocité.

« Donc, vous êtes arrivé dans cette entreprise depuis maintenant plus de dix ans. En quelques mots, pourriez-vous m'en parler : y a-t-il eu des étapes importantes, des ruptures ? Ou alors cela a-t-il été un long fleuve tranquille ? »

Les questions s'enchainent. Je rebondis sur ses réponses, l'aide à approfondir, à remonter à la source de ses convictions. Mentalement, je ne suis plus assis face à lui, mais à côté pour voir la situation de son point de vue, pour comprendre sa vision de son rôle, de celui des autres.

« Et l'entreprise plus globalement, quels sont les défis auxquels elle a à faire face ? ».

Je fais attention à oublier ce que je sais déjà, à ne pas reproduire vers lui mes interprétations naissantes. Comme c'est la vingtième interview, forcément une image commence à se dégager. Mais je dois rester en éveil, le moins projectif possible, le moins inductif.

Vers la fin, j'injecte au travers de mes questions les lignes de force actuelles de mon diagnostic. Pour voir comment il va réagir : va-t-il confirmer, compléter, infirmer ?


Partir sans a priori, sans jugement initial. Repérer les courants, les logiques, les contradictions. Laisser la synthèse émerger presque d'elle-même. « Neurodiagnostiquer ».

De quoi s'agit-il ?

D'aller bien au-delà d'une simple analyse des actions, de la véracité des chiffres ou de l'exactitude d'une politique. Certes, de telles analyses peuvent apporter des données intéressantes mais elles ne prennent qu'une photographie instantanée de l'entreprise :

- Si les éléments recueillis sont satisfaisants, comment savoir si cette performance sera maintenue dans la durée ? L'exactitude est-elle le fruit de la chance ou de la performance du système ? Symétriquement si les résultats recueillis ne sont pas satisfaisants, est-ce qu'il s'agit d'une erreur provisoire ou permanente ?

- Quels sont les éléments qui expliquent ces résultats – positifs ou négatifs – ?

- En quoi l'analyse du résultat va-t-elle permettre de comprendre comment il a été obtenu ?

- Qu'en déduire pour le futur et les actions à entreprendre ?


« Neurodiagnostiquer » c'est chercher non pas à juger le résultat obtenu ou la qualité des décisions prises, mais bien à comprendre les systèmes, conscients et inconscients, qui sous-tendent l'action de l'entreprise et génèrent les décisions. C'est identifier aussi les décalages éventuels par rapport au réel et les interprétations majeures qui sous-tendent les actions.

D'une certaine façon, il s'agit de développer vis-à-vis de l'entreprise une approche de type « psychanalytique », c'est-à-dire amenant à exprimer les interprétations émises par l'organisation et les logiques sous-jacentes. Soyons clairs, il n'est bien sûr pas dans mon propos de dire qu'il faut considérer l'entreprise comme un organisme malade : je n'emploie l'expression « psychanalytique » que pour exprimer que, ici encore, il s'agit, sans a priori, de faire retrouver à l'entreprise pourquoi elle agit et de l'aider à tirer par elle-même ses propres leçons.

Tout au long de ce « neurodiagnostic », une phrase clé est à garder en mémoire : « Si je ne comprends pas pourquoi un système ou quelqu'un fait quelque chose, la seule chose que je dois comprendre, c'est que je ne comprends pas… et que je dois continuer à chercher. » »

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(EXTRAIT DU LIVRE NEUROMANAGEMENT)