17 mai 2010

IL N’EST JAMAIS TROP TARD POUR ÊTRE HEUREUX

Les prisons sont faites pour mettre en sécurité les souvenirs que l'on ne veut pas oublier

Assis à son bureau, il griffonne sans relâche une feuille, la regarde, l'arrache et recommence. A chaque fois, comme une amorce imparfaite, nous voyons une séquence de ce qu'il essaie d'écrire. Finalement, il se décide de partir à la recherche de ces mots qu'il n'arrive pas à trouver. Il pousse une porte et se retrouve face à elle.
Tourné vers le futur, le pays essaie de se construire, démocratie dans un continent en réémergence. A chaque fois, il reste hanté par son passé, ses années maudites. Finalement, il va devoir de partir à la recherche de ces souvenirs qu'il n'arrive pas à oublier.

Benjamin Esposito se retrouve face à Irène Menéndez Hastings, celle qu'il a aimée dès la première rencontre. Impossible alors de mettre des mots sur cet amour, impossible de lui exprimer quoi que ce soit. Tout n'était passé que par le regard, par ses yeux, dans ses yeux. Face à elle, il était tétanisé, maladroit. Elle, non plus, n'a pas pu lui dire ce qu'elle ressentait. L'un comme l'autre ont été emportés dans la violence de l'enquête qui les réunissait. Mis en danger, au lieu de l'emmener avec lui, il est parti, poussé par elle qui ne demandait qu'un mot pour partir aussi.

Isidoro Gomez n'avait été qu'objet de mépris, ou pire d'indifférence. Impossible d'attirer ne serait-ce que le regard de celle qu'il désirait en secret. Tout n'était passé que par son regard, par ses yeux, dans ses yeux. Alors un jour, il avait tué celle qu'il désirait. Ce geste violent et désespéré avait transformé sa faiblesse en domination. Démasqué par Benjamin et Irène, condamné à perpétuité, il avait été sauvé par cette junte qui ne prospérait que de la perversité de ses défenseurs. Il avait pu alors se retourner sur ceux qui l'avait pourchassé.

Plus on avance dans le film, plus Benjamin dénoue les fils restés en suspens, et plus sa vie personnelle devient le miroir de celle de l'Argentine. A force de courage, d'intelligence et de ténacité, il va enfin arriver à exprimer à Irène l'amour qu'il ressent pour elle. Cela ne sera possible que quand il aura trouvé les dernières pièces de puzzle manquantes, celles qui étaient restées enfermées dans les méandres de son inconscient ou physiquement dans une geôle perdue.

Le premier passeur est une machine à écrire qui n'a jamais su taper les « A ». Elle lui apporte la clé de ce message que son inconscient lui avait dicté : il avait écrit « Temo », c'est-à-dire « Je crains » ; avec le « A », cela devient « Te amo », c'est-à-dire « Je t'aime ». Sa censure l'enfermait dans ses peurs.
Le deuxième est Isidoro, retrouvé caché et enfermé dans la campagne argentine. Celui qui le retient là est Ricardo, l'amoureux de sa victime, de la femme qu'il avait sauvagement assassinée. Comme la junte avait libéré Isidoro, il s'était substitué à la justice et l'avait remis dans la prison à perpétuité que Benjamin lui avait promise. On n'échappe ni à son passé, ni aux promesses faites. 


Alors, Benjamin va pouvoir pousser à nouveau la porte d'Irène et la laisser se refermer sur leur amour enfin affirmé. Et la démocratie argentine va avancer un peu plus loin en ayant regardé ses propres errances.
On ne progresse, on ne trouve son chemin qu'en affrontant les démons de son passé, non pas pour les détruire, mais pour les mettre dans une prison à laquelle on pourra constamment se référer. C'est la survie d'Isidoro qui permet à Benjamin et l'Argentine d'avancer…

Ces quelques lignes sont ma lecture personnelle du film « Dans ses yeux » de Juan José Campanella. Faut-il que j'écrive que je vous conseille vivement d'aller le voir ?


