12 déc. 2014

DISPARUS

Avant…
Bouts de vêtements sur une patère,
Bribes de tissus verticales,
Odeur et humidité suantes en prime, 
Tâches sur l’ocre d’une paroi lisse.
Autre mur, un trou pour un plein,
Une flèche vers un passé révolu,
Vie disparue, vie ravagée,
Du blanc déchiré dans un ocre
Souvenirs télescopés en terre indienne,
Scories moites d'une marche de touriste,
Béance d'un salon de beauté disparu, 
Quelques mètres qui font fossé.

(Souvenir de Hampi en Inde – juillet 2012)

11 déc. 2014

TOUT CHANGER, C’EST POSSIBLE !

Reinventing organizations (15)
Développer l’auto-management, ne veut pas dire qu’il n’y a plus d’organisation, ni que toute structure dans l’entreprise a disparu. Non bien sûr, simplement elle repose sur des unités de base, très autonomes, et donc dotées de tout ce qu’il faut pour fonctionner. On n’est loin des structures pyramidales et hiérarchiques, et de grandes directions fonctionnelles qui préparent et jugent le travail exécuté par d’autres.
Deuxième erreur : croire que toute le monde est égal. Non, simplement les rôles et les fonctions ne sont pas définis a priori, ils émergent dynamiquement des situations, des évolutions et des savoir-faire individuels.
Troisième point soulevé très justement par Frédéric Laloux : le malentendu de l’ « empowerment ». Si une direction veut développer l’empowerment, cela veut dire qu’elle continue à se penser supérieure, qu’elle reste le centre du pouvoir, et que, dans un geste généreux, elle en transmet une partie à la base de l’entreprise.  Dans un système auto-organisé, rien de tel : inutile de se battre pour avoir du pouvoir, plus on l’a !
Dans son livre, Frédéric Laloux détaille aussi comment concrètement la vie d’une entreprise est changée. Le tableau ci-dessous fait la synthèse des transformations principales.



(à suivre)

10 déc. 2014

PARIER SUR L’INTELLIGENCE ET LA RESPONSABILITÉ

Reinventing organizations (14)
Revenons sur chacune des trois ruptures.
D’abord l’auto-management.
Pour simplifier l’idée, elle repose sur le constat suivant : puisque chaque membre d’une entreprise est un adulte, souvent à la tête d’une famille, doué du droit de vote, pourquoi ne pas lui faire confiance, et le traiter comme un enfant qu’il faut constamment surveiller et à qui l’on doit dire quoi faire et comment ?
Pourquoi ne pas parier sur l’intelligence individuelle et collective ? 
Car aucune situation n’est vraiment identique à une autre, le monde est trop incertain, les talents et les motivations trop divers pour que des chefs même éclairés puissent faire des choix plus pertinents que ceux vivent le réel et y sont physiquement confrontés.
Dès lors plus besoin d’encadrement, plus de distinction entre cols bleus et cols blancs, plus d’exécutants entourés de chefs et sous-chefs.
Un des exemples sur lequel Frédéric Laloux prend appui est l’entreprise Favi longtemps dirigée par Jean-François Zobrist. 
Dans un article diffusé le 13 décembre 2012,  « La confiance doit remplacer le contrôle », j’avais moi-même sur mon blog parlé du mode de management insolite de cette fonderie.
Cet exemple a lui seul montre que non seulement c’est possible, mais que cela aboutit à développer la résilience de l’entreprise, sa performance et son développement.
Et pourtant cela reste un cas bien isolé….
(à suivre)

