8 juil. 2011

C'EST COMMENT QU'ON FREINE ?

La folie des rythmes 
Difficile donc de garder le contrôle d'une situation, de faire ce que l'on veut et de  changer de rythme. C'est ce qui a souvent été chanté. 
En voilà trois exemples volontairement très différents ! 



7 juil. 2011

COMME UN COUREUR, L’ENTREPRISE DOIT ADAPTER SON BIORYTHME À LA SITUATION

Il faut aussi savoir ralentir…
Quand je commence à courir, mon corps est froid, mon rythme cardiaque trop lent, ma respiration inadaptée. Puis, rapidement, tout se modifie et je cours efficacement. À l’inverse, pour pouvoir m’endormir, mon organisme ralentit. Ainsi, le cerveau humain a une capacité à gérer inconsciemment l’adaptation du rythme à la situation donnée : ralentissement pendant les périodes de sommeil, accélération lors des courses ou des émotions fortes.
L’entreprise est aussi un corps vivant qui a son propre biorythme qui définit la pulsation interne et la rapidité des échanges. Elle doit être capable de l’adapter à la différence des situations vécues : si elle est au repos ou si elle court, il va changer.
Par exemple, la mise en place des nouveaux opérateurs de téléphonie mobile a commencé par une première phase d’effervescence : la rapidité était l’essentiel, bien plus que la précision ou l’exactitude, car l’important était de conquérir des parts de marché pour prendre position.
A succédé une phase de consolidation où, tout en continuant à être réactif vis-à-vis de l’évolution des clients et de la concurrence, il a fallu surtout fidéliser, développer le panier moyen et contrôler les coûts internes : ceci a amené à moins privilégier la rapidité et à mettre en place des processus plus « lents » afin de mener toutes ces optimisations.
Arrive aujourd’hui une nouvelle phase avec une concurrence plus ouverte et plus large. Probablement le besoin de réactivité est de retour…

6 juil. 2011

QUE MAITRISE CONSCIEMMENT UNE ENTREPRISE ?

Comment une grande entreprise peut-elle agir de façon coordonnée ? (2)

Dans mon livre, je mettais l’accent sur quatre questions à se poser pour évaluer la capacité d’une grande entreprise à agir de façon coordonnée :
  • Est-ce que les données figurant dans le système de management central sont bien les mêmes que celles qui figurent dans les niveaux inférieurs ?
  • Est-ce que chaque sous-ensemble a une compréhension de la stratégie d’ensemble et a accès aux conséquences des décisions qu’il prend ? Y a-t-il une cohérence ou non entre tous les systèmes ? Que se passe-t-il si on élargit aux systèmes liés aux organisations syndicales ou associatives ?
  • Est-ce qu’il y a des éléments de l’entreprise qui sont toujours inconscients(1) ? Ou formulé autrement, est-ce qu’une partie de l’activité de l’entreprise n’est jamais explicitement managée ?
  • Y a-t-il un système de diffusion de la Direction Générale vers les unités élémentaires, pour assurer la communication d’une décision, le déclenchement et la synchronisation des actions ? Et des unités vers la Direction Générale pour faire remonter une information ou déclencher une alerte ?
J’y mettais aussi en exergue l’anecdote suivante : « Dans les années soixante, l’humoriste Fernand Raynaud avait un sketch célèbre tournant autour de la question suivante : « Combien de temps faut-il pour que refroidisse le canon du fusil ? ». Cette question était posée par un adjudant à de jeunes recrues et la bonne réponse était : « Un certain temps », c’est-à-dire le temps qu’il faudra. Eh bien, à la question « Combien de temps attend le client ? » ou à celle « Quel temps faut-il pour lancer un produit ? », la réponse est là aussi souvent un certain temps, le temps nécessaire pour que le cas soit traité… »

(1) Quelques exemples : y a-t-il un système qui permet de suivre et de piloter « consciemment » le temps d’attente des clients, ou bien ce temps d’attente est-il simplement la résultante des processus de l’entreprise ? Est-on capable de suivre et de piloter le temps nécessaire pour lancer un nouveau produit, ou à nouveau ce temps est-il simplement la résultante des actions des différents services concernés ?

5 juil. 2011

DIFFICILE D'ATTRAPER UN VERRE SI LES JAMBES BOUGENT AU MAUVAIS MOMENT !

