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10 févr. 2024

Patong beach

Debout, verticaux, inertes.

Seuls, leurs bras bougent.

Un peu.

Aucun ne nage.

À quoi bon ?

 

Ne leur manquent que des verres.

Quelques toasts aussi peut-être.

Un barman sûrement.

Incomplétude.

Manque.

 

Les bières sont loin.

La mer à quitter,

La sable à traverser,

L’échoppe à atteindre.

A quoi bon ?

 

Je les regarde.

Perplexe.

Je les traverse,

M’écarte d’eux,

Et nage au loin.

Musique (Thaïlande)


Musique

Gauche ou droite,

S’arrêter ou avancer,

Comment savoir ?

 

Néglige le flux,

Ferme les yeux,

Crois aux sons.

 

La musique dit le vrai,

La musique montre la voie,

La musique est là pour toi.

 

Trouve une chaise,

Assieds-toi comme tu peux,

Oublie le reste.

 

Music

Left or right,

Stop or go,

How to know?

 

Forget the flow,

Close your eyes,

Trust your ears.

 

Music tells you the truth,

Music shows you the way,

Music is there for you.

 

Find a chair,

Sit where you can,

Enjoy the moment.

7 févr. 2024

Pai (Thailande)

Faux-semblants et dissemblances,

Regard de dupes, tromperies.

Pai, tu te caches derrière des touristes anonymes.

Tes rues se sont remplies d’hôtels, de restaurants et bars.

Tes street food n’ont plus le goût du passé.

Je marche à la recherche de ce que j’ai perdu.

 

Et pourtant quand le jour se tait,

Quand l’alcool remplit mon verre,

Quand je glisse dans un bar obscur,

Quand l’odeur d’une herbe prohibée,

Quand le son d’un rock éraillé me heurtent,

Quand autour de moi, les sacs à dos sont de retour,

Je te retrouve.


Allongé plus qu’assis, 

Ta main fouille ma nuque,

La musique enivre nos corps.

Prélude à ce qui adviendra.

Dans un moment,

Dans plusieurs.

Savoir attendre,

Laisser mijoter,

Cuire et recuire.

Ta main, tes doigts, ta bouche.

Et la musique.

Encore et encore.

28 févr. 2022

CALLIGRAPHIE

Une silhouette frêle et longiligne, 
Un long pinceau, 
De l’eau sur un pavage, 
Une composition fugace. 
Éléments de langage et traces visuelles, 
Hybride de sens et de formes. 
Rencontre. 
 
Pour arriver à m’abandonner, 
Répéter sans fin le même geste. 
L’intérioriser, 
Le ressentir, 
Le vivre et non plus le faire, 
Simplement, directement, instinctivement. 
Apprentissage. 
 
Sans pensée, 
Sans filtre, 
Sans contrôle, 
Avec mon maître, 
Nous balayons les airs, 
Pour nous incarner sur le sol. 
Accomplissement. 
 
(poème inspiré par mon livre Par hasard et pour rien)

18 févr. 2022

TENTATION

Cent soixante, cent quatre-vingt. 
Ronflement de mon six cylindres, 
Musique minimale d’Underworld. 
Deux cents, deux cent vingt. 
 
Tout est immobile. 
Habillé de métal, 
Je suis le seul vivant. 
Voyage au pays des morts. 
 
Sur ma gauche, un rail. 
Envie de le toucher, 
De devancer l’appel, 
De vivre mon dernier futur. 
 
(poème inspiré par mon livre Par hasard et pour rien)

8 févr. 2022

CAILLOUX

Des jeux solitaires, 
L’odeur de Wycliffe, 
Paul et Serge, 
Les couloirs des Beaux-Arts, 
Les rumeurs de ma première exposition. 
Et un peu de mes parents. 
 
Des cailloux disjoints, 
Distants, 
Sans liants, 
Sans histoire, 
Sans récit, 
Sans chemin dessiné. 
 
Un passé mis en pièces, 
Démonté, 
Désorganisé, 
Dépourvu de sens. 
Des traces. 
Un puzzle impossible.
 
 
(poème inspiré par mon livre Par hasard et pour rien

2 févr. 2022

NAISSANCE (3)

Une naissance c’est un récit. 
Entendu après, 
Quand devenu grand, 
Pas très grand, mais plus, 
Quand assis sur des genoux, 
Le début est raconté. 
 
Pour moi, rien de tout cela. 
Ni genoux, ni récit. 
Rien. 
Pourtant, le jour de l’accouchement. 
A minima, ma mère était là. 
 
Ma conception, une effraction. 
Ma sortie, je ne sais pas. 
Elle, elle sait. 
Nécessairement. 
 
Pourquoi ce silence ? 
Pour effacer ma naissance ? 
M’effacer ? 
 
Excusez-moi d’être là, 
Encore vivant.
 
 
(poème inspiré par mon livre Par hasard et pour rien

1 févr. 2022

NAISSANCE (2)

Je suis né sans parents, 
Ou presque, 
Ou si peu. 
 
J’ai appris à faire avec. 
Il a bien fallu, 
Il faut bien. 
 
