L'humour est présent, ce qui donne à ce livre dont l'objet est très sérieux, une légèreté rare qui lui donne toute sa valeur.
« Ce livre est le fruit de l'expérience d'un dirigeant de très grande entreprise qui est aujourd'hui conseil auprès des grands groupes internationaux. Le message qui y est délivré a été structuré autour de l'incertitude, c'est-à-
dire autour du futur, puisque celui-ci a du mal à être dessiné avec exactitude.
L'imprévu étant la norme, comment y faire face ? Telle est la question qui y est posée.
Une question qui est déclinée en trois points :
- quelle attitude avoir ? Analyser la situation et se refuser à faire des prévisions chiffrées et détaillées au-delà de l'horizon immédiat ;
- comment se fixer un objectif ? En cherchant à sentir vers quoi vont les courant et les évolutions et viser celles qui correspondent aux aptitudes de l'entreprise ;
- comment agir au quotidien ? En lâchant prise, c'est-à-dire en prenant appui sur les courants.
Et, après avoir ainsi défini la démarche, Robert Branche montre que l'incertitude étant structurelle, ne saurait être vue comme provisoire et que, dès lors, elle doit être vue non comme un obstacle à la maîtrise, mais comme une « formidable opportunité », comme le moteur de l'innovation. Tissé autour de références vécues et d'observations pratiques l'auteur se moque des modèles déterministes fondés sur la certitude et condamne les prévisions « à coup de tableurs mathématiser (et de) se préoccuper plus des ruptures majeures improbables que des battements d'aile d'un papillon ». On le voit, l'humour est présent, ce qui donne à ce livre dont l'objet est très sérieux, une légèreté rare qui lui donne toute sa valeur.
À lire absolument. »
Septembre-octobre 2010 - N° 113 - Préventique Sécurité
28 oct. 2010
27 oct. 2010
PLUS DE BIÈRES ET MOINS DE COCA-COLA
Nous avons besoin de construire des communs
Face à ce monde de l'incertitude, à ce mélange des races et des cultures, nous avons besoin de plus de bière et moins de Coca-cola !
Qu'est-ce que je veux dire par là ?
Le Coca-cola – je n'ai rien contre la boisson en tant que telle, mais je la prends comme un emblème, un symbole de la réponse univoque, universelle et normalisatrice – est une boisson qui s'impose progressivement et vient gommer les différences. Elle constitue une référence commune, mais une référence sans racines, sans histoires. Que veut-dire le Coca-cola pour un français, un chinois ou un brésilien ? En quoi ce produit qui est devenu un des communs du monde est-il l'expression de la multiplicité des cultures et des histoires ?
En rien. Il s'impose comme une réponse plate et identique, à toutes les situations. Il est destructeur des différences et des passés.
La bière est elle, née dans chacun des pays (*). Elle est commune à nous tous, mais elle est inscrite dans l'histoire et la culture locale. Nous pouvons à la fois partager une bière parce que chacun d'entre nous l'apprécie, et découvrir la différence de cette bière. Chaque bière est différente, car elle est née d'un territoire et d'une histoire.
La bière est un commun de l'humanité, mais elle est un anti Coca-cola. La bière est un construit commun, elle est riche de nos différences.
Apprenons à construire plus de bières et moins de Coca-cola !
(*) Voir « LA BIÈRE EST LE COMMUN DE L'HISTOIRE DES HOMMES »
Face à ce monde de l'incertitude, à ce mélange des races et des cultures, nous avons besoin de plus de bière et moins de Coca-cola !
Qu'est-ce que je veux dire par là ?
Le Coca-cola – je n'ai rien contre la boisson en tant que telle, mais je la prends comme un emblème, un symbole de la réponse univoque, universelle et normalisatrice – est une boisson qui s'impose progressivement et vient gommer les différences. Elle constitue une référence commune, mais une référence sans racines, sans histoires. Que veut-dire le Coca-cola pour un français, un chinois ou un brésilien ? En quoi ce produit qui est devenu un des communs du monde est-il l'expression de la multiplicité des cultures et des histoires ?