14 mai 2010

SAVOIR NE PAS PERDRE DE VUE LA MER VISÉE

______ Éditorial du vendredi ________________________________________________________________

Rappel du patchwork de la semaine :
- Lundi : Après une grossesse de 18 mois et un accouchement de 2 semaines, voilà mon livre qui émerge au milieu de dizaines de milliers de jeunes et moins jeunes anciens. A partir de maintenant, il va m'échapper pour devenir la propriété de ceux qui l'auront en main.
- Mardi : A sa création, moins de 25% des élèves de l'École des Pont et Chaussées étaient français. Est-ce que la force de la France n'est pas née de cette ouverture au monde ? Dans notre crainte de la mondialisation actuelle, ne sommes-nous pas en train de perdre de vue comment s'est forgée notre identité nationale ?
- Mercredi : Quand des enfants regardent plus de 3 heures par jour la télévision, leurs dessins deviennent squelettiques et bâclés. Quand les directions font de la stratégie entre deux urgences, leurs réflexions sont sommaires et superficielles…
- Jeudi : Repos pour cause d'ascension !

Décidément tout est affaire de rythme et de tempo : il est dangereux de passer des heures à réfléchir quand un immeuble est en train de brûler ; il est dangereux d'agir dans la précipitation quand il s'agit de le construire ou de le reconstruire.
Ajuster le temps que l'on alloue au sujet que l'on veut traiter et veiller, à l'instar de ces enfants drogués de télévision, de ne pas se laisser emporté par le zapping actuel.
Les bourses jouent au yoyo, les commentateurs enchaînent sans y prêter garde des analyses contradictoires, les politiques semblent avoir renoncé à maintenir un quelconque cap… Attention à ce que les dirigeants ne tombent pas eux-mêmes dans ce mouvement vibrionnaire : face à l'incertitude qui les entourent, un de leurs rôles essentiels est de ne pas perdre de vue la mer visée et de rappeler constamment, à tout un chacun, dans quelle direction elle se trouve…

12 mai 2010

À FORCE DE ZAPPER, ON NE SAIT PLUS PRENDRE LE TEMPS DE LA RÉFLEXION

Prendre son temps, est-ce perdre du temps ? (1)

Au cours d'une intervention récente(2), Thierry Gaudin s'est fait l'écho des résultats d'une étude entreprise dans le Bade-Wurtemberg. Cette étude compare les dessins faits par deux échantillons d'enfants, les uns regardant la télévision moins d'une heure par jour, les autres plus de trois heures par jour.

Jetez un coup d'œil à la photo ci-jointe, elle parle d'elle-même. C'est comme si le temps passé devant la télévision les avait convertis au zapping et que les enfants du 2ème groupe ne pouvaient plus consacrer du temps au dessin. Quelques traits suffisent bien, pourquoi s'embêter à rajouter des fioritures et à s'appliquer sur un contour ?

Quand je regarde ces dessins, ceci me rappelle ce que je constate aujourd'hui dans les entreprises : à l'instar des enfants drogués d'images, bon nombre de directions d'entreprises courent tellement d'un sujet à un autre, sautent d'une réunion dans un avion, que, quand il s'agit de dessiner une stratégie ou de dessiner une nouvelle organisation, elles ne savent plus faire que des esquisses sans corps et sans précision.

Or de la même façon qu'il faut s'asseoir pour dessiner, on ne peut pas réfléchir à long terme instantanément et dans l'immédiateté. Comme l'a écrit Jean-Louis Servan-Schreiber(3), « nous travaillons sans recul. Pour un canon, c'est un progrès. Pas pour un cerveau. » ! Attention à l'anorexie mentale...


(1) Cliquer pour voir tous mes articles relatifs au Temps

(2) Cliquer pour voir la vidéo de la présentation
(3) Le Nouvel art du temps

11 mai 2010

L’ÉCOLE DES PONTS DE 1862 ÉTAIT PLUS INTERNATIONALE QU’AUJOURD’HUI !

Moins d'un quart des élèves étaient français

Imaginez une école d'ingénieurs dont la promotion de 35 élèves serait composée comme suit : 8 Français, 8 Italiens, 5 Portugais, 2 Américains, 2 Autrichiens, 2 Polonais, 2 Roumains, 2 Russes, 1 Brésilien, 1 Lithuanien, 1 Martiniquais, 1 Serbe.

