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3 sept. 2012

NOUS EXTRAYONS SANS CESSE DES MÉTARÈGLES À PARTIR DE NOTRE EXPÉRIENCE

Si toutes les balles sont rondes, le fait d’être rond a un lien avec le fait de s’appeler une balle (Neurosciences 21)

Reprise de mon blog après ces quelques semaines de best of avec l’approfondissement du cours 2012 de Stanislas Dehaene sur le cerveau statisticien.
J’avais terminé lors de mon article du 19 juillet par un résumé des conclusions que Stanislas Dehaene en avait tiré, et singulièrement par le fait que notre cerveau construisait continûment une vision du futur probable et comparaît ce qu’il observait à cette vision préalable. (voir Nous ne percevrions le présent que comme écart par rapport à nos prévisions).
Revenons donc maintenant plus en détail sur les différents points.
D’abord, deux premiers commentaires essentiels dans cette analyse du cerveau statisticien :
-        La méthode de calcul suivie par notre cerveau l’amène à privilégier les solutions les plus simples : dès qu’il identifie un modèle explicatif qui correspond aux données observées, et rien d’autre, il le privilégie. Ainsi, il prend le contre-pied du proverbe Shadok, « Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué », et reprend un principe de raisonnement énoncé depuis l’Antiquité : « Une pluralité ne doit pas être posée sans nécessité », ou encore « Les entités ne doivent pas être multipliées au delà du nécessaire ». Nous sommes ainsi programmés pour aller vers la simplicité.
-        Notre cerveau ne sait pas s’en tenir aux faits observés : il ne peut pas s’empêcher de tirer des conclusions et des inférences, même quand il n’a pas assez de données. Voilà la justification scientifique de notre tendance naturelle à confondre corrélation et causalité, et toujours induire à partir de rien.
Mais, comment notre cerveau peut-il induire à partir de presque rien ?
Essentiellement parce qu’il ne se contente pas de tirer des conclusions à partir de ce qu’il observe, mais parce qu’il mobilise des règles apprises dans le passé : il est capable de transférer des règles et donc de progresser ainsi rapidement.
Par exemple, si l’on tire une boule bleue d’une urne, on ne peut rien en conclure dans l’absolu pour les tirages suivants. Mais si l’on a appris, par l’expérience, que les urnes ne contiennent toujours que des objets identiques, et de même couleur, on saura que les tirages suivants seront aussi des boules bleues.
C’est ce type de transfert d’expérience qui permet l’apprentissage du langage :
-        Étape 1 : un enfant est face à une ensemble de cinq objets, trois sortes de balles et deux sortes de tasses. Il apprend alors que trois s’appellent des balles et deux des tasses.
-        Étape 2 : il constate que les formes des balles et des tasses sont différentes, mais que toutes les tasses ont la même forme, ainsi que les tasses.
-        Étape 3 : il en conclut qu’à chaque nom, correspond une forme spécifique. Les « choses » ont une forme donnée qui les caractérise.
-        Étape 4 : il transfère ce savoir acquis à d’autres noms, et comprend qu’une girafe est un animal qui a une forme de girafe, qu’un crayon la forme d’un crayon, etc.
C’est le principe du méta-apprentissage : nous apprenons à apprendre ; chaque progrès nous transforme et facilite l’acquisition future.
Les Shadoks ne sont d’ailleurs pas en reste, et quand ils affirment que la notion de passoire est indépendante de celle de trou, ils énoncent une métarègle.
Cette capacité essentielle à tout apprentissage est directement liée au fait que notre cerveau est capable d’appliquer des inférences bayésiennes. C’est ce qui lui permet d’inférer les métarègles, et de les généraliser ensuite.
Mais bien sûr, ceci n’est pas sans inconvénient, car cela ne nous prédispose pas à l’inconnu et à la nouveauté : nous aurons toujours tendance à la lire, en y appliquant les vraisemblances et les règles issues de notre passé…
(à suivre)

