12 févr. 2010

VOYAGER VITE ET BEAUCOUP, C’EST SE DISPERSER

______ Éditorial du vendredi ________________________________________________________________
Rappel du patchwork de la semaine :
- Lundi : Quand on découvre que Mc Donald est peut-être en train d'abandonner ses racines américaines au profit d'une version plus mystique et empreinte d'histoire.
- Mardi : Il y a 20 ans, Michel Serres mettait en exergue notre attitude de parasite et le danger du mot « environnement » qui nous laisse à croire que nous sommes au centre du monde 
- Mercredi : Où l'on voit que, à l'occasion de son dernier film, le « What else » de Georges Clooney est devenu « What's next »
- Jeudi : Une question au sujet de l'écomobilité : est-ce implicitement la promotion de l'homme-escargot, celui qui n'a plus d'histoire, voyage avec sa maison dans son dos et regarde le monde au travers d'une glace ?

Ces articles (je mets à part celui de lundi qui n'était qu'un regard amusé sans autre intérêt que cet amusement) ont pour fil conducteur notre attitude par rapport au monde.
Sommes-nous toujours en train de voyager dans ce monde en le considérant comme « notre » monde, celui qui nous appartient, qui nous environne et que nous pouvons salir à notre gré ? Voulons-nous poursuivre notre course sans fin, en limitant au maximum nos bagages pour voyager plus vite et plus efficace, en consommant le moins possible des ressources rares ?
Ou allons-nous arriver à comprendre que nous appartenons à ce monde ? Serons-nous capable de repenser aussi nos relations interpersonnelles et de remettre en cause notre agitation croissante ? Pouvons-nous arriver à comprendre que voyager vite et beaucoup, c'est se disperser ?

11 févr. 2010

QUAND LA SNCF FAIT LA PROMOTION DES ESCARGOTS !

L'écomobilité ou les voyageurs sans bagages

La SNCF a lancé récemment le concept de l'écomobilité. Volonté de surfer sur la vague écologique et d'en profiter pour mettre en avant la performance énergétique du train.
Je ne doute pas du bien-fondé de cette affirmation et de la nécessité de développer des transports collectifs (sans oublier le vélo !).
Je suis simplement amusé par cette expression « écomobilité ». Je n'ai lu aucune étude, mais je serais curieux de savoir ce que quelqu'un pris au hasard comprend à partir de cette expression et de l'affiche ci-jointe.
Je suis allé chercher sur internet une définition du mot. Voilà ce que j'ai trouvé :

"Qu'est ce que l'écomobilité ? C'est bouger écologique et équitable. C'est la suite du Grenelle et le commencement d'autre chose, c'est la nouvelle bataille de SNCF. (…) Un petit mot pour dire une grande cause : faire préférer le train à tout le monde. C'est la nouvelle bataille de SNCF. Et le triomphe de l'écomobilité profitera à tout le monde" (http://www.carte-regliss.fr/fr/votre-planete/sncf-et-leco-mobilite/ )
Beau concept donc…

Simplement, je ne peux pas m'empêcher de trouver un autre sens à ce mot : comme « éco » vient du mot maison en grec, je vois là la promotion de l'escargot, celui qui est voyage avec sa maison.
Clin d'œil involontaire vers le personnage de Georges Clooney dans « In the air » (voir mon article d'hier) qui, lui aussi, voyage avec sa maison réduite à un sac à dos.
Sur l'affiche de la SNCF, on voit en petit la mention « generation-ecomobile ». C'est peut-être bien de cela dont il s'agit : sommes-nous en train de devenir des voyageurs sans bagages, des itinérants sans histoire ? Avons-nous vraiment envie de redevenir des enfants regardant le monde réel défiler devant une glace ?

10 févr. 2010

QUAND GEORGES CLOONEY EST PRIS DE FOLIE VIBRIONNAIRE

De "What else" à "What's next" !

Autant dans la publicité pour Nespresso, Georges Clooney exprime le calme et la tranquillité, autant dans son dernier film « In the Air », il est la caricature du cadre courant sans arrêt d'un bout des États-Unis à l'autre.
Quand, pour Nespresso, il dit « What else », ce n'est pas pour changer. Bien au contraire, c'est pour exprimer qu'il a enfin trouvé ce qu'il cherchait. Plus de raison de changer, tout est parfait. Implicitement, il exprime aussi lui-même le choix parfait : Georges Clooney incarne un idéal masculin.

