Histoire de caverne (Saison 4 – Épisode 7)
Rien ne semblait pouvoir enrayer le développement des maisons du plaisir et temples du jeu, quand apparut l'APIHLE.
Marcel exultait. Après des années passées à ruminer sa vengeance, il la tenait enfin. En tant que Président de l'APIHLE (Association pour la préservation de l'identité humaine et la lutte contre les élixirs), il allait leur en faire voir…
Mais qui était donc ce Marcel et pourquoi en voulait-il autant à moi, Johnny et Jojo ? Pour cela, il me faut remonter bien longtemps en arrière, quand je n'étais encore qu'un modeste entrepreneur spécialisé dans la décoration des cavernes (voir le début de la saison 1 : Comment je suis devenu banquier pour ne plus avoir à faire du troc). À l'époque, je n'exécutais pas moi-même les peintures rupestres, et les sous-traitais à un jeune artiste de talent, Marcel. C'est pour payer Marcel que j'avais fait connaissance avec Johnny, trouvé l'idée des pierres comme monnaie d'échanges et que tout avait commencé.
Marcel, lui, avait continué sa carrière d'artiste, ou du moins avait essayé. Voir mon ascension et celle de Johnny l'avait bloqué : il m'en voulait de ne pas l'avoir associé à mes affaires, et rapidement avait passé ses journées à imaginer que, sans lui, nous ne serions arrivés à rien.
Il y a une dizaine d'années, un peu avant l'arrivée de Jordana et Isabella, Jojo le devin était allé le voir pour lui commander une nouvelle peinture. Quand il avait vu dans quel état se trouvait Marcel (sa caverne était un amoncellement d'os mal rongés, ses peaux de zèbres étaient à moitié rongées par des cohortes d'insectes – Marcel avait depuis toujours la passion des peaux de zèbre –, et même ses peintures rupestres avaient été volontairement raturées…), il était reparti sans lui dire un mot. Il s'était ensuite répandu de partout, en se moquant de l'état de la caverne de Marcel. Il était aussi à l'origine d'un article paru dans l'Échos des Cavernes : « Marcel ou la fin d'un talent ».
Ce fut la goutte d'eau de trop : Marcel plongea encore plus profond. Ce qui le sauva de la dépression, ce fut la haine qu'il développa contre moi, Johnny et Jojo. Elle devint sa fixation, sa raison d'être. Il vécut dès lors dans l'obsession de se venger. Malheureusement pour lui, les années passant, nous devenions de plus en plus puissants. Marcel avait bien pensé s'en prendre à nos enfants, mais il n'avait pas pu : il voulait viser non pas à des enfants innocents, mais directement nos personnes et nos affaires.
Les années passèrent. Petit à petit, Marcel avait remonté la pente. Il s'était remis à la peinture. Quand il avait vu apparaître les cabanes, cela lui avait donné une idée : comme les cabanes étaient un moyen d'habiter là où on voulait et de se libérer de la localisation forcée des cavernes, il avait imaginé de peindre sur des morceaux de bois et non plus sur les murs. Ainsi on pouvait déplacer ses peintures, les mettre n'importe où, et les emmener avec soi. Le succès fut immédiat. Aujourd'hui Marcel était à la tête d'une entreprise prospère de décoration murale, « Decorama ». Il employait une centaine de personnes et était présent des deux côtés du monde. Lui-même peignait encore de temps en temps pour le plaisir.
Il avait renoué des relations d'abord avec nous via Jacques et Jordana. En effet ceux-ci étaient ses premiers clients : Decorama avait le décorateur exclusif de « Cabanes de rêves », la société de J&J. Un soir, il fut présenté à Jojo qui ne reconnut pas en lui le Marcel pauvre et à moitié fou qu'il avait connu, il y a longtemps. Il ne dit évidemment rien et cacha sa haine, attendant le bon moment.
Marcel fut donc aux premières loges pour assister à l'essor des maisons du plaisir, puis des temples du jeu. Il avait gardé de son plongeon une fixation sur la santé physique et morale : il ne s'en était sorti qu'au prix d'une ascèse personnelle extrêmement ferme. Aussi fut-il extrêmement choqué par la luxure promue par ces lieux. Il sentit qu'il tenait enfin sa vengeance : en s'attaquant à ces lieux de débauche, il allait faire d'une pierre deux coups, nous attaquer enfin et défendre l'ordre moral auquel il tenait.
Discrètement, il créa l'APIHLE et commença à recruter auprès de tous les déçus de ce monde en train de devenir moderne. Il avait déjà une centaine de membres quand survinrent les accidents de chars. Son association apparut alors au grand jour en lançant sa célèbre campagne(1) : « Pour des cavernes et des cabanes propres ».
Le lendemain, il avait rendez-vous avec le conseil des cabanes et cavernes (le CCC), organe dirigeant des deux mondes(2).
« Nous ne vous laisserons pas mettre en péril la santé morale de nos enfants, commença-t-il »
Je le regardais en me demandant si j'avais eu raison de créer le CCC et d'en prendre la présidence…
(à suivre)
(1) Cette campagne est enseignée à HECC (L'École des Hautes Études des Cavernes et Cabanes) comme étant la première utilisation de la communication moderne pour le lancement d'une cause politique.
(2) Le CCC a été la formalisation logique de l'instance qui gouvernait de fait les deux mondes. Il comprenait outre moi, Johnny, Jojo, Jacques, Paulo, Jordana, Christina et Isabella. Pour asseoir sa légitimité, nous nous étions contentés d'annoncer sa création dans un numéro spécial de l'Écho des Deux mondes. Comme nous étions tout puissants, pourquoi faire compliqué ? J'avais été élu premier Président du CCC, Christina Vice-Présidente et Jojo Secrétaire.
6 janv. 2010
5 janv. 2010
SEXE, ÉLIXIR, TAM-TAM… ET JEU
Histoire de caverne (Saison 4 – Épisode 6)
Grâce au succès des maisons du plaisir, l'économie des deux bouts du monde tournait à plein. L'argent et le temps gagné étaient recyclés pour mon plus grand profit. Et Johnny venait d'avoir une nouvelle idée.
Dans son message, Johnny m'annonçait aussi son arrivée prochaine. Quelle pouvait bien être cette idée géniale qui justifiait qu'il quitte le confort de sa position de vice-roi de Christoville ? J'allais le savoir bientôt…
Une semaine plus tard(1), le crissement d'un attelage me prévint de l'arrivée de Johnny : il n'y avait que lui pour faire un tel ramdam. Je sortis pour l'accueillir.
« Que dis-tu de mon nouveau véhicule, me dit-il en me montrant un drôle de char ».
Son char était plus étroit que les autres, doté seulement de deux roues (au lieu de quatre, voire six habituellement), et tenait en équilibre, car il était relié à l'avant à une magnifique paire de bisons(2). L'ensemble était un peu ridicule, fragile et clinquant, mais Johnny avait l'air si content d'être le centre de tous les regards…
« C'est un véhicule personnel. Idéal pour une course rapide ou une ballade en amoureux.
- Si tu le dis… »
Quelques minutes plus tard, nous étions assis chez moi, chacun ayant en main une coupe remplie d'un des élixirs d'Isabella.
« Toujours aussi délicieux, cette boisson, commença Johnny.
- Oui, et maintenant, on peut les acheter dans un nouveau réseau de cabanes que vient de monter Isabella. Ce sont de petites cabanes où l'on peut trouver un peu de tout, et, bien sûr, en premier, ses boissons. Elles appellent cela des « Elixstores ». C'est la dernière mode d'aller y faire ses courses. Mais tu n'as pas fait tout ce chemin pour m'entendre parler des elixstores.
- Non, effectivement. Mais cela constitue une bonne introduction, car cela montre le potentiel de développement qu'il y a encore derrière les idées d'Isabella.
- Je t'écoute.
- L'idée centrale d'Isabella a été de transformer le temps libre et le goût au divertissement en un business rentable. Idée simple et brillante, comme toutes les bonnes idées. Pour cela, elle s'est appuyée sur deux tendances majeures de tous les êtres vivants, gorilles et chimpanzés inclus : le goût du sexe et le besoin de s'évader. Pour le sexe, elle a eu l'intelligence de proposer un peu de tout, permettant à chacun selon ses envies de trouver ce qu'il cherche. Pour l'évasion, elle s'en est tenue à la boisson. Certes, elle propose toute une variété d'élixirs, mais cela reste de la boisson. Il y a d'autres façons de s'évader. Jacques, avec ses cavernes, puis ses cabanes au bord des lacs (voir les saisons précédentes), a proposé un peu d'évasion. Mais cela reste très artisanal.
- Tu veux développer un nouveau réseau de cabanes de vacances ?
- Attends… Il y a aussi une autre tendance naturelle, pour l'instant sous-exploitée : le jeu. Regarde des enfants : ils jouent. Idem pour les chimpanzés et les gorilles. Regarde des adultes : ils se racontent des histoires, essaient de se battre à la course, cherchent à viser de loin un arbre avec leur lance… Ils jouent aussi. Or, aucune offre organisée dans le domaine du jeu, rien. Donc mon idée est simple : elle est de compléter la trilogie d'Isabella – sexe, élixir, tam-tam – en y ajoutant le jeu. Je me propose de lancer avec Jacques un nouveau réseau de cabanes où tout un chacun pourra jouer. Ces cabanes seront situées à proximité soit d'un site exceptionnel (lac, point de vue,…), soit d'un centre de vie. Elles proposeront un ensemble associant logement, boisson et jeu. Pas de sexe et pas de musique, pour respecter l'exclusivité accordée à Isabella. Nous ne cherchons pas la guerre.
- Intéressant. Quel type de jeu trouvera-t-on dans ces cabanes ?
- Nous sommes en train de travailler dessus. Nous voulons nous inspirer à la fois des jeux des enfants et de ceux des adultes. Un mélange d'adresse, d'intelligence et de chance. Je suis venu ici pour finaliser tout cela avec Jacques. J'ai avec moi quelques maquettes, mais je préfère ne pas t'en parler pour l'instant. Dernier « détail ». Nous sommes à la recherche de financement pour monter ce projet. Tu es partant ?
- Sur le principe, oui. Reste à analyser plus précisément votre projet, connaître vos besoins financiers et définir ma part correspondante. Je vais demander à ma fille Dorothée de suivre ce projet. Autant Thomas est bon quand il s'agit de chiffres et de technologie, autant quand il s'agit de montages complexes, sa sœur est bien meilleure. Et il est temps qu'elle ait sa propre affaire…
Trois mois après cette discussion, l'Écho du monde annonçait la naissance du premier « Temple du jeu ». Pourquoi « Temple » ? Parce que finalement Johnny et Jacques avait décidé d'enrichir leur offre en lui donnant un côté religieux qui ajoutait une caution de sérieux : les clients pourraient dire qu'ils venaient là, non pas pour le jeu ou le plaisir, mais pour le bien de Dieu. Aussi Jojo avait participé à l'élaboration du concept.
Pour la partie jeu, l'offre était multiple. A l'extérieur du temple, on avait aménagé de grands espaces dans lesquels allaient se dérouler des compétitions : celui qui courait le plus vite, celui qui lançait le plus loin, celui qui tuait le plus d'oiseaux,… On pouvait jouer soit en participant soi-même à la compétition, soit en pariant sur qui allait gagner. A l'intérieur du temple, on trouvait des tables sur lesquelles on pouvait faire rouler des boules de pierre. Ces boules rebondissaient sur les bords de la table et pouvaient tomber dans un trou ou un autre. Pour gagner, il fallait avoir parié sur le bon trou.
Pour la partie logement et boisson, pas de problème. Jacques s'y connaissait. De plus, Isabella, comprenant l'intérêt pour elle de ce nouveau débouché, avait accepté d'y vendre ses boissons.
Dès l'ouverture, la foule se pressa. Un mois plus tard, ouvrait le deuxième temple. Un an plus tard, il y avait vingt temples, venant s'ajouter à la centaine de maisons du plaisir et à la dizaine d'elixstores.
C'est alors que se produisirent les premiers accidents de chars et que certains gorilles se mirent à échapper leur cargaison. Quand cela aboutit à la première mort d'un homme (il avait été lâché par un gorille alors qu'il atteignait son appartement, situé au niveau 4 d'une tour du futur), naquit l'association pour la préservation de l'identité humaine et la lutte contre les élixirs, l'APIHLE…
(à suivre)
(1) La piste qui réunissait les deux bouts du monde avait été considérablement améliorée, ne serait-ce que pour l'entretien des réseaux Internex et Intervox. Le courant de marchandises s'était aussi considérablement accru. Résultat : on pouvait faire le trajet en guère plus d'une semaine.
(2) En fait les animaux en question n'étaient pas exactement des bisons, mais une espèce rare et aujourd'hui disparue, dont, même moi, j'ignore le nom. Alors on va se contenter de les appeler « bison », c'est plus simple !
Grâce au succès des maisons du plaisir, l'économie des deux bouts du monde tournait à plein. L'argent et le temps gagné étaient recyclés pour mon plus grand profit. Et Johnny venait d'avoir une nouvelle idée.
Dans son message, Johnny m'annonçait aussi son arrivée prochaine. Quelle pouvait bien être cette idée géniale qui justifiait qu'il quitte le confort de sa position de vice-roi de Christoville ? J'allais le savoir bientôt…
Une semaine plus tard(1), le crissement d'un attelage me prévint de l'arrivée de Johnny : il n'y avait que lui pour faire un tel ramdam. Je sortis pour l'accueillir.
« Que dis-tu de mon nouveau véhicule, me dit-il en me montrant un drôle de char ».
Son char était plus étroit que les autres, doté seulement de deux roues (au lieu de quatre, voire six habituellement), et tenait en équilibre, car il était relié à l'avant à une magnifique paire de bisons(2). L'ensemble était un peu ridicule, fragile et clinquant, mais Johnny avait l'air si content d'être le centre de tous les regards…
« C'est un véhicule personnel. Idéal pour une course rapide ou une ballade en amoureux.
- Si tu le dis… »
Quelques minutes plus tard, nous étions assis chez moi, chacun ayant en main une coupe remplie d'un des élixirs d'Isabella.
« Toujours aussi délicieux, cette boisson, commença Johnny.
- Oui, et maintenant, on peut les acheter dans un nouveau réseau de cabanes que vient de monter Isabella. Ce sont de petites cabanes où l'on peut trouver un peu de tout, et, bien sûr, en premier, ses boissons. Elles appellent cela des « Elixstores ». C'est la dernière mode d'aller y faire ses courses. Mais tu n'as pas fait tout ce chemin pour m'entendre parler des elixstores.
- Non, effectivement. Mais cela constitue une bonne introduction, car cela montre le potentiel de développement qu'il y a encore derrière les idées d'Isabella.
- Je t'écoute.
- L'idée centrale d'Isabella a été de transformer le temps libre et le goût au divertissement en un business rentable. Idée simple et brillante, comme toutes les bonnes idées. Pour cela, elle s'est appuyée sur deux tendances majeures de tous les êtres vivants, gorilles et chimpanzés inclus : le goût du sexe et le besoin de s'évader. Pour le sexe, elle a eu l'intelligence de proposer un peu de tout, permettant à chacun selon ses envies de trouver ce qu'il cherche. Pour l'évasion, elle s'en est tenue à la boisson. Certes, elle propose toute une variété d'élixirs, mais cela reste de la boisson. Il y a d'autres façons de s'évader. Jacques, avec ses cavernes, puis ses cabanes au bord des lacs (voir les saisons précédentes), a proposé un peu d'évasion. Mais cela reste très artisanal.
- Tu veux développer un nouveau réseau de cabanes de vacances ?
- Attends… Il y a aussi une autre tendance naturelle, pour l'instant sous-exploitée : le jeu. Regarde des enfants : ils jouent. Idem pour les chimpanzés et les gorilles. Regarde des adultes : ils se racontent des histoires, essaient de se battre à la course, cherchent à viser de loin un arbre avec leur lance… Ils jouent aussi. Or, aucune offre organisée dans le domaine du jeu, rien. Donc mon idée est simple : elle est de compléter la trilogie d'Isabella – sexe, élixir, tam-tam – en y ajoutant le jeu. Je me propose de lancer avec Jacques un nouveau réseau de cabanes où tout un chacun pourra jouer. Ces cabanes seront situées à proximité soit d'un site exceptionnel (lac, point de vue,…), soit d'un centre de vie. Elles proposeront un ensemble associant logement, boisson et jeu. Pas de sexe et pas de musique, pour respecter l'exclusivité accordée à Isabella. Nous ne cherchons pas la guerre.