En rien. Il s'impose comme une réponse plate et identique, à toutes les situations. Il est destructeur des différences et des passés.
La bière est elle, née dans chacun des pays (*). Elle est commune à nous tous, mais elle est inscrite dans l'histoire et la culture locale. Nous pouvons à la fois partager une bière parce que chacun d'entre nous l'apprécie, et découvrir la différence de cette bière. Chaque bière est différente, car elle est née d'un territoire et d'une histoire.
La bière est un commun de l'humanité, mais elle est un anti Coca-cola. La bière est un construit commun, elle est riche de nos différences.
Apprenons à construire plus de bières et moins de Coca-cola !
(*) Voir « LA BIÈRE EST LE COMMUN DE L'HISTOIRE DES HOMMES »
26 oct. 2010
VIVE LE MULTICULTUREL !
Faire du multiracial et multiculturel une opportunité
Comment arriver à sortir de nos peurs, de notre appréhension du futur, de notre crainte de l'incertitude ?
D'abord comme je l'évoquais hier, en comprenant que bon nombre de nos peurs viennent de notre passé animal, et qu'il est peut-être temps de les dépasser.
Ensuite, en pensant et réfléchissant à partir de la situation réelle et non pas de la situation rêvée. Je vois partout des paroles et des écrits qui imaginent que le monde devrait être autrement ; que le mélange des races, des cultures et des religions est une mauvaise chose ; que le bon temps des colonies et de celui où « chacun était chez soi » était non seulement le bon temps, mais celui où il faudrait revenir (*).
Une image pour me faire comprendre – ou du moins essayer – : si vous prenez deux gaz et que vous les mélangez, vous ne pourrez jamais les séparer à nouveau – sauf à dépenser des quantités d'énergies disproportionnées –. De même, je crois qu'il est illusoire de croire que l'on va pouvoir détricoter la globalisation. Nous sommes mélangés, multiculturels, multiraciaux, multi-religieux pour le meilleur et le pire, et le retour en arrière est impossible.
Ce mélange est pour moi une bonne nouvelle et plus l'opportunité d'une nouvelle création qu'un risque, mais je comprends que l'on puisse penser le contraire – je crois même que la majorité pense le contraire, on a tellement entretenu les peurs, tellement parlé des lions qui pouvaient être cachés dans le bruit des feuilles…–.
Quand les USA ont déclaré la guerre au Japon, ils ont dû parquer à proximité de Los Angeles la dizaine de milliers de Japonais résidant sur leur territoire. Que ferons-nous demain si nous refusons de bâtir une société multiculturelle et que nous déclarons la guerre à la Chine et à l'Inde au nom d'emplois détruits chez nous ? Allons-nous parquer un million d'individus et lancer des pierres aux Chinois lors du prochain Nouvel An ?
Quand allons-nous comprendre qu'à refuser le monde tel qu'il est, nous allons vers une guerre civile dans nos cités ?
A l'inverse, nous avons la chance de pouvoir inventer le monde de demain, à condition que nous comprenions que l'incertitude est d'abord un champ d'opportunités et que nous voyons le fait d'être devenu un pays multiculturel et multiracial comme une source de richesse.
Mes propos peuvent sembler utopistes… mais où est l'alternative ? Et sont-ils utopiques ou n'ont-ils pas été mis en œuvre ?
(*) Voir « CHACUN CHEZ SOI ET LES VACHES SERONT MIEUX GARDÉES ! » et « JE N'AVAIS JAMAIS PENSÉ QUE L'INDE PUISSE DEVENIR IMPORTANTE UN JOUR »
Comment arriver à sortir de nos peurs, de notre appréhension du futur, de notre crainte de l'incertitude ?
D'abord comme je l'évoquais hier, en comprenant que bon nombre de nos peurs viennent de notre passé animal, et qu'il est peut-être temps de les dépasser.