Quelle ouverture internationale, n'est-ce-pas ? Une forme de modèle idéal qui correspond bien à la mondialisation actuelle et au besoin de croiser les origines.

De quelle école s'agit-il ? Cette école est située en France, c'est l'École Nationale des Ponts et Chaussées. Impossible, pensez-vous ? Il s'agit forcément une erreur !

Non, un document officiel l'atteste : regardez la copie ci-jointe de l'annuaire de la promotion 1862 ! Effectivement, à sa création, l'École des Ponts était ouverte sur le monde (à noter l'absence de l'Asie de ce panel international).

Comme quoi, nous avons à revisiter notre passé : la force de la France est-elle venue d'une vision centrée sur elle-même et d'une approche de propriétaire de son sol, ou de l'accueil des autres ?

Pour ma part, je regrette que les promotions actuelles dans nos écoles et universités n'aient plus cette ouverture au monde. Nous n'en serions que plus riches et notre identité n'en serait que plus forte !

10 mai 2010

NAISSANCE EFFECTIVE DES « MERS DE L’INCERTITUDE »

Quand mon livre émerge…

Ce vendredi matin, j'ai fait une rencontre étonnante : celle de mon livre ! Il était enfin physiquement né et sorti de chez l'imprimeur.
Sensation étrange d'avoir entre les mains cet enfant qui fut si long à mettre au monde : environ 18 mois entre le début de mes lectures en vue du livre et le moment où j'ai terminé la version finale. Puis un moment suspendu de près de deux semaines entre mon accord sur la mise en page et l'apparition du livre : un peu comme si une mère devait après avoir accouché, attendre deux semaines pour avoir son enfant dans les bras ! C'est long…

Enfin, le voilà. L'endroit où je suis allé le chercher est aussi un endroit improbable : une librairie située à proximité de la Nation(1), où seul un étroit couloir permet de passer au milieu de piles de livres, allant du sol au plafond (voir la photo ci-jointe). Comme si mon livre en venait à émerger au milieu de tous ces anciens… Beau symbole. Tout autour de lui, se trouve amoncelés de milliers de grands frères dans des piles improbables et fragiles. Métaphore physique de la vulnérabilité du savoir, de la nécessaire hybridation des idées, de l'importance du cheminement.

Le temps de la réflexion solitaire et de la construction des idées va donc céder la place à celui de leur diffusion et de leur confrontation au dehors. Trois conférences à venir pour son lancement pour commencer. J'espère aussi des retours de ceux qui le liront (n'hésitez pas à vous servir de ce blog ou du groupe Facebook que j'ai crée pour me faire part de vos réactions).
A partir de la semaine prochaine, je commencerai à expliquer plus en détail la logique de mon livre et en mettre en ligne des extraits.

7 mai 2010

PASSER AU LEGO SUPPOSE LÂCHER PRISE, CONFIANCE ET DURABILITÉ

______ Éditorial du vendredi ________________________________________________________________

Rappel du patchwork de la semaine :
- Lundi : Dans sa présentation, Georges Whitesides explique que, derrière des objets aussi complexes qu'une cathédrale ou internet, on trouve un système simple fait de blocs – des pierres, des zéros et des uns – que l'on peut facilement empiler les uns sur les autres. Les systèmes vivants sont eux-mêmes des « cellules empilées ».
- Mardi : Pour faire face de façon réactive et efficace à l'incertitude, l'entreprise doit elle-aussi penser plus en termes de systèmes de construction que de solutions finies : chaque direction centrale élabore des « lego » avec lesquels chacun pourra « jouer »
- Mercredi : Je ne crois pas que l'on puisse être un bon manager dans l'absolu. Être un bon manager, c'est avoir un mode de management adapté à la situation de l'entreprise que l'on dirige, selon le rythme de l'innovation, le type de clientèle, le poids des caractéristiques régionales…
- Jeudi : Le Petit Prince de Saint Exupéry est là pour nous rappeler combien le regard de l'enfant peut nous remettre en perspective ce que nous faisons quotidiennement, et que « l'on ne connait que les choses que l'on apprivoise »

