13 mai 2016

NO COMMENT

A quoi bon ?
Certaines photos se suffisent à elles-mêmes, non ? Celle-là, prise dans une rue du vieux Québec, en fait partie. 
A quoi bon ajouter quoi que ce soit ? Regardez, amusez vous, rêvez, complétez… ou zappez selon votre humeur ! J 


11 mai 2016

LA FRANCE RÉELLE QUI AGIT

2017 : Le réveil citoyen – Avant-propos d’Alexandre Jardin (1)
Mon livre "2017 : Le réveil citoyen" sort sous une nouvelle édition avec, en plus de la préface de Jean-Christophe Fromantin, un avant-propos d’Alexandre Jardin.
« Depuis plus de quinze ans au travers de l’association Lire et Écrire, et deux ans avec Bleu Blanc Zèbre, je suis au contact des hommes et femmes de joie qui agissent. La France les a toujours produits. Jadis on les trouva à Bir Hakeim, se battant loin du cadre français brisé, creusant au siècle d’avant le canal de Suez, de Panama, faisant surgir une tour Eiffel sur le Champ-de-Mars, défonçant les idées reçues en passant à l’acte. Partout et dans tous les domaines ! Industriels culottés, fondateurs de mutuelles, d’associations d’éducation populaire, membres du Conseil national de la Résistance, osant et osant toujours au nez et à la barbe des conservatismes, faisant la nique à l’inertie et à la fatalité. Résolus à contredire le destin.
Aujourd’hui ils pullulent sur le territoire et convergent, en remisant leurs différences. Parce que l’action d’intérêt général est leur vrai pays. Parce qu’ils savent, souvent avec désespoir, que le cadre français est réellement inopérant. Ils réforment eux-mêmes les services publics sans rien attendre des ministres, inventent des solutions pour loger les mal-logés en se fichant bien des lois, mettent en œuvre des pratiques pour guérir la nation de l’échec scolaire ou promouvoir l’auto-entreprise, créent des banques sans banques pour rebancariser les deux millions et demi de gens privés de compte, structurent des solutions performantes pour diviser par cinq la mortalité des petites entreprises, installent d'immenses réseaux d'épiceries solidaires afin de nourrir le peuple qui a faim en respectant sa dignité, mettent en place des mutuelles de proximité, des outils de micro-crédit, usinent l’économie circulaire de demain, etc. 
Entrepreneurs, militants associatifs, tous se prennent eux-mêmes comme point d’appui. Et croyez-moi, ils ne produisent pas des rapports, ils font. En acceptant de coopérer avec les maires, les vrais Faizeux de notre classe politique. Car les maires ont eux aussi une obligation de résultat. S’ils n’y parviennent pas, ça se voit. Donc ce sont aussi des gens d’action. »
(à suivre)

9 mai 2016

PROMOUVOIR À TOUS CRINS LA DÉFENSE DES DROITS DE LA PROPRIÉTÉ PRIVÉE SUR L’IMMATÉRIEL

Tous rentiers : Cinq idées reçues à combattre pour avoir une chance d’agir juste (5)
Le développement de nos économies contemporaines s’est largement construite grâce au développement des brevets, et donc de la privatisation de biens immatériels.
Philippe Askenazy met l’accent sur le danger de ceci dans des domaines comme la santé (surtout si les systèmes de soin sont éclatés et faibles face aux groupes pharmaceutiques), et surtout la connaissance : peut-on laisser des intérêts privés s’approprier ceci sans risque ?
Étrangement dans son livre, il ne parle pas de l’agriculture et des semences : comment ne pas non plus s’inquiéter de voir une entreprise comme Monsanto s’approprier ce qui était un bien commun ?
Supprimer tout droit de  propriété sur l’immatériel n’est pourtant pas la solution, car il est légitime et nécessaire de rémunérer et protéger des investissements faits. 
Trouver le bon équilibre avec la nécessité de protéger les libertés individuelles et de lutter contre l’émergence d’inégalités socialement insupportables, est certainement un de nos défis contemporains.