Dans « In the Air », à l'inverse, il est toujours entre deux avions, deux rendez-vous. Il n'envisage pas de s'arrêter même un instant, son appartement est vide et tout ce qu'il a tient dans sa valise. Son cadre de vie idéal, c'est la cabine d'un avion ou la chambre d'un hôtel.
Il a même théorisé son mode de vie et tient des conférences autour du sac à dos : êtes-vous capable de mettre tout ce à quoi vous tenez dans un sac à dos ? Si oui, vous êtes libre ; si non, vous avez des entraves. Lui, il n'a pas d'ami, pas d'amour, pas de possession. Rien. Donc il est libre.
Libre de bouger tout le temps, de courir toujours plus vite… mais pour rien. A chaque fois qu'il a obtenu quelque chose ou est arrivé quelque part, il dit « What else ? » et repart… In fine, il s'apercevra du vide de sa vie… mais trop tard.
Ce film est une métaphore de notre civilisation : je ne vois autour de moi que des gens qui courent sans cesse. Si, comme je l'ai déjà écrit souvent (voir la série d'articles autour du temps), c'était une preuve d'efficacité, nous vivrions dans un monde parfait !

Attention donc à ne pas nous tromper sur la réponse à apporter à « What else » : comprenons que c'est plus pour nous faire comprendre que le mouvement est souvent illusoire… Ne le remplaçons pas par "What's next" !

9 févr. 2010

« OUBLIEZ DONC LE MOT ENVIRONNEMENT »

Quand il y a 20 ans, Michel Serres proposait déjà le contrat naturel...

Dès 1990, Michel Serres écrivait "le Contrat naturel" dans lequel il attirait l'attention sur la nécessité de changer notre relation à la nature : le monde n'est pas notre environnement, mais nous en faisons partie ! Certains se sont ralliés récemment à l'écologie, il m'a semblé utile de réécouter ce que Michel Serres avait écrit, il y a vingt ans. Occasion d'un nouveau patchwork.

Nous salissons le monde pour montrer qu'il nous appartient 
« Ne vivant plus qu'à l'intérieur, … indifférents au climat, sauf pendant leurs vacances, où ils retrouvent, de façon arcadienne et pataude, le monde, ils polluent, naïfs, ce qu'ils ne connaissent pas, qui rarement les blesse et jamais ne les concerne. Espèces sales, singes et automobilistes, vite, laissent tomber leurs ordures, parce qu'ils n'habitent pas l'espace par où ils passent et se laissent donc aller à le souiller. (…) De quoi nous occupons-nous ? De données numériques, d'équations, de dossiers. »
« Or j'ai souvent noté qu'à l'imitation de certains animaux qui composent leur niche pour qu'elle demeure à eux, beaucoup d'hommes marquent et salissent, en les conchiant, les objets qui leur appartiennent pour qu'ils le deviennent. Cette origine stercoraire ou excrémentielle du droit de propriété me paraît une source culturelle de ce qu'on appelle, pollution, qui, loin de résulter, comme un accident, d'actes involontaires, révèle des intentions profondes et une motivation première. »
« Ainsi la souillure du monde y imprime la marque de l'humanité, ou de ses dominateurs, le sceau ordurier de leur prise ou de leur appropriation. »

Nous sommes des parasites du monde que nous habitons
« La Déclaration des droits de l'homme a eu le mérite de dire : « tout homme » et la faiblesse de penser : « seuls les hommes » ou les hommes seuls. Nous n'avons encore dressé aucune balance où le monde entre en compte, au bilan final. »
« L'essentiel se passe dedans et en paroles, jamais plus dehors avec les choses… Au moment même où physiquement nous agissons pour la première fois sur la Terre globale, et qu'elle réagit sans doute à l'humanité globale, tragiquement, nous la négligeons.
« Oubliez donc le mot environnement, usité en ces matières. Il suppose que nous autres hommes siégeons au centre d'un système de choses qui gravitent autour de nous, nombrils de l'univers, maîtres et possesseurs de la nature. »

Nous ne pouvons plus être en guerre contre notre monde
« Or, à force de la maîtriser, nous sommes devenus tant et si peu maîtres de la Terre, qu'elle menace de nous maîtriser de nouveau à son tour. »
« Nous ne nous battons plus entre nous, nations dites développées, nous nous retournons, tous ensemble, contre le monde. Guerre à la lettre mondiale, puisque tout le monde, au sens des hommes, impose des pertes au monde, au sens des choses. » 
« Aimer nos deux pères, naturel et humain, le sol et le prochain : aimer l'humanité, notre mère humaine, et notre naturelle mère, la Terre. »

