2 mars 2015

ON NE CHOISIT PAS D’ÉCRIRE

Saigner sa vie - Extrait de mon roman Double J (billet paru le 20 avril 2012)
Non, cette histoire devait rester en moi, rester la confidence d’un soir, un secret partagé avec Jacques, et seulement lui. S’il voulait la réentendre, je n’aurais qu’à la lui raconter à nouveau. Écrire, c’était perdre le contrôle, ne plus savoir ce qu’elle allait devenir. Écrire, c’était mourir. 
J’en étais là de mes réflexions, quand ma main avait été captée par le stylo. Je n’avais pas pu l’empêcher de s’en saisir, et d’en faire sortir un peu du sang qui l’habitait. La vision de cette encre rouge qui avait commencé à maculer la page blanche, la douceur du contact du stylo – mais était-ce le stylo ou le corps de Jacques que je tenais ? –, m’avaient fait perdre pied. Je n’avais pas voulu écrire mon histoire, mais elle et le stylo en avaient décidé autrement. L’encre avait commencé à se répandre, et à épancher les mots qui me hantaient. La tête m’avait tourné et tout était devenu double : le stylo et Jacques, les mots et l’amant, l’encre et le sang. Comme quand je parlais à Jacques dans le noir de la nuit, l’histoire s’était mise à sortir doucement, tranquillement, un flot inextinguible, une douce hémorragie. 
Pourtant, je ne m’étais pas vidé de mon énergie, et ce sang n’était pas mon sang. Au contraire, plus j’avais avancé dans l’écriture, plus les pages s’étaient accumulées, et plus je m’étais senti renforcé. Pouvoir lire ce que j’avais pensé, m’avait apporté calme et sérénité. Je m’étais trouvé enfin. C’était comme si toutes les tensions accumulées en moi depuis mon enfance s’étaient trouvées résolues, la pression de mon imaginaire enfermé se dissipant sur le papier. 
Alors, le stylo ne m’avait plus quitté. Sans cesse, j’avais couvert des pages et des pages de lettres de sang qui dessinaient ma pensée. J’avais aimé ce papier qui se colorait de mes mots, j’avais aimé le mouvement sensuel de la plume glissant sur les feuilles, le crissement engendré, le rouge qui se répandait, j’avais aimé caresser le corps du stylo en pensant à celui de Jacques. Impossible de taper sur un clavier, mon écriture en serait devenue mécanique, vide d’émotion, vide d’énergie. 
Petit à petit, j’avais pris goût à la violence du rouge de mes écrits. Cette couleur était à la fois celle de mon sentiment pour Jacques et celle de l’hémorragie de l’écriture. J’écrivais avec ce stylo qu’il m’avait donné, avec l’encre qu’il avait choisie. Je sentais le sang de Jacques nourrir le sang de mes pensées, et voyais déjà un lecteur futur venir le boire et s’en repaître. J’aimais cette vision d’un lecteur vampire venant sucer nos sangs mêlés. C’était comme s’il s’était insinué dans notre lit et, pendant notre sommeil, était venu s’abreuver, d’une morsure, à la force de notre union. 
Le stylo avait été le talisman rendant inévitable cette écriture. Jacques avait eu raison : j’aimais écrire et ce livre était en moi. Je n’avais pas eu besoin de réfléchir, pas d’effort à faire, juste à le laisser sortir. Le stylo avait été l’accoucheur de ma pensée, tout se faisant naturellement, le livre sortant comme le flot d’une artère rompue. Qu’allait-il advenir ensuite ? Je verrais bien, je n’avais plus peur. 