J’ai eu tous les choix, 
Excepté celui de mon origine. 
Comme tout le monde. 
 
Se dire que l’on n’y peut rien, 
Devrait arranger, 
Au moins un peu, 
Un tout petit peu.
 
Mais pas vraiment... 

 
(poème inspiré par mon livre Par hasard et pour rien)

31 janv. 2022

NAISSANCE (1)

Ouf ! C’est fait.
Enfin.
Neuf mois, déformée, envahie de l’intérieur.
À mes côtés, le fruit de l’expulsion dort.
Demander à l’infirmière de l’emmener.
Ne pas être dérangée cette nuit.
Besoin de me reposer.
Enfin.
Ouf ! C’est fait.
 
 
(Extrait de mon livre Par hasard et pour rien)

28 janv. 2022

POUSSER DES PORTES


Diversité des portes. 
Elles délimitent et dessinent, 
Elles interdisent et relient, 
Elles sont physiques ou virtuelles. 
 
Si fermée, 
L’après est imagination. 
La pousser pour savoir, 
Ou se contenter de rêver ? 
 
Si entrouverte, 
L’après est esquisse. 
Céder à la tentation, 
Ou fuir le chant des sirènes ? 
 
Toujours, il y a un avant et un après, 
Toujours, le franchissement engage. 
On ne ressort jamais indemne du voyage. 
Et parfois, le retour en arrière est impossible.
 
 
 
« Voilà presque quarante ans que je poussais des portes. L’une après l’autre. Sans réfléchir. Par curiosité. Par paresse. Ou juste parce qu’elle était là. Difficile de résister au charme de l’inconnu. Du mystère. 
Mais derrière une porte, on ne trouve que par accident ce que l’on cherche. Ai-je jamais d’ailleurs cherché quoi que ce soit ? Qui que ce soit ? Qui peut prétendre savoir pourquoi il fait tel choix plutôt que tel autre ? 
Et personne ne m’avait prévenu que pousser certaines portes conduisait à des glissades définitives. Une fois franchie, on perd le contrôle de sa vie pour dépendre de ce qui se trouve au-delà. 
Certaines portes délimitent et dessinent des espaces, quand d’autres sont les trous des peaux de mondes successifs, des passerelles qu’il suffit d’emprunter pour basculer de l’un à l’autre. 
Fermées, elles interdisent l’accès, et cachent ce qui est inconnu. Fermées, elles laissent place à l’imagination. Pourquoi vouloir savoir ? Pourquoi ne pas laisser son esprit voguer, et se contenter de rêver ce que l’on ne voit pas ? 
Entrouvertes, elles sont un appel, une invitation à se glisser le long d’elles. Il faut les saisir vite de peur qu’elles ne se referment. Mais ce que l’on entraperçoit, est-ce un mirage, un chant de sirènes visuel, une prison tentatrice ? Faut-il s’encorder avant de s’avancer ? Fuir ? 
D’autres ne sont que virtuelles. Pas de porte, pas de charnières. Juste le symbole d’un franchissement, la matérialisation d’un avant et après. Il ne semble n’y avoir aucun risque, puisque tout est visible. N’est-ce qu’un jeu de passe-passe ? Une tentation à aller de l’autre côté, pour ensuite se retourner et découvrir sous un angle nouveau, ce que l’on vient de quitter ? Est-ce si simple ? N’y a-t-il vraiment aucun danger ? On ne ressort jamais indemne d’un voyage, fusse-t-il le plus facile. 
En rencontrant Marc, c’est une telle porte que j’avais involontairement poussée. Invisible, virtuelle et pourtant intensément réelle et essentielle. 
Et si je n’étais pas allé ce soir-là au sauna IDM ? Ou beaucoup plus tard ? Ou m’étais endormi dans la cabine ? Et si, et si, et si… Mais la porte avait été franchie ouvrant en moi tant d’autres closes. Je n’étais plus étanche. Des voies multiples étaient créées. 
Aucun retour en arrière n’était possible… »

27 janv. 2022

PEUR D’ÊTRE ABANDONNÉ

UNE POUPÉE DE CHIFFONS
Tapie dans l’ombre, 
Abritée d’un rameau, 
Cachée dans le Maïdan, 
Elle m’attendait. 
 
Blottie dans mes bras, elle se réchauffe. 
Envahie de ses émotions, je revis. 
Replongé dans une enfance oubliée, 
J’ai retrouvé mon doudou perdu. 
 
Maman, j’ai perdu ta main. 
Où es-tu ? 
Pourquoi es-tu partie ? 
Seuls les pleurs m’habitent. 
 
Maman, ce n’est plus ta main, 
Ta main qui me manque. 
C’est celle de Jacques, 
Jacques, le neveu parti. 
 
Assis à même le sol, 
Sur une sente obscure, 
Appuyé contre un tronc, 
Longuement je pleure. 
 