Nous devons reconnaître par contrat la globalité du monde
« J'entends désormais par contrat naturel d'abord la reconnaissance, exactement métaphysique, par chaque collectivité, qu'elle vit et travaille dans le même monde global que toutes les autres. »
«  Virtuel et non signé au même titre que deux premiers, puisqu'il semble bien que les grands contrats fondamentaux demeurent tacites, le contrat naturel reconnaît un équilibre entre notre puissance et les forces du monde. De même que le contrat social reconnaissait quelque égalité entre les signataires humains de son accord… de même que le contrat savant s'oblige à rendre en raison ce qu'il reçoit en information, de même le contrat naturel reconnaît d'bord l'égalité nouvelle entre la force de nos interventions globales et la globalité du monde. »

8 févr. 2010

MC DO S’APPRÊTE À TOUT CHANGER !

Mc Donald's teste son nouveau concept dans le silence d'une rue parisienne

Jeudi dernier, je marchais rue Saint Lazare à proximité de la Gare du même nom quand mon regard fut arrêté par une image insolite : Une devanture nouvelle et révolutionnaire d'un Mc Donald's (voir la photo ci-jointe).

Manifestement Mc Do teste un nouveau concept révolutionnaire : il compte abandonner son rattachement au mythe nord-américain pour plonger ses racines dans les tréfonds de l'histoire européenne.

Qu'apprend-on en observant attentivement cette façade (comme toujours lors d'un test, une entreprise en dit plus qu'elle ne le voudrait sur ses intentions) :

- Ronald Mc Donald, personnage central de l'iconographie actuelle remplacé par un roi : Ce changement exprime, à lui seul, la portée de la transformation : dynamisme et exubérance de Ronald versus majesté et calme du roi, couleurs vives et maquillage outrancier versus tons pastels et réalisme affiché. Mc Do veut clairement s'inscrire dans notre nouvelle culture mondiale : réalisme, conformismes, sérieux. Tout un programme.

- L'omniprésence du bois : Là je m'interroge. Il ne peut s'agir d'un mépris affiché vis-à-vis de l'environnement et de la déforestation. Mc Do ne pourrait pas prendre un tel risque. J'y vois au contraire une prise de position en faveur de la maison ossature bois et des économies d'énergie. Ce bois vient surement d'une plantation écologique, et certainement pas d'une forêt africaine ou sud-américaine. Les cimentiers devraient faire attention à ce que Mc Do ne devienne pas le cheval de Troie venant menacer notre mode de construction.

- La présence de 4 drapeaux juxtaposés au logo M : C'est évidemment un clin d'œil à l'intention des européens et de la multiplicité de nos nations. C'est un peu un remake du « United colors of Benetton ». Je suppose que les 4 drapeaux seront choisis en fonction du continent. Malin.

- La verticalité du concept : La plupart des Mc Do actuels sont des structures horizontales, alors que celle-ceci est d'abord verticale. Cet élancement vers le ciel est-il une affirmation de l'importance de Dieu et de la religion ? Mc Do veut-il faire de ses restaurants les cathédrales du 21ème siècle ? Des minarets de la consommation au sommet desquels des haut-parleurs viendraient hurler les promotions du jour ? La réponse dans les semaines et mois à venir…

C'est donc une révolution qui s'annonce. Et pourtant personne n'en parle. Y aurait-il une conspiration du silence ? Mais alors y a-t-il un chef d'orchestre, et si oui, pourquoi ?

5 févr. 2010

COLLECTIVEMENT, NOUS NE VISONS AUCUNE MER

______ Éditorial du vendredi ________________________________________________________________

Rappel du patchwork de la semaine :

- Lundi : Où grâce au Docteur House, on comprend mieux pourquoi pour réussir un diagnostic complexe, on a besoin de confrontations, d'observations larges, d'approximations successives, de perte de temps et d'intuition.
- Mardi : L'Oréal a choisi au début des années 70 la beauté comme stratégie, a alors aligné ses actes en vendant Monsavon et a depuis multiplié produits et voies d'accès vers cette même mer.
- Mercredi : Comme L'Oréal, Google vise une mer et c'est sa seule stratégie. Elle revendique de n'avoir aucun plan d'action…
- Jeudi : Choisir sa mer, c'est un peu comme un mariage pour lequel le divorce serait interdit. Plus l'entreprise avance, plus elle sera forte et soudée, ce à une condition : ne pas changer de mer.