4 mai 2016

FAIRE CONFIANCE AUX VERTUS DU DÉVELOPPEMENT DE LA PROPRIÉTÉ IMMOBILIÈRE

Tous rentiers : Cinq idées reçues à combattre pour avoir une chance d’agir juste (4)
On a tendance à affirmer que l’accession à la propriété est vertueuse, ce pour plusieurs raisons : amortisseur à la crise, préparation à la retraite, meilleure socialisation, meilleur entretien des logements. Mais est-ce si sûr ? 
Ainsi que Philippe Askenazy le rappelle, la crise des subprimes aux USA a montré qu’au contraire, l’acquisition d’un logement pouvait être source de faillite financière.
C’est aussi un frein à la mobilité : si la situation de l’emploi local vient à se dégrader, les salariés propriétaires de leurs logements se retrouvent piégés, car non mobiles. Comment en effet revendre son bien immobilier, sans avoir à faire face à des pertes importantes, parfois incompatibles avec les prêts contractés ?
C’est d’ailleurs un des points que met en avant Christophe Guilluy dans son livre la France Périphérique : « Les problèmes financiers sont structurels (ayant du mal à s’acquitter du paiement des traites de leur maison, des nombreux déplacements, de l’obligation de posséder deux voitures) et l’endettement, voire le surendettement, répandu. Quand le chômage frappe, l’éloignement des zones les plus dynamiques rend difficile un retour à l’emploi. Le piège se referme sur « cette classe moyenne inférieure » caractéristique en réalité de ces nouvelles catégories populaires fragilisées. »
Enfin Philippe Askenazy met le doigt sur un autre risque, celui du lien avec le populisme : « La transformation dans les décennies suivantes des sociétés scandinaves en sociétés de propriétaires occupants ne semble pas avoir amélioré leur fonctionnement. Pis, elles n’ont pas échappé à la montée des partis populistes d’extrême droite depuis le début du siècle (les Vrais Finlandais, le Parti populaire danois, le Parti du progrès norvégien, les Démocrates suédois). De fait, les contradictions des électeurs propriétaires servent partout de terreau aux populismes, du Tea Party américain au mouvement Cinq Étoiles italien en passant par UKIP, le Front national ou Pegida. (…) Ils désignent un tiers comme le responsable de leurs difficultés : en premier lieu, les immigrés mais aussi les assistés souvent identifiés aux premiers. »
Notons enfin que l’Allemagne se singularise par rapport à tous les autres pays européens avec presque la moitié des ménages locataires, versus un tiers en France, et 30% dans la moyenne de l’Union européenne.[i]
(à suivre)

