17 juil. 2012

NOUS NE VOYONS PAS, NOUS CONSTRUISONS DES VUES PLAUSIBLES

Notre cerveau est un Monsieur Jourdain du calcul statistique (Neurosciences 18)
Depuis plus de trois semaines, je vous ai emmené dans une promenade guidée au sein  des découvertes récentes de l’équipe de Stanislas Dehaene et des résumés qu’il a fait des travaux des autres.
Nous avons commencé par la découverte des neurones de la lecture qui nous ont initiés à l’art du bricolage et du recyclage. Puis ce furent ceux des nombres et de notre capacité non seulement à compter, mais aussi à subitiser  - c’est-à-dire à savoir immédiatement, subitement -  et à estimer des quantités.
Commença alors le voyage dans les volutes plus profondes de notre identité, ce en trois escales : l’inconscient cognitif et sa merveilleuse machinerie massivement parallèle, la conscience et son espace de travail global où se tissent les stratégies et se pilotent les mises en œuvre nouvelles, et enfin la métacognition et cette étrange capacité à nous dédoubler, en observateur de nous-mêmes, conscient de notre existence.
Voilà maintenant la fin « provisoire » de ce voyage avec ce qui, je pense, est le plus étonnant, et peut-être le plus riche de conséquences, notamment pour le management des hommes et des entreprises : le cerveau statisticien.
En effet dans son cours 2012, Stanislas Dehaene va nous montrer que, sans le savoir, nous sommes tous, plus ou moins, des mathématiciens, et que notre cerveau n’arrête pas de calculer des probabilités, de faire des estimations et de choisir ce qui lui paraît le plus plausible.
On ressort de cela avec la vision classique en miettes : contrairement à ce que l’on croît, nous ne « voyons » pas ce que nous regardons, ni n’ « écoutons » ce que nous entendons. Entre les informations captées par nos sens et nos pensées, il y a toute une série de calculs, de choix et d’optimisations, qui se passent sans que nous en rendions compte…
Nous faisons sans cesse ce qui s’appellent des « inférences probabilistes », c’est-à-dire que, sur la base de ce que nos sens ont capté et de ce que notre expérience passée nous a appris, nous nous faisons une idée sur ce qui se passe et sur les significations éventuellement sous-jacentes.
Ces inférences sont omniprésentes dans tous les domaines de la cognition : perception, action, apprentissage du langage, reconnaissance des mots, inférences sur l’esprit des autres… Nous n'arrêtons pas de faire des interprétations et des calculs de probabilité, nous supposons par défaut que la lumière vient d'en haut, nous rajoutons des informations sur ce qui est perçu, nous avons des a priori sur le monde extérieur, a priori qui complètent nos perceptions ambiguës.
Bref, nous construisons ce qui nous paraît plausible, ce qui s’appelle en théorie mathématique, l’inférence Bayésienne.
Mais que diable veut dire une inférence Bayésienne ?
(à suivre)

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