Qu'en est-il de l'action politique ? J'ai un peu l'impression de voir le négatif de ce que revendique Google : je ne vois que des plans d'action à un, deux ou cinq ans, mais je ne vois ni vision, ni stratégie. Tous les raisonnements, tous les projets sont emportés par les vagues de l'incertitude : comme ils ne visent aucune mer, ils sont le jouet des aléas et ne construisent que bien peu.
Choisir une mer qui viendrait fixer l'objectif de l'action collective, supposerait de réussir un diagnostic complexe : comprendre quels sont les mondes vers lesquels nous pouvons aller et quel est celui que l'on vise. Au lieu de cela, nous regardons couler l'eau et nous nous posons la question d'où elle vient : comment savoir où va la Seine en la regardant couler ? Et nous oscillons d'un méandre à l'autre…

4 févr. 2010

ON CHOISIT SA MER POUR LA VIE

Une stratégie qui coule de source

Paradoxalement, dans le monde de l'incertitude, on choisit sa mer pour la vie… toute la vie. La mer n'est pas un objectif que l'on se fixe pour les cinq ou dix à venir, c'est un horizon, situé à l'infini, qui va guider et apporter du sens aux actions de l'entreprise aujourd'hui et demain : L'Oréal vise la beauté depuis le début 70, Air Liquide s'intéresse au gaz depuis plus de cent ans, et Google n'envisage pas de se centrer sur un autre thème que l'information.

Pourquoi une telle stabilité ?
D'abord parce qu'elle est possible. Une mer est un attracteur stable dans le chaos du monde, un besoin fondamental et stable qui, quels que soient les aléas, va structurer le fonctionnement de notre société à long terme, orienter les évolutions, et attirer vers lui les courants. C'est un des éléments constitutifs de notre écosystème social. Des exemples ? La beauté, la communication, les loisirs, le déplacement, l'alimentation, la sexualité, l'énergie, un composant de la matière… Plus le rattachement sera direct, plus l'attraction sera forte et stable, plus la mer profonde et vaste. Donc les mers sont et seront toujours là. Si elles venaient à disparaître, ce ne seraient plus des mers.
Ensuite parce que, comme un fleuve se renforce au fur et à mesure qu'il progresse, une entreprise ne peut pas changer de mer sans « repartir de zéro ». Au début, une entreprise n'a qu'une intuition de la mer qui lui convient et de comment elle peut contribuer à apporter des solutions nouvelles facilitant l'accès à cette mer. C'est petit à petit qu'elle va développer une compréhension fine, créer des offres de mieux en mieux adaptées, créer des réseaux multiples, développer des savoir-faire internes…

Enfin parce que c'est cette mer qui donne le sens à l'action collective et soude les équipes internes. Changer de mer, ce n'est pas seulement changer de stratégie, c'est changer d'identité. Changer de mer, c'est risquer de ne pas être compris et suivi, de voir éventuellement même éclater l'entreprise. En fait, changer de mer, c'est changer l'entreprise : quand BSN est passée du verre à l'alimentation et la santé, elle est devenue Danone, qui n'est pas la transformation de BSN, mais une nouvelle entreprise.

Aussi ne choisit-on pas sa mer sur un coup de tête : cela doit être le résultat d'un processus long et approfondi. Souvent ce choix a été fait dès la naissance de l'entreprise et s'est trouvé progressivement confirmée par le renforcement de l'entreprise. Dans ce cas, on a choisi sa mer comme l'eau d'un fleuve : la source a imposé la mer.

3 févr. 2010

GOOGLE N’A PAS DE PLANS À 5, 2 OU 1 ANS

Viser une mer et agir au présent

Dans une interview paru en juin 2009 dans Wired MagazineEric Schmidt, PDG de Google, disait : « Google est peut-être au cœur de ce futur, mais il n'y a pas de grand plan. (…) Nous n'avons pas de plan à cinq ans, nous n'avons pas de plan à deux ans, nous n'avons pas de plan à un an. Nous avons une mission et une stratégie, et la mission est…, vous savez, d'organiser l'information du monde. Et la stratégie est de le faire à travers l'innovation. Cela ne nous ennuie pas si quelque chose ne marche pas. Parce que nous comprenons que quelque chose d'autre marchera. »

Ainsi comme L'Oréal, sa stratégie se résume au choix d'une mer, la beauté pour L'Oréal (voir mon article d'hier), l'information du monde pour Google. Dans les deux cas, le même choix : privilégier l'innovation pour l'atteindre.

De même Nestlé avec la nutrition et la santé (mer aussi visée par Danone), Saint Gobain avec l'habitat, Total avec l'énergie ou Air Liquide avec le gaz …

2 févr. 2010

L’ORÉAL ET LA MER DE LA BEAUTÉ

Parce que cela le valait bien !