[i] Source Eurostat, données 2013

2 mai 2016

PENSER QUE LA DYNAMIQUE DE L’EMPLOI EST PORTÉE PAR LES INDÉPENDANTS ET LES PETITES ENTREPRISES

Tous rentiers : Cinq idées reçues à combattre pour avoir une chance d’agir juste (3)
Concernant l’emploi indépendant, à l’appui du livre, voici quelques données statistiques :
 Selon l’INSEE, la part de l’emploi non salarié progresse lentement depuis 2006, en passant de 8,9% de l’emploi total à 10,6% en 2014, mais reste inférieure à son niveau de 1989 qui était de 13,4%.
Derrière cette évolution globale, deux mouvements contraires :
- Depuis 1989, une baisse régulière de l’emploi non salarié dans l’agriculture qui, tout en y étant dominant, ne représente plus de 63,4 % en 2014 contre 82,4 % en 1989. Ceci correspond à la montée en puissance d’une « agriculture industrielle ».
- Depuis 2004, une croissance dans la construction : la part de l’emploi non salarié est passée de 15,1 à 19,9 % en 2014. C’est à rapprocher des attaques régulières dans cette profession contre le statut du travailleur indépendant.
- Par contre dans les secteurs de l’industrie et du tertiaire, les évolutions sont certes positives, mais très lentes, avec un passage depuis 2004 de 3,2 à 4,4 % pour l’industrie, et de 7,3 à 9 % pour le tertiaire.
Selon le Bureau International du travail, il y a une forte baisse de l’emploi non salarié de 1982 à 2004 où il passe de 17,9 à 10,8 %, puis remonte à 11,5 % en 2014. Des données donc différentes, mais des évolutions synchrones. 
Concernant l’ancienneté dans les entreprises, on ne constate pas une progression de la tranche des salariés ayant moins d’un an d’ancienneté, mais au contraire, une baisse puisqu’ils sont passés de 17 % des salariés en 2000 à moins de 13 % en 2014. 
Bref, tout sauf un raz de marée des travailleurs indépendants… au moins pour l’instant.
Qu’en est-il de la création d’emploi ? A nouveau, quelques données statistiques, fruit d’une recherche personnelle :
Une note publiée par l’INSEE en 2010[i] constate que la part des salariés travaillant dans des entreprises de plus de 1000 personnes est passée de 27 à 33 % entre 1985 et 2006, alors que celle étant dans des entreprises de moins de 20 personnes stagnait autour de 30 %. La part des entreprises ayant une taille comprise entre 20 et 1000, elle, baisse, et ce dans chacune des tranches à l’intérieur de cet ensemble. D’où le titre de cette note : « Depuis trente ans, les grandes entreprises concentrent de plus en plus d’emploi »
Une analyse par secteur, dans cette même note, montrent des vitesses différentes : dans les services et le commerce, la part des grandes entreprises progresse très fortement (augmentation d’environ 15 points de leur poids dans l’emploi), alors que dans l’industrie, on n’a qu’un très faible gain.
Les statistiques les plus récentes de l’INSEE portent sur les années de 2009 à 2012, et procèdent selon un regroupement différent : 
- Dans les micro-entreprises (moins de 10 salariés), croissance de l’emploi entre 2009 et 2010 de 7%, et depuis, baisse de 1% par an,
- Dans les PME (de 10 à 250 salariés) et les grandes entreprises (plus de 5000 salariés), croissance d’environ 1% par an (1,3 pour les PME et 0,7 pour les grandes),
- Dans les entreprises de taille intermédiaire (de 250 à 5000 salariés), croissance de 2% par an
Si l’on rapproche ceci de l’étude de 2010 (il n’y aucune raison de penser qu’une rupture s’est produite entre les deux), le segment en croissance serait donc d’abord celui des entreprises de 1000 à 5000 personnes, et le plus fragile celui des plus petites, l’emploi au sein de celles de plus de 5000 restant quasiment stable.
Pourquoi donc affirme-t-on constamment que ce sont les petites entreprises qui créent de l’emploi ? Parce que l’on ne regarde que les créations brutes en ignorant les destructions d’emplois : le tissu de petites entreprises est en mouvement constant, et il s’y crée sensiblement autant d’emplois qu’il s’en détruit. Ou autre façon de  formuler : l’emploi y est fragile et très incertain. Rien que de très normal finalement.
Plus inquiétante est le peu de dynamisme des entreprises de taille moyenne, c’est à dire celles ayant un effectif de quelques centaines de personnes : c’est un indicateur de la vulnérabilité globale du tissu industriel français. Témoignage de la difficulté des petites entreprises à grandir, ce qui entrave le renouvellement.
Quant aux grandes entreprises, elles résistent globalement… peut-être justement au préjudice des entreprises moyennes.
(à suivre)

[i] Depuis trente ans, les grandes entreprises concentrent de plus en plus d’emploiINSEE PREMIERE, N°1289, AVRIL 2010