Comment une grande entreprise peut-elle agir de façon coordonnée ? (1)
Pour faire face à des concurrents à bas coût, la Direction Générale d’une compagnie aérienne a lancé un vaste plan de réduction des dépenses dans l’ensemble de l’entreprise. Une équipe ad hoc est constituée. Sont notamment revues toutes les dépenses dans l’aéroport principal. Un audit met en évidence que le nombre de personnes affectées à la réception des bagages est excessif, le calcul reposant sur le nombre total de bagages traités par jour. La décision de diminuer le nombre de bagagistes est prise et est rapidement mise en œuvre.
En parallèle, une autre partie de cette grande entreprise qui a en charge de développer les ventes en Asie, et singulièrement au Japon, décide de promouvoir dans ce même aéroport une logique de hub : des correspondances très rapides vont permettre à des voyageurs venant du Japon de transiter efficacement et repartir vers une destination quelconque en Europe. Le temps de correspondance visé est de 30 minutes.
Or les vols depuis le Japon sont effectués dans des Boeing 747 et l’arrivée de ces vols a lieu à l’heure de pointe de l’aéroport : il y a donc à ce moment-là un très grand nombre de bagages à traiter. Aussi, compte tenu de la diminution du nombre de bagagistes, le temps moyen pour traiter un bagage monte à 45 minutes : en effet, le calcul d’optimisation fait pour la réduction des coûts a raisonné en moyenne journalière et n’a pas tenu compte de l’effet de pointe.
Ainsi la juxtaposition des deux décisions, optimisation du traitement des bagages et mise en place du hub, a fait que la plupart des voyageurs venant du Japon repartaient vers leurs destinations finales sans leurs bagages !
Le coût direct lié au traitement de tous les bagages en retard (intervention manuelle hors processus, frais d’acheminement jusqu’au client final incluant des taxis, indemnités, …) a été nettement supérieur à l’économie faite par la réduction du nombre de bagagistes : une estimation rapide de ce surcoût l’a évalué à dix fois l’économie initiale. Et ce sans parler des dégâts faits à l’image de la compagnie auprès des clients mécontents, dégâts toujours difficilement chiffrables : l’incident a été tellement important que l’entreprise a failli être déréférencée par toutes les agences de voyages japonaises.
Un peu comme si, au moment d’attraper un verre, nos jambes s’étaient mises en mouvement d’elles-mêmes. Difficile alors de réussir à attraper le verre…

4 juil. 2011

UNE CRÉATION DE VALEUR QUI N’EN EST PAS UNE

Je te tiens, tu me tiens par la barbichette
Fin de journée, dans un bar quelque part dans le monde. John, assis à une table du fonds, attend, comme tous les soirs, son ami Paul.
Un coup d'œil à sa montre. Bizarre, Paul est vraiment en retard. Le voilà qui rentre, essoufflé, une toile sous le bras :
« Regarde cette toile, dit Paul à John.
- Tu l’as payée combien ?
- Cinq mille euros. »
Deux heures plus tard, John repense au tableau : « S’il l’a payé cinq mille, c’est qu’il vaut nettement plus. »
John pianote un email : « Dix mille pour ton tableau »
Réponse : « OK pour 100 % de plus-value ! »
Au milieu de la nuit, Paul se réveille : « Quand John découvre mon tableau, il ne dit rien. Deux heures après, il me propose le double : il a appris quelque chose ! »
Il envoie à son tour : « Ai réfléchi. Te le rachète quinze mille. »
Un mois plus tard, Paul qui, la veille, a repris le tableau pour cent cinquante mille euros, retrouve John :
« Combien pour le tableau ?
- Rien, je suis passé à la sculpture.
- Dommage, juste au moment où on commençait à vraiment gagner de l’argent. »
Bien sûr tout ceci n’est qu’une histoire imaginaire…

1 juil. 2011

SE CROIRE INVULNÉRABLE TUE !

Plus une entreprise est grande et puissante, plus elle risque de se déconnecter du réel et se croire invulnérable. Or le réel est bien là, dans et autour de l'entreprise. A un moment ou à un autre, il se rappellera aux bons soins de ceux qui l'ont oublié...

