Face à la crise actuelle, on assiste à un grand bétisier des raisonnements les plus absurdes. Mais comment les départager ?
Nous vivons actuellement une période suffisamment troublée pour autoriser, voire encourager toutes les réflexions, ou du moins tout ce qui en a l'apparence. On arrive ainsi à une sorte de bouillie contradictoire.
Je peux citer par exemple pêle-mêle :
- La solution de la crise du capitalisme sauvage serait dans la mise en place d'un pilotage direct par l'État, alors que rien n'a jamais démontré la capacité d'un État de réussir à piloter un système économique complexe.
- On n'est pas capable d'évaluer réellement la dimension des pertes du système financier mondial, mais on est confiant dans la capacité des États de combler les pertes après nationalisations. Notons que ces nationalisations ont pour vertu d'éviter d'avoir à calculer ces pertes.
- On a confiance dans la capacité d'Obama à contribuer à la résolution d'une crise mondiale qui a été initialisée aux USA, sans savoir si le redressement des États-Unis ne passera pas d'abord par une externalisation croissante des pertes vers les autres pays.
- On est capable d'évaluer le taux de croissance actuel – ou plutôt celui de la récession – à 0,5% près, alors que l'on n'est même pas capable de connaître la situation réelle des banques. Pourquoi ne pas confier aux économistes si brillants dans le calcul des taux de croissance, celui de la performance économique du système financier ?
- Des députés, pour faire face à la crise, ont recommandé de ne plus appliquer les règles (voir « Merci aux députés de promouvoir un retour à la loi de la jungle »)
- Un éditorialiste a expliqué qu'il avait tellement de plus en plus de « métiers » – son journal, la radio, la télévision… – et qu'il n'avait plus le temps de réfléchir, mais juste de parler et d'écrire…
Cette liste n'est évidemment pas close et vous avez le moyen au travers d'un commentaire de la compléter. N'hésitez surtout pas !
Toujours est-il que je trouve que tout ceci ressemble de moins en moins à une pensée construite, et de plus en plus à une forme de « fromage de tête » (d'ailleurs plus informe qu'en forme).
Suivant mes réflexions, je me demandais comment arriver à décerner un prix de meilleur fromage de tête, une forme d'anti-César ou anti-Oscar (tout dépend si l'on veut donner un côté hexagonal à ce prix ou pas…). Les candidats sont faciles à identifier : économistes, politologues, hommes politiques, experts, éditorialistes de tous poils, tous ceux qui peuplent notre univers médiatique.
Mais comment les départager, sur quels critères ?
Leur demander de se noter entre eux, comme on le fait justement pour les César et Oscar ? Avec un grand prix, le prix de la prévision la plus fausse, le prix du raisonnement le plus paradoxal, le prix de l'interprétation, … ?
Ou alors faut-il procéder par sondage auprès de la population mondiale ? Ou uniquement auprès des populations les plus pauvres qui, en tant que victimes, auront un jugement plus précis ?
Ou alors on essaie d'évaluer celui qui a fait le plus de dégâts ? Mais comment ?
Vraiment c'est un casse-tête….
J'en étais là de mes réflexions, quand, en marchant rue de Rennes à Paris, j'ai aperçu la devanture de mon charcutier préféré, Vérot, et y ai lu qu'il était le « champion de France du Fromage de Tête ». Étant lyonnais d'origine, je sais que la charcuterie est un moment important de vérité, et, comme Vérot a été précisément formé à Lyon, je suis rentré confiant dans son magasin : il était le champion de France, il allait enfin pouvoir tout m'expliquer.
En fait, j'en suis ressorti avec un assortiment de ses produits, mais sans la réponse attendue. Dommage.
Depuis je continue à chercher. Si vous avez des suggestions, elles sont les bienvenues…