
- Comme c'est à partir de ces évaluations que sont alloués les financements (évolution du cours de bourse, notation des risques, prêt,…) et les primes (augmentation, bonus,…), elles conditionnent l'attribution des ressources collectives et individuelles.
- Comme nous cherchons à être reconnus, être appréciés positivement, et à bien faire, elles agissent sur nos motivations et nos choix.
Aussi, tant que l'on demandera à une entreprise de fournir des prévisions à trois, voire cinq ans, tant que l'on n'acceptera un business plan que s'il comprend un compte d'exploitation prévisionnel détaillé à trois ans, tant que l'on mesurera l'efficacité de la Direction à sa capacité à respecter les prévisions, il sera difficile de changer en profondeur.
Par un effet de propagation, ces tableaux financiers globaux demandés structurent en profondeur l'entreprise : on ne peut pas pousser la porte d'un quelconque bureau sans tomber sur un tableur Excel détaillant un microprojet, ou sans voir un document expliquant en dix pages pourquoi la prévision initiale n'a pas été tenue. Comme le dit un proverbe chinois : « le poisson pourrit par la tête »…
Il est donc indispensable de repenser les méthodes d'évaluation des entreprises et des projets, et de les adapter à au monde de l'incertitude, notre neuromonde : dès qu'on dépasse l'horizon du flou – c'est-à-dire le court terme –, et qu'il s'agit d'évaluer la solidité à long terme d'une entreprise ou la rentabilité d'un projet, il est non seulement illusoire, mais dangereux de croire ces batteries de chiffres et de prévisions.
Ces tableaux de chiffres loin de protéger ceux qui les ont demandés vont les induire en erreur : ils croient qu'ils ont effectivement évalué la viabilité d'un projet ou d'une entreprise, alors qu'ils n'ont devant eux que des données sans réelles significations et qu'ils ont poussé l'entreprise dans la mauvaise direction.
Aussi je pose une question « simple » : pourquoi tous les organismes continuent-ils à fonder leur évaluation du risque sur des tableaux dénués de sens et sur des prévisions qui n'en sont pas ? Ne serait-il pas temps de changer d'approche, et d'amorcer cette nécessaire refonte de l'évaluation ?
Extrait des Mers de l'incertitude