29 avr. 2016

DE BLEU ET D’OR

Juste du plastique, une pente et le soleil
J’aime l’Inde, et son art du bricolage. 
Un foisonnement d’intelligence qui sait contourner le peu de ressources.
Et parfois cette économie de moyens aboutit à dessiner un paysage surprenant.
Ainsi sur la colline située sur l’ile face à Bombay, les bâches de plastique deviennent tableau.
Le soleil joue dans les bleus et les ors.
Magique…

(photos prises dans l’île d’Elephanta à Bombay en juillet 2012)

27 avr. 2016

AFFIRMER QUE LES MÉTIERS LES MOINS PAYÉS NE SONT PAS QUALIFIÉS

Tous rentiers : Cinq idées reçues à combattre pour avoir une chance d’agir juste (2)
Autre lieu commun : la disparition de la classe moyenne avec la fracturation croissante du marché du travail entre des emplois très qualifiés fortement rémunérés et des peu qualifiés faiblement rémunérés.
Or, s’il y a bien une fracturation accompagnée la disparition de la catégorie intermédiaire, en conclure que ceci correspond à une rupture parallèle dans les qualifications est erroné.
D’abord comme indiqué précédemment, ce n’est pas parce qu’un emploi est de plus en plus qualifié qu’il est de mieux en mieux payé, mais simplement parce que le rapport de force lui est de plus en plus favorable : par exemple, la croissance des revenus dans l’immobilier ou la finance est sans relation directe avec un écart de compétence vis à vis des autres professions.
Ensuite il est faux de dire que les emplois dits non qualifiés le sont : le déploiement des nouvelles technologies, la suppression de l’encadrement intermédiaire, et l’enrichissement des tâches des personnes en première ligne conduisent à une complexité croissante des tâches. Un des exemples est celui des caissières de supermarché qui deviennent maintenant des « hôtesses de clientèle » dont l’activité dépasse largement celle de simplement taper sur une machine.
Ceci se retrouve dans le niveau de qualification du personnel : entre 1996 et 2014, en Europe, la part des salariés n’ayant eu qu’une formation du premier cycle a systématiquement baissé de l’ordre de 20% pour tous ces métiers[i].
D’aucuns pensent que ceci est le résultat de l’élévation du niveau de formation. Mais n’est-il pas plus pertinent de dire, comme le fait Philippe Eskenazy, que cette élévation a été rendue nécessaire par la montée de la complexité de ces tâches ? Le fait que le chômage en France soit directement corrélé avec le niveau de formation vient à l’appui de cette lecture. 
Dès lors, comment ne pas comprendre l’amertume des personnes exerçant ces métiers, quand, face à la progression de la complexité et de leurs qualifications personnelles, leurs rémunérations relatives baissent, ainsi que leurs reconnaissances sociales ?
(à suivre)


[i] Tous Rentiers, Source OCDE (2013), Perspectives de l’OCDE sur les compétences 2013