27 févr. 2015

L’OUBLI EST NÉCESSAIRE POUR AVANCER

Devons-nous brûler tous les protestants ? (billet paru le 31 mars 2011)
Il devient ou redevient « à la mode » en France de se replonger dans l’histoire et dans nos racines pour se définir. Certes l’idée est louable et apparemment sympathique. Mais que va-t-on y trouver ? N’est-ce pas le même risque que celui couru par Jeanne dans Incendies ? Les apôtres de la mémoire et des racines ne vont-ils pas mettre le feu à ce pays ? Ne vont-ils pas allumer l’incendie qui va rendre impossible tout vivre ensemble, tout vivre au futur ?
Suivons-les pour un temps et plongeons dans notre passé :
  • Faut-il, au nom des guerres de 14-18 et 39-44, rompre toute relation avec l’Allemagne ? 
  • Ou alors c’est la Grande Bretagne qui est l’ennemie ? La guerre de Cent ans n’est pas si loin, car pourquoi ne pas remonter jusque là ? Y a-t-il une limite au devoir de mémoire ?
  • Côté religion, faut-il se méfier des protestants ? Ils ne sont quand même pas de catholiques. Aurions-nous fait la guerre de religion pour rien ? Pourquoi aller faire une croisade en Lybie alors que l’on peut la faire chez nous ?
  • Inutile de parler des juifs, nous les avons maltraités à de multiples moments, aucune raison d’arrêter.
  • Et pourquoi ne pas non plus réhabiliter l’inquisition ?
  • Et les italiens ne sont-ils pas les héritiers de ces romains qui ont ridiculisé les Gaulois ?
  • Et pourquoi aider les Grecs alors qu’ils ont dominé le monde ? 
  • Et les Égyptiens, où sont donc leurs pharaons ?
Certes, j’exagère. Mais qui a commencé ? 
Qui nous parle de la France en nous parlant de son passé ? Qui a peur de ceux qui la rejoignent ? Qui croit que c’est dans son passé que la France trouvera et construira son avenir ? Qui prône le devoir de mémoire ?
Tout individu se construit sur une part d’oubli qui est la seule façon d’avancer, de pardonner et de penser au futur. Il en est de même avec les nations et les pays : la France ne sera généreuse et porteuse d’avenir que si elle ne se pense pas au passé  et ne cherche pas dans le futur le prolongement de ses origines. 
Méfions-nous des incendiaires qui pourraient réveiller des démons du passé…

25 févr. 2015

INCENDIES MET LE FEU AU DEVOIR DE LA MÉMOIRE

Comment vivre quand on sait que l’on est né d’un crime ? (billet paru le 30 mars 2011)
Un frère et une sœur, jeunes adultes à l’aube de leur vie, font face au notaire, employeur et ami de leur mère. Celle-ci vient de mourir, et ils écoutent la lecture du testament. Double choc : celui de la demande de leur mère de retrouver leur père, celle de la nouvelle de l’existence d’un frère qu’elle leur demande aussi de retrouver.
Leur père est un inconnu, lointain, quelque part dans ce Liban quitté par leur mère au moment de leur naissance. Ils le croyaient mort. Pourquoi aller à sa rencontre ? Pourquoi remettre en  cause l’équilibre de leur vie, ici ? Pourquoi quitter le Québec ?
Et puis ce frère, qu’est-ce que cela veut dire ? Pourquoi leur mère ne leur en a jamais parlé ? Quelle drôle d’idée, d’un seul coup, dans un testament, de lâcher la bombe de son existence !
Réaction symétrique et opposée entre le frère et la sœur. 
Simon, le frère est d’avis qu’il faut continuer comme avant. Surtout ne pas savoir, surtout ne rien changer. Il est bien là après tout. Rien n’est parfait, mais aucun drame apparent. Probablement des non-dits, des problèmes de-ci de-là, mais rien d’apparemment dramatique. Oui, sa mère avait son jardin secret. Oui, ils ont peut-être, et même certainement, un père quelque part au sud Liban, et un frère aussi. Et alors ? Simon ressent le danger de ce passé enfoui. C’est vrai que ce n’est pas très courageux. N’a-t-il pas tort de vouloir laisser inconnu ses origines ?
Jeanne, la sœur, n’a pas peur de ce passé. Elle, elle veut partir, va partir à sa recherche. Elle n’imagine de rester là comment avant. Maintenant qu’elle sait que ce passé inconnu existe, elle doit partir. Pourquoi ? Est-elle plus courageuse ? Est-elle plus insatisfaite de sa vie ici ? Allez savoir… La voilà sur le chemin de ses racines, de leurs racines, mettant ses pas dans ceux de sa mère. Elle découvre l’horreur de la guerre du Sud Liban et comment ses origines en dépendent. Elle va convaincre son frère de la rejoindre.
Je ne vais pas vous raconter le film et le chemin d’horreur de ses découvertes successives. A vous de les découvrir si vous ne l’avez pas vu.
Au terme de ce voyage, quelques questions se poseront : qui avait raison, celui qui voulait continuer comme si de rien n’était ou celle qui voulait savoir ? Comment vont-ils pouvoir vivre avec ce qu’ils ont appris ? Peut-on survivre quand on sait que l’on est né d’un crime ?
Incendies n’apporte pas de réponses. Denis Villeneuve l’a tourné comme un documentaire, pas de commentaires, pas d’explications, pas de jugements. Juste le choc de la succession des images, juste l’empilement des faits, lente plongée… sans fonds.
Il montre simplement que la remontée à la surface de certains faits venant du passé n’est pas toujours souhaitable. Comment vivre en effet sans oubli ? 
Ce qui est vrai pour un individu l’est aussi des sociétés : est-il toujours pertinent de vouloir se souvenir de tout ? Le devoir de mémoire n’est-il pas parfois à pondérer par la nécessité de l’oubli ? Que penser de la volonté de penser la France en la plongeant dans son passé ?