Ensuite, en pensant et réfléchissant à partir de la situation réelle et non pas de la situation rêvée. Je vois partout des paroles et des écrits qui imaginent que le monde devrait être autrement ; que le mélange des races, des cultures et des religions est une mauvaise chose ; que le bon temps des colonies et de celui où « chacun était chez soi » était non seulement le bon temps, mais celui où il faudrait revenir (*).
Une image pour me faire comprendre – ou du moins essayer – : si vous prenez deux gaz et que vous les mélangez, vous ne pourrez jamais les séparer à nouveau – sauf à dépenser des quantités d'énergies disproportionnées –. De même, je crois qu'il est illusoire de croire que l'on va pouvoir détricoter la globalisation. Nous sommes mélangés, multiculturels, multiraciaux, multi-religieux pour le meilleur et le pire, et le retour en arrière est impossible.
Ce mélange est pour moi une bonne nouvelle et plus l'opportunité d'une nouvelle création qu'un risque, mais je comprends que l'on puisse penser le contraire – je crois même que la majorité pense le contraire, on a tellement entretenu les peurs, tellement parlé des lions qui pouvaient être cachés dans le bruit des feuilles…–.
Quand les USA ont déclaré la guerre au Japon, ils ont dû parquer à proximité de Los Angeles la dizaine de milliers de Japonais résidant sur leur territoire. Que ferons-nous demain si nous refusons de bâtir une société multiculturelle et que nous déclarons la guerre à la Chine et à l'Inde au nom d'emplois détruits chez nous ? Allons-nous parquer un million d'individus et lancer des pierres aux Chinois lors du prochain Nouvel An ?
Quand allons-nous comprendre qu'à refuser le monde tel qu'il est, nous allons vers une guerre civile dans nos cités ?
A l'inverse, nous avons la chance de pouvoir inventer le monde de demain, à condition que nous comprenions que l'incertitude est d'abord un champ d'opportunités et que nous voyons le fait d'être devenu un pays multiculturel et multiracial comme une source de richesse.
Mes propos peuvent sembler utopistes… mais où est l'alternative ? Et sont-ils utopiques ou n'ont-ils pas été mis en œuvre ?
(*) Voir « CHACUN CHEZ SOI ET LES VACHES SERONT MIEUX GARDÉES ! » et « JE N'AVAIS JAMAIS PENSÉ QUE L'INDE PUISSE DEVENIR IMPORTANTE UN JOUR »
25 oct. 2010
VIVE L’INCERTITUDE !
Nous avons mal à l'incertitude
Que nous le voulions ou pas, à chaque bruit dans les feuilles, ce sont des lions que nous sentons venir, et non pas une gentille brise (*) : nous sommes programmés pour la survie et prendre le vent pour un lion n'a jamais tué personne, alors que l'inverse … Aussi voyons-nous des lions à chaque fois.
Mais est-ce vraiment si bon pour notre survie collective ?
Quand notre futur dépend de plus en plus des solidarités et des capacités à créer ensemble, est-ce qu'avoir peur de l'autre, de celui que je ne connais pas, n'est pas plus un problème qu'une solution ?
Quand la plupart des processus de fabrication font intervenir une multitude de pays et de savoir-faire, comment penser que la solution va venir d'un retour en arrière, d'une relocalisation chez nous, de la remontée des frontières ? Doutons-nous à ce point de nous-mêmes pour avoir de telles peurs ?
Sommes-nous condamnés à n'être que ces animaux que nous avons été ? Est-il normal de spontanément percevoir celui que je ne connais pas, comme un ennemi, un rival, un agresseur potentiel ? Est-il normal de ne pas nous faire confiance les uns les autres (**) ?
L'incertitude – le bruit dans les feuilles, l'autre que je ne connais pas, le demain qui m'est inconnu – est-il donc une si mauvaise nouvelle ? Ou l'incertitude est-elle cette page blanche sur laquelle je vais pouvoir exprimer ma créativité ?