25 avr. 2016

CROIRE QU’UNE RÉMUNÉRATION EST LE REFLET DE LA PRODUCTIVITÉ

Tous rentiers : Cinq idées reçues à combattre pour avoir une chance d’agir juste (1)
On parle souvent d’une classe politique hors sol et de propositions déconnectées de la réalité. Une des raisons en est souvent des raisonnements qui, au lieu de partir du réel, reposent sur des lieux communs qui sont autant d’idées reçues erronées.
De ce point de vue, le dernier livre « Tous rentiers ! » de Philippe Askenazy est plus que salutaire, car il nous amène à revisiter précisément quelques lieux communs, source d’autant d’erreurs.
Cinq me semblent essentiels.
Commençons par la liaison entre rémunération et productivité
D’aucuns pensent qu’il y a un lien direct entre la productivité d’un métier et la rémunération correspondante. En fait, non, car le niveau d’une rémunération se corrèle d’abord à la capacité ou non de bénéficier d’un rapport de force favorable.
Quelques exemples tirés du livre, Tous rentiers ! : comment expliquer autrement qu’un pharmacien français gagne trois fois plus que son homologue anglais, ou qu’un conducteur du métro new-yorkais le double de son alter ego parisien ? Ou encore pour rester dans la même catégorie, qu’un conducteur londonien ait une rémunération de 50% supérieure à un pharmacien de la même ville ?
Autre absurdité d’un calcul à partir de la productivité apparente : « La valeur ajoutée apparente d’un psychanalyste est égale à la somme des paiements des clients, diminuée de quelques consommations intermédiaires (électricité, ménage…) : si le psychanalyste augmente le prix de sa consultation, donc sa rémunération, on observera que sa productivité apparente progresse. ».
Je corrèle ceci à l’absurdité de la mesure de la performance de l’économie à partir de l’évolution du PIB : le développement de tâches inutiles ou la destruction de biens existants pour leur remplacement à l’identique font progresser le PIB, alors que la meilleure utilisation de biens existants – comme par exemple le partage des voitures particulières ou de logements inoccupés – a un effet négatif. 
Une étude de McKinsey qui vient de paraître, montre aussi que les développements couplés du numérique et de l’impression 3D font diminuer le transfert de produits au profit de celui de data.
C’est ainsi que la plupart des économistes en arrivent à dire que la révolution numérique en cours ne crée pas de croissance, sans se rendre compte que c’est leur outil de mesure qui est déficient. 
Autre remarque de Philippe Askenazy : l’amélioration de la qualité n’est pas prise en compte dans les calculs : faire bien ou mal son travail n’est pas mesuré. Il le complète avec l’exemple d’un hôtel où l’on a changé les matelas, agrandi les chambres et construit une piscine : analyser la variation de prix en considérant que c’est la même prestation est faux.
Une conclusion à retenir en synthèse de tout cela : attention aux calculs mathématiques, car le réel ne se met pas en équation !
Ainsi que j’ai eu l’occasion de l’écrire dans mon dernier livre, "2017 : Le réveil citoyen" : « il est pertinent de multiplier et additionner pour calculer le coût de la trousse d’un élève, mais absurde pour savoir comment s’en servir. Pertinent pour évaluer le niveau de dépenses de l’État et des prélèvements publics, ou la part restant disponible pour les ménages et les entreprises, mais absurde pour en simuler les effets sur l’économie. »
(à suivre)

22 avr. 2016

AUTORITÉ

Ainsi va la vie !
Voilà un enfant qui n’en est plus un.
Elle sait que sa vie sera dure et que rien ne lui sera jamais donné : ni la protection de ses parents, ni la bienveillance de ses voisins, ni la douceur de la vie ne seront au rendez-vous de ses jours à venir.
Voilà une vache qui a intérêt à filer doux.
Elle sait que rien ne la protègerait en cas de courroux de sa petite maîtresse : ni son caractère normalement sacré, ni sa taille, ni sa force ne sont te taille face à une telle détermination.
Ainsi va la vie en Inde…

(photo prise à Hampi en juillet 2012)