- Intéressant. Quel type de jeu trouvera-t-on dans ces cabanes ?
- Nous sommes en train de travailler dessus. Nous voulons nous inspirer à la fois des jeux des enfants et de ceux des adultes. Un mélange d'adresse, d'intelligence et de chance. Je suis venu ici pour finaliser tout cela avec Jacques. J'ai avec moi quelques maquettes, mais je préfère ne pas t'en parler pour l'instant. Dernier « détail ». Nous sommes à la recherche de financement pour monter ce projet. Tu es partant ?
- Sur le principe, oui. Reste à analyser plus précisément votre projet, connaître vos besoins financiers et définir ma part correspondante. Je vais demander à ma fille Dorothée de suivre ce projet. Autant Thomas est bon quand il s'agit de chiffres et de technologie, autant quand il s'agit de montages complexes, sa sœur est bien meilleure. Et il est temps qu'elle ait sa propre affaire…
Trois mois après cette discussion, l'Écho du monde annonçait la naissance du premier « Temple du jeu ». Pourquoi « Temple » ? Parce que finalement Johnny et Jacques avait décidé d'enrichir leur offre en lui donnant un côté religieux qui ajoutait une caution de sérieux : les clients pourraient dire qu'ils venaient là, non pas pour le jeu ou le plaisir, mais pour le bien de Dieu. Aussi Jojo avait participé à l'élaboration du concept.
Pour la partie jeu, l'offre était multiple. A l'extérieur du temple, on avait aménagé de grands espaces dans lesquels allaient se dérouler des compétitions : celui qui courait le plus vite, celui qui lançait le plus loin, celui qui tuait le plus d'oiseaux,… On pouvait jouer soit en participant soi-même à la compétition, soit en pariant sur qui allait gagner. A l'intérieur du temple, on trouvait des tables sur lesquelles on pouvait faire rouler des boules de pierre. Ces boules rebondissaient sur les bords de la table et pouvaient tomber dans un trou ou un autre. Pour gagner, il fallait avoir parié sur le bon trou.
Pour la partie logement et boisson, pas de problème. Jacques s'y connaissait. De plus, Isabella, comprenant l'intérêt pour elle de ce nouveau débouché, avait accepté d'y vendre ses boissons.
Dès l'ouverture, la foule se pressa. Un mois plus tard, ouvrait le deuxième temple. Un an plus tard, il y avait vingt temples, venant s'ajouter à la centaine de maisons du plaisir et à la dizaine d'elixstores.
C'est alors que se produisirent les premiers accidents de chars et que certains gorilles se mirent à échapper leur cargaison. Quand cela aboutit à la première mort d'un homme (il avait été lâché par un gorille alors qu'il atteignait son appartement, situé au niveau 4 d'une tour du futur), naquit l'association pour la préservation de l'identité humaine et la lutte contre les élixirs, l'APIHLE…
(à suivre)
(1) La piste qui réunissait les deux bouts du monde avait été considérablement améliorée, ne serait-ce que pour l'entretien des réseaux Internex et Intervox. Le courant de marchandises s'était aussi considérablement accru. Résultat : on pouvait faire le trajet en guère plus d'une semaine.
(2) En fait les animaux en question n'étaient pas exactement des bisons, mais une espèce rare et aujourd'hui disparue, dont, même moi, j'ignore le nom. Alors on va se contenter de les appeler « bison », c'est plus simple !
4 janv. 2010
COMMENT RÉCONCILIER PLAISIR, MORALE, SANTÉ ET SOLIDITÉ MONÉTAIRE?
Histoire de caverne (Saison 4 – Épisode 5)
Isabella venait de lancer ses « maisons du plaisir ». Elles reposaient sur une formule simple : Sexe, élixir et tam-tam.
« Voilà pourquoi Isabella vient de résoudre mon problème de liquidité et de valeur de mes billes. »
Thomas me regardait les yeux écarquillés.
« Désolé, mais ton exposé était tellement brillant que je n'ai rien compris. Tu peux recommencer plus lentement. »
Avec un sourire, je repris donc.
« A cause de la crise de liquidité causée par la baisse du marché immobilier couplée aux augmentations données aux gorilles et chimpanzés, j'ai dû accroître la quantité de billes mises en circulation, et ce dans des proportions très importantes. Si cela s'apprend, je serai accusé de manipuler la valeur de la bille et on risque de ne plus avoir confiance en mes billes. Or des monnaies de substitutions existent. Jusque-là, tu comprends.
- Oui. Cela, tu me l'as déjà expliqué plusieurs fois. Ce que je ne vois pas, c'est en quoi l'existence des maisons du plaisir va changer quoique ce soit à ton problème.
- Je te rappelle d'abord que ce n'est pas seulement mon problème, mais le tien aussi… A ton avis, les clients des maisons du plaisir vont payer avec quoi leurs consommations et les quelques minutes passées dans les box privés avec les danseurs(1) ?
- Avec des billes, je suppose.
- Bien. Et la quantité de ces billes provient de quoi, à ton avis ?
- Je ne sais pas. De leur travail, je suppose.
- Oui, et plus précisément, de l'argent excédentaire. Celle que l'on a été contraint de donner aux gorilles et aux chimpanzés. Augmentation qui a fait tâche d'huile et a profité à tout le monde.
- Oui et alors ?
- Maintenant, il suffit que je récupère auprès d'Isabella toutes les billes qu'elle vient si gentiment de collecter pour moi.
- Mais ce serait du vol.
- Qui te parle de vol ? Je vais juste réunir le conseil des cavernes, suggérer à Christina de faire de même pour le conseil de Christoville. Les deux conseils vont voter le même texte : au nom de la préservation de l'ordre moral et de la santé des habitants, nous allons instaurer une taxe sur le plaisir. Une taxe de 50% prélevée sur le chiffre d'affaire : pour deux billes rentrées, nous en prélèverons une. Officiellement, cette taxe permettra de financer un programme de santé publique. Je vais faire en sorte que Jojo, en tant que sorcier, en soit le responsable. Dans la pratique, je gèrerai les fonds et me refinancerai dessus.
- Et tu crois qu'Isabella va se laisser faire ?
- Elle n'aura pas le choix. Et je lui expliquerai qu'elle n'a qu'à doubler ses prix. En échange, je m'engagerai à lui garantir le monopole du plaisir. Elle acceptera, doublera ses prix et augmentera d'autant le montant retournant dans mes caisses.
- Cette fois, j'ai compris. Brillant père. »
Un mois plus tard, un double texte fut voté des deux côtés du monde : l'un accordant le monopole du plaisir à la société « Maisons du plaisir », société contrôlée majoritairement par Isabella avec une participation minoritaire de Coco ; l'autre créant la taxe santé. Jojo dans la foulée devint le premier président de la Caisse de développement pour la protection de la morale et de la santé, caisse qui allait gérer la taxe. Personne ne fit attention que le trésorier de cette caisse était mon fils Thomas.
Six mois plus tard, tout allait vraiment bien :
- Le réseau des maisons du plaisir était constitué maintenant de plus de cent maisons. Ceci m'avait permis de replacer la totalité des cabanes qui m'étaient restées sur les bras précédemment.
- Le chiffre d'affaire avait explosé et absorbait tous les revenus disponibles. Le temps passé dans les maisons du plaisir occupait aussi les esprits. Plus personne ne s'ennuyait.
- Je croulais plus que jamais sous les billes.
C’est alors que Johnny m’envoya un message : il avait une idée pour accroître encore le plaisir… et nos revenus. Quel merveilleux ami !
(à suivre)
(1) Compte-tenu de mon incapacité de contrôler l'âge de mes lecteurs, je ne suis pas rentré dans une description complète et trop explicité de l'offre sexe des maisons du plaisir. Mais les lecteurs adultes comprendront aisément en quoi elle peut constituer.
Isabella venait de lancer ses « maisons du plaisir ». Elles reposaient sur une formule simple : Sexe, élixir et tam-tam.
« Voilà pourquoi Isabella vient de résoudre mon problème de liquidité et de valeur de mes billes. »
Thomas me regardait les yeux écarquillés.
« Désolé, mais ton exposé était tellement brillant que je n'ai rien compris. Tu peux recommencer plus lentement. »
Avec un sourire, je repris donc.
« A cause de la crise de liquidité causée par la baisse du marché immobilier couplée aux augmentations données aux gorilles et chimpanzés, j'ai dû accroître la quantité de billes mises en circulation, et ce dans des proportions très importantes. Si cela s'apprend, je serai accusé de manipuler la valeur de la bille et on risque de ne plus avoir confiance en mes billes. Or des monnaies de substitutions existent. Jusque-là, tu comprends.
- Oui. Cela, tu me l'as déjà expliqué plusieurs fois. Ce que je ne vois pas, c'est en quoi l'existence des maisons du plaisir va changer quoique ce soit à ton problème.
- Je te rappelle d'abord que ce n'est pas seulement mon problème, mais le tien aussi… A ton avis, les clients des maisons du plaisir vont payer avec quoi leurs consommations et les quelques minutes passées dans les box privés avec les danseurs(1) ?
- Avec des billes, je suppose.
- Bien. Et la quantité de ces billes provient de quoi, à ton avis ?
- Je ne sais pas. De leur travail, je suppose.
- Oui, et plus précisément, de l'argent excédentaire. Celle que l'on a été contraint de donner aux gorilles et aux chimpanzés. Augmentation qui a fait tâche d'huile et a profité à tout le monde.
- Oui et alors ?
- Maintenant, il suffit que je récupère auprès d'Isabella toutes les billes qu'elle vient si gentiment de collecter pour moi.
- Mais ce serait du vol.
- Qui te parle de vol ? Je vais juste réunir le conseil des cavernes, suggérer à Christina de faire de même pour le conseil de Christoville. Les deux conseils vont voter le même texte : au nom de la préservation de l'ordre moral et de la santé des habitants, nous allons instaurer une taxe sur le plaisir. Une taxe de 50% prélevée sur le chiffre d'affaire : pour deux billes rentrées, nous en prélèverons une. Officiellement, cette taxe permettra de financer un programme de santé publique. Je vais faire en sorte que Jojo, en tant que sorcier, en soit le responsable. Dans la pratique, je gèrerai les fonds et me refinancerai dessus.
- Et tu crois qu'Isabella va se laisser faire ?
- Elle n'aura pas le choix. Et je lui expliquerai qu'elle n'a qu'à doubler ses prix. En échange, je m'engagerai à lui garantir le monopole du plaisir. Elle acceptera, doublera ses prix et augmentera d'autant le montant retournant dans mes caisses.
- Cette fois, j'ai compris. Brillant père. »
Un mois plus tard, un double texte fut voté des deux côtés du monde : l'un accordant le monopole du plaisir à la société « Maisons du plaisir », société contrôlée majoritairement par Isabella avec une participation minoritaire de Coco ; l'autre créant la taxe santé. Jojo dans la foulée devint le premier président de la Caisse de développement pour la protection de la morale et de la santé, caisse qui allait gérer la taxe. Personne ne fit attention que le trésorier de cette caisse était mon fils Thomas.
Six mois plus tard, tout allait vraiment bien :
- Le réseau des maisons du plaisir était constitué maintenant de plus de cent maisons. Ceci m'avait permis de replacer la totalité des cabanes qui m'étaient restées sur les bras précédemment.
- Le chiffre d'affaire avait explosé et absorbait tous les revenus disponibles. Le temps passé dans les maisons du plaisir occupait aussi les esprits. Plus personne ne s'ennuyait.
- Je croulais plus que jamais sous les billes.
C’est alors que Johnny m’envoya un message : il avait une idée pour accroître encore le plaisir… et nos revenus. Quel merveilleux ami !
(à suivre)
(1) Compte-tenu de mon incapacité de contrôler l'âge de mes lecteurs, je ne suis pas rentré dans une description complète et trop explicité de l'offre sexe des maisons du plaisir. Mais les lecteurs adultes comprendront aisément en quoi elle peut constituer.
31 déc. 2009
SEXE, ÉLIXIR ET TAM-TAM !
Histoire de caverne (Saison 4 – Épisode 4)
Isabella avait obtenu ce qu'elle voulait et venait d'annoncer le lancement des « maisons du plaisir ». De mon côté, ma préoccupation était tout autre : j'avais dû multiplier le nombre de billes en circulation. Moins cela se saurait, mieux ce serait…
L'annonce d'Isabella avait fait son effet : plus personne ne parlait d'autre chose. Toutes les cavernes, toutes cabanes, toutes les Tours du futur ne bruissaient plus que d'une question : qu'est-ce que c'étaient des « Maisons du plaisir ». Et ce, des deux côtés du bout du bout du monde. Même dans la forêt, ce n'était plus que des cris de chimpanzés et de gorilles se demandant quand ils pourraient y aller. Les paris allaient bon train. Les uns disaient que c'était un nouveau type de cabanes plus faciles à construire. D'autres que c'était des maisons que les esprits habitaient et y répandaient des ondes de plaisir. D'autres rétorquaient que, si Isabella avait été croyante, cela se saurait. Bref tout le monde en parlait, mais personne ne savait rien.
La réponse vint la semaine suivante : dans l'Écho du Monde, on pouvait lire « Écoutez et vous trouverez le plaisir ! ». Dès la parution de cette nouvelle édition, des tam-tams se mirent à résonner tout autour. Ce son attira, comme un aimant, hommes, femmes, chimpanzés et gorilles : tout le monde avait tellement envie de savoir que chacun lâcha ce qu'il était en train de faire pour suivre le son et trouver d'où il venait. Les uns se retrouvèrent entrer en profondeur dans les bois, d'autres se rapprocher de rivières, d'autres enfin aller vers les vieux centres des deux bouts du monde. Qu'allaient-ils bien trouver ?
Chacun, quel que soit l'endroit où il se trouvait, eu devant lui une cabane comme ensorcelée non seulement de musique, mais de fleurs et de parfums tous les plus envoutants les uns que les autres. Au fronton, était écrit : « Entre et tu accèderas au plaisir ».
A l'intérieur, d'un côté, une sorte de tronc avait été fendu dans sa longueur et accroché en l'air à mi-hauteur. Sur le dessus, étaient posées des séries de coupelles en bois de toutes tailles et de toutes les essences. Derrière, accroché au mur, on voyait d'autres morceaux de bois recouvert de grands pots desquels émanaient des odeurs merveilleuses. Entre le mur et le tronc fendu, se tenait une femme très peu vêtue qui proposait à chacun de goûter le contenu de ces pots : « N'hésitez pas : pour le lancement des maisons du plaisir, tout est gratuit. C'est 'open bar'. » Personne ne comprit d'où venait des mots étranges 'Open Bar', mais tout le monde se mit à boire. Et plus ils buvaient, plus les esprits s'échauffaient.
Alors les regards se tournèrent de l'autre côté de la salle. Là sur de grandes planches, se tenaient deux gorilles qui frappaient selon un rythme obsédant sur leur tam-tam. Devant eux, ondulaient dans un ballet sans fin deux femmes, deux gorilles femelles, deux chimpanzés femelles. Chacune jouait du corps de l'autre et la dénudait lentement… Les regards s'allumèrent.
« Je crois que je viens de comprendre pourquoi Isabella les a appelées les maisons du plaisir, dis-je avec un sourire ». Comme les autres, je n'avais pas pu résister à l'appel de ma curiosité et de la musique des tam-tams. J'étais arrivé parmi les premiers dans la maison la plus proche de ma caverne.
Sentant que l'on me tapait sur l'épaule, je me retournais et trouvais face à moi Isabella.
« Cela vous plaît ?
- Brillante idée. Cela a l'air de plaire à tous : homme, gorille ou chimpanzé. Et les femmes, vous y avez pensé ?