19 juil. 2012

NOUS NE PERCEVRIONS LE PRÉSENT QUE COMME ÉCART PAR RAPPORT À NOS PRÉVISIONS

Le cerveau se ferait constamment une idée du futur qui l’attend (Neurosciences 20)
En quoi donc notre cerveau est-il concerné par les mathématiques bayésiennes et les calculs de probabilité ?
Voici de façon synthétique les raisons avancées par Stanislas Dehaene (1):
1. Ces inférences rendent compte des processus de perception : étant donné des entrées ambiguës, notre cerveau en reconstruit l’interprétation la plus probable.
En effet, notre vue ne transmet au cerveau qu’une photographie de ce qui nous entoure. Notamment la plus plupart de ce qui nous entoure est partiellement caché, et nous n’en voyons qu’une partie. En tenant compte de la succession des images transmises (qui vont révéler une partie de ce qui est caché) et de ce que nous avons appris depuis notre naissance, le cerveau va interpréter ces informations pour nous permettre de comprendre ce qui nous entoure. Par exemple, si nous voyons la tête d’un ami dépasser d’un mur, nous allons inférer que cet ami est bien présent derrière ce mur.
2. Nos décisions combinent un calcul bayésien des probabilités avec une estimation de la valeur probable et des conséquences de nos choix.
Prendre une décision suppose d’avoir construit une interprétation du monde qui nous entoure, ce à partir de ce que nous en percevons. Cette interprétation est issue de la valeur la plus probable, telle que calculée selon les mathématiques Bayésiennes. Par exemple, si nous devons parier sur la couleur d’une bille tirée d’une urne, nous allons spontanément ne prendre en compte que les couleurs étant apparues lors des tirages précédents.
3. L’architecture du cortex pourrait avoir évolué pour réaliser, à très grande vitesse et de façon massivement parallèle, des inférences Bayésiennes.
Sur la base de ce qu’il connaît, notre cerveau construit dynamiquement une projection du futur, tel qu’il devrait être, c’est-à-dire tel qu’il est le plus probable qu’il soit (codage prédictif). Ensuite, les informations issues de la situation réelle ne sont pas codées telles qu’elles apparaissent, mais en tant qu’écarts par rapport à cette prévision. Ainsi ce sont les différences et les nouveautés qui ont transmises (propagation des signaux d’erreur).
4. Le bébé semble doté, dès la naissance, de compétences pour le raisonnement plausible et l’apprentissage Bayésien.
Dès la naissance, nous serions capables de combiner de façon quasi optimale les a priori issus de notre évolution et les données reçues du monde extérieur. Ainsi la théorie Bayésienne résoudrait le dilemme classique entre les théories empiristes et nativistes. L’apprentissage du langage, la reconnaissance des mots, et la théorie de l’esprit pourraient également être modélisés comme des inférences Bayésiennes.
Telle est toute l’étendue de ce cours 2012. Vous percevez déjà l’importance des conséquences de cette nouvelle vision du fonctionnement du cerveau, ce notamment sur notre approche de l’incertitude : si notre cerveau est structurellement et intimement construit pour prévoir le futur à partir du passé et du présent, il n’est pas surprenant que nous ayons du mal à appréhender la nouveauté et les ruptures.
Tout ceci mérite bien sûr de s’attarder davantage.
C’est ce que je ferai à la rentrée, à compter du lundi 3 septembre. Je reviendrai alors plus en détail sur ce cours 2012, et sur ces conséquences pour le management des entreprises.
D’ici-là, mon blog va, comme tous les ans, prendre quelques vacances. Pendant celles-ci, sera diffusé, au rythme de deux articles par semaine (un le lundi, un le jeudi), un best of tiré des articles parus jusqu’à présent.
Pendant cette période, je vais aller me laisser perdre dans l’effervescence de l’Inde du Sud, occasion de nouvelles découvertes, de prise de recul, et aussi très probablement de commencement de la rédaction de mon prochain livre…
Avant cela, juste quelques lignes demain, comme un pont entre ici et là-bas...

(à suivre le 3/9/12)

(1) Pour ceux qui veulent plus de détails, le mieux est de suivre l’intégralité du cours 2012

