Le capital du XXIe siècle (16) – Inégalités3
Que s’est-il passé selon Thomas Piketty en matière de réduction des inégalités de revenus ? Beaucoup à cause des guerres, rien à cause d’un processus structurel de compression des inégalités. Telle est une des thèses majeures de son livre : les inégalités perdurent, et même se développent comme nous le verrons plus loin.
« Dans une large mesure, la réduction des inégalités au cours du siècle écoulé est le produit chaotique des guerres, et des chocs économiques et politiques qu’elles ont provoqués, et non le produit d’une évolution graduelle, consensuelle et apaisée. Au XXe siècle, ce sont les guerres qui ont fait table rase du passé, et non la paisible rationalité démocratique ou économique. »
Cette assertion est loin de faire l’unanimité aux seins des économistes. Comme un de mes amis me disait dernièrement : « Au temps des rois, seuls les nobles pouvaient lire la nuit. Au dix-neuvième siècle, toute la bourgeoisie le pouvait. Aujourd’hui tout le monde. Belle réduction des inégalités, non ? »
Il est vrai que l’accès au confort et technologies diverses se diffuse de plus en plus…
Sans entrer dans cette polémique entre experts, force est de constater que la tranche où les revenus du capital dominent les revenus du travail ne représente de nos jours que 0,1% des revenus les plus élevés, soit cinq fois moins qu’en 1930, et dix fois moins qu’en 1910.
Mais si les inégalités liées au capital se sont réduites, celles liées aux salaires restent, car, comme Thomas Piketty le rappelle, le salariat n’a jamais été un bloc homogène.
Thomas Piketty ramasse cela en une formule adroite : « Dans une large mesure, nous sommes passés d’une société de rentiers à une société de cadres. » Et il précise : « C’est-à-dire d’une société où le centile supérieur est massivement dominé par des rentiers (des personnes détenant un patrimoine suffisamment important pour vivre des rentes annuelles produites par ce capital) à une société où le sommet de la hiérarchie des revenus – y compris le centile supérieur – est composé très majoritairement de salariés à haut salaire, de personnes vivant du revenu de leur travail. »
(à suivre)