- Attendez un peu et vous allez voir entre en scène d'autres danseurs. »
Quelques minutes plus tard, effectivement, d'autres danseurs du sexe opposé prirent la place des premiers. Puis bientôt, les ballets devinrent mixtes. La chaleur monta encore d'un cran.
« Je crois que j'en ai assez vu, dis-je en sortant et m'adressant à Isabella. Venez me voir demain. Maintenant vous êtes des nôtres ! »
Le lendemain, quand Isabella entra dans ma caverne, elle m'y trouva ainsi que Jacques, Jojo et Jordana. Elle tenait à la main un des ses pots remplis d'une de ses boissons enivrantes.
« Vous allez nous dire comment vous avez réussi à produire des tels élixirs, lui dis-je.
- Certainement pas ! Un des trois secrets de fabrique des maisons du plaisir, me répondit-elle en souriant.
- Quels sont les deux autres ?
- Sexe et tam-tam !
- Bien ! Alors trinquons tous ensemble à votre succès. »
En mon for intérieur, je souriais : j'étais convaincu qu'Isabella venait aussi d'apporter une solution à mon problème…
(à suivre)
Isabella avait obtenu ce qu'elle voulait et venait d'annoncer le lancement des « maisons du plaisir ». De mon côté, ma préoccupation était tout autre : j'avais dû multiplier le nombre de billes en circulation. Moins cela se saurait, mieux ce serait…
L'annonce d'Isabella avait fait son effet : plus personne ne parlait d'autre chose. Toutes les cavernes, toutes cabanes, toutes les Tours du futur ne bruissaient plus que d'une question : qu'est-ce que c'étaient des « Maisons du plaisir ». Et ce, des deux côtés du bout du bout du monde. Même dans la forêt, ce n'était plus que des cris de chimpanzés et de gorilles se demandant quand ils pourraient y aller. Les paris allaient bon train. Les uns disaient que c'était un nouveau type de cabanes plus faciles à construire. D'autres que c'était des maisons que les esprits habitaient et y répandaient des ondes de plaisir. D'autres rétorquaient que, si Isabella avait été croyante, cela se saurait. Bref tout le monde en parlait, mais personne ne savait rien.
La réponse vint la semaine suivante : dans l'Écho du Monde, on pouvait lire « Écoutez et vous trouverez le plaisir ! ». Dès la parution de cette nouvelle édition, des tam-tams se mirent à résonner tout autour. Ce son attira, comme un aimant, hommes, femmes, chimpanzés et gorilles : tout le monde avait tellement envie de savoir que chacun lâcha ce qu'il était en train de faire pour suivre le son et trouver d'où il venait. Les uns se retrouvèrent entrer en profondeur dans les bois, d'autres se rapprocher de rivières, d'autres enfin aller vers les vieux centres des deux bouts du monde. Qu'allaient-ils bien trouver ?
Chacun, quel que soit l'endroit où il se trouvait, eu devant lui une cabane comme ensorcelée non seulement de musique, mais de fleurs et de parfums tous les plus envoutants les uns que les autres. Au fronton, était écrit : « Entre et tu accèderas au plaisir ».
A l'intérieur, d'un côté, une sorte de tronc avait été fendu dans sa longueur et accroché en l'air à mi-hauteur. Sur le dessus, étaient posées des séries de coupelles en bois de toutes tailles et de toutes les essences. Derrière, accroché au mur, on voyait d'autres morceaux de bois recouvert de grands pots desquels émanaient des odeurs merveilleuses. Entre le mur et le tronc fendu, se tenait une femme très peu vêtue qui proposait à chacun de goûter le contenu de ces pots : « N'hésitez pas : pour le lancement des maisons du plaisir, tout est gratuit. C'est 'open bar'. » Personne ne comprit d'où venait des mots étranges 'Open Bar', mais tout le monde se mit à boire. Et plus ils buvaient, plus les esprits s'échauffaient.
Alors les regards se tournèrent de l'autre côté de la salle. Là sur de grandes planches, se tenaient deux gorilles qui frappaient selon un rythme obsédant sur leur tam-tam. Devant eux, ondulaient dans un ballet sans fin deux femmes, deux gorilles femelles, deux chimpanzés femelles. Chacune jouait du corps de l'autre et la dénudait lentement… Les regards s'allumèrent.
« Je crois que je viens de comprendre pourquoi Isabella les a appelées les maisons du plaisir, dis-je avec un sourire ». Comme les autres, je n'avais pas pu résister à l'appel de ma curiosité et de la musique des tam-tams. J'étais arrivé parmi les premiers dans la maison la plus proche de ma caverne.
Sentant que l'on me tapait sur l'épaule, je me retournais et trouvais face à moi Isabella.
« Cela vous plaît ?
- Brillante idée. Cela a l'air de plaire à tous : homme, gorille ou chimpanzé. Et les femmes, vous y avez pensé ?
- Attendez un peu et vous allez voir entre en scène d'autres danseurs. »
Quelques minutes plus tard, effectivement, d'autres danseurs du sexe opposé prirent la place des premiers. Puis bientôt, les ballets devinrent mixtes. La chaleur monta encore d'un cran.
« Je crois que j'en ai assez vu, dis-je en sortant et m'adressant à Isabella. Venez me voir demain. Maintenant vous êtes des nôtres ! »
Le lendemain, quand Isabella entra dans ma caverne, elle m'y trouva ainsi que Jacques, Jojo et Jordana. Elle tenait à la main un des ses pots remplis d'une de ses boissons enivrantes.
« Vous allez nous dire comment vous avez réussi à produire des tels élixirs, lui dis-je.
- Certainement pas ! Un des trois secrets de fabrique des maisons du plaisir, me répondit-elle en souriant.
- Quels sont les deux autres ?
- Sexe et tam-tam !
- Bien ! Alors trinquons tous ensemble à votre succès. »
En mon for intérieur, je souriais : j'étais convaincu qu'Isabella venait aussi d'apporter une solution à mon problème…
(à suivre)
30 déc. 2009
LA NAISSANCE ANNONCÉE DES MAISONS DU PLAISIR
Histoire de caverne (Saison 4 – Épisode 3)
Je connais maintenant les conditions mises par Isabella : vingt cabanes, une page de publicité, un accord entre Intervox et Internex. Mais pourquoi diable veut-elle vingt cabanes sans valeur ?
« Je crois que nous sommes obligés d'accepter, surtout que cela ne nous demande pas un gros sacrifice, commença Jacques »
Pour cette réunion essentielle, Jordana avait insisté pour que Jacques soit là. C'est ensemble qu'ils avaient monté « cabanes de rêves », l'entreprise leader sur le marché des cabanes simples, et surtout sur celui des « Tours du futur », nom commercial des piles de cabanes. Et tout le monde était persuadé qu'ils avaient mis en commun plus que leurs savoir-faire dans l'immobilier (Jordana était la spécialiste reconnue en matière de cabanes, Jacques exploitait depuis longtemps un réseau de cavernes de tourisme… mais surtout ils ne se quittaient plus, même la nuit. Leur liaison évidente était à l'origine de plusieurs billets dans l'Écho du Monde)…
« Jordie, tu en penses quoi, dis-je à Jordana, en lui souriant.
- Je suis d'accord aussi, répondit-elle en me foudroyant du regard. Et ne m'appelle pas Jordie, je t'en prie. C'est d'un ridicule !
- Ce n'est pas ce que tu as dit à Isabella quand elle t'appelé ainsi. »
Silence de plomb…
De son côté, Isabella n'avait pas perdu de temps. Elle était sûre que nous finirions par accepter ses conditions : qui refuserait de faire un rabais de 50% sur le prix de cavernes dont personne ne voulait ?
Elle était en grande conversation avec son protégé : Coco. Le décalage dû au temps de transmission via Intervox ralentissait les échanges. Avec Internex, cela irait plus vite : la lumière voyageait plus vite et plus loin que le son. Mais l'accord n'était pas encore signé…
« As-tu fait comme je te l'ai demandé ? As-tu construit un réseau de cabanes dans les arbres, tout à la périphérie de Christoville(1) ?
- Oui, j'ai fait exactement selon tes souhaits : j'ai maintenant une vingtaine de cabanes dans les arbres et personne n'est au courant. Sauf évidemment parmi les gorilles, mais je réponds d'eux.
- Parfait, nous allons avoir bientôt une vingtaine ici, idéalement placées.
- Tu ne veux pas me dire maintenant à quoi cela rime.
- Tu m'as bien dit que tu avais trop de temps libre et trop d'argent.
- Oui, et cela commence à me prendre la tête.
- Et c'est pareil pour tous les gorilles et tous les chimpanzés, n'est-ce pas ?
- Dans une moindre mesure, mais oui, c'est pareil.
- Eh bien, grâce à nous, plus personne ne va s'ennuyer… et ils auront tous moins d'argent !
- Hein ? »…
Ma discussion avec Jordana, Jacques et tous les autres était, elle, terminée. Tout le monde avait été d'accord pour accepter les conditions d'Isabella. Je ne voyais pas bien ce qu'elle voulait faire, mais j'avais assez de problèmes pour ne pas m'en préoccuper. Après tout, comme elle me prenait vingt cabanes immédiatement, cela m'enlevait une épine du pied.
Mon inquiétude, c'était ma solvabilité personnelle. Pour faire face à mes engagements, reprendre les cinquante cabanes, apporter les liquidités nécessaires pour payer les nouveaux salaires des singes et chimpanzés, financer les projets toujours croissants de Jacques et les inventions de Johnny, j'avais dû doubler le nombre de billes en circulation. Personnellement, cela ne me gênait pas, du moins tant que personne ne le savait. Sinon, je craignais un vent de panique. Je savais avoir des ennemis qui pourraient alors se faire un plaisir de lancer leur propre monnaie. Ce serait la catastrophe.
Pour l'instant, tout se passait bien. Il fallait que je fasse le point avec Thomas, qui ,depuis sa position stratégique à la tête de l'Écho du Monde et d'Internex, était au courant de tout. En plus, je devais lui parler de l'accord passé avec Isabella sur la page gratuite et sur le lien entre Internex et Intervox.
« Ne t'inquiète pas, me rassura-t-il. Rien ne filtre sur les billes. Pour la page gratuite, c'est notée. Mais c'est à la collectivité de prendre en charge le manque à gagner. Pour l'accord entre Internex et Intervox, je suis un peu à l'origine de l'idée : Internex est plus rapide quand le soleil brille, et Intervox fonctionne même par mauvais temps ou la nuit. En plus le trafic explose. Donc oui, je suis très favorable à cet accord… si je suis le président du regroupement bien sûr.
- OK c'est noté pour le dernier point. Si c'est possible, oui. Mais je ne vais pas en faire un point dur dans la négociation. Une coprésidence est acceptable.
- Comme tu veux… »
Un mois plus tard, l'accord était signé, les cabanes reprises par Isabella, les réseaux regroupés sous une coprésidence (Elle n'avait pas voulu que le tout soit dirigé par Thomas seul.).
Enfin, elle utilisa pour la 1ère fois la page de publicité gratuite. Un seul grand titre occupait la page, et, des deux côtés du bout du monde, on pouvait lire : « Vous ne vous ennuierez plus jamais : les maisons du plaisir sont nées »
(à suivre)
(1) Dans un élan de mégalomanie, Christina avait fait rebaptisé le réseau de cabanes dont elle était à la tête : Christoville. Était-ce pour impressionner Johnny ?
Je connais maintenant les conditions mises par Isabella : vingt cabanes, une page de publicité, un accord entre Intervox et Internex. Mais pourquoi diable veut-elle vingt cabanes sans valeur ?
« Je crois que nous sommes obligés d'accepter, surtout que cela ne nous demande pas un gros sacrifice, commença Jacques »
Pour cette réunion essentielle, Jordana avait insisté pour que Jacques soit là. C'est ensemble qu'ils avaient monté « cabanes de rêves », l'entreprise leader sur le marché des cabanes simples, et surtout sur celui des « Tours du futur », nom commercial des piles de cabanes. Et tout le monde était persuadé qu'ils avaient mis en commun plus que leurs savoir-faire dans l'immobilier (Jordana était la spécialiste reconnue en matière de cabanes, Jacques exploitait depuis longtemps un réseau de cavernes de tourisme… mais surtout ils ne se quittaient plus, même la nuit. Leur liaison évidente était à l'origine de plusieurs billets dans l'Écho du Monde)…
« Jordie, tu en penses quoi, dis-je à Jordana, en lui souriant.
- Je suis d'accord aussi, répondit-elle en me foudroyant du regard. Et ne m'appelle pas Jordie, je t'en prie. C'est d'un ridicule !
- Ce n'est pas ce que tu as dit à Isabella quand elle t'appelé ainsi. »
Silence de plomb…
De son côté, Isabella n'avait pas perdu de temps. Elle était sûre que nous finirions par accepter ses conditions : qui refuserait de faire un rabais de 50% sur le prix de cavernes dont personne ne voulait ?
Elle était en grande conversation avec son protégé : Coco. Le décalage dû au temps de transmission via Intervox ralentissait les échanges. Avec Internex, cela irait plus vite : la lumière voyageait plus vite et plus loin que le son. Mais l'accord n'était pas encore signé…
« As-tu fait comme je te l'ai demandé ? As-tu construit un réseau de cabanes dans les arbres, tout à la périphérie de Christoville(1) ?
- Oui, j'ai fait exactement selon tes souhaits : j'ai maintenant une vingtaine de cabanes dans les arbres et personne n'est au courant. Sauf évidemment parmi les gorilles, mais je réponds d'eux.
- Parfait, nous allons avoir bientôt une vingtaine ici, idéalement placées.
- Tu ne veux pas me dire maintenant à quoi cela rime.
- Tu m'as bien dit que tu avais trop de temps libre et trop d'argent.
- Oui, et cela commence à me prendre la tête.
- Et c'est pareil pour tous les gorilles et tous les chimpanzés, n'est-ce pas ?
- Dans une moindre mesure, mais oui, c'est pareil.
- Eh bien, grâce à nous, plus personne ne va s'ennuyer… et ils auront tous moins d'argent !
- Hein ? »…
Ma discussion avec Jordana, Jacques et tous les autres était, elle, terminée. Tout le monde avait été d'accord pour accepter les conditions d'Isabella. Je ne voyais pas bien ce qu'elle voulait faire, mais j'avais assez de problèmes pour ne pas m'en préoccuper. Après tout, comme elle me prenait vingt cabanes immédiatement, cela m'enlevait une épine du pied.
Mon inquiétude, c'était ma solvabilité personnelle. Pour faire face à mes engagements, reprendre les cinquante cabanes, apporter les liquidités nécessaires pour payer les nouveaux salaires des singes et chimpanzés, financer les projets toujours croissants de Jacques et les inventions de Johnny, j'avais dû doubler le nombre de billes en circulation. Personnellement, cela ne me gênait pas, du moins tant que personne ne le savait. Sinon, je craignais un vent de panique. Je savais avoir des ennemis qui pourraient alors se faire un plaisir de lancer leur propre monnaie. Ce serait la catastrophe.
Pour l'instant, tout se passait bien. Il fallait que je fasse le point avec Thomas, qui ,depuis sa position stratégique à la tête de l'Écho du Monde et d'Internex, était au courant de tout. En plus, je devais lui parler de l'accord passé avec Isabella sur la page gratuite et sur le lien entre Internex et Intervox.
« Ne t'inquiète pas, me rassura-t-il. Rien ne filtre sur les billes. Pour la page gratuite, c'est notée. Mais c'est à la collectivité de prendre en charge le manque à gagner. Pour l'accord entre Internex et Intervox, je suis un peu à l'origine de l'idée : Internex est plus rapide quand le soleil brille, et Intervox fonctionne même par mauvais temps ou la nuit. En plus le trafic explose. Donc oui, je suis très favorable à cet accord… si je suis le président du regroupement bien sûr.
- OK c'est noté pour le dernier point. Si c'est possible, oui. Mais je ne vais pas en faire un point dur dans la négociation. Une coprésidence est acceptable.
- Comme tu veux… »
Un mois plus tard, l'accord était signé, les cabanes reprises par Isabella, les réseaux regroupés sous une coprésidence (Elle n'avait pas voulu que le tout soit dirigé par Thomas seul.).