23 févr. 2015

AU PAYS DES CHÊNES, DES TRUFFES ET DES PIERRES

Grandir caché - extrait de mon roman Double J (billet paru le 11 mai 2012) 
Au pied des chênes qui peuplaient le terrain, poussaient des truffes, ces étonnants et capricieux tubercules qui grandissaient mystérieusement sous terre. La truffe m’était apparue comme une étonnante métaphore de moi-même. Comme moi, elle grandissait cachée, dans l’obscurité, rebelle à toute domestication, toute culture. On pouvait passer à côté d’elle, à quelques centimètres, sans s’en rendre compte. Elle ne faisait aucun bruit, ne se manifestait que discrètement par le brûlé au pied de l’arbre et une odeur subtile que seul un animal pouvait déceler. Chercher des truffes, c’était participer à un spectacle de prestidigitation. Au départ, il n'y avait rien, juste des chênes, de la terre et quelques plantes éparses. Et puis, quelques secondes après, grâce à l'odorat du chien et au talent de son maître, la truffe était là, comme un lapin sorti du chapeau. Elle ne se révélait que par eux, le chien et son maître. Avant, elle n’existait pas, restait virtuelle.
A quoi pensait la truffe dans son refuge souterrain ? Avait-elle peur d’être trouvée, ou à l’inverse, vivait-elle dans l’attente d’être découverte et d’accéder au monde ? Est-ce que vivre pour elle, c’était grandir cachée et protégée ? Savait-elle qu’elle serait mangée dès qu’elle serait trouvée ? Était-ce pour cela qu’elle mûrissait le plus doucement possible et que, le moment venu, quand elle était prête, émettait une odeur presque imperceptible ? Essayait-elle d’échapper au monde du dehors, ce monde qui allait la dévorer ?
Je ne pouvais pas ne pas faire le lien entre ma vie et les truffes. Comme elles, j’avais besoin de me cacher, de me protéger. Je n’avais pas grandi au soleil, mais dans l’ombre et l’obscurité. Jacques m’avait-il trouvé parce que j’étais mûr pour émerger au grand jour ? Allait-il me manger ?
A l’opposé des truffes, il y avait les pierres. Autant les truffes étaient vivantes et cachées, autant les pierres étaient mortes et apparentes. Posées les unes sur les autres, sans ciment, sans aucun liant, elles dessinaient des lignes aléatoires. Les murs en pierres sèches étaient la structure et l’ossature du paysage, ils le découpaient et l’architecturaient. Ces murs, je les avais d’abord regardés, sans bruit, respectueusement. Puis, j’avais appris à les compléter, les réparer et, de temps en temps, les prolonger, voire les créer. J’avais, à ma façon discrète et progressive, commencé à écrire avec des pierres dans un jardin. Cette écriture minérale était lente, physique et paradoxale : je n’étais content de mon travail, que si personne ne se rendait compte que le mur avait été fait ou refait. Il devait se fondre dans le paysage et s’intégrer comme s’il avait toujours été là. Ce devait être une œuvre intemporelle, une œuvre semblant exister depuis l’origine des temps.
C’était dans cette niche que j’avais voulu poursuivre l’écriture de mon histoire. Elle était l’endroit logique pour soutenir son émergence.

20 févr. 2015

SUR LE TOIT DU MONDE

Prisonnier
Clos, calme, caché, calfeutré, cotonneux, condamné,
Sur le toit du monde que la brume me masque,
À l’abri d’un bar anglais d’un hôtel hérité des colonies,
J’écris un roman que personne ne lira… peut-être.
L’horizon n’est plus, l’Himalaya a été gommé.
Les autres ne sont plus, leurs vies ont été éradiquées.
Mon passé n’est plus, je suis vierge de mémoire.
Mon futur n’est plus, je ne suis que présent.
Ancré dans l’instant, habité de mon imaginaire,
Abreuvé des herbes cueillies dans des champs voisins,
Saoulé par le silence, ivre de la vacuité du monde,
J’invente une histoire qui aurait pu être la mienne.
Clos, calme, caché, calfeutré, cotonneux, condamné,
J’apprends à ne plus vivre qu’enfermé sur le toit du monde.
À l’abri de la prison d’un hôtel hérité des colonies,
J’apprends à ne plus vivre que reclus et sans espoir.
(Photo prise en août 2010 à Darjeeling en Inde)
(Pour les deux semaines à venir, petit break du live avec la rediffusion de quelques billets précédents)

19 févr. 2015

ARRÊTONS DE DÉMÉNAGER LE TERRITOIRE !