Certains succès montent à la tête
Cette entreprise était allée de succès en succès. Créée il y a maintenant plus de cinquante ans, elle avait rapidement pris une position de leader sur ses marchés et avait réussi à s’imposer mondialement.
Après cette phase initiale d’expansion, pour accroître son efficacité, elle avait progressivement automatisé tout ce qui pouvait l’être. Parallèlement, elle avait mis en place un plan de formation interne pour accueillir les nouveaux et accélérer l’apprentissage de ses recettes de succès. Tout ceci facilitait l’action quotidienne et permettait de se concentrer sur ce qui était nouveau.
Aujourd’hui, un sentiment de puissance s’est diffusée et elle se sent invulnérable aux évolutions de la conjoncture et des exigences des clients : elle a oublié tous les efforts faits dans le passé, et est convaincue d’être « naturellement » plus forte que ses concurrents.
Résultat, elle ignore de plus en plus sa concurrence, et étant experte, croit savoir mieux que ses clients ce dont ils ont besoin. Elle est de moins en moins capable de repérer les signaux faibles venant de son environnement et a tendance à oublier les points qui sont à l’origine de son propre succès.
L’entreprise continue à être dirigée de façon consciente, mais n’intègre plus les informations qui pourraient contredire ses interprétations, interprétations qui sont devenues des certitudes. 
Sans le savoir, sans s’en rendre compte, l’entreprise agit peut-être à contre-courant : elle est devenue insensible à son environnement, et donc vulnérable à toute rupture…
On est tellement bien chez nous...
Grâce à sa position dominante, la profitabilité de cette entreprise est largement supérieure à la moyenne du marché. Elle est assise à la fois sur des positions industrielles clés, sur le contrôle de quelques ressources essentielles et sur un savoir-faire industriel et marketing. Bref tout va bien…
Pour récompenser tout le monde, des avantages ont été accordés, année après année, aux salariés et à la Direction. Le sentiment d’appartenance à l’entreprise s’est renforcé au fur et à mesure du cumul de ces avantages.
Un accord tacite entre Direction, syndicats et personnel amène, à l’occasion de chaque négociation, à les renforcer, quitte à externaliser davantage de fonctions pour ne pas dégrader la compétitivité de leur entreprise : il y a de moins en moins de monde à l’intérieur et ceux qui s’y trouvent sont de plus en plus en décalage avec le « monde extérieur ».
S’est ainsi développé petit à petit un confort interne croissant qui n’incite plus à la vigilance. Finalement, tout le monde, Direction comme salariés, privilégie le développement de ce confort : le corps social de l’entreprise se coupe progressivement de l’extérieur. À la limite, on manage alors pour manager, on pense qu’une réunion est bonne parce qu’elle s’est simplement bien passée, et on oublie que tout ceci n’a de sens que si la performance réelle, celle vue par les clients et l’extérieur, s’améliore effectivement.
Devenue autiste, l’entreprise a tendance à protéger jusqu’au bout les avantages acquis, éventuellement même en mettant en péril sa survie…
Je n'ai pas besoin des autres
Créée initialement autour d’un produit unique qu’elle a mondialisé, cette entreprise a ensuite grandi rapidement en multipliant ses lignes de produits. Elle est experte dans la transformation d’une innovation en marché : identification des savoir-faire clés, industrialisation des processus, marketing et commercial ad-hoc, gestion de la marge et du profit…
Ce développement s’est accompagné de la mise en place de structures ad-hoc, d’une spécialisation croissante et d’une multiplication des interlocuteurs internes. Le système global est devenu de plus en plus complexe et l’atteinte de la performance suppose une collaboration efficace entre un nombre croissant d’acteurs.
L’intégration transverse est maintenant difficile à piloter et est de moins en moins maîtrisée. Une partie des acteurs en place se fait sa propre interprétation de la mission qui lui est allouée et de ce que peuvent attendre ou fournir les autres acteurs. Certains vont même jusqu’à se poser la question de la pertinence des structures  communes et de l’existence de l’entreprise en tant que telle.
Pourtant ces structures communes sont celles qui fournissent les ressources et les innovations. Finalement les délais de lancement des nouveaux produits s’allongent…
Et comme la multiplication des lignes de produit s’était faite selon un logique client et qu’elles s’adressent toujours le plus souvent aux mêmes clients, ceux-ci sont contactés en désordre et ne comprennent plus la logique de l’entreprise…
Finalement, plus personne n’a confiance en personne, et les processus internes deviennent redondants…
La performance globale se dégrade, mais personne ne s’en rend vraiment compte, car chacun est focalisé sur son périmètre. L’entreprise se fissure doucement et sûrement…

Des entreprises font des calculs qui ne veulent rien dire
Cette entreprise allait de la chimie de base à la chimie de spécialités, chaque ligne de produit étant centralement pilotée par une structure ad-hoc. En France, les organisations commerciales étaient dédiées à ces lignes de produits, mais, partout ailleurs, existait un responsable pays qui exerçait une supervision de toutes les activités locales.
Aussi « logiquement », ce responsable calculait la part de marché du groupe dans le pays. Cette part de marché était l’agglomération des parts de marché de chaque produit, et faisait une moyenne entre des produits n’ayant aucun rapport entre eux : quel sens pouvait avoir de mélanger des produits aussi dissemblables que les dérivés chlorés ou sulfurés avec des silicones, voire même des terres rares ?
La part de marché résultante n’avait donc aucun sens métier : ce n’était que le résultat d’un calcul et rien de plus.
Or comme le responsable pays avait un rôle historique important dans le groupe, elle était suivie au niveau de la Direction Générale et toute évolution de cette part de marché déclenchait analyse et questions.
Le système central construisait ses interprétations sur une donnée qui n’avait aucun sens réel et n’avait aucun lien avec les logiques de développement des activités dans les pays…

SE CROIRE INVULNÉRABLE, C'EST ÊTRE MALADE !