Enfin, elle utilisa pour la 1ère fois la page de publicité gratuite. Un seul grand titre occupait la page, et, des deux côtés du bout du monde, on pouvait lire : « Vous ne vous ennuierez plus jamais : les maisons du plaisir sont nées »
(à suivre)
(1) Dans un élan de mégalomanie, Christina avait fait rebaptisé le réseau de cabanes dont elle était à la tête : Christoville. Était-ce pour impressionner Johnny ?
29 déc. 2009
POURQUOI ISABELLA S’INTÉRESSE-T-ELLE À DES CABANES SANS VALEUR ?
Histoire de caverne (Saison 4 – Épisode 2)
Coco, chef des gorilles et président de la toute nouvelle CGC (confédération des gorilles et des chimpanzés) déguste son succès, mais commence à se demander ce qu'il va faire de son temps et de son argent. De mon côté, j'ai mandat pour ouvrir des discussions avec Isabella et voir comment l'impliquer dans nos affaires.
« Cela fait bien longtemps, Isabella, commença Jordana.
- Oui, très exactement depuis que tu as choisi de préférer Jacques et de m'abandonner, répondit-elle »
Silence glacial. Je savais que je n'aurais pas dû venir avec Jordana, mais elle avait su s'imposer.
« Nous ne sommes pas là pour parler du passé, Isabella, lui dis-je. Quoiqu'il ait pu se passer, cela ne doit pas nous empêcher de ne pas nous entredéchirer.
- Peut-être… Que proposes-tu au juste ?
- Tout et rien. Tout, parce que nous voulons vraiment trouver une solution. Quand je dis « nous », je parle aussi au nom de Christina. Rien parce que je ne suis pas venu avec un schéma préétabli, mais avec une offre de collaboration, ouverte et sans limites. Je te crois beaucoup trop intelligente pour entrer dans un schéma préétabli. Tu es trop imaginative et épris de liberté pour cela. Au fait, bravo pour ton double coup : m'obliger à reprendre les cinquante cabanes au moment où, à cause de la grève, tous les coûts salariaux explosent, bravo !
- Merci, je savais que tu apprécierais… Mais ce n'est qu'un début… Imagine, par exemple, que je répande l'information que tu es en train de multiplier les billes. Car c'est bien ce que tu es en train de faire pour faire face à tous ces surcoûts non prévus, non ? Donc, imagine que je répande ce bruit et que je suggère à tous de demander à ce que l'on reprenne leurs billes…
- Arrête. C'est pour cela que je suis là. Pour te faire comprendre que tu ne peux pas jouer contre nous comme cela. Qu'à trop remonter les chimpanzés et les gorilles contre les humains, c'est aussi contre toi que tu les remontes. Fais attention à l'effet boomerang. D'autant plus que moi, je ne t'ai jamais voulu de mal.
- Oui, peut-être.
- Allez, je suis sûr que tu as réfléchi et que tu sais ce que tu veux faire.
- Effectivement.
- Alors, dis-moi.
- Non, je ne veux pas te le dire tout de suite. Je vais juste te dire ce que je veux, mais pas ce que je vais faire. Je n'ai pas assez confiance. Pas encore assez.
- OK. Que veux-tu ?
- L'usage de vingt des cinquante cabanes que tu as récupérées, et une option sur les trente autre, option valable pendant six mois. Pour la location des vingt premières, la moitié du prix du marché (1), ce payable annuellement, en fin d'année ; pour le reste, le prix du marché. Une pleine page de publicité dans l'Écho du monde, gratuite pendant un an, page garantie dans chaque numéro. Un accord d'utilisation croisé entre mon réseau de relais sonores, l'Intervox, et ton réseau Internex. Ils sont complémentaires.
- Je ne peux pas te répondre immédiatement, il faut que je consulte mes associés. Mais cela me paraît jouable. »
Pendant tout notre échange, Jordana n'avait rien dit, semblant même regretter d'être venue. Là, elle ne put s'empêcher de marmonner :
« Vouloir récupérer vingt cabanes sans valeur, cela n'a aucun sens.
- Tu verras bientôt si cela n'a aucun sens, Jordie, lui répondit-elle en la fixant »
Ce fut à mon tour de regarder Jordana. Pourquoi Isabelle l'avait-elle appelée Jordie ? Qu'est-ce qui se tramait ? Sans savoir pourquoi, je n'aimais pas trop cela…
(à suivre)
(1) Le prix du marché est fixé par la société d'études et de cotation de Jojo et Paulo. Ils garantissent la sincérité des informations. Tout est basé sur une mesure quotidienne de toutes les transactions. Pour plus d'information, se référer au numéro 212 de l'Écho des Cavernes (prédécesseur de l'Écho du Monde), dans lequel Paulo expose en détail le fonctionnement de tous les indicateurs publiés.
Coco, chef des gorilles et président de la toute nouvelle CGC (confédération des gorilles et des chimpanzés) déguste son succès, mais commence à se demander ce qu'il va faire de son temps et de son argent. De mon côté, j'ai mandat pour ouvrir des discussions avec Isabella et voir comment l'impliquer dans nos affaires.
« Cela fait bien longtemps, Isabella, commença Jordana.
- Oui, très exactement depuis que tu as choisi de préférer Jacques et de m'abandonner, répondit-elle »
Silence glacial. Je savais que je n'aurais pas dû venir avec Jordana, mais elle avait su s'imposer.
« Nous ne sommes pas là pour parler du passé, Isabella, lui dis-je. Quoiqu'il ait pu se passer, cela ne doit pas nous empêcher de ne pas nous entredéchirer.
- Peut-être… Que proposes-tu au juste ?
- Tout et rien. Tout, parce que nous voulons vraiment trouver une solution. Quand je dis « nous », je parle aussi au nom de Christina. Rien parce que je ne suis pas venu avec un schéma préétabli, mais avec une offre de collaboration, ouverte et sans limites. Je te crois beaucoup trop intelligente pour entrer dans un schéma préétabli. Tu es trop imaginative et épris de liberté pour cela. Au fait, bravo pour ton double coup : m'obliger à reprendre les cinquante cabanes au moment où, à cause de la grève, tous les coûts salariaux explosent, bravo !
- Merci, je savais que tu apprécierais… Mais ce n'est qu'un début… Imagine, par exemple, que je répande l'information que tu es en train de multiplier les billes. Car c'est bien ce que tu es en train de faire pour faire face à tous ces surcoûts non prévus, non ? Donc, imagine que je répande ce bruit et que je suggère à tous de demander à ce que l'on reprenne leurs billes…
- Arrête. C'est pour cela que je suis là. Pour te faire comprendre que tu ne peux pas jouer contre nous comme cela. Qu'à trop remonter les chimpanzés et les gorilles contre les humains, c'est aussi contre toi que tu les remontes. Fais attention à l'effet boomerang. D'autant plus que moi, je ne t'ai jamais voulu de mal.
- Oui, peut-être.
- Allez, je suis sûr que tu as réfléchi et que tu sais ce que tu veux faire.
- Effectivement.
- Alors, dis-moi.
- Non, je ne veux pas te le dire tout de suite. Je vais juste te dire ce que je veux, mais pas ce que je vais faire. Je n'ai pas assez confiance. Pas encore assez.
- OK. Que veux-tu ?
- L'usage de vingt des cinquante cabanes que tu as récupérées, et une option sur les trente autre, option valable pendant six mois. Pour la location des vingt premières, la moitié du prix du marché (1), ce payable annuellement, en fin d'année ; pour le reste, le prix du marché. Une pleine page de publicité dans l'Écho du monde, gratuite pendant un an, page garantie dans chaque numéro. Un accord d'utilisation croisé entre mon réseau de relais sonores, l'Intervox, et ton réseau Internex. Ils sont complémentaires.
- Je ne peux pas te répondre immédiatement, il faut que je consulte mes associés. Mais cela me paraît jouable. »
Pendant tout notre échange, Jordana n'avait rien dit, semblant même regretter d'être venue. Là, elle ne put s'empêcher de marmonner :
« Vouloir récupérer vingt cabanes sans valeur, cela n'a aucun sens.
- Tu verras bientôt si cela n'a aucun sens, Jordie, lui répondit-elle en la fixant »
Ce fut à mon tour de regarder Jordana. Pourquoi Isabelle l'avait-elle appelée Jordie ? Qu'est-ce qui se tramait ? Sans savoir pourquoi, je n'aimais pas trop cela…
(à suivre)
(1) Le prix du marché est fixé par la société d'études et de cotation de Jojo et Paulo. Ils garantissent la sincérité des informations. Tout est basé sur une mesure quotidienne de toutes les transactions. Pour plus d'information, se référer au numéro 212 de l'Écho des Cavernes (prédécesseur de l'Écho du Monde), dans lequel Paulo expose en détail le fonctionnement de tous les indicateurs publiés.
28 déc. 2009
QUE FAIRE DE SON TEMPS LIBRE ET DE SON ARGENT ?
Histoire de caverne (Saison 4 – Épisode 1)
Rappel (rapide) des saisons précédentes : Nous sommes à l'époque lointaine des cavernes. Pendant longtemps, moi, Bobby le financier, et mes amis et autrefois rivaux – Johnny, le roi de l'industrie et de l'invention, Jojo le devin et Paulo le magicien, les deux rois de la prévision –, avions régné dans le monde des cavernes. Mais avec l'arrivée de Jordana et la découverte de Christina, la chef d'un monde inconnu au-delà du bout du bout du monde, c'est-à-dire de l'autre côté des montagnes, nous avons dû partager notre pouvoir. Cela ne s'est pas fait sans heurs : un moment grâce à la sophistication des modèles prévisionnels construits par mon fils, Thomas, nous avons crû pouvoir les battre. Mais nous avions dû nous rendre à l'évidence, seule, la collaboration était possible. Elle fut fructueuse, et finalement, les affaires de chacun se sont développées. Tout serait donc parfait si Isabella, une laissée pour compte de notre cartel, n'avait décidé de mettre à mal notre système. Elle venait de mener une attaque simultanée sur deux fronts : elle venait de faire exploser la bulle de spéculation immobilière, m'obligeant à me retrouver propriétaire d'une multitude de cabanes sans valeur ; elle avait poussé les chimpanzés et les gorilles, maillon indispensable pour le bon fonctionnement des piles de cabanes (ils assurent la montée et la descente des habitants, comme de tous leurs colis ou paquets), à se mettre en grève. Ils venaient d'obtenir une augmentation substantielle. (Pour plus de détails vous pouvez lire la saison 1, la saison 2 et la saison 3 – pour cela, cliquez sur le lien de la saison correspondante).
Coco était mort de rire : Il n'en revenait pas du tour qu'il venait de jouer à Christina, et à ce Johnny qui ne la quittait plus guère. Coco était, comme il aimait à la répéter, le chef des gorilles. Si jamais, l'un de ses congénères levait un peu trop son cri ou bombait un peu trop fort le torse, Coco avait vite fait de le remettre en place. Être chef était une affaire de famille : on était chef de père en fils dans la sienne.
Quand il repensait à tout ce qui s'était passé en quelques mois, il n'en revenait pas. Il n'y a encore pas longtemps, lui et les siens vivaient durement dans la forêt. La survie supposait un combat quotidien.
Puis était arrivé Johnny, qui, très vite, s'était mis en tête d'empiler les cabanes, les unes au-dessus des autres. Il avait eu besoin des services des gorilles. Bien sûr, Coco n'était pas dupe, Johnny avait cherché à les exploiter. Mais c'était déjà mieux que la situation précédente : en montant ou descendant quelques humains par jours, en assurant en complément le service de livraison, les gorilles avaient largement de quoi vivre.
Avec son importation de chimpanzés (voir « Comment casser le pouvoir des gorilles ? »), Johnny lui avait compliqué la tâche : moins facile de peser dans les négociations avec ces demi-portions toujours prêts à travailler beaucoup plus pour ne gagner qu'un tout petit peu plus en échange.
Mais c'était maintenant terminé grâce à l'intelligence d'Isabella. Géniale, cette femme ! Avoir réussi à nous mettre d'accord avec les chimpanzés, avoir mis en place la CGC – Confédération des gorilles et des chimpanzés -, avoir créé ce réseau de communication entre les deux bouts du monde (en parallèle du réseau fonctionnant grâce à des signaux lumineux mis en place par Bobby et Johnny, la CGC a son propre réseau reposant lui sur des signaux sonores relayés par des chimpanzés), tout cela avait permis la grève générale.
Au bout d'un conflit finalement relativement court – seulement un mois -, ils avaient eu gain de cause sur toutes leurs revendications : deux jours de repos par semaine, deux semaines de congés payés par an, augmentation du salaire de 20%. Comme Coco venait en plus d'être élu Président de la CGC, comme il touchait un pourcentage sur tous les gains des gorilles, c'était royal !
D'où l'hilarité actuelle de Coco. Mais, très vite, il eut comme un vide dans la tête : qu'allait-il bien pouvoir de ce temps libre et de tout cet argent ? Les bananes pourrissaient déjà dans ses placards. Alors que faire ?
A l'autre bout du monde, dans ma grande caverne, je tenais un conseil de guerre.
« J'ai rendez-vous dans une heure avec Isabella, disais-je. Donc, nous sommes bien d'accord sur la marche à suivre.
- Oui, répondirent en cœur Jojo et Paulo qui se trouvaient à mes cotés. »
Johnny, lui, n'était pas avec nous : il était avec Christina au milieu des arbres. Il fallut attendre que ma question arrive jusqu'à lui grâce à Internex (c'est le nom de baptême que mon fils Thomas avait donné à notre réseau de signaux lumineux, réseau dont il assurait la direction depuis qu'il avait pris la présidence de l'Écho du monde, mon groupe de presse et de communication. Personne n'avait bien compris pourquoi il avait choisi ce nom – lui non plus –, mais comme cela n'avait aucune importance, nous n'allions pas le contrarier pour si peu). Puis sa réponse prit le chemin inverse. Cinq minutes en tout furent nécessaires, un temps ridiculement court.
« OK pour nous aussi, répondit Johnny. Simplement peux-tu nous reconfirmer les termes de la plateforme de discussion.
- L'idée est simple : faire rentrer d'une façon ou d'une autre Isabella dans nos affaires. Tant qu'elle restera à l'extérieur, elle sera une source de problèmes. Or j'ai déjà assez de mal avec toutes les cabanes que j'ai sur les bras, et la multiplication des billes. Je vais voir si je sens une ouverture de son côté. »
Au fur et à mesure de mes paroles, un chimpanzé émettait un signal lumineux qui partait dans le ciel. Heureusement, le soleil brillait, sinon nous aurions dû annuler notre réunion. Pas de soleil, pas d'Internex en état de marche. Pas d'Internex, pas de communication avec Johnny et Christina.
« Et je viens avec toi, compléta Jordana »
« Oui, et cela ne me plaît guère, pensai-je ». Je n'avais pas pu faire autrement que d'accepter sa présence…
(à suivre)
Rappel (rapide) des saisons précédentes : Nous sommes à l'époque lointaine des cavernes. Pendant longtemps, moi, Bobby le financier, et mes amis et autrefois rivaux – Johnny, le roi de l'industrie et de l'invention, Jojo le devin et Paulo le magicien, les deux rois de la prévision –, avions régné dans le monde des cavernes. Mais avec l'arrivée de Jordana et la découverte de Christina, la chef d'un monde inconnu au-delà du bout du bout du monde, c'est-à-dire de l'autre côté des montagnes, nous avons dû partager notre pouvoir. Cela ne s'est pas fait sans heurs : un moment grâce à la sophistication des modèles prévisionnels construits par mon fils, Thomas, nous avons crû pouvoir les battre. Mais nous avions dû nous rendre à l'évidence, seule, la collaboration était possible. Elle fut fructueuse, et finalement, les affaires de chacun se sont développées. Tout serait donc parfait si Isabella, une laissée pour compte de notre cartel, n'avait décidé de mettre à mal notre système. Elle venait de mener une attaque simultanée sur deux fronts : elle venait de faire exploser la bulle de spéculation immobilière, m'obligeant à me retrouver propriétaire d'une multitude de cabanes sans valeur ; elle avait poussé les chimpanzés et les gorilles, maillon indispensable pour le bon fonctionnement des piles de cabanes (ils assurent la montée et la descente des habitants, comme de tous leurs colis ou paquets), à se mettre en grève. Ils venaient d'obtenir une augmentation substantielle. (Pour plus de détails vous pouvez lire la saison 1, la saison 2 et la saison 3 – pour cela, cliquez sur le lien de la saison correspondante).