Pour me faire comprendre, je voudrais que vous preniez le temps d'imaginer un monde sans incertitude. Donc vous vivez dans un monde dont l'évolution est connue et où chacun de vos actes est prévisible. Avez-vous vraiment envie de ce monde ?
Moi pas ! Aussi je m'écrie, sans aucune retenue : vive l'incertitude, car il n'y a pas d'espoir sans incertitude !
(*) Voir « IL EST MOINS DANGEREUX D'INVENTER UN LION QUE D'EN MANQUER UN ! »)
(**) Voir « COMMENT VIVRE LA COMPLEXITÉ SANS CONFIANCE ? »
Que nous le voulions ou pas, à chaque bruit dans les feuilles, ce sont des lions que nous sentons venir, et non pas une gentille brise (*) : nous sommes programmés pour la survie et prendre le vent pour un lion n'a jamais tué personne, alors que l'inverse … Aussi voyons-nous des lions à chaque fois.
Mais est-ce vraiment si bon pour notre survie collective ?
Quand notre futur dépend de plus en plus des solidarités et des capacités à créer ensemble, est-ce qu'avoir peur de l'autre, de celui que je ne connais pas, n'est pas plus un problème qu'une solution ?
Quand la plupart des processus de fabrication font intervenir une multitude de pays et de savoir-faire, comment penser que la solution va venir d'un retour en arrière, d'une relocalisation chez nous, de la remontée des frontières ? Doutons-nous à ce point de nous-mêmes pour avoir de telles peurs ?
Sommes-nous condamnés à n'être que ces animaux que nous avons été ? Est-il normal de spontanément percevoir celui que je ne connais pas, comme un ennemi, un rival, un agresseur potentiel ? Est-il normal de ne pas nous faire confiance les uns les autres (**) ?
L'incertitude – le bruit dans les feuilles, l'autre que je ne connais pas, le demain qui m'est inconnu – est-il donc une si mauvaise nouvelle ? Ou l'incertitude est-elle cette page blanche sur laquelle je vais pouvoir exprimer ma créativité ?
Pour me faire comprendre, je voudrais que vous preniez le temps d'imaginer un monde sans incertitude. Donc vous vivez dans un monde dont l'évolution est connue et où chacun de vos actes est prévisible. Avez-vous vraiment envie de ce monde ?
Moi pas ! Aussi je m'écrie, sans aucune retenue : vive l'incertitude, car il n'y a pas d'espoir sans incertitude !
(*) Voir « IL EST MOINS DANGEREUX D'INVENTER UN LION QUE D'EN MANQUER UN ! »)
(**) Voir « COMMENT VIVRE LA COMPLEXITÉ SANS CONFIANCE ? »
22 oct. 2010
ON NE DIRIGE PAS EFFICACEMENT EN ETANT DE PASSAGE !
_____ Éditorial du vendredi ________________________________________________________________
21 oct. 2010
NOUS AVONS BESOIN DE “TOY TRAINS”
Pourquoi ne pas promouvoir le voyage arrêté ? (suite)
Assis dans le train, je ne pense plus au déplacement – peut-on encore parler de déplacement à cette vitesse ? – et me laisse glisser dans une douce paresse. Je repense à cette chanson de Bénabar dans laquelle une jeune femme fait tout ce qu'elle peut pour arriver en retard. Elle cherche le moyen de déplacement le plus lent, espère manquer sa correspondance, choisit l'itinéraire le plus long. Comme je la comprends. Moi aussi, assis dans ce train, pris par la magie du train, la lenteur de ce paysage qui ne défile pas, mais glisse doucement, absorbé par les brumes de Darjeeling qui absorbent tout progressivement, je m'endors doucement
Prendre ce train, c'est aussi un peu comme lire Proust : une délicieuse sensation de surplace, d'approfondissement de la compréhension, de capacité à zoomer dans les détails du paysage comme Proust zoome à l'intérieur des situations.
