24 févr. 2024

KERALA DUST - MARIA

Un rythme, des mots peuvent ensorceler. 

Ceux de Kerala Dust dans Maria agissent sur moi comme une drogue... douce :

Tu es un virgule à une question ou un point qui ne peut pas être soulevé.
Un incident qui te réveille pour un soleil qui ne vient jamais.
Une réponse à quelque énigme ou une vérité qui s’ensuit.
Mais certains diront que c’est pourquoi je suis tombé amoureux de toi.
 
Un désir indéterminé ou un plan non concluant.
Tu es la mer qui continue de couler à travers les fissures entre nos mains.
Une conception immaculée ou les caméras sur la lune.
Mais certains diront que c’est pourquoi je suis tombé amoureux de toi


(You’re a comma to a question, or a point that can’t be raised.

An incident that wakes you to a sun that never came.

An answer to some riddle or a consequential truth.

But some might say that’s why I fell for you.

 

An indeterminate desire or an inconclusive plan.

You’re the sea that keeps on flowing through the cracks between our hands.

An immaculate conception or the cameras on the moon.

But some might say that’s why I fell for you.)

19 févr. 2024

MOUVEMENT

Un chemin possible,

Étroit, ondulant, séduisant.

Une piste ocre vers un ailleurs.

Un inconnu aujourd’hui lointain.

 

De chaque côté, le vide.

Ne pas trembler, ne pas faillir.

Pour ne pas tomber.

Et survivre un peu plus.

 

Demain, je verrai bien.

Demain, j’aurai avancé.

Demain, je serai là-bas.

Là où je ne suis pas.

 

Pas encore…

 

(inspiré par le site de Pai Canyon où ont été prises ces photos)

16 févr. 2024

VIRAGES

À gauche, à droite.

Sans cesse.

L’un après l’autre.

Sans fin.

 

Où est la raison,

Où est le sens,

De cet enchaînement,

De ce désordre.

 

À gauche, à droite.

Sans cesse.

L’un après l’autre.

Sans fin.

 

Né par hasard et pour rien,

Échappé d’une rambarde,

Sauvé d’un coup de volant,

Je reste sans direction.

 

À gauche, à droite.

Sans cesse.

L’un après l’autre.

Sans fin.

 

Avance, continue,

Laisse le sens émerger.

Approche-toi des autres.

Eux, ils savent.

 

Peut-être…

 

(inspiré par la route entre Chiangmai et Pai : 80 km et 762 virages)

12 févr. 2024

Double Tsunami

24 décembre 2004,

Un mur d’eau balaie tout.

Plus de cinq mille morts en Thaïlande.

Sur la plage de Patong,

Hôtels, restaurants, bars

Tous détruits.

 

De longues années,

Pour panser les plaies,

Reconstruire,

Revivre.

 

Janvier 2020,

Une pandémie s’abat.

Plus de trente mille morts en Thaïlande.

Sur la plage de Patong,

Hôtels, restaurants, bars

Tous fermés.

Pendant trois ans.

 

Aujourd’hui,

Tout reprend.

Mais tout ce que j’ai connu a disparu.

10 févr. 2024

Patong beach

Debout, verticaux, inertes.

Seuls, leurs bras bougent.

Un peu.

Aucun ne nage.

À quoi bon ?

 

Ne leur manquent que des verres.

Quelques toasts aussi peut-être.

Un barman sûrement.

Incomplétude.

Manque.

 

Les bières sont loin.

La mer à quitter,

La sable à traverser,

L’échoppe à atteindre.

A quoi bon ?

 

Je les regarde.

Perplexe.

Je les traverse,

M’écarte d’eux,

Et nage au loin.

Musique (Thaïlande)


Musique

Gauche ou droite,

S’arrêter ou avancer,

Comment savoir ?

 

Néglige le flux,

Ferme les yeux,

Crois aux sons.

 

La musique dit le vrai,

La musique montre la voie,

La musique est là pour toi.

 

Trouve une chaise,

Assieds-toi comme tu peux,

Oublie le reste.

 

Music

Left or right,

Stop or go,

How to know?

 

Forget the flow,

Close your eyes,

Trust your ears.

 

Music tells you the truth,

Music shows you the way,

Music is there for you.

 

Find a chair,

Sit where you can,

Enjoy the moment.

7 févr. 2024

Pai (Thailande)

Faux-semblants et dissemblances,

Regard de dupes, tromperies.

Pai, tu te caches derrière des touristes anonymes.

Tes rues se sont remplies d’hôtels, de restaurants et bars.

Tes street food n’ont plus le goût du passé.

Je marche à la recherche de ce que j’ai perdu.

 

Et pourtant quand le jour se tait,

Quand l’alcool remplit mon verre,

Quand je glisse dans un bar obscur,

Quand l’odeur d’une herbe prohibée,

Quand le son d’un rock éraillé me heurtent,

Quand autour de moi, les sacs à dos sont de retour,

Je te retrouve.


Allongé plus qu’assis, 

Ta main fouille ma nuque,

La musique enivre nos corps.

Prélude à ce qui adviendra.

Dans un moment,

Dans plusieurs.

Savoir attendre,

Laisser mijoter,

Cuire et recuire.

Ta main, tes doigts, ta bouche.

Et la musique.

Encore et encore.

11 mars 2022

TATOUAGE

Je marche maintenant dans une ville inconnue. Depuis combien de temps ? Je ne sais pas, mais certainement depuis longtemps. Pourquoi ? Pour trouver un nouveau corps à tatouer. Je tourne en rond. Les murs sont gris, ternes, les rues étroites, sombres. Et vides. Je suis seul. Aucun bruit, aucun mouvement autour de moi. Un peu de vent, c’est tout. Chaud, désagréable, chargé de poussière. 
J’ai soif. À droite, justement, l’enseigne d’un bar luit faiblement. Je jette un coup d’œil à l’intérieur : glauque, quelques tables, un petit comptoir dans un recoin. Je n’aperçois personne. Trop soif. Je pousse la porte. 
Aussitôt une musique de rock se déchaîne, un éclairage au néon s’allume, quelques danseurs se déhanchent sur une petite piste. Je m’approche du barman qui, sans un mot, me tend une bière. Je la saisis et me tourne vers la salle. Que des hommes. Une ambiance sexe, la plupart sont torse nu. 
Vais-je trouver ici celui que je cherche ? Ce soir, je le veux captif, rebelle, révolté. Je le veux criant, se débattant, se refusant. En vain, car il sera solidement attaché sur un lit. 
Écrire dans sa peau ne sera pas intellectuel, mais physique : mes mots pénétreront son corps. Littéralement. Au sens propre. 
D’abord, avant de commencer, lentement, je pincerai sa chair, la soulèverai et la relâcherai. Puis je recommencerai, encore et encore. Comme certains joueurs de tennis font rebondir la balle avant de servir, je ferai rebondir sa peau avant de la tatouer. 
Puis avec mon stylet, je le violerai en franchissant la résistance de son derme pour entrer en lui. Le glissement ne sera pas une caresse, mais une griffure. L’encre sera rouge, le sperme ensanglanté de mon sexe scriptural. 
Envie de provoquer une douleur vraie et non plus superficielle. Envie de le faire souffrir. Envie de l’entendre gémir. Envie de le soumettre à ma volonté sadique. 
Mon stylet sera un fouet, le rouge son sang. Je le frapperai régulièrement et méthodiquement. Jusqu’à plus soif. Jusqu’à ne plus avoir la moindre énergie. Jusqu’à ne plus tenir debout.

 

(Extrait de mon livre Par hasard et pour rien)