Coco était mort de rire : Il n'en revenait pas du tour qu'il venait de jouer à Christina, et à ce Johnny qui ne la quittait plus guère. Coco était, comme il aimait à la répéter, le chef des gorilles. Si jamais, l'un de ses congénères levait un peu trop son cri ou bombait un peu trop fort le torse, Coco avait vite fait de le remettre en place. Être chef était une affaire de famille : on était chef de père en fils dans la sienne.
Quand il repensait à tout ce qui s'était passé en quelques mois, il n'en revenait pas. Il n'y a encore pas longtemps, lui et les siens vivaient durement dans la forêt. La survie supposait un combat quotidien.
Puis était arrivé Johnny, qui, très vite, s'était mis en tête d'empiler les cabanes, les unes au-dessus des autres. Il avait eu besoin des services des gorilles. Bien sûr, Coco n'était pas dupe, Johnny avait cherché à les exploiter. Mais c'était déjà mieux que la situation précédente : en montant ou descendant quelques humains par jours, en assurant en complément le service de livraison, les gorilles avaient largement de quoi vivre.
Avec son importation de chimpanzés (voir « Comment casser le pouvoir des gorilles ? »), Johnny lui avait compliqué la tâche : moins facile de peser dans les négociations avec ces demi-portions toujours prêts à travailler beaucoup plus pour ne gagner qu'un tout petit peu plus en échange.
Mais c'était maintenant terminé grâce à l'intelligence d'Isabella. Géniale, cette femme ! Avoir réussi à nous mettre d'accord avec les chimpanzés, avoir mis en place la CGC – Confédération des gorilles et des chimpanzés -, avoir créé ce réseau de communication entre les deux bouts du monde (en parallèle du réseau fonctionnant grâce à des signaux lumineux mis en place par Bobby et Johnny, la CGC a son propre réseau reposant lui sur des signaux sonores relayés par des chimpanzés), tout cela avait permis la grève générale.
Au bout d'un conflit finalement relativement court – seulement un mois -, ils avaient eu gain de cause sur toutes leurs revendications : deux jours de repos par semaine, deux semaines de congés payés par an, augmentation du salaire de 20%. Comme Coco venait en plus d'être élu Président de la CGC, comme il touchait un pourcentage sur tous les gains des gorilles, c'était royal !
D'où l'hilarité actuelle de Coco. Mais, très vite, il eut comme un vide dans la tête : qu'allait-il bien pouvoir de ce temps libre et de tout cet argent ? Les bananes pourrissaient déjà dans ses placards. Alors que faire ?
A l'autre bout du monde, dans ma grande caverne, je tenais un conseil de guerre.
« J'ai rendez-vous dans une heure avec Isabella, disais-je. Donc, nous sommes bien d'accord sur la marche à suivre.
- Oui, répondirent en cœur Jojo et Paulo qui se trouvaient à mes cotés. »
Johnny, lui, n'était pas avec nous : il était avec Christina au milieu des arbres. Il fallut attendre que ma question arrive jusqu'à lui grâce à Internex (c'est le nom de baptême que mon fils Thomas avait donné à notre réseau de signaux lumineux, réseau dont il assurait la direction depuis qu'il avait pris la présidence de l'Écho du monde, mon groupe de presse et de communication. Personne n'avait bien compris pourquoi il avait choisi ce nom – lui non plus –, mais comme cela n'avait aucune importance, nous n'allions pas le contrarier pour si peu). Puis sa réponse prit le chemin inverse. Cinq minutes en tout furent nécessaires, un temps ridiculement court.
« OK pour nous aussi, répondit Johnny. Simplement peux-tu nous reconfirmer les termes de la plateforme de discussion.
- L'idée est simple : faire rentrer d'une façon ou d'une autre Isabella dans nos affaires. Tant qu'elle restera à l'extérieur, elle sera une source de problèmes. Or j'ai déjà assez de mal avec toutes les cabanes que j'ai sur les bras, et la multiplication des billes. Je vais voir si je sens une ouverture de son côté. »
Au fur et à mesure de mes paroles, un chimpanzé émettait un signal lumineux qui partait dans le ciel. Heureusement, le soleil brillait, sinon nous aurions dû annuler notre réunion. Pas de soleil, pas d'Internex en état de marche. Pas d'Internex, pas de communication avec Johnny et Christina.
« Et je viens avec toi, compléta Jordana »
« Oui, et cela ne me plaît guère, pensai-je ». Je n'avais pas pu faire autrement que d'accepter sa présence…
(à suivre)
25 déc. 2009
« AU LIEU DE CHERCHER À ÊTRE RECONNU, IL FAUT CHERCHER À ÊTRE CONNU »
Le bonheur est-il à portée de main ?
Quel meilleur thème pour le jour de Noël qu'un patchwork issu de l'excellent livre de Tal Ben-Shahar, « L'apprentissage du bonheur » ?
Sur les fonceurs, les viveurs et les défaitistes
« Ce qui singularise les fonceurs, c'est qu'ils sont incapables de prendre plaisir à ce qu'ils font – et croient constamment qu'ils seront heureux le jour où ils atteindront un objectif donné. (…) Nous apprenons à nous concentrer en permanence sur un but futur, et non sur le présent, et toute notre vie nous courons après un avenir qui toujours nous échappe. (…) En confondant soulagement et bonheur, le fonceur continue à courir après les buts qu'il s'est fixés comme si le simple fait de les atteindre un jour était une condition de son bonheur. »
« Sans but à long terme, sans défi à surmonter, la vie perd son sens. »
« L'illusion du fonceur est de croire que le bonheur durable viendra quand il aura atteint sa destination. Celle du viveur, de n'accorder d'importance qu'au chemin. Quant au défaitiste, ayant renoncé tant au but qu'au parcours c'est un déçu de la vie. Le premier est l'esclave de l'avenir, le deuxième celui du moment, et le troisième celui du passé. »
Sur le bonheur
« Ma propre définition du bonheur est « la sensation globale de plaisir chargé de sens ». L'individu heureux éprouve des sentiments positifs tout en trouvant une raison d'être à son existence. »
« Comme le disait George Bernard Shaw, « c'est cela, la joie véritable, dans la vie : être au service d'un dessein que l'on considère soi-même comme supérieur » »
« Le bienheureux remet en question la formule « On n'a rien sans rien » car il prend plaisir au processus engagé et, en se consacrant à un dessein auquel il croît, parvient à un meilleur résultat. »
Sur les objectifs
« Pour cela, nous devons discerner et poursuivre des buts à la fois porteurs de sens et de plaisir. »
Citation de Goethe : « Quoi que vous puissiez ou que vous rêviez de faire, faites-le. L'audace a du génie, de la puissance et de la magie. »
« Tandis que si on s'est fixé une destination, si on sait plus ou moins où on va, on est libre de concentrer son attention sur une tâche : profiter au maximum de l'endroit où on se trouve. »
Sur l'éducation
« Ce paradoxe (nous prétendons préférer les loisirs, mais c'est dans notre métier que nous passons par le plus d'expériences optimales) est à la fois insolite et révélateur. Il laisse supposer que le préjugé à l'égard du travail, l'assimilation effort/souffrance et oisiveté/plaisir est si profondément enraciné en nous qu'il déforme la perception de ce que nous vivons en réalité. »
« Comme Csikszentmihalyi le souligne : « Les adultes contribuent à induire (les jeunes) en erreur. Ils donnent aux tâches sérieuses des allures de corvées abrutissantes et pénibles, et font passer les activités superficielles pour excitantes et faciles. »
Sur le sentiment amoureux
« Au lieu de chercher à être reconnu, entériné – au lieu de quêter l'approbation, les félicitations de l'autre –, il faut éprouver le désir d'être connu. »
« Beaucoup de gens pensent que pour vivre une union heureuse il faut trouver le bon partenaire. En fait, l'élément le plus important, le plus délicat à trouver n'est pas là ; ce qu'il faut, c'est cultiver la relation que l'on a choisie. »
Pendant les jours à venir, et ce jusqu'aux premiers jours de janvier, je vais publier la saison 4 de ma « saga préhistorique ». Le blog sera de retour sous sa forme habituelle le 11 janvier.
Avec un peu d'avance, bonne année à tous !
Quel meilleur thème pour le jour de Noël qu'un patchwork issu de l'excellent livre de Tal Ben-Shahar, « L'apprentissage du bonheur » ?
Sur les fonceurs, les viveurs et les défaitistes
« Ce qui singularise les fonceurs, c'est qu'ils sont incapables de prendre plaisir à ce qu'ils font – et croient constamment qu'ils seront heureux le jour où ils atteindront un objectif donné. (…) Nous apprenons à nous concentrer en permanence sur un but futur, et non sur le présent, et toute notre vie nous courons après un avenir qui toujours nous échappe. (…) En confondant soulagement et bonheur, le fonceur continue à courir après les buts qu'il s'est fixés comme si le simple fait de les atteindre un jour était une condition de son bonheur. »
« Sans but à long terme, sans défi à surmonter, la vie perd son sens. »
« L'illusion du fonceur est de croire que le bonheur durable viendra quand il aura atteint sa destination. Celle du viveur, de n'accorder d'importance qu'au chemin. Quant au défaitiste, ayant renoncé tant au but qu'au parcours c'est un déçu de la vie. Le premier est l'esclave de l'avenir, le deuxième celui du moment, et le troisième celui du passé. »
Sur le bonheur
« Ma propre définition du bonheur est « la sensation globale de plaisir chargé de sens ». L'individu heureux éprouve des sentiments positifs tout en trouvant une raison d'être à son existence. »
« Comme le disait George Bernard Shaw, « c'est cela, la joie véritable, dans la vie : être au service d'un dessein que l'on considère soi-même comme supérieur » »
« Le bienheureux remet en question la formule « On n'a rien sans rien » car il prend plaisir au processus engagé et, en se consacrant à un dessein auquel il croît, parvient à un meilleur résultat. »
Sur les objectifs
« Pour cela, nous devons discerner et poursuivre des buts à la fois porteurs de sens et de plaisir. »
Citation de Goethe : « Quoi que vous puissiez ou que vous rêviez de faire, faites-le. L'audace a du génie, de la puissance et de la magie. »
« Tandis que si on s'est fixé une destination, si on sait plus ou moins où on va, on est libre de concentrer son attention sur une tâche : profiter au maximum de l'endroit où on se trouve. »
Sur l'éducation
« Ce paradoxe (nous prétendons préférer les loisirs, mais c'est dans notre métier que nous passons par le plus d'expériences optimales) est à la fois insolite et révélateur. Il laisse supposer que le préjugé à l'égard du travail, l'assimilation effort/souffrance et oisiveté/plaisir est si profondément enraciné en nous qu'il déforme la perception de ce que nous vivons en réalité. »
« Comme Csikszentmihalyi le souligne : « Les adultes contribuent à induire (les jeunes) en erreur. Ils donnent aux tâches sérieuses des allures de corvées abrutissantes et pénibles, et font passer les activités superficielles pour excitantes et faciles. »
Sur le sentiment amoureux
« Au lieu de chercher à être reconnu, entériné – au lieu de quêter l'approbation, les félicitations de l'autre –, il faut éprouver le désir d'être connu. »
« Beaucoup de gens pensent que pour vivre une union heureuse il faut trouver le bon partenaire. En fait, l'élément le plus important, le plus délicat à trouver n'est pas là ; ce qu'il faut, c'est cultiver la relation que l'on a choisie. »
*
* *
Joyeux Noël à tous les lecteurs de mon blog !* *
Pendant les jours à venir, et ce jusqu'aux premiers jours de janvier, je vais publier la saison 4 de ma « saga préhistorique ». Le blog sera de retour sous sa forme habituelle le 11 janvier.
Avec un peu d'avance, bonne année à tous !
24 déc. 2009
JE N’AIME PAS LES BOUTEILLES DE VIN ANONYMES
Nous avons de plus en plus besoin d'enracinements
Quand j'ouvre une bouteille de vin – ce qui m'arrive assez régulièrement… –, je n'aime pas que ce soit une bouteille anonyme. Qu'est-ce que j'entends par anonyme ? Une bouteille achetée dans un magasin, un vin dont je ne connais personnellement ni le terroir, ni le vigneron.
La plupart du temps, la bouteille que j'ouvre, je l'ai achetée sur place, chez son producteur. Elle a alors un tout autre parfum : elle est habitée du souvenir du moment passé dans la cave, du regard de celui qui a élevé ce vin, du soleil et du paysage qui l'ont vu grandir. (La photo de l'étiquette ci-jointe est celle d'un de mes vins préférés, un côte du Rhône produit à proximité de ma maison en Provence. Si vous cliquez sur l'image, vous aurez accès au site de ce producteur)
Plus nous sommes connectés tous ensemble, plus les réseaux d'internet et de la téléphone mobile nous permettent de nous abstraire de l'endroit physique où nous nous trouvons, plus nous avons besoin de repères et d'enracinement : le vin que je vais boire, mon corps saura d'où il vient. C'est rassurant…
Quand j'ouvre une bouteille de vin – ce qui m'arrive assez régulièrement… –, je n'aime pas que ce soit une bouteille anonyme. Qu'est-ce que j'entends par anonyme ? Une bouteille achetée dans un magasin, un vin dont je ne connais personnellement ni le terroir, ni le vigneron.
La plupart du temps, la bouteille que j'ouvre, je l'ai achetée sur place, chez son producteur. Elle a alors un tout autre parfum : elle est habitée du souvenir du moment passé dans la cave, du regard de celui qui a élevé ce vin, du soleil et du paysage qui l'ont vu grandir. (La photo de l'étiquette ci-jointe est celle d'un de mes vins préférés, un côte du Rhône produit à proximité de ma maison en Provence. Si vous cliquez sur l'image, vous aurez accès au site de ce producteur)
Plus nous sommes connectés tous ensemble, plus les réseaux d'internet et de la téléphone mobile nous permettent de nous abstraire de l'endroit physique où nous nous trouvons, plus nous avons besoin de repères et d'enracinement : le vin que je vais boire, mon corps saura d'où il vient. C'est rassurant…
23 déc. 2009
L’ABSURDITÉ DES « TEMPS MODERNES » EST AUJOURD’HUI SOUVENT DANS LES BUREAUX
Quand je me trouve dans des lieux comme des services administratifs ou des centres d'appel, je ne peux m'empêcher de penser au film de Charlie Chaplin, les Temps modernes.
Dans ce film, on voyait Charlot être prisonnier du rythme des machines qui l'entouraient et l'asservissaient : le développement de la mécanisation et la mise en place du travail à la chaîne grâce au taylorisme avaient abouti à cette déshumanisation du travail en usine. L'insertion de l'électronique et de l'informatique dans les machines couplée avec la formation et l'enrichissement des tâches, ont permis progressivement de donner de la souplesse et de supprimer ces chaînes asservissantes. Plus personne ne pense aux Temps modernes qu'il regarde une usine actuelle : l'homme a été remis au cœur du processus de production.
L'arrivée des technologies de l'information dans les bureaux est un peu de même nature que la mécanisation initiale dans les usines : on a taylorisé le travail administratif, la machine – ici le système d'information – étant au cœur et les hommes à son service. L'exemple le plus criant est celui des centres d'appel : le système choisit vers qui envoyer l'appel, le système propose en temps réel un script que l'agent doit suivre dans sa discussion avec l'appelant, le système surveille tous les paramètres et établit automatiquement rapport et alertes…
Dans les Temps modernes, c'était le corps de Charlot qui était mis à mal : soumis au rythme inexorable des machines, il pouvait penser à autre chose, car le système ne lui demandait pas de penser – surtout pas ! –, mais juste de suivre mécaniquement ce que lui imposait la machine. Dans les bureaux d'aujourd'hui, on ne peut plus penser à autre chose, car c'est l'activité cérébrale qui est prise dans l'étau de cette taylorisation intellectuelle.
