Une histoire est faite de phrases... faites de mots... faits de lettres…
Prenez un livre : Il est composé de phrases, elles-mêmes composées de mots, à leur tour composés de lettres. Emboîtement de niveaux dont chacun suit des règles qui lui sont propres : seules certaines successions de lettres donnent des mots ; toutes les suites de mots n’aboutissent pas à une phrase qui ait un sens et des règles de grammaire doivent être respectées ; la suite des phrases doit aboutir à une histoire, structurée ou non, qui correspond à la signification visée.
Si l’on observe le livre, Il y a des blancs, c’est-à-dire des espaces, qui ne portent en eux-mêmes aucun sens. Pourtant, si vous enlevez ces espaces, vous n’avez plus que des lettres dont n’émergent plus ni les mots, ni les phrases, ni le livre. Ces espaces qui séparent des lettres pour définir le début et la fin des mots créent un nouveau type de lien, un lien entre les mots ainsi définis : ces espaces séparent et réunissent. Grâce à ces espaces, on passe du niveau des lettres à celui des mots.
De même, la membrane qui limite une cellule est ce qui la définit et la circonscrit : sans cette membrane, pas de cellule. Mais cette membrane, c’est aussi ce par quoi la cellule échange avec le reste du monde, avec les autres cellules et avec ces éléments dont elle a besoin pour vivre. C’est aussi grâce à la membrane qu’elle va pouvoir s’unir avec d’autres cellules pour aller composer un groupe de cellules, et progressivement construire le niveau supérieur. A nouveau, la membrane sépare et réunit.
La nature est ainsi bâtie autour de séparations/réunions qui articulent et distinguent. Les deux propriétés sont inséparables et sont réalisées indistinctement. Ce sont elles qui contribuent à la solidité de chaque niveau ; ce sont elles qui assurent les emboîtements et les circulations nécessaires entre niveaux.
Extrait des Mers de l’incertitude
(à suivre)
(à suivre)