17 févr. 2009

JE N’AI JAMAIS VU UN FLEUVE QUI NE FINISSAIT PAS PAR ALLER À LA MER

Nous alternons constamment entre conflit et évitement. Nous n'avons pas assez la culture de la confrontation qui seule peut faire le tri dans nos erreurs d'interprétations et nos croyances

Comment prévoir ? Comment analyser une situation pour imaginer les trajectoires et chemins futurs ? Comment ne pas tomber dans les pièges classiques de la réflexion stratégique ?


Dans mes articles précédents, j’ai déjà évoqué les pièges principaux :
- Se contenter de prolonger les tendances issues du passé et de l’expérience (voir « Résonance entre Dérive Naturelle, Cygne Noir et Crise actuelle… » et « Il est bien trop tôt pour se prononcer sur les conséquences de la Révolution Française »),
- Symétriquement, se noyer dans l’analyse des ruptures possibles et des possibles « battements d’aile de papillon » (voir « Ne nous laissons pas berner par la magie des battements de l’aile d’un papillon »)
- Ne pas tenir compte des interactions entre l’entreprise et son environnement – concurrence, clients, technologie, réglementation – et des coévolutions possibles (voir « Résonance entre Dérive Naturelle, Cygne Noir et Crise actuelle… », « Radar ou jeu : et si la réponse dépendait de l’observateur »)

Pour compléter ceci, quelques lignes issues de Neuromanagement :
« Imaginons que le problème posé soit de comprendre où va la Seine. Si je fais mon observation sans prendre du recul, je vais constamment me tromper : chaque méandre de la Seine sera l’occasion d’une erreur. Il faut arriver à dépasser la dynamique locale immédiate pour trouver la logique d’ensemble : identifier que la Seine va vers une mer, et donc que c’est elle qu’il faut trouver. Ainsi « diagnostiquer » la trajectoire de la Seine, c’est d’abord comprendre que ce que je vois – le méandre – n’est que l’anecdote. »


On se retrouve ainsi dans une situation paradoxale :
- Une vue trop stratosphérique où l’altitude sera telle que l’on ne verra plus aucun détail et que l’on ne pourra que se faire « manipuler » par les chiffres et les idées reçues. Comme le dit Michel Serres dans l’Incandescent : « Quel type de connaissance des Alpes tirerai-je de leur traversée en Airbus, à 11 000 m d’altitude, en buvant un jus d’orange plat et feuilletant un illustré sot ? »
- Un zoom sur un champ limité, et risquer de se « perdre dans les méandres », suivre tous les « battements d’aile de papillon », ou aussi présupposer à l’avance là où peuvent se situer les faits porteurs des évolutions futurs.
Pas facile donc de trouver le bon équilibre.
En fait, au risque de vous surprendre, je dirai même : C’est impossible. La seule solution est de l’accepter… et de faire au mieux !

Procéder donc par des allers et retours : dès que l’on pense avoir trouvé une rupture potentielle, prendre du recul pour la remettre en cause.
Quand on a dessiné un scénario d’évolution crédible, se concentrer sur tout ce qui peut le détruire.
Quand on a une vue d’ensemble, descendre sur quelques zones de détail et voir si ceci est compatible avec la vue globale…


J’ai l’habitude de résumer mon objectif par cette phrase : « Cherchons où se trouve la mer. Car je n’ai jamais vu un fleuve qui ne finissait pas par y aller. Ensuite on s’intéressera au cours du fleuve pour évaluer en combien de temps il peut y aller et comment… »

5 commentaires:

Unknown a dit…

Bonjour,
Sur wikipédia (par exemple)
Endoréisme
http://fr.wikipedia.org/wiki/Endoréisme
Cordialement
a.c

diogene a dit…

L'Okavango, Okawango, Cubango ou Kubango1 est le troisième cours d'eau d'Afrique australe par sa longueur (entre 1 600 et 1 800 km). Il prend sa source près de la ville de Nova Lisboa en Angola central, avant de traverser la Namibie pour atteindre le Botswana. Les eaux de l'Okavango ont la particularité de ne jamais rejoindre l'océan, le cours du fleuve s'achève par le vaste delta de l'Okavango dans le désert du Kalahari.

diogene a dit…

Le cygne noir (cf Taleb)

A moins que votre définition ne soit autoreférentielle : L'intelligence, c'est ce que mesure nos tests (Binet et Simon)

Un cours d'eau qui se jette dans la mer est un fleuve.

Robert Branche a dit…

Merci pour cette information sur l'endoréisme et l'Okawango
Comme quoi aucune métaphore ou image n'est pas parfaite !
Et que donc dans certaines situations - heureusement rares - l'eau n'arrive jamais à la mer... et se trouve piégée.
Il en est aussi de certaines entreprises qui "meurent" en cours de route...

Pour ce qui est du cygne noir, je l'ai déjà cité souvent dans mes articles portant sur les risques de la prévision.
C'est précisément pour "essayer" de s'abstraire des illusions d'une situation donnée, que je propose de "chercher la mer". En prenant l'exemple de la dinde qui vit dans une ferme et est contente parce que la nourriture est bonne, c'est prendre du recul et comprendre qu'elle est la logique de sa situation et la "direction vers laquelle elle coule vraiment".

Kevin a dit…

Le colorado n'atteind plus la mer à cause de l'utilité massive d'eau par les Etats-Unis .