Dans les usines du siècle dernier, c'étaient les corps qui avaient des accidents. Dans les bureaux d'aujourd'hui, ce sont les cerveaux qui en ont de plus en plus. Tout témoigne de cette dégradation.
« Heureusement », cette mécanisation administrative montre ses limites, même par rapport à son objectif initial : plus elle se développe, plus la relation client devient mécanique et de moindre qualité. Les derniers développements des technologies de l'information permettent aussi de remettre les hommes au cœur du système, pour peu qu'on le veuille vraiment.
Il y a urgence…
22 déc. 2009
S’ORGANISER SUR LE PIRE POUR N’AVOIR PLUS QUE DES BONNES NOUVELLES
Si je choisis un scénario médiant, une fois sur deux, j'aurai à faire face à un débordement
« Cela fait plus de quinze minutes que je t'attends, lui dis-je. On avait bien pourtant prévu de se retrouver à 11h, non ? Nous allons être en retard pour notre rendez-vous.
- Désolé, mais il y a eu plus d'embouteillages que je ne pensais, me répondit-il.
- Une question : combien de temps tu pensais mettre entre ton rendez-vous précédent et ici ?
- Trente minutes. Pourquoi me demandes-tu cela ?
- Tu vas voir. Et donc tu es parti à 10h30 ?
- Oui, puisque je pensais mettre trente minutes.
- Mais en fait, tu n'es pas vraiment sûr de mettre trente minutes. La preuve, tu es en retard… Comme d'habitude, d'ailleurs… Donc quand tu estimais le temps à trente minutes, tu penses que c'était plus ou moins combien de minutes.
- Je ne sais pas exactement. Je dirais quinze, vingt minutes.
- Donc si tu pars, trente minutes avant, tu as donc systématiquement une chance sur deux d'être en retard.
- Vu comme cela, oui.
- Donc à partir de maintenant, quand tu choisiras ton heure de départ, tu tiendras compte de l'incertitude : si tu penses que la durée d'un trajet est de trente minutes plus ou moins quinze minutes, tu pars quarante-cinq minutes avant ton rendez-vous. Comme cela, tu seras, sauf accident exceptionnel, sûr d'être à l'heure. Souvent tu seras en avance, mais tu ne feras plus porter le poids de l'incertitude sur les autres. Ce sera l'occasion de faire une dernière préparation de ton rendez-vous… »
Cette anecdote me vient d'une histoire réelle avec un collaborateur qui n'arrivait jamais à l'heure.
Comme lui, souvent, nous avons tendance à nous organiser sur un scénario médiant : aussi une fois sur deux, nous sommes pris de court, débordés par la situation. Ceci est vrai pour la gestion du temps, mais aussi pour la gestion de la trésorerie, l'organisation d'un projet complexe,…
Pour garder la maîtrise du bon déroulement, il faut chercher à « mettre l'incertitude à l'intérieur » de son calcul, en s'organisant à partir de la pire des hypothèses. On n'aura ainsi plus qu'à gérer « des bonnes nouvelles ».
C'est plus facile, non ?
« Cela fait plus de quinze minutes que je t'attends, lui dis-je. On avait bien pourtant prévu de se retrouver à 11h, non ? Nous allons être en retard pour notre rendez-vous.
- Désolé, mais il y a eu plus d'embouteillages que je ne pensais, me répondit-il.
- Une question : combien de temps tu pensais mettre entre ton rendez-vous précédent et ici ?
- Trente minutes. Pourquoi me demandes-tu cela ?
- Tu vas voir. Et donc tu es parti à 10h30 ?
- Oui, puisque je pensais mettre trente minutes.
- Mais en fait, tu n'es pas vraiment sûr de mettre trente minutes. La preuve, tu es en retard… Comme d'habitude, d'ailleurs… Donc quand tu estimais le temps à trente minutes, tu penses que c'était plus ou moins combien de minutes.
- Je ne sais pas exactement. Je dirais quinze, vingt minutes.
- Donc si tu pars, trente minutes avant, tu as donc systématiquement une chance sur deux d'être en retard.
- Vu comme cela, oui.
- Donc à partir de maintenant, quand tu choisiras ton heure de départ, tu tiendras compte de l'incertitude : si tu penses que la durée d'un trajet est de trente minutes plus ou moins quinze minutes, tu pars quarante-cinq minutes avant ton rendez-vous. Comme cela, tu seras, sauf accident exceptionnel, sûr d'être à l'heure. Souvent tu seras en avance, mais tu ne feras plus porter le poids de l'incertitude sur les autres. Ce sera l'occasion de faire une dernière préparation de ton rendez-vous… »
Cette anecdote me vient d'une histoire réelle avec un collaborateur qui n'arrivait jamais à l'heure.
Comme lui, souvent, nous avons tendance à nous organiser sur un scénario médiant : aussi une fois sur deux, nous sommes pris de court, débordés par la situation. Ceci est vrai pour la gestion du temps, mais aussi pour la gestion de la trésorerie, l'organisation d'un projet complexe,…
Pour garder la maîtrise du bon déroulement, il faut chercher à « mettre l'incertitude à l'intérieur » de son calcul, en s'organisant à partir de la pire des hypothèses. On n'aura ainsi plus qu'à gérer « des bonnes nouvelles ».
C'est plus facile, non ?
21 déc. 2009
« LE PLUS DIFFICILE EN PÉRIODE TROUBLE N’EST PAS DE FAIRE SON DEVOIR, MAIS DE LE CONNAÎTRE »
Patchwork issu de La méthode 6. Éthique d'Edgar Morin
Le vivant se nourrit de la mort
« Ainsi en est-il des écosystèmes qui « vivent la mort ». Ainsi en est-il de nous autres animaux, mammifères, primates, humains, qui vivons par régénération permanente de nos cellules et molécules à partir de leur mort et de leur destruction. Ainsi en est-il de nos sociétés qui se régénèrent en éduquant les générations nouvelles tandis que meurent les anciennes. « Vivre de mort, mourir de vie », avait énoncé Héraclite. »
« Le vie lutte cruellement contre la cruauté du monde et résiste avec cruauté à sa propre cruauté. Tout vivant tue et mange du vivant. Le cycle nourricier des écosystèmes (cycle trophique) est en même temps un cycle de mort pour les animaux et végétaux dévorés. La régulation écologique se paie par des hécatombes. La cruauté est le prix à payer pour la grande solidarité de la biosphère. La Nature est à la fois mère et marâtre. Tout vivant lutte contre la mort en intégrant la mort pour se régénérer (mort des cellules dans les organismes individuels remplacées par des cellules neuves, mort des vieillards dans les sociétés remplacés par les nouvelles générations). »
Qu'est-ce comprendre ?
« Nous sommes totalement responsables de nos paroles, de nos écrits, de nos actions, mais nous ne sommes pas responsables de leur interprétation ni de leurs conséquences. »
« Les idées nous manipulent plus que nous les manipulons. La possession par l'idée nous rend incompréhensifs de ceux qui sont possédés par d'autres idées que les nôtres et de ceux qui ne sont pas possédés par nos idées. »
« Comprendre, c'est comprendre les motivations intérieures, c'est situer dans le contexte et le complexe. Comprendre, ce n'est pas tout expliquer. La connaissance complexe reconnaît toujours un résidu inexplicable. Comprendre, ce n'est pas tout comprendre, c'est aussi reconnaître qu'il y a de l'incompréhensible. »
« Comprendre n'est pas innocenter, ni s'abstenir de juger, ni s'abstenir d'agir, c'est reconnaître que les auteurs de forfaits ou d'infamies sont aussi des êtres humains. N'oublions jamais le message de Robert Antelme : les SS veulent nous retrancher de l'espèce humaine, ils ne le pourront pas, mais nous-mêmes ne pouvons (ne devons) les retrancher de l'espèce humaine. »
« Conditionner le pardon au repentir, c'est perdre le sens profond du pardon qui est un pari sur l'humain. (…) Mais la confiance elle-même peut vaincre la méfiance. C'est pourquoi le pardon, acte de confiance en la nature humaine, est un pari. »
L'incertitude fait que l'on ne fait jamais réellement ce que l'on avait voulu
« Ainsi l'agir humain devient catastrophiquement imprévisible. « On déclenche des processus dont l'issue est imprévisible, de sorte que l'incertitude (…) devient la caractéristique essentielle des affaires humaines. » (Hannah Arendt) (…) Nulle action n'est donc assurée d'œuvrer dans le sens de son intention. »
« Les scientifiques partagent avec les autres citoyens une autre cause d'aveuglement éthique : c'est l'ignorance de l'écologie de l'action ; celle-ci, rappelons-le, enseigne que toute action humaine, dès qu'elle est entreprise, échappe à son initiateur et entre dans un jeu d'interactions multiples qui la détournent de son but et parfois lui donnent une destination contraire à son intention. Ceci est vrai en général pour les actions politiques, ceci est vrai aussi pour les actions scientifiques. »
« L'utopisme banal ignore les impossibilités. Le réalisme banal ignore les possibilités. Comme nous l'avons vu, le réalisme banal ignore que le réel est travaillé par des forces souterraines, au départ invisibles, qui tendent à la transformer. Il ignore l'incertitude du réel. (…) Le vrai réalisme se fonde sur l'incertitude du réel. (…) Comprendre l'incertitude du réel, savoir qu'il y a du possible encore invisible dans le réel. »
Le développement de l'incertitude en appelle à la reliance
« Plus nous sommes autonomes, plus nous devons assumer l'incertitude et l'inquiétude, plus nous avons besoin de reliance. Plus nous prenons conscience que nous sommes perdus dans l'univers et que nous sommes engagés dans une aventure inconnue, plus nous avons besoin d'être reliés à nos frères et sœurs de l'humanité. »
« Au niveau de la plus haute complexité humaine, la reliance ne peut être qu'amour. (…) L'humanité n'a pas souffert seulement d'insuffisance d'amour. Elle a produit des outrances d'amour qui se sont précipitées sur les dieux, les idoles et les idées, et sont revenus sur les humains, transmutées en intolérance et terreur. »
« Le plus difficile en période trouble n'est pas de faire son devoir, mais de le connaître. » (Rivarol)
« Les fragments d'humanité sont désormais en interdépendance, mais l'interdépendance ne crée pas la solidarité ; ils sont en communications, mais les communications techniques ou mercantiles ne créent pas la compréhension ; l'accumulation des informations ne crée pas la connaissance, et l'accumulation des connaissances ne crée pas la compréhension. »
« La pensée complexe est la pensée qui relie. L'éthique complexe est l'éthique de la reliance. La mission éthique peut se concentrer en un terme « relier ». Il faut, pour tous et pour chacun, pour la survie de l'humanité, reconnaître la nécessité de relier :
- Se relier aux nôtres,
- Se relier aux autres,
- Se relier à la Terre-Patrie »
Le vivant se nourrit de la mort
« Ainsi en est-il des écosystèmes qui « vivent la mort ». Ainsi en est-il de nous autres animaux, mammifères, primates, humains, qui vivons par régénération permanente de nos cellules et molécules à partir de leur mort et de leur destruction. Ainsi en est-il de nos sociétés qui se régénèrent en éduquant les générations nouvelles tandis que meurent les anciennes. « Vivre de mort, mourir de vie », avait énoncé Héraclite. »
« Le vie lutte cruellement contre la cruauté du monde et résiste avec cruauté à sa propre cruauté. Tout vivant tue et mange du vivant. Le cycle nourricier des écosystèmes (cycle trophique) est en même temps un cycle de mort pour les animaux et végétaux dévorés. La régulation écologique se paie par des hécatombes. La cruauté est le prix à payer pour la grande solidarité de la biosphère. La Nature est à la fois mère et marâtre. Tout vivant lutte contre la mort en intégrant la mort pour se régénérer (mort des cellules dans les organismes individuels remplacées par des cellules neuves, mort des vieillards dans les sociétés remplacés par les nouvelles générations). »
Qu'est-ce comprendre ?
« Nous sommes totalement responsables de nos paroles, de nos écrits, de nos actions, mais nous ne sommes pas responsables de leur interprétation ni de leurs conséquences. »
« Les idées nous manipulent plus que nous les manipulons. La possession par l'idée nous rend incompréhensifs de ceux qui sont possédés par d'autres idées que les nôtres et de ceux qui ne sont pas possédés par nos idées. »
« Comprendre, c'est comprendre les motivations intérieures, c'est situer dans le contexte et le complexe. Comprendre, ce n'est pas tout expliquer. La connaissance complexe reconnaît toujours un résidu inexplicable. Comprendre, ce n'est pas tout comprendre, c'est aussi reconnaître qu'il y a de l'incompréhensible. »
« Comprendre n'est pas innocenter, ni s'abstenir de juger, ni s'abstenir d'agir, c'est reconnaître que les auteurs de forfaits ou d'infamies sont aussi des êtres humains. N'oublions jamais le message de Robert Antelme : les SS veulent nous retrancher de l'espèce humaine, ils ne le pourront pas, mais nous-mêmes ne pouvons (ne devons) les retrancher de l'espèce humaine. »
« Conditionner le pardon au repentir, c'est perdre le sens profond du pardon qui est un pari sur l'humain. (…) Mais la confiance elle-même peut vaincre la méfiance. C'est pourquoi le pardon, acte de confiance en la nature humaine, est un pari. »
L'incertitude fait que l'on ne fait jamais réellement ce que l'on avait voulu
« Ainsi l'agir humain devient catastrophiquement imprévisible. « On déclenche des processus dont l'issue est imprévisible, de sorte que l'incertitude (…) devient la caractéristique essentielle des affaires humaines. » (Hannah Arendt) (…) Nulle action n'est donc assurée d'œuvrer dans le sens de son intention. »
« Les scientifiques partagent avec les autres citoyens une autre cause d'aveuglement éthique : c'est l'ignorance de l'écologie de l'action ; celle-ci, rappelons-le, enseigne que toute action humaine, dès qu'elle est entreprise, échappe à son initiateur et entre dans un jeu d'interactions multiples qui la détournent de son but et parfois lui donnent une destination contraire à son intention. Ceci est vrai en général pour les actions politiques, ceci est vrai aussi pour les actions scientifiques. »
« L'utopisme banal ignore les impossibilités. Le réalisme banal ignore les possibilités. Comme nous l'avons vu, le réalisme banal ignore que le réel est travaillé par des forces souterraines, au départ invisibles, qui tendent à la transformer. Il ignore l'incertitude du réel. (…) Le vrai réalisme se fonde sur l'incertitude du réel. (…) Comprendre l'incertitude du réel, savoir qu'il y a du possible encore invisible dans le réel. »
Le développement de l'incertitude en appelle à la reliance
« Plus nous sommes autonomes, plus nous devons assumer l'incertitude et l'inquiétude, plus nous avons besoin de reliance. Plus nous prenons conscience que nous sommes perdus dans l'univers et que nous sommes engagés dans une aventure inconnue, plus nous avons besoin d'être reliés à nos frères et sœurs de l'humanité. »
« Au niveau de la plus haute complexité humaine, la reliance ne peut être qu'amour. (…) L'humanité n'a pas souffert seulement d'insuffisance d'amour. Elle a produit des outrances d'amour qui se sont précipitées sur les dieux, les idoles et les idées, et sont revenus sur les humains, transmutées en intolérance et terreur. »
« Le plus difficile en période trouble n'est pas de faire son devoir, mais de le connaître. » (Rivarol)
« Les fragments d'humanité sont désormais en interdépendance, mais l'interdépendance ne crée pas la solidarité ; ils sont en communications, mais les communications techniques ou mercantiles ne créent pas la compréhension ; l'accumulation des informations ne crée pas la connaissance, et l'accumulation des connaissances ne crée pas la compréhension. »
« La pensée complexe est la pensée qui relie. L'éthique complexe est l'éthique de la reliance. La mission éthique peut se concentrer en un terme « relier ». Il faut, pour tous et pour chacun, pour la survie de l'humanité, reconnaître la nécessité de relier :
- Se relier aux nôtres,
- Se relier aux autres,
- Se relier à la Terre-Patrie »
18 déc. 2009
POURQUOI NOTER DES RÉUNIONS AUXQUELLES ON N’IRA TRÈS PROBABLEMENT PAS
Comment classer ses rendez-vous en trois catégories
Ainsi que l'indique très justement Jean-Louis Servan-Schreiber dans « Le nouvel art du temps », si nous n'y prenons pas garde, nous n'avons aucun temps disponible pour réfléchir : au fur et à mesure des demandes de rendez-vous, l'agenda se remplit. In fine, il est plein, et, pour avoir du temps à nous, nous sommes alors contraints à soit arriver à sept heures du matin, soit repartir après vingt-et-une heures. Aussi suggérait-il de « régulièrement prendre rendez-vous avec nous-mêmes pour des plages au moins hebdomadaires ».