Pour un nouvelle Délégation à l’Aménagement du Territoire
Lors de son retour au pouvoir, une des décisions majeures du Général de Gaulle a été de lancer une politique ambitieuse d’Aménagement du Territoire. Confiée initialement à une personnalité politique de premier plan, Monsieur Olivier Guichard, la Délégation à l’Aménagement du Territoire et à l’Action Régionale a défini et porté cette politique.
Malheureusement l’élan initial s’est progressivement éteint, et la politique d’aménagement du territoire s’est petit à petit éteinte. En effet, imaginée dans la logique des Trente glorieuses où il s’agissait d’orienter la croissance économique et mieux répartir les emplois, elle n’a jamais su se repenser dans le contexte d’un monde globalisée et d’une croissance faible, voire nulle. Conçue aussi aux temps d’un État central et tout puissant, elle n’a su que maladroitement se mettre au goût du jour d’une France décentralisée.
Et ce n’est pas la fusion récente de la Datar au sein du Commissariat Général à l’Égalité des Territoires qui sera de nature à la relancer. L’intitulé « Commissariat » est en soi déjà l’annonce d’une logique de gestion, ou pire de contrôle. Et quant à croire que le développement des Territoires passera par leur égalité…
Pourtant il y a urgence !
Le livre récent de Christophe Guilluy, La France périphérique, montre en effet que la cohésion territoriale a volé en éclats. Ce n’est plus comme dans les années 60, Paris et le désert français, mais les villes moyennes abandonnées.
Relancer une politique d’aménagement du territoire est une priorité si nous voulons à nouveau tous refaire société ensemble, et tirer parti des avantages offerts par la diversité de notre territoire.
Cela passe par deux conditions :
- De grandes régions qui, centrées autour de villes métropoles, utilisent l’énergie de leur connexion à l’économie mondiale pour irriguer tout leur territoire. Car le nouvel Aménagement du Territoire ne sera un succès que s’il part des forces locales,
- Un État recentré qui remaille le territoire avec de grandes infrastructures reliant les villes entre elles et la France au monde. Ceci suppose d’articuler les ports avec leur hinterland et de mailler les différents modes de transport entre eux.
Pour cela, pourquoi ne pas revenir aux sources en réinventant une Délégation à l’Aménagement du Territoire ? Une structure légère et politique pour incarner, animer et conduire une stratégie de long terme en matière d’infrastructures. Une structure qui laisserait aux Régions le soin de la mettre en œuvre et de l’enrichir, d’où l’abandon de « l’Action Régionale » dans son intitulé.
Car enfin, n’est-ce pas une des premières responsabilités d’une politique nationale que de penser et dessiner le territoire afin que chacun puisse s’y développer mieux et de façon harmonieuse !

18 févr. 2015

SORTIR DU DILEMME DU PRISONNIER

La gueule de bois de la dépense publique ou la nécessité de sortir d’une addiction française (8)
Madame la France, non seulement vous êtes droguée à la dépense publique, non seulement vous êtes la reine des trous, non seulement vous êtes la championne de la centralisation inefficace, mais vous jouez bien maladroitement au dilemme du prisonnier.
De quoi s’agit-il ? De l’histoire classique des deux malfrats qui viennent d’être arrêtés, car suspectés d’un cambriolage. Le commissaire de police est convaincu qu’ils ont fait le coup, mais il ne dispose d’aucune preuve. Aussi fait-il pression sur chacun des deux pour qu’il se dénonce, ce avec une carotte à l’appui : le premier qui parle aura sa peine divisée par deux. Si les deux se taisent, ils repartiront libres. Oui, mais si l’un parle, mieux vaut être le premier… Alors parler ou ne rien dire ? Le choix va dépendre de la confiance que chacun a en l’autre. 
Madame la France, quand je regarde la relation chez vous entre systèmes public et privé, j’ai l’impression que l’on y joue à ce jeu-là, et sans faire confiance à l’autre : Les chefs d’entreprises et les cadres du privé se plaignent du secteur public, et les dénoncent volontiers ; les responsables publics critiquent sans cesse le privé, et inventent chaque jour de nouvelles règles et lois pour le contraindre. 
Et si on changeait la règle du jeu, et si l’on pariait sur la confiance ?
Car voyez-vous, Madame la France, il n’y a ni gentils, ni méchants. Les fonctionnaires, les ouvriers, les cadres supérieurs ou les chefs d’entreprises ne sont pas des hommes et des femmes à abattre. Tous les politiques ne sont pas pourris. 
Tous ensemble ils vous construisent, Madame la France. C’est avec eux, tous ensemble réunis, que vous réussirez ou échouerez.
Sortez vite par le haut du dilemme du prisonnier, et apprenez à chacun à faire confiance à l’autre. Pour cela, une urgence : recréer du lien entre eux… et sortez de votre addiction à la dépense publique et à la centralisation.
Il est plus que temps. 