Difficile quand on est à la tête d'une grande organisation – que ce soit une entreprise ou une organisation politique – de comprendre qu'il n'est pas efficace de chercher à apporter des solutions toutes faites, mais qu'il faut fournir à tout un chacun un système fait de briques simples. Agir ainsi, c'est tout à la fois :
- Pouvoir construire localement dynamiquement des solutions nouvelles et originales : à partir du même tas de pièces de Lego, aucune construction ne ressemblera à sa voisine,
- Responsabiliser ainsi chacun et lui permettre de mobiliser son intelligence sur la compréhension de la situation locale et sur les décisions à prendre,
- Pouvoir industrialiser la fabrication des briques de base en abaissant les coûts, tout en maintenant de la flexibilité,
- Donner une cohérence globale à l'entreprise par le type de système de construction choisi (on ne peut pas dévisser avec un marteau ou élaborer un repas avec des briques de Lego)
Pour que ceci soit possible, cela suppose que la Direction accepte de lâcher prise dans l'exécution et développe une relation de confiance(1) au sein de l'organisation. Difficile dans une entreprise, et manifestement encore plus au plan politique, dans un pays comme la France.

Cela suppose aussi que la Direction connaisse ce qu'elle dirige, et donc qu'elle et ceux qu'elle dirige prennent le temps de « s'apprivoiser » mutuellement : il n'y a pas d'efficacité dans la durée sans durabilité du management. (2)

(1) Sur l'importance de la confiance voir « Il faut retisser la confiance en France » et « Comment vivre la complexité sans confiance ? »
(2) Voir « Pour la mise en place d'un management durable »

6 mai 2010

« SI TU M’APPRIVOISES, NOUS AURONS BESOIN L’UN DE L’AUTRE »

Toutes les grandes personnes ont d'abord été des enfants…

Le hasard de mes lectures m'a fait me replonger dernièrement dans le Petit Prince d'Antoine de Saint Exupéry. En voici un patchwork personnel :

« Si vous leur dites, « la preuve que le petit prince a existé c'est qu'il était ravissant, qu'il riait, et qu'il voulait un mouton. Quand on veut un mouton, c'est la preuve qu'on existe. », (les grandes personnes) hausseront les épaules et vous traiteront d'enfant ! Mais si vous leur dites : « La planète d'où il venait est l'astéroïde B612 », alors elles seront convaincues, et elles vous laisseront tranquille avec leurs questions. »
« Il faut exiger de chacun ce que chacun peut donner, reprit le roi. L'autorité repose d'abord sur la raison. Si tu ordonnes à ton peuple d'aller se jeter dans la mer, il fera la révolution. J'ai le droit d'exiger l'obéissance parce que mes ordres sont raisonnables. »
« Quand tu trouves un diamant qui n'est à personne, il est à toi. Quand tu trouves une île qui n'est à personne, elle est à toi. Quand tu as une idée le premier, tu la fais breveter : elle est à toi. Et moi je possède les étoiles, puisque personne avant moi n'a songé à les posséder. »
« Que les volcans soient éteints ou soient éveillés, ça revient au même pour nous autres, dit le géographe. Ce qui compte pour nous, c'est la montagne. Elle ne change pas. »
« Tu n'es encore qu'un petit garçon tout semblable à cent mille petits garçons. Et je n'ai pas besoin de toi. Et tu n'as pas besoin de moi non plus. Je ne suis pour toi qu'un renard semblable à cent mille renards. Mais si tu m'apprivoises, nous aurons besoin l'un de l'autre. Tu seras pour moi unique au monde. Je serai pour toi unique au monde. »
« On ne connaît que les choses que l'on apprivoise, dit le renard. Les hommes n'ont plus le temps de rien connaître. Ils achètent des choses toutes faites chez les marchands. Mais comme il n'existe point de marchands d'amis, les hommes n'ont plus d'amis. Si tu veux un ami, apprivoise-moi ! »

5 mai 2010

IL N’Y A PAS DE BON MANAGEMENT DANS L’ABSOLU

Le juge de paix est la création de valeur durable

La réflexion sur le management est au cœur de nombre d'articles ou d'écrits. On y met le plus souvent en avant les aspects positifs ou négatifs de certaines attitudes managériales – ce qu'il faut ou ne pas faire – sans faire référence directe à l'entreprise qu'il s'agit de diriger.
Or mis à part un niveau zéro du management qui est effectivement un socle commun, je ne crois pas que l'on puisse réellement décrire quel est le bon mode de management indépendamment de la situation d'une entreprise donnée.