Mon métier de consultant reposant par construction sur le temps et ma capacité à l'optimiser constamment au mieux, j'ai développé une approche complémentaire. Elle consiste à classer tous les réunions en trois catégories :
D'abord, à noter qu'il n'y a pas une 4ème catégorie qui correspondrait au cas où je participe à une réunion pour laquelle ma présence n'a pas d'impact et dont je ne retirerais rien. A quoi bon y aller ? Donc, cela permet de « faire le ménage » dès la prise de rendez-vous : toujours refuser d'aller à ce type de réunion.
Ensuite, le fait d'avoir hiérarchiser son agenda de cette façon va permettre de gérer les imprévus et de réallouer dynamiquement son temps, soit pour trouver de la place pour une réunion non planifiée, soit pour se dégager du temps pour soi-même.
En effet, si vous appliquez cette typologie à votre agenda, vous verrez que vous avez très peu de réunions de type 1. Bon nombre des rendez-vous peuvent avoir lieu sans vous et donc de type 2. Même s'il faut chercher à « taper » en priorité dans les rendez-vous de type 3, seuls les rendez-vous de type 1 sont les points réellement durs : toute modification suppose une reprogrammation complète de la réunion.
Pourquoi marquer ce type de réunions de type 3 sur son agenda, alors que la plupart du temps on n'ira pas ?
D'abord parce que y aller reste une bonne idée, car c'est souvent au cours de ces moments-là que l'on peut élargir son champ de réflexion et acquérir de nouvelles informations. Comme on n'est pas en première ligne, on est naturellement plus disponible et plus ouvert.
Ensuite, parce que c'est une autre façon de prendre rendez-vous avec vous-mêmes comme le recommande Jean-Louis Servan-Schreiber…
Ainsi que l'indique très justement Jean-Louis Servan-Schreiber dans « Le nouvel art du temps », si nous n'y prenons pas garde, nous n'avons aucun temps disponible pour réfléchir : au fur et à mesure des demandes de rendez-vous, l'agenda se remplit. In fine, il est plein, et, pour avoir du temps à nous, nous sommes alors contraints à soit arriver à sept heures du matin, soit repartir après vingt-et-une heures. Aussi suggérait-il de « régulièrement prendre rendez-vous avec nous-mêmes pour des plages au moins hebdomadaires ».
Mon métier de consultant reposant par construction sur le temps et ma capacité à l'optimiser constamment au mieux, j'ai développé une approche complémentaire. Elle consiste à classer tous les réunions en trois catégories :
- Celles où ma présence est absolument indispensable, c'est-à-dire que mon absence annule l'existence même du rendez-vous. Il peut s'agir de toutes les réunions à deux, mais aussi de celles où je suis le présentateur ou l'animateur sans possibilité de remplacement,
- Celles où ma présence est nécessaire (soit par la valeur ajoutée spécifique que je peux apporter, soit par l'importance du sujet traité et ses conséquences dans le futur), mais pas indispensable, c'est-à-dire que la réunion peut se tenir sans moi. Ce sont par exemple tous les comités de direction et de suivi (sauf si j'en suis le président ou le rapporteur sans remplaçant possible).
- Celles où ma présence n'a pas d'impact sur la réunion, mais dont je vais en retirer une plus-value personnelle. Ce sont bien sûr toutes les réunions d'information, mais aussi bon nombre de comités auxquels je peux participer sans être directement impliqué à l'ordre du jour.
D'abord, à noter qu'il n'y a pas une 4ème catégorie qui correspondrait au cas où je participe à une réunion pour laquelle ma présence n'a pas d'impact et dont je ne retirerais rien. A quoi bon y aller ? Donc, cela permet de « faire le ménage » dès la prise de rendez-vous : toujours refuser d'aller à ce type de réunion.
Ensuite, le fait d'avoir hiérarchiser son agenda de cette façon va permettre de gérer les imprévus et de réallouer dynamiquement son temps, soit pour trouver de la place pour une réunion non planifiée, soit pour se dégager du temps pour soi-même.
En effet, si vous appliquez cette typologie à votre agenda, vous verrez que vous avez très peu de réunions de type 1. Bon nombre des rendez-vous peuvent avoir lieu sans vous et donc de type 2. Même s'il faut chercher à « taper » en priorité dans les rendez-vous de type 3, seuls les rendez-vous de type 1 sont les points réellement durs : toute modification suppose une reprogrammation complète de la réunion.
Pourquoi marquer ce type de réunions de type 3 sur son agenda, alors que la plupart du temps on n'ira pas ?
D'abord parce que y aller reste une bonne idée, car c'est souvent au cours de ces moments-là que l'on peut élargir son champ de réflexion et acquérir de nouvelles informations. Comme on n'est pas en première ligne, on est naturellement plus disponible et plus ouvert.
Ensuite, parce que c'est une autre façon de prendre rendez-vous avec vous-mêmes comme le recommande Jean-Louis Servan-Schreiber…
17 déc. 2009
« NOUS SOMMES DÉJÀ RÉUNIS DEPUIS 500 € »
Plus on est nombreux, plus cela devrait aller vite…
Je prolonge mon billet d'hier relatif au temps et la lecture du Nouvel Art du Temps de Jean-Louis Servan-Schreiber par une observation sur les réunions en entreprises.
Compte-tenu de mon métier de consultant, j'ai eu l'occasion de participer ou assister à un très grand nombre de réunions.
Il m'est venu, il y a quelques années, une idée « fantaisiste » pour améliorer le fonctionnement des réunions, suffisamment fantaisiste pour que je n'aie cherché jamais à le mettre en pratique, suffisamment logique pour que j'en parle ici.
Quelle est-elle ? Classiquement, pour une réunion donnée, on fixe une date et une durée, et un certain nombre de participants. Au moment de monter la réunion, on va réfléchir à la durée en fonction de l'importance et de la difficulté du sujet à traiter. Mais à aucun moment, on ne va vraiment chercher à faire le lien entre cette durée et le nombre et la qualité des participants (sauf, bien sûr, à tenir compte de leur disponibilité). De même, on ne calcule que rarement, le coût de cette réunion.
Or, plus il y aura de monde dans une réunion donnée, plus il y aura d'intelligence collective, et donc « normalement », plus la réunion devrait être efficace. Ce n'est malheureusement, la plupart du temps, pas le cas, car l'accroissement du nombre de participants va surtout de pair avec la multiplication des arguties et des polémiques internes. On peut donc avoir une situation paradoxale : accroissement du nombre de participants et donc du coût, et dégradation de la qualité de la réunion.
Il m'est un jour venu alors l'idée suivante : plutôt que de prévoir une réunion disons d'une heure, pourquoi ne pas prévoir une réunion de « tant d'euros ». Il suffit parallèlement que chaque membre de l'entreprise ait un coût horaire (facile à calculer à partir du salaire, des charges sociales et des coûts administratifs directs). Ceci aurait déjà pour mérite de mettre en regard le coût de la réunion avec la valeur du sujet traité.
De plus, on pourrait remplacer les horloges par des compteurs débitant des euros et, quand quelqu'un demande à participer ou soit convoqué, avoir son coût horaire chargé dans le système. Dès lors, plus il y aura de participants, moins la réunion devra durer longtemps. On pourrait donc en cours de réunion, au bout d'un moment, avoir quelqu'un qui dirait : « Nous sommes déjà réunis depuis 500 €, et il ne nous en reste plus que 1500. Il faut absolument que l'on avance. »
Évidemment, comme la mise en œuvre d'une telle idée ne serait pas de nature à détendre l'ambiance en entreprise et à diminuer le stress, je ne la recommande pas telle qu'elle. Mais bien souvent, quand je suis dans des réunions surchargées et qui s'éternisent, je ne peux m'empêcher d'imaginer ce compteur monétaire en train de tourner…
Je prolonge mon billet d'hier relatif au temps et la lecture du Nouvel Art du Temps de Jean-Louis Servan-Schreiber par une observation sur les réunions en entreprises.
Compte-tenu de mon métier de consultant, j'ai eu l'occasion de participer ou assister à un très grand nombre de réunions.
Il m'est venu, il y a quelques années, une idée « fantaisiste » pour améliorer le fonctionnement des réunions, suffisamment fantaisiste pour que je n'aie cherché jamais à le mettre en pratique, suffisamment logique pour que j'en parle ici.
Quelle est-elle ? Classiquement, pour une réunion donnée, on fixe une date et une durée, et un certain nombre de participants. Au moment de monter la réunion, on va réfléchir à la durée en fonction de l'importance et de la difficulté du sujet à traiter. Mais à aucun moment, on ne va vraiment chercher à faire le lien entre cette durée et le nombre et la qualité des participants (sauf, bien sûr, à tenir compte de leur disponibilité). De même, on ne calcule que rarement, le coût de cette réunion.
Or, plus il y aura de monde dans une réunion donnée, plus il y aura d'intelligence collective, et donc « normalement », plus la réunion devrait être efficace. Ce n'est malheureusement, la plupart du temps, pas le cas, car l'accroissement du nombre de participants va surtout de pair avec la multiplication des arguties et des polémiques internes. On peut donc avoir une situation paradoxale : accroissement du nombre de participants et donc du coût, et dégradation de la qualité de la réunion.
Il m'est un jour venu alors l'idée suivante : plutôt que de prévoir une réunion disons d'une heure, pourquoi ne pas prévoir une réunion de « tant d'euros ». Il suffit parallèlement que chaque membre de l'entreprise ait un coût horaire (facile à calculer à partir du salaire, des charges sociales et des coûts administratifs directs). Ceci aurait déjà pour mérite de mettre en regard le coût de la réunion avec la valeur du sujet traité.
De plus, on pourrait remplacer les horloges par des compteurs débitant des euros et, quand quelqu'un demande à participer ou soit convoqué, avoir son coût horaire chargé dans le système. Dès lors, plus il y aura de participants, moins la réunion devra durer longtemps. On pourrait donc en cours de réunion, au bout d'un moment, avoir quelqu'un qui dirait : « Nous sommes déjà réunis depuis 500 €, et il ne nous en reste plus que 1500. Il faut absolument que l'on avance. »
Évidemment, comme la mise en œuvre d'une telle idée ne serait pas de nature à détendre l'ambiance en entreprise et à diminuer le stress, je ne la recommande pas telle qu'elle. Mais bien souvent, quand je suis dans des réunions surchargées et qui s'éternisent, je ne peux m'empêcher d'imaginer ce compteur monétaire en train de tourner…
16 déc. 2009
« NOUS SOMMES PLUS STRESSÉS QU’OBÈSES »
Patchwork tiré du « Nouvel Art du temps » de Jean-Louis Servan-Schreiber
« Le vocabulaire courant nous met sur de fausses pistes. « Gagner » ou « perdre » du temps n'a aucun sens. Nous disposons de la totalité du temps disponible, lequel est imperturbable et non modifiable. »
« Ce n'est plus la lumière solaire, mais l'heure d'entrée et de sortie de l'usine qui rythme les journées. (…) Et comme l'ouvrier ne fabrique plus lui-même ses aliments ou ses vêtements, il doit s'adapter aux horaires d'ouverture de ceux qui vendent. Quand, enfin, beaucoup plus tard, les conquêtes sociales, lui permettent d'introduire des loisirs dans sa vie, il lui faut aussi être à l'heure pour le début su spectacle ou de l'émission de télé. »
« Le Choix du moment : Notons que c'est l'écriture et non l'imprimerie qui a permis de décaler la naissance d'une idée de sa réception parmi nous. (…) Aujourd'hui, ce pouvoir de décalage entre production et usage s'est généralisé grâce à une prolifération des machines. Le congélateur, (…) le magnétoscope, (…) et toutes les messageries écrites ou parlées. »
« Nous réfléchissons bien plus à l'emploi de notre argent, renouvelable, qu'à celui de notre temps, irremplaçable. »
« Le grand morcellement de notre temps ne s'est propagé que depuis la Seconde Guerre mondiale. (…) Les déménagements, (…) les changements d'employeurs, ou même de métier, (…) les amours successives (…) A une vie courte aux temps peu nombreux, s'est substituée une vie longue aux temps multiples et mêlés. »
« Plus stressés qu'obèses : ulcères, crises cardiaques ou cancers naissent dans le sillage du stress, qui est au temps ce que l'obésité est à la nourriture. »
« Nous travaillons sans recul. Pour un canon, c'est un progrès. Pas pour un cerveau. »
« Le vocabulaire courant nous met sur de fausses pistes. « Gagner » ou « perdre » du temps n'a aucun sens. Nous disposons de la totalité du temps disponible, lequel est imperturbable et non modifiable. »
« Ce n'est plus la lumière solaire, mais l'heure d'entrée et de sortie de l'usine qui rythme les journées. (…) Et comme l'ouvrier ne fabrique plus lui-même ses aliments ou ses vêtements, il doit s'adapter aux horaires d'ouverture de ceux qui vendent. Quand, enfin, beaucoup plus tard, les conquêtes sociales, lui permettent d'introduire des loisirs dans sa vie, il lui faut aussi être à l'heure pour le début su spectacle ou de l'émission de télé. »
« Le Choix du moment : Notons que c'est l'écriture et non l'imprimerie qui a permis de décaler la naissance d'une idée de sa réception parmi nous. (…) Aujourd'hui, ce pouvoir de décalage entre production et usage s'est généralisé grâce à une prolifération des machines. Le congélateur, (…) le magnétoscope, (…) et toutes les messageries écrites ou parlées. »
« Nous réfléchissons bien plus à l'emploi de notre argent, renouvelable, qu'à celui de notre temps, irremplaçable. »
« Le grand morcellement de notre temps ne s'est propagé que depuis la Seconde Guerre mondiale. (…) Les déménagements, (…) les changements d'employeurs, ou même de métier, (…) les amours successives (…) A une vie courte aux temps peu nombreux, s'est substituée une vie longue aux temps multiples et mêlés. »
« Plus stressés qu'obèses : ulcères, crises cardiaques ou cancers naissent dans le sillage du stress, qui est au temps ce que l'obésité est à la nourriture. »
« Nous travaillons sans recul. Pour un canon, c'est un progrès. Pas pour un cerveau. »
15 déc. 2009
« LES MONTAGNES S’ÉCOULENT DEVANT DIEU »
On ne peut pas voir les effets à long terme au travers d'observations immédiates
Quand nous regardons le monde qui nous entoure, nous distinguons des liquides et des solides. Effectivement, si je verse un liquide, il va immédiatement se répandre sur toute la surface du sol ; si je pose un solide, il restera là où je l'ai posé. Entre les deux, c'est le monde du visqueux ou du pâteux (pensez à du sirop, du ketchup ou un plastique chauffé).Certes… mais si je prolonge mon observation du solide, il va finir par lui-aussi « couler ». En fait, la différence entre solide et liquide est une question d'échelle de temps : un liquide coule immédiatement, un solide de façon différée (il flue). Ceci dépend du « nombre de Deborah » (en référence à la prophétesse Deborah qui, après la victoire de Baraq sur Sisera le Philistin, dit : « Les montagnes s'écoulent devant Dieu ») : ce nombre est le rapport entre le temps de relaxation de la matière suite à une déformation (le temps de relaxation est le temps de retour à l'équilibre et est une propriété intrinsèque de la matière) et le temps d'observation.