Moi qui aime me sentir me déplacer pour avoir le temps de me préparer, je suis comblé ! J'aurais tellement ralenti que je vais avoir le plus grand mal à repartir de Darjeeling. Pourquoi aller ailleurs ? Pourquoi bouger ? Pourquoi voyager ?
Je suis loin de celui que j'étais dix ans plus tôt. Alors habitué à vivre professionnellement dans et entre les avions – le temps passé dans les avions était alors quasiment le seul disponible à la réflexion –, j'étais venu en Inde pour changer de millénaire : deux jours à Bombay, deux jours à Goa, puis à nouveau 2 jours à Bombay, six jours en tout en Inde. A un ami qui m'avait fait remarqué que c'était court, j'avais alors répondu : « mais j'ai passé deux nuits de suite au même endroit, où est le problème ? ».
Assis dans le « toy train », je suis conscient d'être arrivé à un autre extrême, mais est-ce vraiment un extrême ? Est-ce qu'en courant, en zappant, on est efficace ? Comme j'ai souvent eu l'occasion de le dire ou de l'écrire, s'il suffisait de courir pour être efficace, toutes les entreprises le seraient, car je ne vois que des gens qui y courent…
Pourtant quand survient une catastrophe comme le nuage de cendres islandais, ces mêmes dirigeants, si pressés, si indispensables, se retrouvent bloqués à l'autre du bout du monde et se rendent compte que le système continue à fonctionner sans eux. Forts de ce repos forcés, ils ont eu du temps libre devant eux…
Nous devrions promouvoir un peu partout des « toy trains », des espaces où le temps et le mouvement s'arrêteraient pour permettre à tout un chacun à réfléchir à ce qu'il fait.
Assis dans le train, je ne pense plus au déplacement – peut-on encore parler de déplacement à cette vitesse ? – et me laisse glisser dans une douce paresse. Je repense à cette chanson de Bénabar dans laquelle une jeune femme fait tout ce qu'elle peut pour arriver en retard. Elle cherche le moyen de déplacement le plus lent, espère manquer sa correspondance, choisit l'itinéraire le plus long. Comme je la comprends. Moi aussi, assis dans ce train, pris par la magie du train, la lenteur de ce paysage qui ne défile pas, mais glisse doucement, absorbé par les brumes de Darjeeling qui absorbent tout progressivement, je m'endors doucement
Prendre ce train, c'est aussi un peu comme lire Proust : une délicieuse sensation de surplace, d'approfondissement de la compréhension, de capacité à zoomer dans les détails du paysage comme Proust zoome à l'intérieur des situations.
Moi qui aime me sentir me déplacer pour avoir le temps de me préparer, je suis comblé ! J'aurais tellement ralenti que je vais avoir le plus grand mal à repartir de Darjeeling. Pourquoi aller ailleurs ? Pourquoi bouger ? Pourquoi voyager ?
Je suis loin de celui que j'étais dix ans plus tôt. Alors habitué à vivre professionnellement dans et entre les avions – le temps passé dans les avions était alors quasiment le seul disponible à la réflexion –, j'étais venu en Inde pour changer de millénaire : deux jours à Bombay, deux jours à Goa, puis à nouveau 2 jours à Bombay, six jours en tout en Inde. A un ami qui m'avait fait remarqué que c'était court, j'avais alors répondu : « mais j'ai passé deux nuits de suite au même endroit, où est le problème ? ».
Assis dans le « toy train », je suis conscient d'être arrivé à un autre extrême, mais est-ce vraiment un extrême ? Est-ce qu'en courant, en zappant, on est efficace ? Comme j'ai souvent eu l'occasion de le dire ou de l'écrire, s'il suffisait de courir pour être efficace, toutes les entreprises le seraient, car je ne vois que des gens qui y courent…
Pourtant quand survient une catastrophe comme le nuage de cendres islandais, ces mêmes dirigeants, si pressés, si indispensables, se retrouvent bloqués à l'autre du bout du monde et se rendent compte que le système continue à fonctionner sans eux. Forts de ce repos forcés, ils ont eu du temps libre devant eux…
Nous devrions promouvoir un peu partout des « toy trains », des espaces où le temps et le mouvement s'arrêteraient pour permettre à tout un chacun à réfléchir à ce qu'il fait.