Si vous demandez à L'Oréal de définir sa stratégie, il va répondre la beauté de la femme, et plus récemment celle de l'homme. La beauté est bien une mer, car elle est un besoin fondamental et stable qui, quels que soient les aléas, va structurer le fonctionnement de notre société à long terme, orienter les évolutions, et attirer vers lui les courants. En quoi L'Oréal contribue-t-il à nous rapprocher de cette mer ? En proposant des innovations dans le domaine de la peau, du cheveu et du parfum, et mobilisant ainsi trois de nos cinq sens : la vue, le toucher et l'odorat.

Ce choix date du début des années 70. Il n'était alors ni simple, ni évident. L'Oréal aurait tout aussi bien pu, vu sa position dans les shampooings et les savons, choisir l'hygiène et la propreté. Une fois le choix fait, cela s'est traduit par un acte majeur : il a vendu Monsavon à Procter & Gamble. Or, Monsavon avait été racheté par L'Oréal en 1928, et avait servi de support à toute l'extension du groupe dans le secteur grand public. La raison sociale du groupe a même été L'Oréal-Monsavon. La cession de Monsavon constituait une rupture avec le passé et la concrétisation de la stratégie. En 1964, L'Oréal a racheté Lancôme qui était une PME (créée en 1935 par Armand Petitjean, un parfumeur parisien) et a assuré son expansion.

Depuis, pour viser la beauté, L'Oréal a multiplié les produits, les marques, les circuits de distribution. Cette redondance peut sembler une sous-optimisation, un manque de productivité, elle est surtout une assurance contre les aléas : si le circuit des ventes via les pharmacies se développe plus vite que via les parfumeries, L'Oréal est là. Si c'est celui de la vente directe, L'Oréal est là encore. Si ce sont les produits naturels qui ont le vent en poupe et supplantent ceux qui revendiquent d'abord une performance technique, L'Oréal est toujours là. Plus il y aura de chemins possibles pour aller vers la mer, plus on aura de chances de l'atteindre effectivement, plus « l'histoire coulera de source ». C'est la redondance qui va apporter souplesse et résilience.

Ainsi année après année, sans remettre en cause la mer visée, jouant des opportunités qui se présentent, l'Oréal se renforce et est devenue le leader mondial dans le champ visé.

Pourquoi donc L'Oréal s'en est-il tenu à ce choix, a-t-il multiplié les voies d'accès, a-t-il aligné ses actes ? Parce que cela le valait bien !

1 févr. 2010

POURQUOI LE DOCTEUR HOUSE RÉUSSIT-IL SES DIAGNOSTICS ?

Les cinq clés de la réussite

La série TV « Docteur House » met en scène, à chaque épisode, un diagnostic médical quasiment impossible : chaque fois, un patient présente un ensemble de symptômes apparemment contradictoires, et tous les tests viennent successivement éliminer les hypothèses faites. In fine, comme un magicien, le docteur House va trouver la solution, celle qui réunit tous les faits et va résoudre le cas.

Comme émerge cette solution ? Si j'analyse le déroulé du diagnostic, je trouve toujours : 
- Une confrontation constante au sein de l'équipe : Chacun est tenu de formuler à haute voix ses hypothèses, d'expliquer ce qui les sous-tend et d'accepter l'exercice de démolition venant du reste de l'équipe, et souvent de House lui-même.
- Un recueil large des faits qui va bien au-delà du classique questionnaire médical : Tous les éléments de contexte, y compris via une fouille de l'appartement du malade, sont collectés.
- Des tests successifs : Toute hypothèse est immédiatement testée, même si elle n'est pas certaine. Il suffit qu'elle soit envisageable, c'est-à-dire possible pour être vérifiée.
- Du temps passé à « ne rien faire » : L'essentiel de l'activité de House n'est pas planifiée, ni affectée à une recherche opérationnelle. Il passe son temps à discuter, critiquer les personnes qui l'environnent, jouer avec un balle, regarder une émission de télévision.
- Une solution qui vient d'ailleurs : La solution émerge toujours à partir d'une analogie externe. Confronté à une situation de la vie courante, House va y trouver la clé qui lui permet de relier les faits et comprendre ce qui lui échappait. De plus, pendant tout l'épisode, House va veiller à s'impliquer au minimum dans la relation au patient. Il est intensément au courant des faits, mais il reste ailleurs, à distance.

Voilà cinq points à garder en mémoire pour tout diagnostic complexe… On n'est toutefois pas obligé d'avoir un comportement aussi pénible que celui de House !