Pourquoi ?

Tout d'abord pour une raison évidente, mais qui est souvent perdue de vue : on ne manage pas pour manager, on ne dirige pas pour diriger, ce ne sont que des moyens pour permettre à l'entreprise de créer durablement plus de valeur. Le point de départ ne doit pas donc être le mode de management, mais bien les conditions d'une création de valeur durable. Je précise que, par création de valeur, je ne parle pas d'enrichissement des seuls actionnaires et des dirigeants, mais bien de la valeur totale de l'entreprise. La notion de durabilité est aussi essentielle et inclut sa résilience face à l'incertitude(1).

Or les conditions de création de la valeur sont très variables selon les entreprises et les secteurs dans lesquels elles se trouvent, ceci, comme je l'écris dans mon nouveau livre, parce que chaque entreprise « a ses propres règles, ses propres contraintes. (…) Les logiques peuvent être multiples selon :

- Le degré d'innovation et l'horizon de prévisibilité du métier : plus le métier sera soumis à des lancements fréquents d'innovations, plus l'horizon du flou sera proche, et moins il sera alors pertinent de mettre en place une organisation visant le contrôle a priori. A l'inverse, plus l'activité sera mature, la compétition organisée, plus il sera nécessaire d'optimiser finement les coûts et les marges, et donc d'avoir une anticipation budgétaire très rigoureuse.
- Le type de clientèle visée : plus les produits seront de type grand public, la concurrence multiple et composite, plus il faudra distinguer les activités commerciales et marketing. A l'inverse, si le marché visé est celui des grandes entreprises, il sera dangereux de séparer fortement le commercial et le marketing, chaque produit étant quasiment conçu pour un client donné.
- Le poids des caractéristiques géographiques : plus les attentes des clients seront homogènes entre pays, les circuits de distribution similaires, plus l'organisation devra être globale avec un poids faible donné aux géographies. 
(…) Ensuite, parce qu'il faut ajuster dynamiquement le niveau de précision au type de sujet traité. Si c'est une situation « téléphone/avion »(2), il faut investir en amont, prendre son temps, mener des études approfondies avant d'agir, et les organisations, les systèmes de pilotage doivent être construits en conséquence. Par contre, si c'est une situation « adresse/ voiture », inutile de surinvestir en amont : le mieux est de procéder par ajustements progressifs ; là, il faut des feed-back rapides, de la réactivité, de l'apprentissage.
Moins j'ai besoin d'être précis, plus je pourrai aller vite : identifier dans une situation donnée, le niveau de précision nécessaire est donc un préalable à la définition du biorythme. »3


Être un bon dirigeant, bien manager c'est savoir adapter son attitude à la situation : on ne manage pas dans l'absolu, et certains qui sont de très bons managers face à certaines situations, sont les pires dans d'autres…

(1) Voir « Pour la mise en place d'un management durable »
(2) Voir « Situation adresse ou téléphone ? »

(3) Extraits des Mers de l'incertitude p.145 et 146

4 mai 2010

DOTER L’ENTREPRISE D’UN SYSTÈME SIMPLE, PERMETTANT DE CONSTRUIRE LOCALEMENT LA BONNE SOLUTION

Comment faire face au développement de l'incertitude et à l'accroissement de la complexité sans construire des « usines à gaz » ?

J'ai déjà eu l'occasion dans bon nombre de mes articles(1), d'évoquer comment et pourquoi l'incertitude se développe, et comment, parallèlement et en partie à cause de cette croissance de l'incertitude, la complexité de l'environnement des entreprises explose : mondialisation des activités, multiplicité des savoir-faire techniques à mobiliser. J'y reviendrai dans les jours qui viennent à l'occasion de la sortie de mon livre « Les mers de l'incertitude »(2).