9 déc. 2014

L’ENTREPRISE VIVANTE

Reinventing organizations (13)
A quoi correspond donc ce nouveau mode d’organisation ? A un système vivant, dont il s’agit de comprendre, accompagner et faciliter la vie propre.
Diriger cesse donc de décider, mais devient comprendre et faciliter : à l’image des parents, dont le rôle est de comprendre l’adulte qui est en potentiel au sein de leurs enfants, pour en faciliter l’émergence et le développement.
Telle est la métaphore centrale du livre Reinventing Organizations.
Ceci conduit à trois ruptures majeures :
- L’auto-management : plus besoin de hiérarchie, de chefs et sous-chefs, inutile non plus de chercher à tous prix le consensus. Le fonctionnement est horizontal et chaotique… comme la vie.
- Le tout : plus besoin de laisser sa vraie personnalité aux portes du bureau ou de l’usine, de nier la part féminine, de cacher les doutes, les intuitions ou les émotions. Chacun peut être pleinement lui-même.
- La finalité en mouvement : plus besoin de prévision ou de contrôle, mais de l’écoute et de la compréhension. L’important est de comprendre la finalité de l’organisation et de l’aider à l’atteindre.
Cette description peut sembler une utopie inaccessible et purement théorique. Mais non ! 
Au travers de plusieurs monographies et d’exemples multiples issus d’entreprises de tailles diverses et appartenant à tous les secteurs, Frédéric Laloux illustre son propos : les entreprises vivantes sont là, déjà parmi nous… même si elles sont encore en petit nombre.
(à suivre)

8 déc. 2014

LES NOUVEAUX PARADIGMES DE L’ORGANISATION VIVANTE

Reinventing organizations (12)
Nous arrivons donc au cœur du livre de Frédéric Laloux, avec la description de ce nouveau mode d’organisation émergent qui a été l’objet central de ses recherches. Je ne vais pas déflorer ici l’essentiel de son livre, mais juste continuez à en donner un patchwork pour donner un avant-goût, et je l’espère l’envie de vous y plonger à votre tour !
Il s’agit d’un mode curieux où l’organisation devient vivante, sait choisir son but, s’auto-organise, où les libertés individuelles sont maximum, où l’échange et la dynamique collective sont essentielles, où le rôle du leader mute complètement, jusqu’à peut-être un jour disparaître lorsque le système sera arrivé à maturité… Étrange monde, bien éloigné des organisations bureaucratiques et tayloriennes encore si présentes.
Tout d’abord à quel changement de paradigme personnel correspond donc ce nouveau mode de fonctionnement collectif :
- Ne plus s’identifier à son propre ego, et apprendre à minimiser le besoin de contrôle son environnement : prendre la vie comme elle vient, avec ses hauts et ses bas,
- Ne plus chercher ni la reconnaissance, ni le succès, mais simplement l’accomplissement personnel et la sensation de faire bien : viser le geste juste ici et maintenant
- Ne pas se fixer d’objectifs extérieurs, mais approfondir qui nous sommes profondément : s’appuyer sur sa vraie nature et sa force naturelle,
- Ne plus se penser distinct de ce qui nous entoure, ni séparer le monde en entités disjointes, mais penser globalement : ne pas séparer vie personnelle et professionnelle, ne pas séparer une entreprise de son écosystème et de ses concurrents
Tout ceci raisonne fortement avec la vision bouddhiste du monde. L’entreprise du XXIème siècle serait-elle une transposition managériale et organisationnelle du bouddhisme ? Pas complètement bien sûr, mais un peu oui…
(à suivre)

5 déc. 2014

DIVINES COLÈRES

Ciels d’orage
J’aime la Provence pour la chaleur de ses étés, l’azur de ses ciels, la multitude de ses étoiles, le chant de ses cigales ou les alignements de ses lavandes.
Mais les instants qui précèdent les orages sont habités d’une tension irremplaçable.
Le temps est alors suspendu, la violence latente, le déchirement à venir. L’encre des nuages est le barrage qui contient le flot qui va se déverser.
Dans quelques minutes, le vent se lèvera, les éclairs exploseront, et le déluge s’épandra, torrent d’énergie, sans merci, déchirant les feuillages, lessivant sols et peaux.
A l’abri de ma terrasse, je contemplerai la colère des Dieux, priant qu’elle soit la plus brève possible, et regrettant déjà d’avoir aimé, un temps, la noirceur qui l’a précédée.