18 juil. 2012

PRÉVOIR LE PASSÉ À PARTIR DU PRÉSENT

Comment imaginer ce que nous ne connaissons pas à partir de ce que nous voyons (Neurosciences 19)
Voilà donc notre cerveau qui, à l’instar de Monsieur Jourdain qui faisait de la prose sans le savoir, manipulerait sans cesse des statistiques, et ferait des inférences Bayésiennes.
En paraphrasant les célèbres dialogues de Molière dans le Bourgeois gentilhomme, on pourrait dire en imaginant un dialogue entre Stanislas Dehaene et un grand bourgeois contemporain :
« Non, Monsieur : tout ce qui n'est point inférence Bayésienne est certain; et tout ce qui n'est point certain est inférence Bayésienne.
- Et comme l'on pense qu'est-ce que c'est donc que cela ?
- De l’inférence Bayésienne.
- Quoi ? Quand je pense : "Je regarde le ciel, et j’en conclus qu’il va pleuvoir," c'est de l’inférence Bayésienne ?
- Oui, monsieur.
- Par ma foi ! Il y a plus de quarante ans que je fais des inférences Bayésienne sans que j'en susse rien, et je vous suis le plus obligé du monde de m'avoir appris cela. »
Plus sérieusement de quoi s’agit-il ?
Faisons d’abord un flash-back au XVIIIème siècle, à l’époque où le révérend Thomas Blayes, pasteur dans la journée, écrivit un ouvrage, Une introduction à la doctrine des fluxions, et une défense des mathématiciens contre les objections faites à l'auteur de l'Analyse (sic !), ouvrage qui fut repris à sa mort par son ami Richard Price dans un essai intitulé Essai sur la manière de résoudre un problème dans la doctrine des risques.
Cet ouvrage institua ce qui fut appelé la «  règle de Bayes » et qui est une forme d’inversion du raisonnement suivi dans les probabilités :
-        Dans le calcul de probabilités, on cherche à avoir une idée du futur à partir de la situation actuelle : que risque-t-il d’arriver compte-tenu de tout ce que l’on sait de la situation actuelle (y compris de la situation passée).
-        Dans la « règle de Bayes », on cherche à partir de la situation actuelle et de tout ce que l’on en connaît, à imaginer ce qui a pu exister avant, et conduire à cette situation.
Pour être plus clair, prenons le cas d’une urne dans laquelle on procède à un tirage :
-        Si l’on procède à un raisonnement probabiliste, on va chercher à prévoir le futur tirage, et l’on va calculer les probabilités respectives, compte-tenu du contenu de l’urne : si l’urne contient p boules noires, et q boules rouges, on pourra dire que l’on aura soit une boule noire, soit une boule rouge, et les probabilités respectives seront de p/p+q et q/p+q.
-        Si l’on procède à une inférence Bayésienne, on va partir des tirages observés pour imaginer quel peut être le contenu de l’urne. Donc dans ce cas, comme on aura constaté que l’on n’a tiré que des boules noires et rouges, on inférera d’abord que l’urne ne doit contenir que des boules noires ou rouges. Ensuite en fonction du nombre de boules de chaque couleur, on inférera le nombre de boules probables se trouvant dans l’urne.
Mais comme dans la projection vers le futur, sauf à avoir accès au contenu de l’urne, on n’a pas de certitudes :
-        Ce n’est pas parce que, jusqu’à présent, on n’a tiré que des boules noires et rouges, qu’il est certain qu’il n’y a rien d’autres dans l’urne.
-        Le nombre de boules imaginé à partir du nombre de boules tirés n’est que le nombre le plus probable, ni plus, ni moins.
Ainsi les inférences Bayésiennes sont une forme de probabilités à rebours. Comme si un joueur au casino voulait savoir pourquoi il avait gagné ou perdu !
Mais en quoi cela concerne-t-il notre cerveau ?
(à suivre)

17 juil. 2012

NOUS NE VOYONS PAS, NOUS CONSTRUISONS DES VUES PLAUSIBLES

Notre cerveau est un Monsieur Jourdain du calcul statistique (Neurosciences 18)
Depuis plus de trois semaines, je vous ai emmené dans une promenade guidée au sein  des découvertes récentes de l’équipe de Stanislas Dehaene et des résumés qu’il a fait des travaux des autres.
Nous avons commencé par la découverte des neurones de la lecture qui nous ont initiés à l’art du bricolage et du recyclage. Puis ce furent ceux des nombres et de notre capacité non seulement à compter, mais aussi à subitiser  - c’est-à-dire à savoir immédiatement, subitement -  et à estimer des quantités.
Commença alors le voyage dans les volutes plus profondes de notre identité, ce en trois escales : l’inconscient cognitif et sa merveilleuse machinerie massivement parallèle, la conscience et son espace de travail global où se tissent les stratégies et se pilotent les mises en œuvre nouvelles, et enfin la métacognition et cette étrange capacité à nous dédoubler, en observateur de nous-mêmes, conscient de notre existence.
Voilà maintenant la fin « provisoire » de ce voyage avec ce qui, je pense, est le plus étonnant, et peut-être le plus riche de conséquences, notamment pour le management des hommes et des entreprises : le cerveau statisticien.
En effet dans son cours 2012, Stanislas Dehaene va nous montrer que, sans le savoir, nous sommes tous, plus ou moins, des mathématiciens, et que notre cerveau n’arrête pas de calculer des probabilités, de faire des estimations et de choisir ce qui lui paraît le plus plausible.
On ressort de cela avec la vision classique en miettes : contrairement à ce que l’on croît, nous ne « voyons » pas ce que nous regardons, ni n’ « écoutons » ce que nous entendons. Entre les informations captées par nos sens et nos pensées, il y a toute une série de calculs, de choix et d’optimisations, qui se passent sans que nous en rendions compte…
Nous faisons sans cesse ce qui s’appellent des « inférences probabilistes », c’est-à-dire que, sur la base de ce que nos sens ont capté et de ce que notre expérience passée nous a appris, nous nous faisons une idée sur ce qui se passe et sur les significations éventuellement sous-jacentes.
Ces inférences sont omniprésentes dans tous les domaines de la cognition : perception, action, apprentissage du langage, reconnaissance des mots, inférences sur l’esprit des autres… Nous n'arrêtons pas de faire des interprétations et des calculs de probabilité, nous supposons par défaut que la lumière vient d'en haut, nous rajoutons des informations sur ce qui est perçu, nous avons des a priori sur le monde extérieur, a priori qui complètent nos perceptions ambiguës.
Bref, nous construisons ce qui nous paraît plausible, ce qui s’appelle en théorie mathématique, l’inférence Bayésienne.
Mais que diable veut dire une inférence Bayésienne ?
(à suivre)