Face à cela, je vois souvent des directions d'entreprises vouloir y répondre par une complexité interne croissante, et une sophistication de tous les systèmes.

Je pense à l'inverse, dans la ligne des propos tenus par Georges Whitesides et dont je me faisais l'écho hier(3), qu'il faut construire les réponses complexes à partir de blocs simples. Il s'agit pour le management de trouver quelles sont les bonnes brises de base qui pourront être assemblées localement pour construire dynamiquement des solutions adaptées à ce qui survient.

Quelques exemples :
- Le marketing central cherche à construire non plus des produits terminés et qui seront déployés tels quels dans tous les pays, mais des systèmes qui permettront à chaque pays ou filiale de construire rapidement, à bas coût et de façon globalement cohérente leur propre réponse.
- La direction informatique ne développe plus des solutions clés en main, mais crée ou référence des sous-systèmes simples capables de s'assembler et s'interfacer rapidement.
- L'organisation n'est pas définie par la direction générale, mais ce sont les principes que doit respecter toute organisation locale qui le sont, en veillant notamment à toutes les questions d'interface.
- Le rôle de chacun est défini de façon simple et peut être exprimé en quelques mots, et donc être intégré par tous.

(1) Cliquer sur le mot pour vous les articles liés à Incertitude ou Complexité
(2) Sortie le 25 mai
(3) Voir « EN EMPILANT DES BLOCS SIMPLES, ON CONSTRUIT UN SYSTÈME COMPLEXE ROBUSTE »

3 mai 2010

EN EMPILANT DES BLOCS SIMPLES, ON CONSTRUIT UN SYSTÈME COMPLEXE ROBUSTE

Et si on s'intéressait aussi à la simplicité ?

Dans sa conférence (voir ci-dessous), Georges Whitesides (voir sa bio) s'intéresse à la simplicité, et comment elle permet de construire la complexité. Il y explique que ce sont avec des blocs simples – comme des pierres, des 0 et des 1, … –, que l'on peut élaborer des systèmes sophistiqués comme Internet ou des cathédrales.

Ce qui est simple, c'est tout ce qui peut s'empiler facilement et solidement. Guidé par son imagination et son projet, on va poser les blocs les uns sur les autres : l'un fera une cathédrale, quand un autre en tirera un château ou simplement un mur en pierres sèches…

Pour construire avec ces blocs, vous n'avez pas besoin de connaitre la logique qui a permis à ces blocs d'exister, vous n'avez qu'à savoir vous en servir et les empiler. Ceci rejoint le propos de Ian Stewart qui a écrit dans « Dieu joue-t-il aux dés ? » :
« Ce dont nous avons besoin, c'est de la théorie de la simplicité, pas de la théorie de la complexité. Il y a une rhétorique de la science réductionniste qui prétend que, même si la chèvre ne le sait pas, des choses immensément compliquées doivent se produire en elle pour qu'elle se comporte cette façon. (…) Il vous semble, à vous et à la chèvre, que ce qui se passe est simple : mais, en fait, cela ne l'est pas. (…) Une théorie des particules subatomiques est fongible quand on la regarde à partir du niveau de la chèvre. Il faut bien qu'il en soit ainsi, ou bien nous n'aurions jamais été capables de garder une chèvre sans passer auparavant un doctorat de physique subatomique. »

Lego ou Meccano ont apporté à tous les enfants de nouveaux blocs simples pour donner libre cours à leur imagination. McDonald a dominé le monde des hamburgers en le décomposant en briques élémentaires – le pain, la viande, les frites…–, en industrialisant chaque composant et en en facilitant l'assemblage. Le jeu de go repose sur des règles que l'on peut énoncer et comprendre en une minute…

Quand la complexité repose sur des composants eux-mêmes complexes, elle est fragile et vulnérable. Quand elle repose sur des blocs simples, elle est efficace et souple.

A garder en mémoire…