20 avr. 2016

UNE EFFICACITÉ DES AIDES INTERNATIONALES QUI POSE QUESTION…

The Great escape – patchwork (4)
Qu’en est-il de l’efficacité des aides internationales ? Concourent-elles réellement à la réduction des inégalités ?
En guise d’apéritif pour nourrir la réflexion, quelques observations sur le danger d’approcher la pauvreté par l’arithmétique car « réduire la pauvreté est beaucoup plus facile à atteindre par des calculs statistiques qu’en réalité ! » :
« Le grand économiste et statisticien indien, P. C. Mahalanobis décida de demander combien les personnes avaient dépensé en riz ou blé au cours des 30 derniers jours. Beaucoup d’autres pays, pensant que les répondants ne pouvaient pas se souvenir correctement au-delà de 7 jours, optèrent pour cette période plus courte. Un jour, l’enquête indienne passa à son tour à 7 jours, et comme prévu, les dépenses journalières augmentèrent. Cet obscur et technique changement statistique divisa la pauvreté par deux : 175 Millions d’Indiens cessèrent d’être pauvres. »
« Si un Indien peut vivre avec 22 roupies par jour – et certains bien moins –, pourquoi donc un habitant des États-Unis ne peut-il pas vivre avec un dollar par jour ? (…) La pauvreté exclut pour la plupart des Indiens trois choses qui sont importantes et coûteuses aux USA : la maison, la couverture médicale, et l’éducation. En plus, dans un pays chaud comme l’Inde, pas besoin de se chauffer, ni de dépenser beaucoup pour se vêtir. Et les gens travaillent près de là où ils vivent, d’où ne dépensent presque rien en transport. »
Venons-en maintenant aux aides internationales. Un calcul a montré que la pauvreté mondiale pourrait être éliminée si chaque américain, anglais, français, allemand et japonais donnait 0,15 $ par jour. Rien que de très accessible donc. Alors pourquoi donc n’a-t-elle pas disparu ? Est-ce parce que nous n’avons pas assez donné ? Est-ce une problème de plomberie : augmentons la quantité d’eau qui rentre à un bout et nettoyons les conduits pour éviter les pertes, et tout sera réglé ?
Pas vraiment. Car comme le notait Peter Bauer en 1971 : « Si seul le capital manque pour que le développement ait lieu, il sera soit rapidement généré localement, soit fourni par l’étranger au gouvernement ou à des entreprises privées, le capital étant rémunéré par des taxes additionnelles ou des profits. Si, à l’inverse, les conditions du développement ne sont pas présentes, alors l’aide sera nécessairement improductive et donc inefficace. »
Terrifiant et limpide, non ? Et c’est ce que constatent les analyses faites par Angus Deaton : il n’y a aucun lien entre le niveau de l’aide et le développement. C’est même plutôt le contraire : c’est quand les aides sont moins élevées que la situation s’améliore !
Ainsi quand il a mis en regard pour l’Afrique le niveau des aides avec celui du développement, il a constaté que « la croissance baisse fortement pendant que l’aide s’accroit fortement. ». 
En fait la vraie corrélation est avec le niveau de prix  des commodités produites dans ces pays : la meilleure aide est d’accroître le prix de ce qu’on leur achète. Évident… mais ce n’est pas ce que nous faisons.
Angus Deaton analyse en détail pourquoi les aides sont contre-productives : 
« Un projet peut réussir selon ses propres critères, mais son déploiement au niveau de la nation peut échouer. Une évaluation parfaite d’un projet coexiste avec l’échec de l’aide pour le pays tout entier. »
« L’argument qu’une aide menace les institutions dépend de la taille de l’aide. En Chine, Inde ou Afrique du Sud, où l’aide internationale officielle a représenté ces dernières années moins de 5% du revenu national, et occasionnellement plus de 1% des dépenses totales gouvernementales, l’aide n’est pas assez importante pour modifier le comportement du gouvernement ou le développement des institutions. La situation est tout à fait différente dans l’essentiel de l’Afrique. 36 des 49 pays de l’Afrique sub-saharienne ont reçu au moins 10% de leur revenu national lors des 30 dernières années. Sachant que l’aide va au gouvernement, le ratio de l’aide par rapport aux dépenses publiques est encore plus grand. Le Bénin, le Burkina Faso, l’Éthiopie, Madagascar, le Mali, le Niger, le Sierra Leone, le Togo et l’Ouganda sont parmi les pays où l’aide a dépassé 75% des dépenses du gouvernement au cours de ces dernières années. Au Kenya et en Zambie, respectivement 25 et 50%. »