16 juil. 2012

ET SI LE PROPRE DE L’HOMME ÉTAIT L’AUTO-ÉVALUATION

Moi et les autres, est-ce si différent ? (Neurosciences 17)
Après avoir étudié les liens entre métacognition et conscience, Stanislas Dehaene en arrive à la question du lien entre métacognition et théorie de l’esprit : comment peut-on se représenter son propre esprit en train de se représenter une information ?
Précisons d’abord les quatre niveaux allant du fait vers la métacognition :
-        Fait : une voiture rouge est passée ce matin
-        Conscience primaire : j’ai vu (une voiture rouge passer ce matin)
-        Mémoire : je me souviens que (j’ai vu (une voiture rouge passer ce matin))
-        Méta-mémoire : je sais que (je me souviens que (j’ai vu (une voiture rouge passer ce matin)))
Il y a donc une forme de continuum entre la façon dont nous observons le monde qui nous entoure, et notre capacité à nous observer. Les expériences actuelles vont plus loin et semblent montrer qu’il y a un lien étroit entre la connaissance de l’autre et la connaissance de soi :
-        Elles se développent simultanément chez l’enfant,
-        Elles ne sont pas indépendantes et interagissent entre elles,
-        Elles font appel à un réseau similaire d’aires cérébrales
Finalement, il semble bien que nous utilisions le même format de représentation mentale et les mêmes aires cérébrales pour représenter notre esprit et celui des autres.
Que se passe-t-il alors quand nous travaillons en groupe ? Sommes-nous capables d’être collectivement plus efficaces que la seule somme de nos individualités prises séparément ?
Oui, à une condition : que l’on demande aux participants de se mettre d’accord. Intéressant, non ?
Voici l’expérience en question (1) :
-        On soumet simultanément deux personnes au même test. Si leur réponse diffère, les deux personnes échangent jusqu’à ce qu’elles se mettent d’accord.
-        La performance conjointe est meilleure que celle de chacun des individus, de leur moyenne, et même du meilleur des deux.
-        Ceci ne peut s’expliquer qu’en supposant que les participants échangent leur niveau de confiance sur ce qu’ils ont vu, et que l’on mobilise ainsi aussi des connaissances non-conscientes.
Stanislas Dehaene en conclut que le dialogue social améliore la performance humaine, et qu’il a donc été peut-être encouragé par l’évolution. Tout ceci apporte une nouvelle justification à mes développements sur la nécessité de la confrontation dans les entreprises, ce surtout en situation incertaine et mouvante (voir mes articles sur ce sujet)
Ce cours 2011 se termine par un détour dans le monde animal : les animaux disposent-ils d’une forme d’introspection ?
La réponse semble être positive :
  • Les singes savent quand ils se souviennent. Plus un singe risque de se tromper, plus il choisit de refuser de répondre : il écarte sélectivement les essais où il se juge (correctement!) incapable de répondre correctement.
  • L’estimation de l’incertitude semble faire partie intégrante de la décision. A ce titre, elle est présente chez de nombreuses espèces animales. Plus impressionnant est le fait que ces animaux parviennent à utiliser leur estimation de l’incertitude pour modifier leur comportement. Il s’agit véritablement d’un jugement de second ordre ou métacognitif (mais pas nécessairement conscient).
  • Cependant, les expériences de laboratoires posent toujours la question de l’entraînement intensif de l’animal… Une approche éthologique reste à mener afin de vérifier si de tels jugements sont utilisés en milieu naturel.
Ne sommes-nous donc que des « animaux-plus » ?  Probablement… et alors, est-ce un problème ? Notons qu’une des aires cérébrales qui nous distinguent le plus du reste du monde animal est l’aire 10 du cortex préfrontal, une aire qui interviendrait particulièrement dans l’auto-évaluation des performances et dans celle de sa situation personnelle, moi par rapport aux autres.
Le propre de l’homme ne serait-il donc plus le rire, mais la capacité à prendre du recul par rapport à lui-même et à se penser en tant qu’individu ?
Quelle belle chute non, pour ce cours sur la métacognition !
Demain, je poursuivrai avec le cours 2012, et la découverte du cerveau statisticien : sans le savoir, nous n’arrêterions pas de calculer des probabilités…
(à suivre)
(1) Expérience menée par Bahrami, B., Olsen, K., Latham, P. E., Roepstorff, A., Rees, G., & Frith, C. D. en 2010