20 oct. 2010
“TOY TRAIN” OU LE VOYAGE IMMOBILE
Pourquoi ne pas promouvoir le voyage arrêté ?
Dans les contreforts de l'Himalaya, dans les derniers kilomètres arrivant à Darjeeling, un train pousse à l'extrême la lenteur, puisque sa vitesse moyenne est inférieure à dix kilomètres par heure. Mais qu'importe ! Il n'est pas vraiment là pour permettre de se déplacer, mais simplement pour venir souligner la route sinueuse et les paysages escarpés. Pour ceux qui veulent aller plus vite, il y a les jeeps. Mais parler de vitesse même dans ce cas serait abusif, car, vu l'état de la route et la difficulté de procéder au moindre croisement, la vitesse moyenne est de vingt kilomètres par heure. Cette lente approche vers Darjeeling est une saine préparation à ce pays des brumes et du flou. Lent et progressif atterrissage.
Alors quitte à aller lentement, autant prendre le train ! Tiré par une locomotive à vapeur, il rappelle des images vues dans de vieux films. Sensation d'être au cœur d'une reconstitution historique. Ce train est appelé « Toy train », le train jouet. Je trouve cette appellation injuste et pour tout dire irrespectueuse de ce train qui fait ce qui peut et qui, finalement fait ce que l'on attend d'un train : il nous déplace ! Il est vrai qu'il ressemble à ces trains Märklin qui ont bercé mon enfance, mais pourquoi l'afficher ainsi ? Il pourrait se vexer, alors à quoi bon.
Ce train circule au milieu des voitures, des boutiques, des maisons, de la vie. Un anti-TGV sur tous les points ! Pas de barrières qui l'entourent, un confort plus que relatif, des arrêts fréquents pour remettre de l'eau dans la machine, la possibilité en côte de descendre du train et de remonter sans difficulté… Le TGV n'a pas à faire son fier, j'aimerais bien voir ce qu'il serait capable de faire sur les pentes raides qui vont à Darjeeling !
Comme les voitures, le train klaxonne, ou plutôt siffle, pour annoncer son passage et écarter ceux qui se trouvent sur sa voie, humains, animaux ou voitures. Car le train ne va pas s'arrêter, alors tout le monde se pousse. Dommage qu'il n'y ait pas de vaches dans ce coin, car j'aurais aimé voir qui allait gagner : le train allait-il arriver à faire se déplacer les flegmatiques vaches indiennes qui, se sachant sacrées, n'ont aucune raison de se faire du souci pour leur survie ? Pourquoi bouger ?
(à suivre)
- Voir ci-dessous le film que j'ai pris sur le « Toy Train » -
Dans les contreforts de l'Himalaya, dans les derniers kilomètres arrivant à Darjeeling, un train pousse à l'extrême la lenteur, puisque sa vitesse moyenne est inférieure à dix kilomètres par heure. Mais qu'importe ! Il n'est pas vraiment là pour permettre de se déplacer, mais simplement pour venir souligner la route sinueuse et les paysages escarpés. Pour ceux qui veulent aller plus vite, il y a les jeeps. Mais parler de vitesse même dans ce cas serait abusif, car, vu l'état de la route et la difficulté de procéder au moindre croisement, la vitesse moyenne est de vingt kilomètres par heure. Cette lente approche vers Darjeeling est une saine préparation à ce pays des brumes et du flou. Lent et progressif atterrissage.