Si mon temps d'observation est très inférieur au temps de relaxation, la matière m'apparaît comme solide. S'il est très supérieur, elle m'apparaît comme liquide (le temps de relaxation de l'eau est de 10-12 s). Entre les deux, elle va m'apparaître plus ou moins visqueuse ou pâteuse.
Je ne peux m'empêcher de faire le lien avec l'entreprise, le management et la prise de décision.
N'y a-t-il pas là aussi un lien entre le temps d'observation et ce que l'on observe ? Est-ce qu'à vouloir décider vite, on n'est pas condamné à des temps d'analyse et d'observation tellement courts, qu'ils nous trompent sur la réalité en nous masquant les effets à long terme ? Comment peut-on créer de la valeur dans la durée si l'on ne tient pas compte de ces effets à long terme ?
Faisons attention à cette culture du zapping et de la plus-value à court terme. En management, il n'y a pas besoin d'invoquer Dieu pour voir les montagnes couler, il suffit souvent d'attendre un peu…
14 déc. 2009
POURQUOI SOMMES NOUS NÉS « PAR HASARD ET POUR RIEN »
Nous sommes libres grâce à l'incertitude
Le 9 décembre, dans « Nous n'aimons pas l'incertitude », je suis notamment revenu sur un article ancien, « Nous sommes nés par hard et pour rien ». Suite à des réactions récentes, j'ai vu qu'il fallait que je précise le sens que je donnais à « par hasard et pour rien ».
D'abord, pourquoi par hasard ? Certes c'est grâce à mes parents que j'existe, mais ils ne pouvaient pas savoir, ni donc a fortiori vouloir, que ce soit moi, leur enfant. Ils ont voulu un enfant et il se trouve que c'est moi. Dès ma naissance, la personne que je suis, celle qui émerge de mon existence était imprévisible ; puis ma personnalité est le fruit de cette origine et des aléas de ma vie. Je suis ainsi le construit des heurs et hasards de ma vie. A posteriori, oui, il est clair que je suis leur fils, et donc, personne d'autre ne peut dire qu'il l'est. Mais je suis bien le fruit d'un hasard : la volonté de mes parents était simplement d'avoir un enfant sans savoir qui il serait. Le fait d'être aimé ou non ne change rien à cela. C'est d'ailleurs bien la noblesse de l'amour de se consacrer à ce que l'on n'a ni prévu ni dessiné à l'avance.
Ensuite « pour rien ». Je n'ai pas été conçu pour accomplir quelque chose. Personne n'a défini a priori ce que je devais faire de ma vie, ni quelles devaient en être les conséquences. C'est en ce sens que je dis « pour rien ». C'est là la vraie garantie de nos libertés individuelles : nous ne sommes pas nés pour mettre en œuvre la volonté ou le projet d'un autre. C'est à chacun de nous de choisir sa voie et de faire preuve de sa responsabilité personnelle pour faire au mieux.
Le 9 décembre, dans « Nous n'aimons pas l'incertitude », je suis notamment revenu sur un article ancien, « Nous sommes nés par hard et pour rien ». Suite à des réactions récentes, j'ai vu qu'il fallait que je précise le sens que je donnais à « par hasard et pour rien ».
D'abord, pourquoi par hasard ? Certes c'est grâce à mes parents que j'existe, mais ils ne pouvaient pas savoir, ni donc a fortiori vouloir, que ce soit moi, leur enfant. Ils ont voulu un enfant et il se trouve que c'est moi. Dès ma naissance, la personne que je suis, celle qui émerge de mon existence était imprévisible ; puis ma personnalité est le fruit de cette origine et des aléas de ma vie. Je suis ainsi le construit des heurs et hasards de ma vie. A posteriori, oui, il est clair que je suis leur fils, et donc, personne d'autre ne peut dire qu'il l'est. Mais je suis bien le fruit d'un hasard : la volonté de mes parents était simplement d'avoir un enfant sans savoir qui il serait. Le fait d'être aimé ou non ne change rien à cela. C'est d'ailleurs bien la noblesse de l'amour de se consacrer à ce que l'on n'a ni prévu ni dessiné à l'avance.
Ensuite « pour rien ». Je n'ai pas été conçu pour accomplir quelque chose. Personne n'a défini a priori ce que je devais faire de ma vie, ni quelles devaient en être les conséquences. C'est en ce sens que je dis « pour rien ». C'est là la vraie garantie de nos libertés individuelles : nous ne sommes pas nés pour mettre en œuvre la volonté ou le projet d'un autre. C'est à chacun de nous de choisir sa voie et de faire preuve de sa responsabilité personnelle pour faire au mieux.
11 déc. 2009
LA SOUPE À L’OIGNON OU L’ECSTASY VERSION LYONNAISE !
Le viagra des noctanphiles
Toute sortie nocturne qui se prolonge au-delà du raisonnable déclenche une fatigue corporelle bien compréhensible. Dès lors se pose un problème clé : comment arriver à faire face avec l'after sans s'écrouler lamentablement sur la piste ou dans les bras de la première fille ou garçon qui passent ?
Avant de vous apporter une réponse originale et personnelle à cette question critique et ô combien essentielle, quelques explications de vocabulaire pour les lecteurs de ce blog qui ne seraient pas des « noctanphiles » :
- L'after est ce moment délicieux qui se déroule à partir de six heures du matin pour se terminer le plus tard possible dans cette journée qui a subrepticement commencé à l'extérieur. Il a lieu dans un endroit pourvu d'une piste de danse, de sofas, et d'un recoin où l'on peut trouver des boissons et quelques victuailles (certains l'appellent « bar »).
- Un « noctanphile » est un individu ou une individuette qui aime la nuit. Il ou elle aime tellement la nuit qu'il ou elle cherche à la prolonger au maximum en se réfugiant, avant que le jour ne paraisse, dans des lieux clos où il ou ellene verra rien du monde extérieur. Ces lieux sont soit l'endroit où, rideaux tirés, volets fermés, il ou elle va dormir, soit ces lieux magiques des after.
Donc retour à la question : comment ne pas s'écrouler
Certains ont développé le recours à des substances illicites apportant une excitation réelle mais dangereuses. Je pense bien sûr en premier à l'ecstasy, qui est à la danse et au monde de la nuit, ce que le viagra est au sexe. Les deux cherchent à lutter artificiellement contre les effets du temps.
En fait, il y a une recette tout aussi efficace, et fameuse à Lyon, ma ville d'origine : la soupe à l'oignon. Avec l'apport de fromage fondu, elle devient gratinée. Née du temps des canuts, elle apporte au petit matin l'énergie nécessaire pour la poursuite de ses activités : pour les canuts, il s'agissait de leur dure journée de travail commencée bien avant six heures du matin ; pour les noctanphiles, elle va être une ecstasy écologique et sans risque.
A quand le déploiement de « corners gratiné » aux abords des boîtes de nuit, bars de nuits et autres lieux qu'affectionnent les noctanphiles ?
Toute sortie nocturne qui se prolonge au-delà du raisonnable déclenche une fatigue corporelle bien compréhensible. Dès lors se pose un problème clé : comment arriver à faire face avec l'after sans s'écrouler lamentablement sur la piste ou dans les bras de la première fille ou garçon qui passent ?
Avant de vous apporter une réponse originale et personnelle à cette question critique et ô combien essentielle, quelques explications de vocabulaire pour les lecteurs de ce blog qui ne seraient pas des « noctanphiles » :
- L'after est ce moment délicieux qui se déroule à partir de six heures du matin pour se terminer le plus tard possible dans cette journée qui a subrepticement commencé à l'extérieur. Il a lieu dans un endroit pourvu d'une piste de danse, de sofas, et d'un recoin où l'on peut trouver des boissons et quelques victuailles (certains l'appellent « bar »).
- Un « noctanphile » est un individu ou une individuette qui aime la nuit. Il ou elle aime tellement la nuit qu'il ou elle cherche à la prolonger au maximum en se réfugiant, avant que le jour ne paraisse, dans des lieux clos où il ou ellene verra rien du monde extérieur. Ces lieux sont soit l'endroit où, rideaux tirés, volets fermés, il ou elle va dormir, soit ces lieux magiques des after.
Donc retour à la question : comment ne pas s'écrouler
Certains ont développé le recours à des substances illicites apportant une excitation réelle mais dangereuses. Je pense bien sûr en premier à l'ecstasy, qui est à la danse et au monde de la nuit, ce que le viagra est au sexe. Les deux cherchent à lutter artificiellement contre les effets du temps.
En fait, il y a une recette tout aussi efficace, et fameuse à Lyon, ma ville d'origine : la soupe à l'oignon. Avec l'apport de fromage fondu, elle devient gratinée. Née du temps des canuts, elle apporte au petit matin l'énergie nécessaire pour la poursuite de ses activités : pour les canuts, il s'agissait de leur dure journée de travail commencée bien avant six heures du matin ; pour les noctanphiles, elle va être une ecstasy écologique et sans risque.
A quand le déploiement de « corners gratiné » aux abords des boîtes de nuit, bars de nuits et autres lieux qu'affectionnent les noctanphiles ?
10 déc. 2009
VIVE LES RECETTES DE CUISINE ?
Nous sommes condamnés à vivre dans l'incertitude. Nous n'avons pas d'autre choix que celui de la liberté et de l'intelligence (incertitude 5/5)
Je relie notre crainte de l'incertitude avec le succès en librairie des recettes de cuisine : quoi de plus sécurisant que de voir tout écrit, tout décrit, tout prévu. Sur un livre de cuisine, on a la photographie du résultat, la liste des ingrédients à réunir, la description de tout le mode opératoire. Et ce qui distingue un bon livre d'un autre, c'est le fait qu'il est effectivement possible et facile de suivre les indications, et que le résultat final sera bien conforme à la photographie.
Voilà le monde dont nous rêvons : un monde où tout pourrait être prévu et organisé comme dans un livre de cuisine. Ah si seulement, il y avait des recettes toutes faites pour la vie de tous les jours... Car, décidément, nous avons peur des grands espaces, du vide, de la liberté absolue.
Sommes-nous nostalgiques du toit de la forêt que nous avons quitté, de ce cocon familial qui nous protégeait ? Sommes-nous à ce point hantés par la jungle où nous vivions il n'y a pas si longtemps, pour penser que tout aléa est d'abord une menace, que toute surprise potentiellement un fauve ou un prédateur ?
Je repense à Clint Eastwood dans son dernier film, Gran Torino. Comme lui au début du film, nous nous croyons puissants de notre force, nos muscles, nos armes, notre voiture. Nous sommes puissants parce que nous croyons maîtriser les choses et que nous avons du poids sur elles.
Nous ne supportons pas ce qui nous échappe, nous dérange, nous perturbe. Nous regardons la vie, assis dans notre fauteuil, des bières à portée de main, protégés par les limites que nous nous sommes construites.
Mais la vie ne respecte pas les limites, ne connaît pas les plans faits a priori, plie les roseaux et brise les chênes.
Pour un pied mis dans son jardin et une fin prochaine annoncée, Clint Eastwood va progressivement découvrir ce monde improbable qui l'entoure, passer des armes au bricolage et finalement trouver la solution par l'abandon.
Celui qui va être le catalyseur de ce chemin est son jeune voisin, un asiatique prénommé Tao. Or en Asie, tao, c'est le chemin, la voie à suivre, la substance des choses… Ce nom n'a pas pu être choisi par Clint Eastwood par hasard.
Comme lui, je crois qu'il faut qu'individuellement et collectivement, nous rencontrions un Tao pour accepter l'incertitude et apprendre à lâcher-prise. C'est nécessaire, mais ce n'est pas naturel : nos réflexes nous poussent à l'inverse.
C'est la même chose que je retrouve du côté des entreprises : la plupart du temps, on cherche à limiter l'incertitude, à s'en abstraire, voire à la cacher. Elle est, là aussi, vue d'abord comme une source d'inquiétudes et non pas d'opportunités : à force d'avoir passé tellement de temps à inventer quel serait le futur, on a du mal à accepter qu'il soit différent.
Finalement, si bon nombre de dirigeants sont convaincus à titre personnel de la prégnance de l'incertitude, bien peu agissent conformément à cette conviction.
Peut-être est-ce parce que cette prégnance n'est pas si forte qu'ils le disent ?
Ainsi je crois que nous sommes insuffisamment prêts à accepter et intégrer que l'incertitude n'est pas tant le témoin de l'incomplétude d'un savoir, mais bien le moteur de notre univers. Elle est le marqueur de notre liberté et de notre marge de manœuvre, et non pas de notre incompétence. Il est illusoire et dangereux de penser que nous allons pouvoir repousser cet horizon du flou et voir clair à l'infini. Nous sommes condamnés à vivre dans l'incertitude. Nous n'avons pas d'autre choix que celui de la liberté et de l'intelligence…
Je relie notre crainte de l'incertitude avec le succès en librairie des recettes de cuisine : quoi de plus sécurisant que de voir tout écrit, tout décrit, tout prévu. Sur un livre de cuisine, on a la photographie du résultat, la liste des ingrédients à réunir, la description de tout le mode opératoire. Et ce qui distingue un bon livre d'un autre, c'est le fait qu'il est effectivement possible et facile de suivre les indications, et que le résultat final sera bien conforme à la photographie.
Voilà le monde dont nous rêvons : un monde où tout pourrait être prévu et organisé comme dans un livre de cuisine. Ah si seulement, il y avait des recettes toutes faites pour la vie de tous les jours... Car, décidément, nous avons peur des grands espaces, du vide, de la liberté absolue.
Sommes-nous nostalgiques du toit de la forêt que nous avons quitté, de ce cocon familial qui nous protégeait ? Sommes-nous à ce point hantés par la jungle où nous vivions il n'y a pas si longtemps, pour penser que tout aléa est d'abord une menace, que toute surprise potentiellement un fauve ou un prédateur ?
Je repense à Clint Eastwood dans son dernier film, Gran Torino. Comme lui au début du film, nous nous croyons puissants de notre force, nos muscles, nos armes, notre voiture. Nous sommes puissants parce que nous croyons maîtriser les choses et que nous avons du poids sur elles.
Nous ne supportons pas ce qui nous échappe, nous dérange, nous perturbe. Nous regardons la vie, assis dans notre fauteuil, des bières à portée de main, protégés par les limites que nous nous sommes construites.
Mais la vie ne respecte pas les limites, ne connaît pas les plans faits a priori, plie les roseaux et brise les chênes.
Pour un pied mis dans son jardin et une fin prochaine annoncée, Clint Eastwood va progressivement découvrir ce monde improbable qui l'entoure, passer des armes au bricolage et finalement trouver la solution par l'abandon.
Celui qui va être le catalyseur de ce chemin est son jeune voisin, un asiatique prénommé Tao. Or en Asie, tao, c'est le chemin, la voie à suivre, la substance des choses… Ce nom n'a pas pu être choisi par Clint Eastwood par hasard.
Comme lui, je crois qu'il faut qu'individuellement et collectivement, nous rencontrions un Tao pour accepter l'incertitude et apprendre à lâcher-prise. C'est nécessaire, mais ce n'est pas naturel : nos réflexes nous poussent à l'inverse.
C'est la même chose que je retrouve du côté des entreprises : la plupart du temps, on cherche à limiter l'incertitude, à s'en abstraire, voire à la cacher. Elle est, là aussi, vue d'abord comme une source d'inquiétudes et non pas d'opportunités : à force d'avoir passé tellement de temps à inventer quel serait le futur, on a du mal à accepter qu'il soit différent.
Finalement, si bon nombre de dirigeants sont convaincus à titre personnel de la prégnance de l'incertitude, bien peu agissent conformément à cette conviction.
Peut-être est-ce parce que cette prégnance n'est pas si forte qu'ils le disent ?
Ainsi je crois que nous sommes insuffisamment prêts à accepter et intégrer que l'incertitude n'est pas tant le témoin de l'incomplétude d'un savoir, mais bien le moteur de notre univers. Elle est le marqueur de notre liberté et de notre marge de manœuvre, et non pas de notre incompétence. Il est illusoire et dangereux de penser que nous allons pouvoir repousser cet horizon du flou et voir clair à l'infini. Nous sommes condamnés à vivre dans l'incertitude. Nous n'avons pas d'autre choix que celui de la liberté et de l'intelligence…
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