12 juil. 2012

METTONS EN COMMUN NON SEULEMENT NOS CONNAISSANCES, MAIS AUSSI NOS DEGRÉS DE CONFIANCE

Nous avons une idée sur ce que nous n’avons pas vu (Neurosciences 16)
Quels sont donc les liens entre métacognition et conscience ?
Stanislas Dehaene commence avec cette question apparemment étrange : la métacognition est-elle possible en l’absence de conscience, ou, formulé autrement, pourrions-nous avoir accès à des informations sur nous-mêmes, sans que cet accès soit automatiquement conscient ? Ou encore pourrions-nous avoir un avis sans que nous le sachions, sans que nous nous en rendions compte ?
Eh bien, la réponse est oui !
Avant de donner les réponses apportées, reprécisons ce qu’est le jugement de confiance : c’est notre capacité à évaluer la confiance que nous accordons à nos réponses. Expérimentalement, il est possible de mesurer les deux éléments : quelle est la performance intrinsèque de nos réponses (est-ce que nous nous trompons) et de notre jugement de confiance (est-ce que nous nous évaluons correctement).
Les différentes études menées ont montré que ce jugement de confiance était une compétence en soi, c’est-à-dire que nous pouvions être capable d’avoir une évaluation correcte de notre performance, tout en nous trompant régulièrement.
Ainsi, dans des cas où des sujets disent n’avoir rien vu (cas de stimuli masqués), le jugement de confiance peut être meilleur que le hasard : on pourrait ainsi évaluer consciemment ce que l’on n’a perçu que de façon non-consciente. Si, au lieu de masquer les stimuli, on utilise des techniques de distraction attentionnelle pour rendre invisible les stimuli, la corrélation entre confiance et performance devient même correcte.
Stanislas Dehaene en conclut qu’une estimation élémentaire de l’incertitude accompagne chaque jugement perceptif, même inconscient. Il se pourrait que chaque aire cérébrale code à la fois le stimulus le plus probable qui explique les entrées sensorielles, ou la réponse la plus probable ou la plus renforcée dans ces circonstances, mais également l’incertitude associée à cette estimation, et peut-être même toute la distribution de probabilité associée
Ainsi même si nous n’exprimons qu’un seul résultat – celui qui nous pensons et disons avoir vu –, nous avons mémorisé toute une série de données qui nous permet d’avoir un avis sur le résultat donné. (1)
C’est ce qui expliquerait que nous puissions avoir un assez bon jugement sur notre propre degré d’erreur.
Au vu de ces éléments, nous devrions donc, dans les entreprises, demander à chacun, et singulièrement aux experts, un avis sur la fiabilité de ce qu’il avance. Si cela était fait brutalement, ce serait très probablement vécu comme une mise en accusation, voire une remise en cause des expertises. Or il n’en est rien : c’est bien d’une compétence indépendante qu’il s’agit.
Faisons donc de la pédagogie dans les entreprises, expliquons que chacun a deux compétences – ce qu’il sait, et la confiance qu’il a sur ce qu’il sait –, et mettons en commun les deux. Nous devrions échanger non seulement sur nos connaissances, mais aussi sur nos degrés de confiance en ce que nous savons. La performance globale en sera nettement améliorée…
(à suivre)

(1) Ce point sera repris longuement dans le cours 2012 sur lequel je viendrai plus tard

11 juil. 2012

SE TESTER SYSTÉMATIQUEMENT POUR MIEUX SE CONNAÎTRE ET MOINS SE TROMPER

Même de façon limitée, nous pouvons apprendre à mieux savoir (Neurosciences 15)
Si notre capacité métacognitive n’est pas une illusion, elle est à tout le moins très limitée, et beaucoup plus que nous le pensons souvent.
Non sans humour, à l’appui de son propos, Stanislas Dehaene reprend les propos tenus par Donald Rumsfeld, le 12 février 20002, concernant les armes de destruction massive soi-disant présentes en Irak : « As we know, there are known knowns; there are things we know we know. We also know there are known unknowns; that is to say we know there are some things we do not know. But there are also unknown unknowns -- the ones we don't know we don't know. » Une pensée digne du clair-obscur inventé par les peintres du XVIIème siècle !
Plus sérieusement, il insiste sur nos illusions métacognitives, singulièrement lorsque nous pensons approcher de la solution, ou lorsque nous pensons avoir suffisamment étudié une question. Rien de moins vrai : la seule chose qui soit vraiment régulière…est le fait que nous nous trompons !
Mais si l’erreur est constante, elle n’est pas totale : notre métacognition n’est pas totalement fausse. Il y a bien un lien entre sensation de savoir, et l’existence de ce savoir, mais un lien faible. Le problème est que cette corrélation nous conduit le plus souvent à surestimer nos compétences – nous savons moins que nous le croyons –,  et à parfois sous-estimer l’exactitude de nos intuitions – nous sentons mieux que nous le croyons.
Y a-t-il un moyen d’améliorer ces résultats ?
Oui d’abord en prenant son temps avant de porter notre jugement. Comme quoi, l’expression « tourner sa langue sept fois dans sa bouche avant de répondre » était fondée !
Oui surtout en se testant systématiquement et en faisant porter son effort d’apprentissage sur les items non-retenus.                                                                                                                                                                                                                                                                  
Ce deuxième point amène à souligner l’importance de la métacognition pour l’éducation et l’auto-éducation. Ainsi la représentation, par l'élève, des connaissances qu'il possède et de la façon dont il peut les améliorer est considéré, par certains pédagogues, comme un élément essentiel de l’éducation :
- Comment as-tu fait pour comprendre?
- Qu’est-ce que tu ne sais pas? Comment peux-tu trouver l’information pertinente?
- Comment peux-tu faire pour apprendre mieux?
Rôle essentiel donc de l’expérimentation sur nous-mêmes. Que l’on pourrait aussi utilement utiliser davantage dans les entreprises : ne devrait-on pas développer tous les boucles d’apprentissage et d’expérimentation ? Ne devrait-on plus se méfier des connaissances théoriques et universitaires ?
Retour à l’introspection : même très limitée, elle est réelle. Aussi d’où vient notre sentiment de savoir ?
- La familiarité : Il semble que nous sommes capables d’évaluer la familiarité d’un problème, c’est-à-dire sa proximité par rapport à ce qui existe dans notre mémoire. Ceci est vrai non seulement pour problèmes déjà traités, mais aussi pour des problèmes nouveaux, qui ressemblent aux anciens. Rien ne nous dit que nous allons trouver rapidement la solution, mais nous avons la conviction que c’est possible.
- Les fragments : Autre source, celle de l’accès à des informations partielles, car la présence de fragments de souvenirs peut conduire au sentiment de savoir, avec le risque que ces fragments ne soient en fait pas appropriés, et qu’alors le sentiment de savoir soit erroné.
Finalement notre capacité d’introspection est liée à cette évaluation de la mémoire – familiarité du problème et accès à des fragments – et à ce qui se trouve présentement dans notre espace de travail global.
Malheureusement ceci reste doublement limité, car notre espace de travail est lent et sériel, et surtout parce qu’il n’a pas accès aux traitements non-conscients. Notre introspection ne sait pas plonger dans l’iceberg de nos connaissances. Pour reprendre la terminologie développée par Jung, elle ne porte que sur le « moi », et pas sur le « soi »…
Mais est-ce si vrai et qu'en est-il des liens entre métacognition et conscience ?
(à suivre)