Alors quitte à aller lentement, autant prendre le train ! Tiré par une locomotive à vapeur, il rappelle des images vues dans de vieux films. Sensation d'être au cœur d'une reconstitution historique. Ce train est appelé « Toy train », le train jouet. Je trouve cette appellation injuste et pour tout dire irrespectueuse de ce train qui fait ce qui peut et qui, finalement fait ce que l'on attend d'un train : il nous déplace ! Il est vrai qu'il ressemble à ces trains Märklin qui ont bercé mon enfance, mais pourquoi l'afficher ainsi ? Il pourrait se vexer, alors à quoi bon.
Ce train circule au milieu des voitures, des boutiques, des maisons, de la vie. Un anti-TGV sur tous les points ! Pas de barrières qui l'entourent, un confort plus que relatif, des arrêts fréquents pour remettre de l'eau dans la machine, la possibilité en côte de descendre du train et de remonter sans difficulté… Le TGV n'a pas à faire son fier, j'aimerais bien voir ce qu'il serait capable de faire sur les pentes raides qui vont à Darjeeling !
Comme les voitures, le train klaxonne, ou plutôt siffle, pour annoncer son passage et écarter ceux qui se trouvent sur sa voie, humains, animaux ou voitures. Car le train ne va pas s'arrêter, alors tout le monde se pousse. Dommage qu'il n'y ait pas de vaches dans ce coin, car j'aurais aimé voir qui allait gagner : le train allait-il arriver à faire se déplacer les flegmatiques vaches indiennes qui, se sachant sacrées, n'ont aucune raison de se faire du souci pour leur survie ? Pourquoi bouger ?
(à suivre)
- Voir ci-dessous le film que j'ai pris sur le « Toy Train » -
19 oct. 2010
METTRE DU FLOU DANS L’ORGANISATION
La redondance est nécessaire pour pouvoir faire face à l'incertitude
Dans beaucoup d'entreprises, toutes les ressources sont affectées à l'avance, il ne reste plus de temps disponible, tout a déjà été prévu, optimisé et organisé : comment pourront-elles faire face au premier aléa ?
Il m'arrive ainsi de rencontrer des dirigeants dont l'agenda est rempli pour les trois mois à venir. Comment font-ils pour faire de la place à l'inattendu ? Ils réallouent leur temps, annulent ce qui n'était pas indispensable, reportent le reste. Mais où est la place laissée à la réflexion, à la prise de recul ? Comment peuvent-ils repérer ce qui est nouveau, ce qui survient ?
A l'intérieur de l'entreprise, si tous les agendas sont remplis, c'est encore pire : non seulement personne n'est en recul, mais comme on n'a pas la latitude de reprogrammer son temps, on est prisonnier de ce qui a été prévu. Reste à espérer que c'est ce qui va arriver…
Adaptabilité, souplesse et sensibilité à l'imprévu impliquent redondance, ressources disponibles, capacité à improviser.
Je sais combien ceci va aux antipodes de la tendance actuelle qui cherche par tous les moyens à accroître la rentabilité des entreprises : on coupe tout ce qui ne sert apparemment à rien, on comprime tout ce qui n'est pas lié directement avec ce qui est planifié. Mais si l'on améliore les résultats immédiats, on se prépare pour un mort future certaine. L'anorexie managériale en quelque sorte : des entreprises devenues tellement maigres qu'elles vont être emportées par la première bourrasque.
Pour éviter que les optimisations successives n'aboutissent à supprimer toutes les marges de manœuvre, il faut avoir affiché le pourcentage de flou que l'on veut maintenir.
Comment le calculer ? Je n'ai pas de remèdes miracles comme réponse, mais plutôt un raisonnement de bon sens. Ce pourcentage peut être estimé au regard des deux paramètres suivants :
- Quel est le niveau d'incertitude du marché dans lequel se trouve l'entreprise ? L'horizon du flou est-il très rapproché ?
- Quel est le niveau de rentabilité actuel ? Quelles sont les ressources financières, techniques, et humaines nécessaires à la conduite des projets engagés et aux actions immédiates ? Quelle est la marge de manœuvre disponible ?