« Que l’aide stimule les dépenses du gouvernement a été de façon répétitive documenté, et le gouvernement est libéré du besoin de consulter ou d’obtenir l’approbation de ses citoyens »
« Dans les cas extrêmes, un afflux externe important, que ce soit une aide ou des ventes de commodités, peut accroître le risque de guerre civile, parce que les souverains ont les moyens d’éviter de partager le pouvoir, et parce que le valeur de ce flux est tel que les deux côtés sont prêts à se battre pour lui. »
« Pourquoi les donateurs laissent-ils faire et ne sanctionnent-ils pas ? Parce qu’ils ne subissent pas les conséquences de l’aide et n’ont pas d’information directe sur ce qui se passe sur le terrain. Ils dépendent des rapports transmis par les agences qui distribuent l’aide. Aussi ils se focalisent sur le volume de l’aide, non pas son efficacité. 
« Les agences gouvernementales sont sous la pression de leurs opinions publiques pour "faire quelque chose" contre la pauvreté – une pression qui est alimentée par les bonnes intentions de la population nécessairement mal informée – et ceci rend difficile pour les agences de couper les aides, même si leurs représentants locaux savent qu’elles font du mal. »
« Le problème des aides étrangères n’est pas ce qu’elles font pour les pauvres tout autour du monde – en effet elles les atteignent rarement – mais ce que les gouvernements font dans les pays pauvres. Le fait est que les aides étrangères aggravent la pauvreté en rendant les gouvernements moins attentifs aux besoins des pauvres, et ainsi leur fait du mal. »
Quel terrifiant réquisitoire !
Et ce n’est pas terminé…
 « La conditionnalité viole la souveraineté. », c’est-à-dire que le fait de conditionner l’octroi d’une aide à telle ou telle réalisation qui est décidée par le pays qui la fournit, conduit à déresponsabiliser et infantiliser le destinataire. Si les montants sont très élevés, le gouvernement local est un peu comme une marionnette artificiellement pilotée à distance.
Cela conduit Angus Deaton à ce raccourci : « Les projets d’investissements agricoles sont construits pour une économie imaginaire et ont autant de chances de réussir qu’un projet de faire pousser des fleurs sur la lune. ».
Aussi, « si la pauvreté et le sous-développement sont les conséquences de la faiblesse des institutions, alors en les affaiblissant ou en les freinant, les flots importants d’aides aboutissent exactement à l’inverse de ce qu’ils cherchent à faire. »
Quant aux programmes portant sur la santé, le bilan des programmes dits verticaux, c’est-à-dire ciblant une maladie précise, sont efficace par rapport à cette maladie qu’ils arrivent à effectivement éradiquer. Mais il y a des dommages collatéraux : 
« Les programmes verticaux d’aide médicale – comme contre le SIDA – ont des résultats positifs contre les maladies qu’ils visent, mais en détournant les ressources locales en leur faveur, ils diminuent de fait la mise en place d’une organisation locale horizontale de la santé : ils la désorganisent par exemple en retirant les infirmières et les aides paramédicales à leurs tâches routinières. »
Que faire ?
Angus Deaton propose malheureusement peu de solutions… 
Parce qu’il ne peut pas être question de ne rien faire, parce qu’admettre de voir une partie importante de l’humanité ne pas profiter de la « Grande Évasion », voici les quelques pistes évoquées à la fin du livre :
- Avoir une action pédagogique au sein de nos pays pour expliquer l’effet dévastateur des aides massives,
- Avoir une vue globale de ce que l’on fait dans un pays donné à travers tous les traités, les échanges, le commerce mondial, la banque mondiale, le FMI…
- Soutenir prioritairement les pays dotés d’un vrai gouvernement local, tout en étant conscient que l’on ne peut pas abandonner les autres qui sont justement les pays qui ont le plus besoin d’aide,
- Pour aider un pays, le mieux est de lui garantir un prix minimum d’achat de ses productions, et de le laisser choisir ce qu’il fera de cette ressource financière,
- En cas de soutien direct, privilégier des programmes de base comme la qualité de l’eau, l’assainissement, ou la lutte antiparasitaire. C’est plus complexe, mais plus efficace.