17 févr. 2015

LES MÉFAITS DE LA CENTRALISATION

La gueule de bois de la dépense publique ou la nécessité de sortir d’une addiction française (7)
Simplement dans notre mode hyperconnecté, où les incertitudes ne sont plus locales mais se propagent d’un bout à l’autre de la planète en une fraction de seconde, où les entreprises fonctionnent de plus en plus en réseau, où démêler les fils des interdépendances est un leurre, comment un seul homme pourrait-il faire les bons choix ?
L’idée d’être sauvée en remontant des barrières et des protections autour de vous, ne marche que dans le village gaulois d’Astérix. Les connexions sont trop profondes, fines et entrelacées pour qu’un tel isolement soit réaliste. Et n’oubliez pas qu’en plus, Astérix dispose d’une arme que vous n’avez pas : la potion magique !
Non, Madame la France, comprenez que c’est dans la décentralisation que se trouve la réponse à vos maux les plus profonds. D’ailleurs cet homme miracle, que vous rêvez de voir revenir, le Général de Gaulle, il l’avait lui-même compris. Car en 1969, c’est ce qu’il voulait entreprendre. Mais vous ne l’avez pas laissé faire, et l’avez remercié. Si seulement vous lui aviez fait confiance, peut-être aurait-il construit cet État recentré, fort et ramassé qui vous est nécessaire. Et aujourd’hui paradoxalement, c’est à lui que vous aimeriez confier les clés, mais non pas pour mettre en œuvre cette décentralisation, mais pour vous sauver comme il l’a fait en 40, 45 ou 58…
(à suivre)

16 févr. 2015

LE MIRAGE DE L’HOMME MIRACLE

La gueule de bois de la dépense publique ou la nécessité de sortir d’une addiction française (6)
Je pourrais multiplier les exemples à l’infini. Chez vous, Madame la France, l’argent public, on a un peu tendance à le gaspiller. Un peu comme dans les lampes à incandescence, versus les lampes LED : elles chauffent et éclairent moins bien. Si seulement vous arriviez à passer à un service public LED : un meilleur service pour un moindre coût !
À part la dépense publique – et vous allez voir que cela va de pair –, vous avez une autre drogue : l’homme ou la femme miracle. Votre histoire en est jonchée, et vous ne pouvez pas ne pas en être nostalgique : Louis XIV, Napoléon, De Gaulle pour ne citer que les plus fameux. Vous oubliez très vite leurs mauvais côtés, pour ne plus vous rappeler que du meilleur. Qui vous en voudrait ? 
Seulement du coup, dès que vous rencontrez un problème – et en ce moment, vous êtes gâtée de ce côté-là ! –, vous en appelez à un homme ou une femme miracle. Un sauveur, un Zorro politique qui, de la pointe de son épée, va tout résoudre. C’est une deuxième drogue qui va de pair avec celle de la dépense publique. Car ce sauveur, vous l’imaginez tout puissant, décidant de tout, capable de savoir quels seront les investissements d’avenir, comment arrêter les gaspillages publics, quel devrait être le programme d’enseignement de la maternelle jusqu’aux études supérieures, sans oublier le travail manuel et la relance de la culture. Un magicien à qui, de bon cœur, vous allez confier encore un peu plus vos économies.
(à suivre)

13 févr. 2015

RESSOURCEMENT

Tapi
Lisse, si lisse.
Ne pas bouger, ne pas nager.
Surtout pas, me fondre dans le silence.
Lisse, si lisse.
Le ciel et l’eau ne sont que points de vue.
Les arbres regardent leurs reflets,
A moins que ce ne soit l’inverse.
Le ciel et l’eau ne sont que points de vue.
Les minutes se font heures.
Tel un crocodile qui, des jours durant,
Guette sa proie, j’attends.
Les minutes se font heures.
Je bois l’énergie de la vie qui m’entoure.
Perdu au cœur de la jungle thaïe,
Lové dans la couette de la chaleur de l’eau,
Je bois l’énergie de la vie qui m’entoure.
(Photos prises en août 2009 dans le Nord de la Thaïlande, à l’hôtel Phu Chusai)