10 juil. 2012

NOUS SOMMES CAPABLES D’EXPLIQUER MÊME LES CHOIX QUE NOUS N’AVONS PAS FAITS !

Peut-on s’autoanalyser sans se tromper ? (Neurosciences 14)
Auguste Comte avait en son temps réfuté toute capacité à s’autoanalyser : « Il est sensible, en effet, que, par une nécessité invincible, l'esprit humain peut observer directement tous les phénomènes, excepté les siens propres. Car, par qui serait faite l'observation ? (…) L'individu pensant ne saurait se partager en deux, dont l'un raisonnerait, tandis que l'autre regarderait raisonner. L'organe observé et l'organe observateur étant, dans ce cas, identiques, comment l'observation pourrait-elle avoir lieu? Cette prétendue méthode psychologique est donc radicalement nulle dans son principe. » (1)
Comment Stanislas Dehaene arrive-t-il à « dépasser » ce paradoxe et expliquer comment une métacognition est possible ?
Tout d’abord en explicitant que, à la différence de ce que l’on pensait encore récemment, les processus mentaux ne constituent pas un système unique et centralisé, mais un ensemble de processus partiellement spécialisés qui échangent entre eux. Pour simplifier et en espérant que je ne trahis pas les propos de Dehaene, je dirais que la sensation d’être, la prise de décision, la pensée émergent d’une sorte de cacophonie interne. Un peu comme dans une agora grecque… Dès lors, il n’est pas exclus que certains « observent » d’autres. On pourrait même aller jusqu'à dire que « tout le monde » observe « tout le monde » !
Ensuite, en prenant acte du paradoxe de Comte comme expression de l’existence d’une limite : il est probablement impossible d’accéder à une introspection parfaite et complète. Ceci est inhérent d’ailleurs à l’existence à un processus non centralisé et émergent : comment pourrions être capable de parfaitement analyser un processus qui est largement aléatoire et hautement complexe ?
Cette limite de notre capacité d’introspection est montrée par de multiples expériences. Une des plus spectaculaires est celle conduite par Johansson, P., Hall, L., Sikstrom, S., & Olsson, A. en 2005. Elle se déroule ainsi :
-        En phase 1, la personne choisit parmi deux visages présentant une beauté similaire, celui qu’elle juge le plus attirant.
-        En phase 2, la personne reçoit la carte et explique les raisons de son choix. Or, dans 20% des cas, les cartes ont été échangées subrepticement. 74% de ces échanges ne sont pas détectés, ni immédiatement, ni rétrospectivement.
-        La personne se met alors à donner des « explications » de son choix, même si ce n’est pas celui qu’elle avait fait ! Ces explications sont données avec le même niveau de détail, la même confiance, la même tonalité émotionnelle.
Ainsi non seulement, notre capacité à nous souvenir des choix que nous faisons n’est pas très fiable – seulement un quart des substitutions est repéré…–, mais  surtout, nous inventons a posteriori les raisons de choix qui ne sont pas les nôtres !
Décidément notre introspection n’est pas très fiable… Si elle l’était, nous distinguerions à coup sûr les cas où nous savons que nous savons, et ceux que nous ne savons pas. Or bien souvent, nous ne savons pas que nous savons – ce sont toutes nos connaissances oubliées ou enfouies dans des zones inaccessibles à la conscience –,  ou pire nous croyons savoir, c’est-à-dire que nous ne savons pas que nous ne savons pas – ce sont nos faux souvenirs et toutes les justifications fictives de nos comportements.
A nouveau, ceci est lourd de conséquences pour le management des entreprises : comment se fiabiliser le processus de décision en tenant compte de ces limites ? Ce ne sera certainement pas par des processus bureaucratiques, multipliant des contrôles tatillons.  
Notons pour l’instant ce problème – j’y reviendrai plus loin –, et revenons au cours de Stanislas Dehaene.
Donc est-ce à dire que notre capacité d’introspection est illusoire ?
(à suivre)
(1) Auguste Comte, Cours de Philosophie Positive (1830-1842), Vol. 1, pp. 31-32