Extrait des Mers de l'incertitude
Dans beaucoup d'entreprises, toutes les ressources sont affectées à l'avance, il ne reste plus de temps disponible, tout a déjà été prévu, optimisé et organisé : comment pourront-elles faire face au premier aléa ?
Il m'arrive ainsi de rencontrer des dirigeants dont l'agenda est rempli pour les trois mois à venir. Comment font-ils pour faire de la place à l'inattendu ? Ils réallouent leur temps, annulent ce qui n'était pas indispensable, reportent le reste. Mais où est la place laissée à la réflexion, à la prise de recul ? Comment peuvent-ils repérer ce qui est nouveau, ce qui survient ?
A l'intérieur de l'entreprise, si tous les agendas sont remplis, c'est encore pire : non seulement personne n'est en recul, mais comme on n'a pas la latitude de reprogrammer son temps, on est prisonnier de ce qui a été prévu. Reste à espérer que c'est ce qui va arriver…
Adaptabilité, souplesse et sensibilité à l'imprévu impliquent redondance, ressources disponibles, capacité à improviser.
Je sais combien ceci va aux antipodes de la tendance actuelle qui cherche par tous les moyens à accroître la rentabilité des entreprises : on coupe tout ce qui ne sert apparemment à rien, on comprime tout ce qui n'est pas lié directement avec ce qui est planifié. Mais si l'on améliore les résultats immédiats, on se prépare pour un mort future certaine. L'anorexie managériale en quelque sorte : des entreprises devenues tellement maigres qu'elles vont être emportées par la première bourrasque.
Pour éviter que les optimisations successives n'aboutissent à supprimer toutes les marges de manœuvre, il faut avoir affiché le pourcentage de flou que l'on veut maintenir.
Comment le calculer ? Je n'ai pas de remèdes miracles comme réponse, mais plutôt un raisonnement de bon sens. Ce pourcentage peut être estimé au regard des deux paramètres suivants :
- Quel est le niveau d'incertitude du marché dans lequel se trouve l'entreprise ? L'horizon du flou est-il très rapproché ?
- Quel est le niveau de rentabilité actuel ? Quelles sont les ressources financières, techniques, et humaines nécessaires à la conduite des projets engagés et aux actions immédiates ? Quelle est la marge de manœuvre disponible ?
Extrait des Mers de l'incertitude
18 oct. 2010
FAUT-IL METTRE LES JEUNES EN CLASSE AFFAIRES ?
Drôle de télescopage au sein du journal Libération
Au comptoir d'un café, le vendredi 15 octobre, je feuilletais distraitement le journal Libération, que je marquai l'arrêt sur le télescopage d'un titre et d'une publicité : le titre « La jeunesse, une vieille peur » faisait partie de la série d'articles sur l'implication croissante des jeunes dans les mouvements liés à la réforme des retraites ; la publicité, elle, faisait la promotion de la classe affaires Air France en mettant en scène non plus comme d'habitude un homme d'affaires, mais un jeune homme à l'allure juvénile.
Amusant télescopage évidemment involontaire. Manifestement, pour Air France et sa direction de la communication, la jeunesse n'est pas une « vieille peur » puisqu'elle la met en scène.
Mais en allant plus loin, y a-t-il un message subliminal dans cet acte manqué ?
Air France veut-elle dire qu'elle a compris les raisons du mécontentement des jeunes ? Veut-elle dire que ce n'est pas réellement contre les retraites qu'ils manifestent, mais qu'ils réclament d'accéder à la classe Affaires ?
Ou est-ce le journal Libération qui suggère que les jeunes auraient peur de l'avion ? Est-ce que cette « vieille peur » est celle de ne plus toucher le sol et de se trouver perdus dans les airs ? Seraient-ils en attente de solutions plus terre à terre ?
Aller savoir…
15 oct. 2010
NOUS N’AIMONS PAS LE FLOU
_____ Éditorial du vendredi ________________________________________________________________
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