4 déc. 2014

LE MILLEFEUILLE ORGANISATIONNEL

Reinventing organizations (11)
Jusqu’à présent j’ai parlé des différents modes d’organisation et de management, comme s’ils s’étaient succédés dans le temps, chacun étant remplacé par le suivant.
Il n’en est rien. Bien au contraire. Comme ils se succèdent de plus en plus rapidement, ils cohabitent et se superposent. 
Ainsi que le relève Frédéric Laloux, on retrouve essentiellement les 4 dernières générations :
- La loi des gangs est présente dans nos sociétés (organisation « Red » selon sa terminologie)
- Nos organisations publiques sont essentiellement régies par des organisations bureaucratiques, et les castes n’ont pas disparues (« Amber »)
- Le monde des grandes entreprises est celui où règne le loi quantitative du profit, du marché et du marketing (« Orange »)
- Et parfois l’entreprise commence à devenir responsable, et les associations non marchandes fleurissent (« Green »)
Le tableau ci-joint tiré de son livre présente les caractéristiques de chacune de ces organisations : des exemples, mes ruptures majeures, la métaphore principale.
Mais cette évolution et la marche en avant n’est pas terminée : un nouveau mode d’organisation est en train de naître…

(à suivre)

3 déc. 2014

UN PLAIDOYER POUR PLUS D’OUVERTURE ET D’ACCEPTATION DE LA DIVERSITÉ

L’Europe et la France ne sont pas construites sur la fermeture
Au moment où une ambiance pour le moins frileuse par rapport à la diversité et à l’immigration se propage en Europe, et singulièrement en France, le discours prononcé par le Pape devant le Parlement européen le 25 novembre 2014 apporte une force et une vision rafraichissantes. Bien loin des thèses du Front National ou de certains milieux ultra-catholiques…
En voici les extraits qui m’ont le plus frappé (les titres sont de mon cru)
Sur l’Europe dans le monde
« A côté d’une Union Européenne plus grande, il y a aussi un monde plus complexe, et ce monde est en pleine évolution. Un monde toujours plus interconnecté et globalisé, et donc de moins en moins « eurocentrique ». A une Union plus étendue, plus influente, semble cependant s’adjoindre l’image d’une Europe un peu vieillie et comprimée, qui tend à se sentir moins protagoniste dans un contexte qui la regarde souvent avec distance, méfiance, et parfois avec suspicion. »
Sur l’individu et le collectif
« Il convient de faire attention pour ne pas tomber dans des équivoques qui peuvent naître d’un malentendu sur le concept de droits humains et de leur abus paradoxal. (…) Par conséquent je considère qu’il est plus que jamais vital d’approfondir aujourd’hui une culture des droits humains qui puisse sagement relier la dimension individuelle, ou mieux, personnelle, à celle de bien commun, de ce « nous-tous » formé d’individus, de familles et de groupes intermédiaires qui s’unissent en communauté sociale. En effet, si le droit de chacun n’est pas harmonieusement ordonné au bien plus grand, il finit par se concevoir comme sans limites et, par conséquent, devenir source de conflits et de violences. »
Sur la diversité et l’immigration
« La devise de l’Union Européenne est unité dans la diversité, mais l’unité ne signifie pas uniformité politique, économique, culturelle ou de pensée. En réalité, toute unité authentique vit de la richesse des diversités qui la composent : comme une famille qui est d’autant plus unie que chacun des siens peut être, sans crainte, davantage soi-même. »
« D’autre part, les particularités de chacun constituent une richesse authentique dans la mesure où elles sont mises au service de tous. Il faut toujours se souvenir de l’architecture propre de l’Union Européenne, basée sur les principes de solidarité et de subsidiarité, de sorte que l’aide mutuelle prévale, et que l’on puisse marcher dans la confiance réciproque. »
« L’Europe sera en mesure de faire face aux problématiques liées à l’immigration si elle sait proposer avec clarté sa propre identité culturelle et mettre en acte des législations adéquates qui sachent en même temps protéger les droits des citoyens européens et garantir l’accueil des migrants ; si elle sait adopter des politiques justes, courageuses et concrètes qui aident leurs pays d’origine dans le développement sociopolitique et dans la résolution des conflits internes – cause principale de ce phénomène – au lieu des politiques d’intérêt qui accroissent et alimentent ces conflits. Il est nécessaire d’agir sur les causes et non seulement sur les effets. 