9 juil. 2012

PILOTAGE ET INTROSPECTION, LES DEUX MAMELLES DE LA MÉTACOGNITION

Comment relier nos actes et nos croyances sur nos actes (Neurosciences 13)
Savoir que l’on ne sait pas n’est pas surprenant. Mais savoir que l’on devrait savoir alors que l’on ne sait plus est déjà plus étrange. Et enfin, savoir quelque chose, tout en sachant que l’on n’est pas si sûr que cela de le savoir, devient un peu complexe, non ?
Voilà pourtant le cheminement de notre métacognition.
Posons d’abord quelques définitions, ce qui est toujours utile pour être sûr de savoir de quoi on parle :
-        Cognition : l’ensemble des processus mentaux qui nous permettent de traiter des informations (internes ou externes),
-        Métacognition: l’ensemble des connaissances et des croyances que nous possédons sur nos propres processus cognitifs (passés, présents ou futurs), ainsi que les processus qui permettent de les manipuler.
-        Méta-mémoire: nos connaissances et nos croyances sur nos processus de mémorisation et de récupération en mémoire
-        Introspection (littéralement le regard intérieur) : Capacité d’accéder consciemment à nos opérations mentales, et de les rapporter à nous-mêmes ou à autrui
Sur ces bases, Stanislas Dehaene présente un début de cadre théorique de la métacognition (1), qui distingue :
  • Les opérations mentales ou représentations,
  • Les méta-représentations, c’est-à-dire les connaissances que l’on a de ses représentations,
  • Le contrôle métacognitif qui va des méta-représentations vers les représentations, et assure une fonction de contrôle des représentations
  • L’introspection qui va des représentations aux méta-représentations et assure une fonction de régulation pour vérifier que les méta-représentations ne dérivent pas, d’où le nom aussi de « metacognitive monitoring ».
Tout ceci peut sembler en première lecture compliqué et obscur.
Pour le rendre plus lisible, je vais l’appliquer au cas de l’entreprise :
  • Les opérations, c’est-à-dire la réalité de l’entreprise, ce qui se passe concrètement dans les usines, chez les commerciaux, dans les laboratoires…
  • La Direction Générale qui se fait une idée de ce qui se passe dans l’entreprise, et correspond aux méta-représentations,
  • Les actions et décisions de la Direction Générale qui cherchent à piloter les opérations (ceci incluant la stratégie, les tableaux de bord, les arbitrages…), ce qui correspond au contrôle métacognitif
  • Les fonctions d’audit et les tableaux de bord qui cherchent à remonter vers la Direction générale la réalité des opérations, ce qui correspond à l’introspection
Tout devient plus clair, comme cela, et donne envie de continuer à suivre le cours de Stanislas Dehaene, non ?
(à suivre)
(1) Repris de Nelson, T.O. & Narens, L. (1990). Metamemory: A theoretical framework and some new findings. In G.H. Bower (Ed). The Psychology of Learning and Motivation, 26, 125-173. New York: Academic Press

5 juil. 2012

COMMENT PEUT-ON AVOIR UN AVIS SUR LA FIABILITÉ DE SES CONNAISSANCES ?