Je suis malade en musique 
Bon nombre d'entreprises sont malades sans trop s'en rendre compte, notamment quand elles se croient invulnérables... Quoi donc de plus normal que de finir cette semaine avec trois versions de "Je suis malade" ?



30 juin 2011

DES ENTREPRISES FONT DES CALCULS QUI NE VEULENT RIEN DIRE

Se croire invulnérable tue (4)
Cette entreprise allait de la chimie de base à la chimie de spécialités, chaque ligne de produit étant centralement pilotée par une structure ad-hoc. En France, les organisations commerciales étaient dédiées à ces lignes de produits, mais, partout ailleurs, existait un responsable pays qui exerçait une supervision de toutes les activités locales.
Aussi « logiquement », ce responsable calculait la part de marché du groupe dans le pays. Cette part de marché était l’agglomération des parts de marché de chaque produit, et faisait une moyenne entre des produits n’ayant aucun rapport entre eux : quel sens pouvait avoir de mélanger des produits aussi dissemblables que les dérivés chlorés ou sulfurés avec des silicones, voire même des terres rares ?
La part de marché résultante n’avait donc aucun sens métier : ce n’était que le résultat d’un calcul et rien de plus.
Or comme le responsable pays avait un rôle historique important dans le groupe, elle était suivie au niveau de la Direction Générale et toute évolution de cette part de marché déclenchait analyse et questions.
Le système central construisait ses interprétations sur une donnée qui n’avait aucun sens réel et n’avait aucun lien avec les logiques de développement des activités dans les pays…

29 juin 2011

JE N’AI PAS BESOIN DES AUTRES

Se croire invulnérable tue (3)
Créée initialement autour d’un produit unique qu’elle a mondialisé, cette entreprise a ensuite grandi rapidement en multipliant ses lignes de produits. Elle est experte dans la transformation d’une innovation en marché : identification des savoir-faire clés, industrialisation des processus, marketing et commercial ad-hoc, gestion de la marge et du profit…
Ce développement s’est accompagné de la mise en place de structures ad-hoc, d’une spécialisation croissante et d’une multiplication des interlocuteurs internes. Le système global est devenu de plus en plus complexe et l’atteinte de la performance suppose une collaboration efficace entre un nombre croissant d’acteurs.
L’intégration transverse est maintenant difficile à piloter et est de moins en moins maîtrisée. Une partie des acteurs en place se fait sa propre interprétation de la mission qui lui est allouée et de ce que peuvent attendre ou fournir les autres acteurs. Certains vont même jusqu’à se poser la question de la pertinence des structures  communes et de l’existence de l’entreprise en tant que telle.
Pourtant ces structures communes sont celles qui fournissent les ressources et les innovations. Finalement les délais de lancement des nouveaux produits s’allongent…
Et comme la multiplication des lignes de produit s’était faite selon un logique client et qu’elles s’adressent toujours le plus souvent aux mêmes clients, ceux-ci sont contactés en désordre et ne comprennent plus la logique de l’entreprise…
Finalement, plus personne n’a confiance en personne, et les processus internes deviennent redondants…
La performance globale se dégrade, mais personne ne s’en rend vraiment compte, car chacun est focalisé sur son périmètre. L’entreprise se fissure doucement et sûrement…

28 juin 2011

ON EST TELLEMENT BIEN CHEZ NOUS

Se croire invulnérable tue (2)
Grâce à sa position dominante, la profitabilité de cette entreprise est largement supérieure à la moyenne du marché. Elle est assise à la fois sur des positions industrielles clés, sur le contrôle de quelques ressources essentielles et sur un savoir-faire industriel et marketing. Bref tout va bien…
Pour récompenser tout le monde, des avantages ont été accordés, année après année, aux salariés et à la Direction. Le sentiment d’appartenance à l’entreprise s’est renforcé au fur et à mesure du cumul de ces avantages.
Un accord tacite entre Direction, syndicats et personnel amène, à l’occasion de chaque négociation, à les renforcer, quitte à externaliser davantage de fonctions pour ne pas dégrader la compétitivité de leur entreprise : il y a de moins en moins de monde à l’intérieur et ceux qui s’y trouvent sont de plus en plus en décalage avec le « monde extérieur ».
S’est ainsi développé petit à petit un confort interne croissant qui n’incite plus à la vigilance. Finalement, tout le monde, Direction comme salariés, privilégie le développement de ce confort : le corps social de l’entreprise se coupe progressivement de l’extérieur. À la limite, on manage alors pour manager, on pense qu’une réunion est bonne parce qu’elle s’est simplement bien passée, et on oublie que tout ceci n’a de sens que si la performance réelle, celle vue par les clients et l’extérieur, s’améliore effectivement.
Devenue autiste, l’entreprise a tendance à protéger jusqu’au bout les avantages acquis, éventuellement même en mettant en péril sa survie…