2 déc. 2014

L’ENTREPRISE RESPONSABLE

Reinventing organizations (10)
Nouvelles questions : n’est-il pas trop simpliste de s’intéresser seulement à ce qui marche et ne marche pas ? Le monde est-il si mathématisable et matérialiste ? Est-ce qu’il n’y a pas d’autres dimensions importantes, comme la communauté, l’harmonie, la coopération ?
A ces interrogations, le monde du marché ne sait pas quoi répondre. Naît alors progressivement un nouveau monde, le monde du pluriel, du complexe et des interactions, celui que Frédéric Laloux habille de vert. Les relations n’y sont plus seulement verticales, top-down, mais horizontales et bottom-up. Les dirigeants y deviennent des leaders au service de leur organisation.
Quelles sont les ruptures qui apparaissent ?
D’abord le transfert de pouvoir à ceux qui font face aux problèmes au jour le jour, c’est « l’empowerment » : décentraliser, partager le pouvoir le plus près possible du terrain, diriger avec humilité.
Ensuite accorder une grande importance au partage d’une culture orientée vers des valeurs communes et à la fixation d’objectifs qui constituent une vraie source d’inspiration : la culture est la glu de l’organisation, et les objectifs permettent à chacun de vouloir se dépasser.
Enfin, ne pas être focalisé seulement sur la création de valeur pour l’actionnaire, mais aussi pour le management, les salariés, les partenaires, et plus largement toute la société. L’entreprise devient socialement responsable, et considère que c’est une part importante de son activité et de sa raison d’être. Alors que précédemment la métaphore de l’organisation était celle de la machine, elle devient celle de la famille.
Quand on regarde notre monde, nous avons l’impression que ce mode d’organisation n’a pas supplanté les autres, mais qu’il cohabite avec les précédents. Est-ce exact ?
(à suivre)

1 déc. 2014

LES LOIS DU SUCCÈS ET DU MARCHÉ

Reinventing organizations (9)
Et si ? Si jamais je faisais ceci plutôt que cela qu’adviendrait-il ? Si jamais je ne respectais plus les règles immuables depuis toujours, est-ce que j’aboutirais à une meilleure solution ?
Voilà le grand changement mental qui conduit à une nouvelle mue : l’individu a le droit de remettre en cause les normes… à condition bien sûr de montrer qu’il aboutit ainsi à un meilleur système.
Et si la Terre n’était pas plate ? Et si le soleil ne tournait pas autour d’elle ? Et si le soleil était lui-même en mouvement ? Pourquoi donc une pomme tombe-t-elle toujours vers le sol, et pourquoi ne tombons-nous pas quand la Terre tourne ?...
Se poser des questions, c’est risquer d’ébranler le bel édifice des pyramides sociales, mais c’est aussi ouvrir la porte au progrès et à l’innovation. Le monde des castes bureaucratiques n’aime pas le changement, il ne connaît que les certitudes. Pour lui, l’incertitude n’est pas seulement un problème, c’est le mal à combattre !
Vive donc l’émergence du monde des remises en cause où les individus deviennent autorisés à poursuivre leurs propres objectifs.
C’est aussi un monde matérialiste puisqu’il ne connaît que ce qu'il voit et touche. La religion, Dieu, la spiritualité, et toutes les équations où 1+1 est différent de 2 sont niés, si ce n’est ridiculisés. Ce qui est sérieux est mathématisable, le reste n’est que baliverne, scorie des temps anciens.
En terme d’organisation, après le temps des gangs et de la mafia, puis celui des églises et de l’armée, arrive maintenant le temps des grandes entreprises mondiales. Il apporte  une triple rupture : l’innovation, la responsabilité et la méritocratie.
Innovation, parce que poser des questions et remettre en cause sont possibles. Responsabilité, parce que des objectifs sont fixés avec des récompenses à la clé. Méritocratie parce que l’on n'est plus bloqué par la caste à laquelle on appartient. 
Évidemment en réalité le système est loin d’être parfait… 
Quel en est le côté sombre ? Le dogme de la mathématisation et de la croissance sans fin. Peu importe que tel ou tel produit soit utile ou non, du moment qu’il peut être conçu, fabriqué, et acheté, il est souhaitable. C’est le temps béni de l’argent roi, de la consommation et de son valet, le marketing. Inutile de dire que nous vivons encore très largement dans cette étape…
(à suivre)