Je ne sais plus, mais je sais que je savais… (Neurosciences 12)
Stanislas Dehaene commence son cours 2011 sur l’introspection et la métacognition, aussi sous-titré, les mécanismes de la connaissance du soi, par deux citations :
-        La première est d’André Gide : « Je m'échappe sans cesse et ne comprends pas bien, lorsque je me regarde agir, que celui que je vois agir soit le même que celui qui regarde, et qui s’étonne, et doute qu’il puisse être acteur et contemplateur à la fois. » (1)
-    La seconde de Vladimir Nabokov : « Être conscient d’être conscient d’être… Si je sais non seulement que je suis, mais également que je sais que je le sais, alors j’appartiens à l’espèce humaine. Tout le reste en découle. » (2)
Comment fonctionnent ces boucles rétroactives de la connaissance sur soi-même, comment sommes-nous conscients d’être conscients ? Comment pouvons-nous avoir une représentation de nous-mêmes ? Tels sont les questions auxquelles il va s’atteler dans ce cours.
S’il est une partie des cours de Stanislas Dehaene qui interpelle fortement le mode de management des entreprises, c’est bien celle-là. En effet les problématiques de l’évaluation et du pilotage sont évidemment clés dans les entreprises. Comme vous allez le voir dans les articles à venir, les analyses et les études de Stanislas Dehaene apportent  des éclairages très intéressants…
Il commence par une double remarque :
-        Souvent nous ne pouvons pas nous souvenir d‘une réponse, mais nous savons que nous la connaissons ; nous disons alors que nous l’avons sur le bout de la langue. Mais comment diable savons que nous savons, alors que nous ne savons pas ? Étrange, non ? Aurions-nous une capacité d’autoévaluation de ce qui est accessible quelque part en nous, et que nous ne retrouvons plus. Un peu comme si nous étions face à une armoire fermée, dans laquelle se trouve ce que l’on cherche, mais dont nous aurions perdu la clé…
-        Si on me demande « Avez-vous déjà dansé avec telle actrice célèbre, par exemple Fanny Ardant ? », je vais répondre très facilement, car je sais que si j‘avais déjà dansé avec elle, je m’en souviendrais. Si maintenant, on me demande « Avez-vous déjà dansé avec une personne dont le prénom commençait par "Fa" », je vais être moins affirmatif, car je sais que je pourrais avoir oublié…
Au travers de ces deux exemples, on perçoit que non seulement nous avons un certain niveau de connaissance, mais aussi un degré de confiance sur ce niveau de connaissance : quand nous ne savons pas, nous savons que nous pourrions ; quand nous pensons savoir, nous avons une opinion sur la solidité de ce savoir.
Ce dernier point est majeur pour fiabiliser les processus de décision dans les entreprises : combien d’erreurs n’ont-elles pas été faites sur la base de croyances qui se sont révélées fausses ! Serait-il possible de se servir des travaux des neurosciences pour lutter contre ce risque ?
(à suivre)
(1) Les faux-monnayeurs, Le journal d’Édouard
(2) Strong Opinions

3 juil. 2012

LA COMPÉTITION POUR SE FAIRE ENTENDRE DANS L’ESPACE DE TRAVAIL GLOBAL

Pas facile de passer de non-conscient à conscient (Neurosciences 10)
On a donc d’un côté l’accès à la conscience qui, grâce à un espace de travail global, peut maintenir pendant une certaine période de temps un état métastable, et qui peut distribuer son information dans tout le cortex, le tout dans un processus lent et complexe de boucles à la fois entrantes et descendantes, de l’autre les processus non conscients qui, comme on l'a vu dans les articles précédents, sont ultra-rapides, massivement parallèles, mais évanescents et incapables de se fixer un but par eux-mêmes. Comment les deux échangent-ils ?
En fait la distinction que je viens de faire est incorrecte, car si elle ne tient pas compte du fait que les deux processus sont entremêlés, et que le même processeur peut être sollicité aussi bien par des traitements conscients que non-conscients.
Quelle est alors l’articulation entre les deux et comment un traitement pourrait-il devenir conscient ?
Pour comprendre cela, il faut distinguer trois situations :
  • Le traitement subliminal : la force du stimulus est trop faible pour accéder à la conscience, c’est-à-dire pour franchir ce qui est appelé « le seuil d’ignition », ce seuil nécessaire pour irradier l’espace de travail global.
  • Le traitement préconscient : la force est cette fois suffisante, mais elle entre en compétition avec d’autres stimuli et reste « aux portes » de l’espace de travail global. Celui-ci ne peut en effet traiter qu’un seul stimuli à la fois, rançon de la sophistication des traitements conscients.
  • Le traitement conscient : la force a été suffisante et l’espace central était disponible, ou ce qui l'occupait a été "éjecté". L’ignition globale a alors lieu.
Cette explication présente aussi dans le livre de Lionel Naccache, Le Nouvel Inconscient, m’avait inspiré des développements dans Neuromanagement, sur les relations entre ce que traitait la Direction Générale – qui, d’une certaine façon, peut être assimilée à une espace de travail central – et le reste de l’entreprise.
En effet la Direction Générale a elle aussi une capacité à agir dans toute l’entreprise, mais ne peut réellement traiter qu’un sujet à la fois, ou du moins un tout petit nombre au regard de tout ce qui advient dans l’entreprise. 
Se pose alors la question de l’accès de tous ces autres sujets à la Direction Générale, et on va retrouver la même typologie :
  •  les sujets trop volatils et qui n’ont donc pas le temps d’être pris en compte,
  •  les sujets suffisamment importants, mais non pris en compte par manque de disponibilités,
  • les sujets traités.
Revenons au cours de Stanislas Dehaene.
Peut-on déduire de cette présentation que ce que nous ressentons et la façon dont nous réagissons est identique ?
(à suivre)