 
 
« Pour la troisième fois, je finis ma promenade par le Maïdan, la version locale de Central Park située au cœur de Calcutta et à proximité de mon hôtel. (…) Je choisis de m’écarter de la partie centrale, et m’engageai dans un chemin de terre serpentant entre des bosquets. 
Là, tapie dans l’ombre, à moitié cachée par une branche qui s’inclinait sur elle, dormait une poupée de chiffon. Innocente, érodée par les pluies qu’elle avait endurées, elle gisait. À qui avait-elle appartenu ? Où était l’enfant qui l’avait perdue ? 
Je me sentis envahi par un flot d’émotions, comme si je venais de retrouver mon doudou perdu. Machinalement, ma main se porta à ma bouche, et je dus me retenir de sucer mon pouce. Besoin de la prendre dans mes bras. 
Je me laissai glisser sur le sol juste à côté d’elle, et posai ma main délicatement sur elle. Attention à ne pas appuyer. Le coton était tellement usé que mes doigts passeraient au travers. Presque transparent. Sous ce voile, elle était nue. Si douce, si fragile. 
Je la pris, la déposai sur mes genoux et m’appuyai contre le tronc de l’arbre voisin. L’endroit était calme et paisible, suffisamment reculé pour que les passants ne s’y aventurassent pas. C’était sans doute pour cela que la poupée était encore là. J’étais en dehors du monde. Juste avec elle. Je la caressai lentement, et fermai les yeux. 
Je sens la chaleur de la main de ma mère et la peur de la perdre. Je sais pourtant que cela va se produire. De rage, mes pleurs redoublent. (…) 
Oui, tout petit, je ne supportais pas de lâcher la main de ma mère, aucune raison de mettre en doute les récits de ma famille. Mais rien de présent dans ma mémoire. 
Non, la main dont je me souvenais, celle que j’avais perdue pour toujours, beaucoup plus tard mais trop tôt, trop brutalement, c’en était une autre : celle de Jacques. Jacques, mon neveu, qui avait grandi à mes côtés. Jacques qui était mort à quatre ans, quand moi je n’en avais que quinze. 
Assis à même le sol dans le parc Maïdan, seul avec une poupée abandonnée, je pleurai. Longuement… »

26 janv. 2022

COURIR POUR FUIR ET NE PLUS PENSER

COURIR 
Sous mes pas, le sol, 
Élastique et résistant. 
Dans les oreilles, la musique, 
Monotone et enivrante. 
 
Toujours le même parcours, 
Courir sans y penser. 
Drogué par les endorphines, 
Quitter mon corps. 
 
Retrouver mon passé évanoui, 
Enfant ou adolescent. 
Croire à un futur simple, 
Imaginer avoir tout résolu. 
 
Réémerger sans guérison, 
Toujours sans solution. 
Juste calmé, 
Heureux d’avoir plané. 
 
Demain, de jour comme de nuit, 
Tiraillé entre des choix impossibles. 
Demain, une autre dose nécessaire, 
Plus forte, plus intense.
 
 
« C’étaient les seuls moments où la tension qui m’habitait disparaissait. La morphine du rythme hypnotique et la monotonie du parcours toujours identique me conduisaient à ne plus penser. Je ne percevais plus que l’élasticité du sol, la régularité de mes foulées. 
Enfoui dans la bulle de la musique et la pulsation du sang qui vibrait dans mes tempes, coupé de tous, de Cécile comme de Marc, je m’immergeais au plus profond de mes neurones. Je quittais mon corps. Seul, il continuait la course. Plus tard, je le réintégrerais. 
Je retrouvais la chaleur de lieux accessibles et connus que de moi-même. Je redevenais l’enfant quasiment autiste à qui personne – ni mes parents, ni mes sœurs, ni quiconque – n’avait jamais eu accès. Pas de vrais amis, peu ou pas de jeux à plusieurs. Solitaire avant tout. Reclus en moi. 
Assis sur ma chaise, face à mon petit bureau, je rejouais des parties contre moi-même, scrabble ou échec. J’inventais mes propres règles. Ou alors un problème de mathématiques. Ce n’était pas pour rien que j’avais excellé dans cet art des constructions théoriques et mentales. J’élaborais des scénarios complexes et enchevêtrés. Je construisais des univers où les symétries n’en étaient pas, où les additions n’existaient pas, où les nombres n’étaient pas encore nés. (…) 
Je revoyais l’adolescent qui hantait les vestiaires des piscines, guettait des corps dénudés, et aimait s’y exhiber. Celui qui déjà n’aimait que des sexes semblables au sien, mais sans le comprendre, ni même s’en rendre compte. Je réhabitais les tentes de mes nuits de scout, où, glissé en slip dans mon duvet, j’attendais en vain un partenaire aventureux. Je repensais à ce petit voisin avec qui je me cachais sous une table couverte de multiples tissus la transformant en abri étanche à tous les regards. (…) 
Je réémergeais de mes courses sans guérison, ni solutions. Juste provisoirement calmé, heureux d’avoir plané. Un long shoot. Je savais que demain, une autre dose me serait nécessaire. Plus forte. Plus intense. Plus profonde. La journée comme la nuit seraient longues. Tiraillé entre un passé et un présent incompatibles. Marc ou Cécile. Quel futur ? »